Mise à jour du 9 avril : le CHU de Tours vient d’appeler, mon opération est reportée au 18 juin, entrée à l’hôpital Bretonneau à Tours le 17…
1er avril 2020 J’aurais dû rentrer aujourd’hui à l’hôpital Bretonneau à Tours pour être opérée du méningiome sphéno-orbitaire qui déforme fortement mon orbite gauche (la flèche orange), plusieurs (6 à 8) heures de rabotage pour éliminer une pyramide ossifiée d’environ 3 cm de base et 3 cm de hauteur, qui englobe le nerf optique, puis reconstruction de l’orbite et sans doute d’une partie du crâne en titane. Pour les nouveaux arrivants, vous pouvez suivre ce lien ou pour les anglophones, Mick, un ami britannique dont j’ai fait la connaissance par l’intermédiaire de Maryse, a fait un très bel article en anglais sur son propre blog. Le 12 mars, j’avais pourtant vu l’équipe et l’anesthésiste, mon opération était classée prioritaire, mais ce n’est plus possible, trop de risques avec le virus qui peut être véhiculé par des porteurs sains, avec un drain dans le cerveau, 24 à 48h de réanimation neurochirurgicale… et il y a désormais d’autres priorités, les lits de réanimation sont le plus possible fléchés sur le coronavirus. Aucune nouvelle date pour l’instant. Pour répondre à certains, pourquoi Tours? C’est le CHU de Poitiers qui a demandé son avis à cette équipe dirigée par le Pr François qui a opéré la plus grande série de méningiomes sphéno-orbitaires, environ 130 en 20 ans, voir la publication il y a deux ans (une équipe qui a réalisé le plus d’opérations de ce genre depuis vingt ans, voir Terrier LM, et al. [dont le Pr François], Spheno-Orbital Meningiomas Surgery: Multicenter Management Study for Complex Extensive Tumors, World Neurosurg, 2018).
Je suis strictement confinée dans mon appartement. Au retour de Tours, je savais qu’il fallait vraiment limiter au maximum les contacts sociaux, je prends beaucoup de cortisone, celle-ci ne peut pas être diminuée, sinon, cela se traduit par une forte restriction de mon champ visuel gauche, comme sur cette image de février 2019, j’ai encadré le point de décrochage sur le graphique qui compare mes champs visuels entre 2013 (les points sous la ligne en 2013 correspondent à ceux avant ma première opération) et 2019 il est mieux depuis. Les zones en noir sont les zones où l’œil ne voit pas les points lumineux. Dès le vendredi, je remettais à mon employeur un certificat médical pour télétravailler du lundi au jeudi (au lieu de deux jours de télétravail depuis février, en prévision de l’opération, pour être moins fatiguée, un jour auparavant). Tout le monde ou presque télétravaille finalement depuis le lundi suite aux décisions nationales. Samedi 14 mars, le Pr Froelich, qui avait le premier fait le lien entre l’Androcur et les méningiomes en 2008, répondait aux questions posées par l’Amavea, en conseillant un confinement dès ce samedi, et de ne pas bouger les doses d’anti-inflammatoires et de cortisone pour celles (les femmes sont très largement majoritaires) qui en prennent, mais comme ces médicaments aggravent les manifestations du coronavirus, nous devons tout faire pour l’éviter. J’ai donc fait très tôt un ultime marché le samedi matin, pris par anticipation mes médicaments pour un mois de plus à la pharmacie. Le dimanche matin, je suis quand même allée voter tôt, à 8h15, bien protégée, c’était ma dernière sortie…
Par ailleurs, je devais avoir le jeudi 19 mars l’audience en appel dans la nomination des experts dans l’évaluation de mes préjudices des méningiomes sous Androcur, seul Bayer a fait appel. L’audience est elle-aussi reportée sans nouvelle date, la presse locale a relayé ce report et la solidarité de tous les voisins de ma cage d’escalier qui font mes courses en joignant ma commande à leur drive, en prenant du pain en même temps que le leur, en passant prendre le Canard enchaîné chez mon buraliste préféré qui me le met de côté et me dépanne pour la monnaie… Centre Presse et la Nouvelle République ont aussi annoncé le report de mon opération, et une équipe de France 2 est venue recueillir mon témoignage hier, avec toutes les précautions possibles, dans la cour entre mon immeuble et la colline : diffusion dans le journal de 13h du 1er avril 2020 – dans un reportage sur le cancer, même si les méningiomes ne dégénèrent pas dans 85% des cas en principe, mais provoquent des troubles suivant les zones comprimées, et dans le 12/13 France 3 Poitou-Charentes du 3 avril 2020, à partir de 7 min 28, par Anne Guillé-Epée et Julien Delage.
Enfin, comme la grippe mais sans doute plus souvent que celle-ci semble-t-il, le coronavirus peut provoquer une agueusie (perte de goût) et une anosmie (perte de l’odorat), apparemment réversible… De mon côté, j’ai perdu l’odorat suite à ma première opération : le nerf olfactif a été sectionné, le chirurgien devant bouger la lame criblée à travers laquelle il passe pour atteindre le méningiome parasellaire, la boule blanche avec la flèche rouge sur la première image. Pour ceux qui seraient concernés, j’avais fait un article récapitulant la problématique, voir Méningiomes sous Androcur de Bayer : perte de l’odorat (anosmie).
Bon confinement à tous, vos efforts protègent aussi les milliers de personnes avec un déficit immunitaire dû à des médicaments comme la cortisone, les régulateurs de l’immunité (maladies autoimmunes notamment), les immunodépresseurs (personnes greffées), etc.
Cela fait très longtemps que je n’ai rien posté sur mon blog, je vais essayer de mettre à profit mes vacances pour programmer à nouveau des articles et répondre à la centaine de commentaires en instance de validation…
Je n’ai guère eu le temps entre le travail (à 80%), la fatigue (j’ai toujours besoin de très grosses nuits) et la préparation de mon dossier médical en vue de la demande en réparation (au civil), devant le TGI de Poitiers, pour mes méningiomes sous Androcur (Acétate de Cyprotérone), pour la demande de nomination d’un expert pour évaluer le préjudice que j’ai subi et pourrai encore subir à l’avenir.
Les fidèles lecteurs de mon blog savent que l’on m’a découvert 3 méningiomes (tumeurs bénignes des méninges qui entourent le cerveau) en 2013 et que l’un d’entre eux, « parasellaire » coincé entre les deux nerfs optiques et la tige pituitaire (la flèche rouge sur l’image) a été enlevé le 14 novembre 2013. Dès leur découverte, j’avais arrêté l’acétate de cyprotérone car à l’époque, on m’avait dit que ce médicament produit par le laboratoire Bayer était contre-indiqué en cas de méningiomes, suite à une première publication restée assez confidentielle sur Méningiomes et Androcur en 2008 par le Pr Froelich à un congrès de la société européenne d’endocrinologie, mais néanmoins relayée l’année suivante par l’agence européenne du médicament (S. Froelich et al. (2008). Does cyproterone acetate promote multiple meningiomas?, ECE2008, Endocrine Abstracts, 16, p. 158).
