Archives de catégorie : Musique / Chansons / Spectacles

Les spectacles que j’ai vus, concert (surtout musique classique, musique du monde), théâtre, danse, cirque, magie

Ciné-concert : Oyuki la vierge de Kenji Mizoguchi

Le théâtre et auditorium de Poitiers après l'ouverture du viaduc, février 2014Je poursuis ma saison 2014-2015 au  théâtre et auditorium de Poitiers / TAP, avec un ciné-concert, Oyuki la vierge de Kenji Mizoguchi, un film de 1935 librement inspiré de Boule de suif de Maupassant, accompagné par le groupe de jazz Francis et ses peintres et leurs deux invitées, Maia Barouh et Emiko Ota.

Le film: dans les années 1930 au Japon. En pleine guerre civile, alors que l’armée gouvernementale est aux portes du viallge, un groupe de personnes réussit à fuir en diligence. A bord, un groupe de bourgeois et deux prostituées. Suite à un accident, essieu cassé, ils sont faits prisonniers. Le commandant exige qu’une jeune fille vierge le rejoigne, le père cède, une des prostituées se révolte et tente de prendre sa place…

Mon avis: contrairement à d’autres ciné-concerts vus ces dernières années, ici le film n’était pas en version restaurée. L’accompagnement en musique et chant commence un peu avant le film… qui s’ouvre finalement par une longue séquence muette. J’ai trouvé, comme d’autres amis présents, que musique et chants étaient certes beaux, mais absolument pas en accord avec le film… La difficulté du ciné-concert, c’est que la musique doit accompagner le film, se faire oublier, pas vivre sa vie propre, comme ce fut le cas ici. Dommage…

Euh, une fois de plus, je n’ai pas vu la fin, à nouveau endormie, a barrière de 21h30 reste infranchissable pour mon cerveau! Il doit me manquer les 10 dernières minutes, l’amie qui était à côté de moi ne pensait pas que j’avais dormi. Mais si, c’est bizarre, de « dormir debout », l’image s’interrompt peu à peu, je vois et entends puis plus rien puis de nouveau perception, les coupures sont de plus en plus longues jusqu’à extinction complète des perceptions, mais sans relâchement musculaire…

Henry VI de Shakespeare mis en scène par Thomas Jolly

Cartes à publicité pour Henry VI de Shakespeare mis en scène par Thomas JollyPour cette saison 2014-2015, le théâtre et auditorium de Poitiers / TAP a choisi de donner Henry VI, l’œuvre monumentale de Shakespeare écrite entre 1588 et 1590 et mise en scène par Thomas Jolly (le « culotté » metteur en scène de 32 ans) et sa compagnie la Piccola Familia, 13h30 de spectacle, 18h30 avec les entractes, qui a triomphé à Avignon en 2014 (d’une seule traite) et dans de nombreuses salles (sous des formats variables). Une vingtaine d’acteurs pour environ 200 personnages. Ici, nous avions le choix entre 4 soirées (mmm… irréaliste pour moi) ou deux dimanches, de 14h30 à 23h environ, ce que j’ai préféré. Il fallait oser monter ce cycle de trois pièces shakespearienne d’un coup, enfin, en 4 épisodes chacun partagés en deux. Les cartes à publicité annonçaient la couleur, ça va conspirer, ça va saigner, ça va vous emporter (dans les bras de Morphée?)!

L’histoire: le règne d’Henry VI revu et corrigé par Shakespeare… de son accession au trône jeune enfant le 1er septembre 1422 -il était né le 6 décembre 1421 et avait donc à peine 1 an-, à la mort de son père Henry V en pleine guerre de Cent Ans à sa mort le 21 mai 1471, en passant par la guerre des Deux Roses.

Le spectacle: un grand praticable avec une variante d’échafaudage sert de décor principal, les lettres permettent de se repérer: Bordeaux, Londres, etc., tous les lieux sont précisés. Pour le reste, des manchons en toile permettent de simuler les colonnes du palais royal par exemple, des chaises « à tout faire » (chevaux, bûcher de Jeanne d’Arc) meublent aussi la première partie. Pour éviter que le public ne se perde dans les méandres de cette histoire complexe, une rhapsode (narratrice à l’Antique) a été ajouté à la pièce originale et permet régulièrement de se situer… l’actrice, Manon Thorel, eut droit à plusieurs ovations! Quelques petits bémols, en cette période de grippe, Thomas Germaine (Henri VI adulte) a fini à chaque fois avec la voix cassée, peut-être aussi parce qu’il poussait trop la voix. Le metteur en scène a en effet choisi de faire crier beaucoup de personnages… ce qui rend parfois incompréhensibles les tirades de Geoffrey Carey (principalement dans les rôles de Humphrey de Gloucester puis de Alexander Iden) avec son accent british. Sinon, j’ai beaucoup aimé ce mélange entre tradition et parties résolument modernes, la tenue de Jeanne d’Arc est… « d’enfer » (avant qu’elle n’aille le rejoindre), mais chut, laissons la surprise à ceux qui verraient la pièce ultérieurement. Comme promis, « ça a saigné », et même beaucoup, sur fond de musique calme ou carrément électro-rock, de lumière tamisée ou de faisceaux lasers… Ces changements de rythmes et d’ambiances sont bienvenus pour maintenir l’attention! Quelques petites piques ajoutées ici et là aussi, par exemple, de passage à Poitiers, ça, c’est dans la pièce, il est question de … farci poitevin, succès garanti et ceux qui commençaient à perdre pied sont vite revenus dans la pièce. Un grand moment de théâtre, n’hésitez pas à embarquer dans l’aventure si elle se profile près de chez vous!