Pour moi, l’Androcur (Acétate de Cyprotérone, du laboratoire Bayer) était un anti-androgène qui contrôlait mes ovaires polykystiques (l’une de mes maladies hormonales, la plus compliquée étant l’absence de production d’hormone antidiurétique – diabète insipide central) depuis 1992. Qui lit les changements de notice (en France en 2011, l’année précédente au Canada) si l’on ne le prévient pas de ce changement? Et quand bien même, contre-indiqué en cas de « Existence ou antécédents de méningiomes », cela ne m’aurait pas alertée, ne sachant pas de quoi il s’agissait avant 2013. Après l’article de 2008 et le signalement par l’agence européenne du médicament en 2009, plusieurs CHU réalisent des études et font des thèses publiées ou plus ou moins secrètes, inédites comme celle soutenue par Adrien Simonneau en septembre 2011 au CHU de Poitiers, qui porte sur 9 cas, 8 femmes avec hirsutisme, 1 homme (cancer de la prostate), 5 opérés, dont une femme décédée: Méningiomes et acétate de cyprotérone (Androcur®), un agoniste de la progestérone (à propos de 9 cas), thèse sous la direction du Pr Bataille. L’auteur revendique la place du CHU de Poitiers comme lanceur d’alerte, mais ne cherche pas à contacter les patients dont le CHU sait qu’ils prennent de l’acétate de cyprotérone… perte de chance pour les patient.e.s (moi inclus) qui prennent ce médicament. Il est aussi dit que tous les cas ont été signalés à l’ANSM (l’Agence nationale de la sécurité du médicament), mais il s’avère que deux ans plus tard, mon cas n’a pas été déclaré à la pharmacovigilance… perte de chance puisque seule l’accumulation des cas déclarés a fini par faire avancer l’ANSM.
En 2013, on m’a juste dit que l’Androcur était contre-indiqué… mais pas qu’il était à l’origine de mes méningiomes. Ce médicament est indiqué pour (notice de 2011) :
« Hirsutismes féminins majeurs d’origine non tumorale (idiopathique, syndrome des ovaires polykystiques), lorsqu’ils retentissent gravement sur la vie psycho-affective et sociale.
· Traitement palliatif anti-androgénique du cancer de la prostate « .
Si je l’ai pris dans l’indication de l’autorisation de mise (AMM) sur le marché (syndrome des ovaires polykystiques), il a été prescrit à beaucoup d’autres personnes pour d’autres raisons, la castration chimique chez l’homme (transsexuels hommes vers femmes et violeurs – oups, dans l’AMM élargie, ils appellent ça « Réduction des pulsions sexuelles dans les paraphilies en association à une prise en charge psychothérapeutique »), la simple acné, des pertes de cheveux ou la contraception chez la femme. Une nouvelle alerte de l’ANSM à la fin de l’été 2018 commence à être davantage relayée, je déclare de moi-même mes méningiomes à l’ANSM (c’est désormais possible pour les patients, avant seuls les médecins et pharmaciens pouvaient le faire) et au laboratoire Bayer, qui me répond qu’ils me déclarent aussi à l’ANSM mais que leur produit est sûr.
En mars 2019, une étude de la caisse nationale d’assurance-maladie sur les 10 dernières années a montré qu’au moins 500 personnes, essentiellement des femmes, en excluant, sans que cela soit justifié dans le rapport publié, les personnes sous affection de longue durée (dont moi, donc). L’acétate de cyprotérone se fixe sur les récepteurs à la progestérone, particulièrement bien exprimés sur les méningiomes. La base de données pubmed recense plus de 3000 articles sur ce médicament depuis sa mise sur le marché (AMM 08/04/1980, première commercialisation le 19/11/1980 d’après la base de données gouvernementale des médicaments) les premiers portant sur sa toxicité hépatique (pour ça, j’étais contrôlée chaque année) et cardiovasculaire (risque +++ d’embolie pulmonaire), comme beaucoup de traitements hormonaux. Beaucoup d’articles disent que les méningiomes sous acétate de cyprotérone se stabilisent voire régressent (beaucoup retiennent « régressent », mais cela semble finalement rare) à l’arrêt du traitement ; cela ne peut pas être le cas pour ceux qui sont ossifiés, et de plus en plus de personnes opérées se révèlent être de grade II, c’est-à-dire plus bénins et devant avoir un traitement de radiothérapie.
En fin d’année 2018, j’ai pris contact avec un avocat toulousain, Me Sintes, du cabinet Metis Avocat, qui vient de publier un bel article sur « Mme X », avant l’audience de demain, sur son site et sur le blog médiapart de son cabinet. En avril 2019, Arnaud Varanne avait également dressé un portrait dans l’hebdomadaire de la Vienne, le 7. Vous pouvez retrouver les phases de ma rééducation sur les 2 premières années, un peu complétées, sur ce blog : problèmes de mémoire de travail, de reconnaissance des visages, fatigue, troubles visuels (faudra-t-il enlever le méningiome sphéno-orbitaire ossifié qui déforme fortement mon orbite gauche, flèche orange sur la photo ci-contre ?), perte de l’odorat, troubles de l’équilibre et de la contraction de certains muscles, douleurs neuropathiques, relations avec la MDPH, distractibilité, etc., voir ou revoir : l’opération, mon visioagrandisseur maison et son plateau mobile, rééduquer l’anosmie?,compréhension de certains homophones (résonne / raisonne par exemple), Bientôt 2 ans… Anosmie, prosopagnosie, problème d’empans de la mémoire de travail… Il faudra que j’ajoute aussi quelque chose sur le permis de conduire!
Pour l’instant, il n’est pas question de toucher au méningiome inséré dans la faux du cerveau à la limite du frontal droit (flèche verte), les risques seraient très supérieurs aux bénéfices attendus. Je vais rédiger de nouveaux articles qui ciblent chaque problème et chaque solution que j’ai trouvée, testée… et approuvée ou pas! Je continue à prendre de la cortisone (avec des problèmes d’approvisionnement des comprimés à 20 mg depuis plusieurs mois, 0,5 mg / kg soit 30 mg par jour pour moi, cela fait 6 comprimés de 5 mg) pour contrôler notamment les troubles visuels, mon champ visuel se rétrécissant à chaque diminution ces derniers mois. Les fibro-adénomes mammaires multiples (FAM, j’en ai 6 à ce jour -enfin, au dernier contrôle à l’automne dernier, dont un de +/- 5 cm) pourraient aussi être la conséquence de ma prise prolongée d’Androcur, mais pour l’instant, personne n’en parle, sauf un professeur endocrinologue à qui je demandais comment avoir moins mal avec mes FAM en deuxième moitié de cycle.
Plusieurs groupes facebook autour des méningiomes et de l’Androcur (et d’autres traitements hormonaux, comme le Lutéran et le Lutényl) ont vu le jour ces derniers mois, et j’ai adhéré à l’Association méningiomes dus à l’acétate de cyprotérone (Amavea), présidée par Emmanuelle Huet-Mignaton, qui participe notamment aux discussions auprès l’ANSM. Il y a quelques jours, les courriers d’alerte sur le médicament sont enfin partis, mais l’assurance-maladie n’a ciblé que les patient.e.s qui ont pris de l’Acétate de cyprotérone ces deux dernières années, alors que le risque augmente fortement à partir de 5 ans de traitement : « effet dose cumulée avec risque multiplié par 7 pour l’ensemble des patientes traitées pour une durée de plus de 6 mois et risque multiplié par 20 au-delà de 5 ans de traitement à posologie de 50 mg/j sur un cycle », c’est écrit noir sur blanc depuis décembre 2018 sur le site de l’ANSM. Les médecins libéraux prescripteurs et les responsables des hôpitaux ont aussi reçu un courrier. Chacun.e doit discuter avec son médecin de l’opportunité ou pas de poursuivre le traitement et avoir une IRM avant le début du traitement (j’en vais eu une en 1990, normale), puis à 5 ans, puis tous les 2 ans si elle est normale. Cela fait quand même 112.000 IRM cérébrales à programmer à la suite de ce courrier, ça va allonger les délais d’attente!!! Et des sous pour Bayer (et oui, service après-vente lucratif), l’un des fournisseurs du produit de contraste nécessaire à ces IRM! En cas de découverte d’un ou plusieurs méningiomes, des consultations de neurochirurgie et, suivant la localisation, d’autres spécialistes (ORL, ophtalmologue, neurologue) devront être programmées. La délivrance ne sera plus possible, pour les nouveaux à partir de ce 1er juillet 2019, pour les autres à partir du 1er janvier 2020, qu’en présentant au pharmacien un papier co-signé du médecin prescripteur et du (de la) patient.e qui signale le risque de méningiome, clairement traduit comme une tumeur, lors de la prise de ce médicament, et les recommandations de suivi.
En attendant, rendez-vous ce mercredi 26 juin 2019 à 9h30 au TGI de Poitiers (au civil) pour nommer un expert médical avec une partie des protagonistes ou leurs représentants : Bayer, l’ANSM, le ministère de la santé, la CPAM de la Vienne (et la MGEN, en tant que fonctionnaire, c’est mon gestionnaire de sécurité sociale, mais la CPAM a délivré mes affections de longue durée), mon ancien médecin généraliste (il touchait depuis le début de mon ALD une indemnisation de coordination) et mon ancien pharmacien (ce n’est pas qu’un « épicier », il a aussi un rôle de contrôle du médicament et d’alerte notamment quand les notices changent)…
PS / 26 juin 2019. Alors que mon avocat toulousain et les avocats parisiens de Bayer, de l’ANSM et de mon ancien pharmacien étaient prêts à plaider, la représentante locale de l’avocat parisien de mon ancien médecin a obtenu un report de l’audience de ce jour au 17 juillet. La présidente a dit qu’elle n’accepterait pas de nouveau report. Même si cela nous énerve tous, encore 3 semaines à patienter!
PS du 17 juillet 2019 : l’audience au TGI a donc eu lieu ce matin. La décision de nomination (ou pas) de l’expert chargé d’évaluer mon préjudice et l’imputabilité à l’Androcur pris pendant plus de 20 ans sera rendue le 31 juillet 2019.
Voir l’interview de France 3 Poitou-Charentes réalisée hier et diffusée au journal régional (édition Poitiers) de midi en suivant ce lien (avec un texte) ou par la « box » ci-dessous (chaîne youtube de France 3), version longue :
Mise à jour du 31 juillet 2019 : le tribunal de grande instance de Poitiers a nommé un collège d’experts composé d’un neurochirurgien, d’un pharmacologue et d’un endocrinilogue, collège chargé d’évaluer le préjudice subi par mes méningiomes sous Androcur. Je mets à jour les liens « presse » au fur et à mesure…
Mise à jour du 24/09/2019 : la société Bayer a interjeté appel de la décision d’expertise le 20 septembre 2019… Deux mois de gagnés pour eux, plus le temps que la cour d’appel de Poitiers trouve une date d’audience.
Mise à jour du 22 janvier 2020 : Radio Agora, à Montmorillon, a consacré une longue interview de 20 minutes, à retrouver ici.
La nouvelle date de l’audience en appel a été fixée par le tribunal de Poitiers pour le 28 mai à 9h. Cela sera sans doute ma première sortie depuis le 15 mars.
Mise à jour du 27 mai 2020 : voir cet article spécifique, j’ai ajouté les liens médias dans la revue de presse ci-dessous
Mise à jour du 16 juin 2020 : la cour d’appel de Poitiers confirme la décision de premier instance (délibéré de ce jour). Test Covid19 passé pour bilan préopératoire, hospitalisation demain et opération jeudi…
Véronique D, portrait en anglais sur le blog de Mick, 27 mars 2020
Report de l’opération dans un reportage sur le cancer, même si les méningiomes ne dégénèrent pas dans 85% des cas en principe, mais provoquent des troubles suivant les zones comprimées, diffusion dans le journal de 13h de France 2 du 1er avril 2020 et dans le 12/13 France 3 Poitou-Charentes du 3 avril 2020 (à partir de 7 min 28) (Anne Guillé-Epée et Julien Delage).
Reportage au JT de France 2 à 13h sur ceux qui restent confinés (c’est à 19 minutes 30 sur le lien, +/- une minute avant pour l’autre témoignage). 25 mai 2020 ((Anne Guillé-Epée et Julien Delage).
J’avais un peu abordé, en novembre 2014, puis en 2015, la possibilité de retrouver ou pas, l’odorat que j’ai perdu suite à l’opération de l’un de mes méningiomes (dus à l’Androcur de Bayer), celui qui est indiqué par la flèche rouge.
J’ai eu un certain nombre de questions sur le sujet, je pense qu’il est utile de faire un nouveau point. L’anosmie existe pour d’autres causes, traumatisme crânien, grippe (et son vaccin dans de très rares cas), anosmie primaire dans certaines maladies rares, avancée en âge. C’est une cause importante de dépression. Perdre l’odorat (anosmie), ce n’est pas perdre le goût (agueusie), c’est-à-dire la sensation de l’acide, du sucré, du salé, de l’amer et de l’umani, mais c’est perdre la rétro-olfaction qui participe beaucoup au goût. Sans odorat, plus de plaisir pour préparer les repas ou manger… et beaucoup de plats brûlés, faute d’être alertée par l’odeur ! Comme je ne sentais toujours pas le gaz, l’année dernière, j’ai changé de cuisinière pour passer à l’électricité.
La cause de mon anosmie est identifiée: pour passer et enlever le méningiome (la boule au centre sur cette IRM avant opération), le neurochirurgien était obligé de pousser l’ethmoïde et notamment sa plaque criblée pour atteindre le jugum du sphénoïde (… poétiques, les noms des os du crâne). Ce faisant, il a soit étiré, soit rompu les petites terminaisons du nerf olfactif, qui ne conduit plus l’information. L’ORL m’avait dit que tout n’est pas perdu, qu’il pouvait y avoir des récupérations jusqu’à 18 à 24 mois. Un an après mon opération, j’avais de très rares sensations olfactives (même pas une odeur par jour, pas toujours les mêmes), inconstantes et seulement à de fortes concentrations. Deux 2 ans après, je pensais avoir déjoué les prédictions du neurochirurgien et de l’ORL du CHU de Poitiers, je progressais beaucoup, percevais de plus en plus de signaux olfactifs, arrivais à faire le lien signal perçu / odeur à attribuer, à forte concentration. Même si l’ORL est sceptique, j’ai vu grâce à ce site consacré à l’anosmie qu’il existait une consultation spécialisée à Garches, avec un programme expérimental de stimulation de l’odorat chez des traumatisés crâniens même après plusieurs années d’anosmie, mais cette consultation n’existait plus quand je me suis renseignée. Merci à Alexia Blondel qui anime les voyages olfactifs au CHU de Poitiers, qui m’a fait découvrir les sticks et les huiles essentielles en évitant celles qui sont le plus neurotoxiques (la majorité des menthes) et celles qui sont « hormon like » (risque de perturbateurs endocriniens et/ou de molécules qui se fixent sur les récepteurs hormonaux des méningiomes). Merci au rééducateur du CHU de Bordeaux avec qui j’ai échangé par messagerie, qui m’a encouragé à acheter le loto des odeurs. Et merci aussi à l’endocrinologue italien qui travaille sur une maladie endocrine rare, le syndrome de Kallmann, maladie qui est associée à une anosmie : il m’a expliqué que l’on pouvait récupérer des compétences olfactives via le trijumeau, notamment le menthol, les agrumes et tout ce qui est lié aux huiles, ce qui correspondait à ce que j’avais commencé à récupérer empiriquement avant de le rencontrer.
Qu’en est-il presque six ans après mon opération? Même si j’ai un tout petit peu progressé, je dirais que je perçois des odeurs à peine quelques minutes (voire quelques dizaines de secondes) par jour, et seulement si je me prépare des repas en fonction de ce que je peux percevoir et que je me colle le nez dans le jet de vapeur de la casserole. Cela me gêne encore beaucoup, notamment dans les relations sociales : quand je déjeune au restaurant ou chez des amis, que faut-il répondre à la question : « c’était bon? ». Je n’en ai absolument aucune idée, car je ne sais absolument pas ce que je mange la plupart du temps si je ne sais pas ce qu’il y a dans l’assiette. Seule exception, l’année dernière, au salon de Moncoutant, avec Maryse, nous avons déjeuner au restaurant sur la place, en entrée, une soupe jaune, vue la saison et l’indication de la carte, l’ingrédient principal était le potimarron. Je sentais autre chose et j’ai proposé le curcuma, dont j’abuse comme d’autres plantes aromatiques. Je pose la question à la serveuse, elle ne sait pas, elle va demander au chef, gagné!!! Il s’inquiète, « j’en ai mis trop? ». « Euh… non, sans doute pas », mais comme je n’ai pas été perturbée par l’odeur des autres ingrédients, j’ai pour une fois réussi à identifier celui-ci à l’aveugle et en conditions réelles! Disons même que c’est l’unique fois en 6 ans.
Donc, entre la première et la deuxième année, à force de stimulations quotidiennes, avec mes boîtes à odeur, des sticks aux huiles essentielles et deux jeux de loto des odeurs, j’arrivais à séparer les sticks aux agrumes de ceux aux menthes, à percevoir parfois le fumet au-dessus des casseroles. Cela au prix d’une stimulation intensive, sentir une boîte le matin (les yeux fermés pour ne pas voir le contenu), s’il n’y a pas de signal, changer à la stimulation suivante, une heure après. S’il y a un signal, essayer d’identifier l’odeur puis vérifier si c’est bon sur l’étiquette au dos (sticks et loto des odeurs) soit en regardant le contenu (boîtes maison). Recommencer toutes les heures. Après un an intensif, j’ai un peu relâché la stimulation, mais je la fait toujours chaque soir et plusieurs fois dans le week-end. Maryse a essayé de me stimuler avec son baeckeoffe et son cake aux clémentines confites et chocolat, avec des soupes dont j’essaye de deviner les ingrédients. J’ai aussi suivi des cours de cuisine pour malades atteints du cancer (même si le méningiome opéré était de grade I c’est-à-dire non cancéreux, j’ai pu y participer), et qui ont aussi le goût perturbé par leurs traitements.
Voici donc la liste des odeurs que je perçois, à condition qu’elles soient à forte concentration :
les « huiles », romarin, thym, lavande, pin, laurier, résine de bouleau, clou de girofle, cumin, eucalyptus (feuilles), anis étoilé ou badiane pétrole mal brûlé, certains solvants (acétone, white spirit) ;
agrumes, mais cela reste difficile de les distinguer (citron / orange / pamplemousse / bergamote) ;
menthes ;
épices : vanille (Madagascar), gingembre, curcuma, curry (pas tous), graines de moutarde (pilon), cannelle (Mexique), anis, graines de coriandre ;
autre dans la cuisine : crêpes, certains plats mijotés, chocolat chauffé, beurre fondu, café juste torréfié, pommes juste coupées ou enfermées dans un sac, poivrons, certains fromages quand ils fondent (Maroilles, Munster, Vieux-Lille, fromage de chèvre très sec -de la ferme du Marais à Chauvigny-, sans distinction devant le fromager sous les halles), carottes et céleri au moment de les râper, fraises, poulet rôti, pain frais (dans la boulangerie), pain grillé (au-dessus du grille-pain, coriandre fraîche, certaines tomates, persil, livêche, gâteau juste sorti du four, chou et urine après avoir mangé des asperges (composantes soufrées) ;
dans la nature : chèvrefeuille, seringua, herbe juste coupée, ammoniaque (étable, bergerie, cuir, épandage de fumier, mauvaises odeurs corporelles dans le bus), pétards et fumigènes, humus en forêt après la pluie, varech sur la plage.
Comparé à toutes les odeurs possibles, ce n’est pas beaucoup, mais c’est toujours un peu mieux que rien du tout.
Ce dimanche, je suis allée voir, une histoire largement inspirée de celle du père du réalisateur, Édouard Bergeon, dont le père s’est suicidé en 1999 à Jazeneuil, à une trentaine de kilomètres au sud-ouest de Poitiers.
L’histoire : 1974, ferme des Grands Bois, dans le Maine-et-Loire. Jacques Jarjeau [Rufus] transmet sa ferme à son fils, de retour d’un ranch aux États-Unis, c’est-à-dire qu’il lui vend les bâtiments et établit un contrat de fermage. 1996. Pour assurer la survie de l’exploitation, Pierre Jarjeau [Guillaume Canet] a gardé la culture (blé et autre) mais transformé l’élevage, abandonnant les moutons pour les chevreaux puis les poulets. Claire, sa femme [Veerle Baetens], assure la comptabilité, son fils Thomas [Anthony Bajon] souhaite devenir ingénieur et reprendre l’exploitation, sa fille [Yona Kervern] est encore un peu jeune pour penser à son avenir. Un seul ouvrier agricole, Mehdi [Samir Guesmi] semble l’aider faire tourner l’exploitation. Quand un incendie ravage l’un des hangars, l’équilibre économique déjà précaire de la ferme est rompu, il sombre dans la dépression…
Mon avis : Il a été beaucoup dit et écrit, dans les commentaires de la presse écrite, à la radio (et sans doute à la télévision, mais je la regarde peu), sur le réalisme par rapport au système productiviste, à la course en avant aux prêts par le Crédit agricole, à la main-mise des grosses coopératives devenues multinationales, où les coopérateurs (en principe les producteurs de base) n’ont plus leur mot à dire et qui fournissent, ici, le hangar et les machines de production, les poussins, les aliments et assurent la vente. Les acteurs sont excellents, le jeu de Guillaume Canet a été unanimement et je trouve à juste titre félicité partout, les autres acteurs ne doivent pas être oubliés, Rufus en père têtu et acariâtre, Veerle Baetens dans le rôle de l’épouse qui porte le fardeau économique de l’exploitation, et les deux enfants, Anthony Bajon et Yona Kervern, que l’on espère revoir dans d’autres films. Je voudrais revenir sur quelques points :
la place des parents, qui ont une petite retraite mais comptent sur le capital amassé au cours de leur vie et valorisé au fil des ans, avec la revente au(x) fils des terres et un fermage annuel qui peut s’avérer bien trop lourd, 1000 francs l’hectare, soit 78.000 francs par an, à rapporter au 700 francs la tonne de blé et au « minimum vieillesse ». Bon an mal an, le rendement du blé est autour de 80 quintaux (800 tonnes) par hectare. Cette place est encore moins abordée dans les reportages et les fictions (sur grand écran ou à la télévision) que le mal-être et le suicide des agriculteurs (1 par jour en moyenne en France) ;
la place de la femme des deux générations, la mère, bonne à tout faire du père, « collaboratrice » non rémunérée et donc probablement sans retraite du père ; la femme de l’agriculteur, qui a une double activité, comptable et gestionnaire des commandes et des stocks à la ferme (bénévole et non rémunérée) et comptable dans une banque, ce qui assure un revenu stable et fait « bouillir la marmite » au quotidien ;
l’inconscience par rapport au risque des pesticides, avec dans les scènes de 1996, l’adolescent et son père qui vident les bidons sans aucune protection dans les réservoirs ; l’adolescent qui s’amuse à passer sous la rampe qui distribue ces mêmes pesticides ; le médecin qui s’inquiète (sans trop insister) du tremblement de son patient
le modèle de production des poulets n’est pas le pire qui soit, ils sont ici élevés au sol et non entassés dans des cages ; un autre modèle est cependant possible, j’en avais un esquissé le contour en 2012, en espérant que les grosses coopératives agricoles qui sentent le vent des consommateurs tourner ne transposent pas leur modèle pourri aux exploitations nouvellement converties à l’agriculture biologique…
Je ne vais pas divulgâcher la fin du film en vous disant que le héros se suicide, je m’étais préparée à affronter cette scène, mais douze ans après le suicide de ma mère, je n’ai pas eu de problème…
Il est encore temps de rejoindre le mouvement Nous voulons des coquelicots, initié par Fabrice Nicolino et François Veillerette, en participant aux manifestations organisées à 18h30 devant de nombreuses mairies partout en France le premier vendredi de chaque mois et/ou en signant et faisant signer l’appel à la fin de l’usage du glyphosate et autres pesticides, en portant le petit coquelicot sur vos sacs, vêtements ou autre. Une version pin’s (épinglette pour faire plaisir à l’académie française) en vente sur leur site.
Sylvie, C., une amie, est en train de m’en faire fabriquer une série en céramique émaillée par Arc / ateliers artistiques d’Airvault dans les Deux-Sèvres, version gros boutons à coudre, je vous les montrerai quand ils seront terminés… ils sont en cours d’émaillage, mais voici ce que ça donne sur une version précédente. Si vous en voulez en bouton, faites moi signe, j’en ai commandé un peu plus, et je peux regrouper des demandes pour une autre commande. Ils organisent un salon tous les deux ans, le prochain aura lieu les 29 et 30 mai2021. L’édition 2019 était très sympa !
La Vienne a rejoint le mouvement des Pisseurs involontaires de glyphosate. Des prélèvements ont été réalisés sur 131 personnes à Gençay, Poitiers et Châtellerault. Mon résultat est tombé : à peu près dans la moyenne du département, 1,399 ng/ml d’urine, je n’avais pas mangé bio la veille… 121 plaintes ont été déposées au pénal (pour mise en danger d’autrui, tromperie aggravée et atteinte à l’environnement) au TGI de Poitiers le 18 septembre 2019, voir l’article paru dans Centre presse (oups, je suis au centre de la photo de groupe). Vous pouvez aussi voir une petite vidéo sur leur site. Le pique-nique (bio et sans laisser de déchets!!!) était très sympa, comme vous pouvez le voir sur le reportage de France 3 (19/20 édition Poitiers)… Merci à Héloïse Maurouard et Claire Marquis qui ont assuré la logistique, depuis les prélèvements devant huissiers, leur envoi à Leipzig pour analyse, jusqu’à la constitution des 121 dossiers portés par Maître Guillaume TUMERELLE, avocat au barreau de la Drôme. Jusqu’à présent, plus de 2500 plaintes ont été déposées partout en France, 5000 au total sont prêtes, elles seront regroupées au pôle de santé publique du Parquet du Tribunal de Grande instance de Paris, en espérant qu’elles ne s’y enlisent pas.
Certes, l’étude de Gilles-Eric Séralini a été décriée, surtout après une intense activité de lobbying de la part de Monsanto, jusqu’à la suppression de la publication scientifique de son étude, mais la toxicité de ce produit ne fait pas de doute : tout ce qui est en -cide tue, si ça tue les plantes ou les animaux, n’oubliez pas que nous avons plein de gènes en commun, ça peut aussi nous tuer!!!
Rappelons que l’usage du Glyphosate (Roundup de Monsanto, racheté fort cher par mon ami Bayer, et ses génériques) est interdit aux particuliers et aux communes. N’oublions pas que les premières victimes des pesticides sont leurs utilisateurs, au premier rang desquels les agriculteurs (Parkinson précoce, certains cancers notamment du rein) et leurs enfants (puberté précoce, …). Le manque de précautions des agriculteurs est bien montré dans le film qui est d’actualité en ce moment, Au nom de la terre, d’Édouard Bergeon.
Depuis le 1er janvier 2019, vous ne pouvez plus en utiliser sous peine d’amende, s’il vous en reste, il faut rapporter le flacon dans le magasin ou la déchetterie qui vous l’a vendu, ou avec les produits toxiques en déchetterie. La SNCF, les industriels l’utilisent toujours abondamment comme désherbant, ainsi bien sûr que les agriculteurs. Heureusement que le maïs MON810, un OGM résistant au glyphosate, ce qui permet d’arroser le champ avec encore plus de glyphosate sans faire mourir le maïs mais en rendant le champ bien « propre », sans une « mauvaise herbe » (ni une abeille)… le temps que celles-ci intègrent à leur tour le gène de résistance au produit et ne se multiplient à nouveau. Nous ne sommes donc sans doute pas près de le voir disparaître, mais faisons tous des efforts.
Pas un brin d’herbe sur la voie ferrée Poitiers-Limoges, à Lussac-les-Châteaux , ici à l’automne en 2017
Pour les plus courageux, je vous conseille de lire le rapport parlementaire R1560 de la député Bénédicte Taurine sur l’interdiction du glyphosate en France, rapport enregistré le 13 février 2019 à l’assemblée nationale : on y lit qu’il a été vendu 8800 tonnes de matière active du glyphosate en 2017 (soit 30% du volume des pesticides cette année là), lisez aussi les débats sur la même page, la position notre cher député de la Vienne Modem apparenté la République en marche, Nicolas Turquois, lui-même agriculteur : « Interdire le glyphosate brutalement, c’est confronter immédiatement des milliers d’agriculteurs à des difficultés majeures, voire insurmontables dans un certain nombre de cas, en l’état actuel de la recherche. Du fait de son coût très modique, de sa souplesse d’utilisation et de son efficacité, le glyphosate est effectivement devenu un produit omniprésent sur les exploitations agricoles« . Il parle ensuite de l’usage indispensable dans les grandes cultures (oups!!! la monoculture intensive), la vigne et la SNCF : » la problématique de la SNCF où la lutte contre l’enherbement, et notamment les ligneux tels que les ronces et les épines, est indispensable« . Là, il se trompe, quelques semaines après, la SNCF, qui traite ainsi ses 61000 km de voies ferrées et utilise 0,4% du glyphosate vendu en France a déclaré vouloir sortir progressivement du glyphosate. Dans le même temps, Bayer, qui ne doute de rien pour sauver son produit, tente de vendre un « train pour consommer moins de glyphosate« …
L’interdiction de certains pesticides met longtemps à avoir des effets sur l’environnement. Par exemple, l’atrazine est interdite depuis 2003, c’est un produit très persistant dans l’environnement. Il y a quelques mois, l’agence régionale de santé de Nouvelle Aquitaine (oui, la même qui a interdit l’essai clinique clandestin près de Poitiers) a autorisé en juin 2018 un dépassement pour plusieurs années des seuils de ce produit dans l’eau potable par le syndicat des eaux de Vienne / SIVEER dans le secteur de Saint-Savin (voir au passage ici les documents sur l’abbaye classée au patrimoine mondiale de l’UNESCO) : la presse locale en a rendu compte de cette autorisation de dépassement (voir Centre Presse). Ce produit serait-il encore parfois discrètement utilisé? Qu’en est-il aussi du lindane, un antiparasitaire organochloré très toxique, interdit en Europe depuis 2007, mais dont il subsiste aussi des flacons dans des granges de ce secteur? Espérons que certains agriculteurs ne l’utilisent pas pour éradiquer la mouche wohlfahrtia, tueuse de mouton qui a envahi notamment le sud du département de la Vienne et la Haute-Vienne voisine depuis quelques années.
Le combat n’est pas gagné, mais par endroit, les coquelicots sont quand même de retour… S’ils pouvaient l’être sur tous les bords de route. Quand reverrons-nous le bleuet, devenu encore plus rare?
Il y a une dizaine de jours à Poitiers, le 19 septembre 2019, un gros marronnier est tombé sur une terrasse du square de la République à Poitiers : il ne s’est pas déraciné, comme le laisse entendre cet article de Centre presse, mais cassé net à la base. C’était l’un des seuls arbres rescapés du massacre du square de la République où se trouve le monument aux morts de 1870-1871, qui a ensuite perdu ses grilles puis sa patine (la presse en parle), puis un début de la restauration chaotique avant d’être vraiment restauré, le square a reçu de nouvelles grilles moches puis une œuvre d’art (février 2013)… Hasard du calendrier, cette carte postale que je vous ai déjà montrée plusieurs fois, qui illustrait aussi un article de Grégory Vouhé sur la création du square par Édouard André, avait aussi été utilisée le même jour par Centre Presse pour illustrer la chronique « Poitiers en 2019 ». Il avait probablement été planté en 1993-1994.
Le bac de cet arbre (ça tombe bien, c’est celui-ci que j’avais photographié en 2013) comme les autres, avait vite été abîmé par les adeptes du skate-board.
Depuis 2010, la ville de Poitiers a coupé de nombreux arbres, même si elle affirme avoir planté autant d’arbres (mais pas des mêmes essences, voir la plantation des Sophoras, ou les poiriers de Chine), la signature d’une charte de l’arbre à grand renfort de green washing (lavage plus vert) sponsorisé par Alain Baraton (ici dans le 7 info) après une énième série de coupes n’y changera rien.
Revenons au square de la République… L’arbre a été découpé et évacué dans la journée, remplacé dans la nuit par un « arbre à messages » par l’un des nombreux groupes politiques (Poitiers collectif) qui ont annoncés leur entrée dans la campagne pour les municipales 2019.
Dans la journée, la municipalité plantait à la place un chêne vert (???), en attendant de planter autre chose fin octobre (ou à la Sainte-Catherine ?).
Revenons au problème, le chef des jardiniers met en cause la sécheresse et le vent, mais comme vous pouvez le voir sur la première photo, le collet de ce marronnier avait été enterré, et c’est à cet endroit qu’il semble avoir « pourri ».
Du coup, j’ai voulu faire un tour rapide des autres arbres qui tentent de survivre en centre-ville…
Ouf, dans le jardin anglais, je trouve enfin mon bonheur…
Un beau collet enfin à l’air libre. Le collet, c’est cette zone entre les racines et le début du tronc, qui est vitale à la croissance et à la bonne santé des arbres. Je vous conseille la lecture de la fiche technique établie par le conseil d’architecture, d’urbanisme et d’environnement de Seine-et-Marne (CAUE 77) sur la protection du système racinaire des arbres lors des travaux de terrassement, qui insiste sur des nombreux problèmes qui peuvent survenir, comme la modification de l’alimentation en eau du sol… Changer ainsi l’écologie d’un arbre plus que centenaire est un acte qui ne pouvait pas lui faire du bien. Passer d’un square en terre à une place pavée et bétonnées avec juste des bacs était un très mauvais choix et condamne probablement à court terme les derniers arbres survivants (beaucoup ont été coupés lors du réaménagement et quelques-uns dans les années suivantes). Vous croyez que l’on peut militer non pas la coupe de ces arbres, mais la restitution du square tel qu’il avait été conçu par Édouard André?
Je ne vous ai pas parlé de mes deux dernières saisons au théâtre et auditorium de Poitiers / TAP, mais je ferai peut-être un retour sur certains spectacles dans les prochaines semaines. Comme pour les dernières saisons, à cause de mes méningiomes (dus à l’Androcur de Bayer) je serai en « accompagnement handicapé ». L’escalier d’accès à la salle de théâtre est mal éclairé, ce qui combine mes difficultés motrices (syndrome pyramidal à gauche) et visiuelles, je ne peux le descendre que lentement (c’est plus facile dans le sens montée), avec les autres spectateurs qui ont tendance à pousser. L’ascenseur des « éclopés de la vie » est plus sûr pour éviter les chutes. J’ai privilégié les séances à 19h30 (fatigue chronique oblige, même comme ça, il m’arrive de m’endormir avant la fin) et le jeudi (pas de travail le vendredi)… Du coup, je n’ai sélectionné « que » 9 spectacles pour cette saison.
Voici donc les spectacles que j’ai choisis, par catégorie:
arts de la piste : Eins Zwei Drei, spectacle de noël (annoncé danse et cirque) par Martin Zimmermann ;
danse : I’m a bruja par Annabel Guérédrat, dans le cadre du Festival À Corps
théâtre : Le fils, de Marine Bachelot-Nguyen et David Gauchard, dans le cadre des Rencontres Michel Foucault ; Le sale discours (autour de la gestion des déchets) par David Wahl et Pierre Guillois et Histoire de fouilles par le même David Wahl (le titre a attiré ma curiosité d’archéologue) ; Causer d’amour par Yannick Jaulin (revoir Comme vider la mer avec une cuiller et Terrien) ;
humour : La lesbienne invisible, reprise par Marine Baousson du spectacle d’Océan (revoir Chatons violents d’Océanerosemarie, devenue depuis Océan)
musique ancienne et classique : Schubert par Adam Laloum
musique du monde : LEMMA, par Souad Asla et des musiciennes du sud du Sahara (la présentation au lancement de saison était émouvante)
Je vais essayer de reprendre l’ancien rythme de publication de mon blog, plus ou moins abandonné depuis des mois… Je reprends avec un article « cinéma »… J’ai hésité à aller voir le dernier film de Woody Allen, dont les accusions de viol sur sa fille adoptive sont revenues à la une de l’actualité ces derniers temps, bloquant sa sortie aux États-Unis suite à l’affaire Weinstein, dans le contexte des mouvements #MeToo puis #BalanceTonPorc. Peut-on vraiment séparer vie artistique et attitude personnelle ? Cela se pose aussi pour Pierre Loti, que l’on qualifierait aujourd’hui clairement de pédophile, Louis-Ferdinand Céline et ses écrits et positions pendant la Deuxième Guerre mondiale, etc. En tout état de cause, Griffin Newman, Rebecca Hall, Timothée Chalamet et Selena Gomez, acteurs phares du film, ont fait dons de leurs cachets à des associations et refusent de participer à la promotion du film qui a été primé au festival 2019 de Deauville. Comme je n’avais pas envie d’aller voir l’adaptation des Les hirondelles de Kaboul, de Yasmina Khadra, que je craignais trop violent, je suis allée voir le film de W. Allen, plus pour l’horaire que par conviction…
L’histoire : de nos jours sur le campus d’une université secondaire du Nord-Est puis à New-York. Ashleigh Enright [Elle Fanning], étudiante en journalisme dont le père est un riche banquier texan ( » plouc » ?), a l’occasion d’aller interviewer pour le journal de l’université un réalisateur de film, Roland « Rollie » Pollard [Liev Schreiber], un réalisateur de film d’art et essai. Gatsby Welles [Timothée Chalamet], étudiant qui préfère le poker et autres jeux aux études, lui propose de passer le week-end ensemble, en amoureux, tout en essayant de fuir au maximum la grande fête littéraire d’automne que sa mère [Cherry Jones] doit donner le même. La pluie se met à tomber, Gatsby tombe sur d’anciens camarades et sur Gatsby [Selena Gomez], la petite sœur d’une de ses ex-petites amies, Ashley est coincée avec son réalisateur en pleine crise existentielle, qui n’aime pas son film, et l’embarque faire le visionnage d’une nouvelle version avec son scénariste, Ted Davidoff [Jude Law], trompé par sa femme [Rebecca Hall], avant de tomber sur un célèbre acteur, Francisco Vega [Diego Luna].
Mon avis : j’ai passé plutôt un agréable moment avec ce film, même s’il y a toujours les mêmes références de Woody Allen, les Juifs New-Yorkais, la dépression chronique, les clichés sur les ploucs – cette fois les Texans (la jeune étudiante n’a mis que deux fois, enfants, les pieds à New-York) – et la bonne société cultivée de New-York, des passages qui manquent de rythme (le rire de la future belle-sœur de Gatsby Welles, les hoquets de Ashleigh Enright). Si la fin est prévisible, la confession de la mère est inattendue et relance l’intérêt pour la dernière demi-heure. Au passage, les personnages fument beaucoup, et pas que du tabac, et boivent en excès (dont du [Cognac] Corvoisier), on peut apercevoir l’affiche de la grande exposition sur Auguste Rodin au MET (il faut que je vous parle de plusieurs expositions que j’avais vues dans le cadre de « l’année Rodin »)… Bref, du Allen par Allen, plutôt dans une bonne moyenne par rapport à certains de ses films de ces dernières années, mais loin d’être le meilleur à mon avis.
Depuis une semaine, il est beaucoup question de l’essai clinique clandestin réalisé par les (ex)-professeurs Jean-Bernard Fourtillan (ancien professeur de chimie thérapeutique / pharmacologie) et Henri Joyeux, croulants et réactionnaires, respectivement président et vice-président du fonds Josefa (qui a son siège à Poitiers avec pour trésorier le professeur Jean-Pierre Fontanel, ex chef de service ORL au CHU de Poitiers), ultra-catholiques, anti-avortement (y compris avortement médical de grossesse), diagnostic pré-implantatoire (ou DPI, « tri » des embryons dans le cas de maladies génétiques ou chromosomiques graves, une procédure difficile et exécutée dans 6 centres en France), anti vaccins… L’article paru ce matin dans Centre Presse et La Nouvelle-République (même article) m’amène à réagir. Les charlatans se défendent en disant que ce n’est pas un essai clinique parce que ce n’est pas un médicament (mais ils promettaient une guérison!), que les 402 patients (nouveau chiffre, jusque là la presse relayait 350) s’appliquaient volontairement les patchs sur lesquels il était inscrit : « Technical sample. Not for human use ». Pas pour usage humain, et ils disent que ce n’est pas un médicament et sans danger!!! Cela ressemble plutôt à « administration d’une substance dangereuse » et « empoisonnement ». Des informations laissent supposer qu’ils continuent leurs essais malgré l’intervention de l’agence régionale de santé (ARS).
Les essais cliniques sont très encadrés, gratuits, le patient signe une « information éclairée, qui lui est remise (enfin, en principe, pour la dernière à laquelle j’ai participé au CHU de Poitiers, sur un protocole de désinfection avant la mise en place d’un cathéter pour vérifier les taux d’infection, il a fallu que je passe par la direction des usagers pour avoir une copie de ce protocole). Là, ils ont donné un produit, soit disant proche d’hormones naturelles, interdit à l’usage humain, en demandant de l’argent (il y a quelques jours, on parlait de 1000 €, maintenant, il est plutôt question de 1500 €), en demandant d’arrêter les traitements en cours, en demandant le secret… Tout cela ressemble fortement à la définition d’une dérive sectaire : la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) aurait d’ailleurs reçu trois signalements. Sur leur site officiel, les critères pour caractériser un risque de dérive sectaire sont les suivants :
» la déstabilisation mentale
le caractère exorbitant des exigences financières
la rupture avec l’environnement d’origine
l’existence d’atteintes à l’intégrité physique
l’embrigadement des enfants
le discours antisocial
les troubles à l’ordre public
l’importance des démêlés judiciaires
l’éventuel détournement des circuits économiques traditionnels
les tentatives d’infiltration des pouvoirs publics « .
Mis à part l’embrigadement des enfants, presque tous les critères sont réunis.
Les examens étaient menés à l’abbaye Sainte-Croix à Saint-Benoît, un bel édifice étudié il y a quelques années par mes collègues : suivez le lien! Les sœurs disent qu’elles ne savaient pas qu’il y avait des prélèvements sanguins, qu’elles ne faisaient que louer les chambres une fois par mois… pendant 20 mois selon la presse. Vu la capacité d’accueil de l’abbaye Sainte-Croix (12 chambres), pour tester 402 patients, cela fait 33,5 nuits de pleine occupation de l’abbaye, les infirmier.e.s tous les jours, cela devait quand même se repérer! La foi rend vraiment aveugle.
L’abbaye Sainte-Croix vient du déménagement de l’abbaye du centre-ville de Poitiers (là où se trouve aujourd’hui le musée). Elles sont les héritières du monastère fondé par sainte Radegonde, réputée pour son pouvoir de guérison… y compris Louis XIV, ainsi qu’en atteste (!!!) l’ex-voto en photographie en tête d’article, posé par Anne d’Autriche en remerciement de la guérison de son fils Louis XIV en 1658 (à gauche) ; à droite, un autre ex-voto, daté de 1870/1871 (sainte Radegonde aurait protégé Poitiers de l’avancée des Prussiens…). Sainte Radegonde est souvent représentée sous les traits d’Anne d’Autriche, je vous remets tous les liens vers mes anciens articles ci-dessous. Les organisateurs de cette escroquerie pensaient peut-être que le pouvoir de guérison magique de sainte Radegonde pouvait aussi aider à la guérison des malades de Parkinson et d’Alzheimer qu’ils ont abusé?
Chauve-souris sur un culot de la voûte d’une tour du 13e siècle du château de Blois
La nuit européenne de la chauve-souris, c’est ce week-end (samedi 24 et dimanche 25 août 2019) ! Il y aura partout en Europe des points d’observation… au frais dans les bois ou dans des grottes, avec des appareils pour rendre audibles les infra et ultrasons qu’elles émettent. Vous pouvez retrouver en suivant le lien toutes les informations et les lieux d’observation en France, pour les autres pays, je n’ai pas cherché… Protégez ces petites bêtes, laissez leur des gîtes sympathiques, la plupart de celles qui vivent dans nos contrées sont insectivores et mangent notamment des milliers de moustiques chacune!
Celle de la photographie vient régulièrement se mettre au frais quelques jours dans le tunnel interne de la résidence où j’habite, qui permet de relier le « plateau » de Poitiers en ascenseur. Elle doit y trouver la fraîcheur des grottes. Les arbres, les greniers, les hangars en abritent aussi beaucoup, même s’il faut attendre de les voir sortir à la chasse aux insectes pour les voir.
Sinon, pour les amis et visiteurs poitevins, vous pouvez aussi aller voir la chauve-souris sculptée sur l’un des dosserets des stalles de la cathédrale de Poitiers ou celles qui logent au-dessus des voûtes de l’église Sainte-Radegonde, et volent régulièrement dans la nef en passant par les anciens trous des cordes des cloches.
Pour aller plus loin : voir Le guide des chauves-souris en Poitou-Charentes, de Olivier Prévost (Collection les cahiers naturalistes, 2004, Geste éditions, 197 pages, ISBN 978-2845611625).