Les entractes: contrairement à la pagaille qui avait régné pour l’entracte de L’âme du Japon, cette fois, tout était très bien organisé. En bas du grand escalier, une taverne attendait ceux qui n’avaient pas eu envie de réserver un repas ou qui avaient apporté leurs provisions et juste envie d’un cake et de bière anglaise… Pour les autres, nous avions la possibilité de réserver et pré-payer des repas à des prix très raisonnables (avec ou sans dessert, variante viande ou végétarienne, boisson comprise, par Thierry Nardo -désormais sous les halles- et Gargamel-le-Catering -rue des Trois-Rois, deux restaurateurs poitevins). Files bien organisées et grandes tablées en bois sous de jolis lustres (en récupération… couverts rouillés à la place des pampilles) et de grandes tapisseries… projetées sur les murs des foyers côté théâtre comme côté auditorium. Organisation impeccable 😉 , jusqu’à se caler sur… l’heure anglaise (18h30 le premier dimanche, 18h le deuxième)!

Badge j'ai vu Henry VI en entierBon, je l’avoue, je n’ai pas vu la fin les deux soirs, les amis avec qui j’étais ont renoncé à me réveiller toutes les 5 minutes après 21h30… mais cela n’a rien à voir avec la qualité de la pièce, juste avec le reste de fatigue de mes méningiomes. En revanche, l’endormissement le premier dimanche après le premier entracte est dû à un passage moins rythmé et plus long du coup, d’autres spectateurs ont aussi piqué du nez. J’ai quand même eu droit au badge « J’ai vu Henry VI en entier ».

La première sieste acoustique au TAP

Poitiers, le théâtre et auditorium, 11, l'auditorium vu du balcon C’était il y a presque deux mois déjà, juste avant Noël. J’ai participé à la première sieste acoustique au théâtre et auditorium de Poitiers / TAP, dans le cadre de ma saison 2014-2015… où je passe un nouveau grand après-midi pour la deuxième partie de Henri VI de Shakespeare mis en scène par Thomas Joly (18h en tout, avec les entractes sur deux dimanches, 13h de spectacle sans les pauses).

Revenons donc à la sieste, un concept développé il y a quelque temps par Bastien Lallemant et qui a essaimé un peu partout dans des théâtres, des festivals ou ailleurs.

15h moins quelques minutes. Il avait été recommandé d’apporter oreiller (pour le confort) et son … doudou! Les spectateurs, en petit nombre, entrent dans l’auditorium, se déchaussent, montent sur la scène de l’auditorium (ci-dessus lors d’une visite avec l’architecte) recouverte d’une moquette moelleuse, les instruments sont au fond au milieu. Nous sommes invités, une fois dotés un plaid violet, à nous allonger en cercle autour de la « scène ». Encore un peu d’attente et les musiciens, Bastien Lallemant, JP Nataf, Mina Tindle, Albin de la Simone et Maëva Le Berre entrent avec leurs mugs, se faufilent entre les spectateur, nous souhaitent une bonne sieste et annoncent qu’un tintement de cloche signalera la fin du « dodo » dans une heure. La lumière est baissée, la musique commence en douceur, court au ras du sol… La magie opère vite, les uns reprennent le répertoire des autres, ma voisine (chut, je ne dirai pas qui!) s’endort doucement, pas moi, pour une fois (prudemment, j’avais dormi 1h30 avant!). La musique au ras du sol m’a beaucoup plus, surtout que ce sont des musiciens que j’entends régulièrement sur France Inter, mais dont je n’avais jusqu’ici jamais acheté d’album.  Avant la sieste, j’avais un faible pour le répertoire d’Albin de la Simone (il a interprété Mes épaules vers la fin de la sieste), j’avoue que désormais, j’écoute avec plus d’attention les textes de chacun d’entre eux.

Réveil en douceur, chacun se relève doucement, « range son lit » (rend le plaid et remporte son oreiller), se rechausse et pour assurer la transition et un retour en douceur vers la ville, un goûter est servi au foyer… Parfait, j’adore, j’adhère!!!

Depuis, une autre sieste a été organisé pour le week-end WEE (électro), une autre aura lieu, hors abonnement, en mars, j’attends l’ouverture de la billetterie 😉

Extension par le Cirque inextrémiste au TAP

Le théâtre et auditorium de Poitiers après l'ouverture du viaduc, février 2014Nouvelle sortie au  théâtre et auditorium de Poitiers / TAP, dans le cadre de ma saison 2014-2015, avec le Cirque intextrémiste mardi soir, j’avais sélectionné le spectacle à 19h30, pour que ça ne soit pas trop tard et que je ne m’endorme pas une nouvelle fois au spectacle… La compagnie était venue au festival des expressifs en 2009, avec une annulation partielle à cause de la manifestation violente contre le déménagement de la prison.

Le spectacle: des bouteilles de gaz, deux planches, trois amis sur scènes. Au départ, une mauvaise blague faite à Rémy, paraplégique [suite à un accident de cirque], abandonné dans une poubelle sur scène, sans son fauteuil. Puis alors que ss deux amis viennent de construire un « échafaudage » avec les planches et les bouteilles de gaz, le voici qui revient sur scène aux commandes d’une mini-pelle mécanique, et le voilà qui propulse ses deux compères dans les airs en équilibre instable sur leur planche.

Mon avis: si le début est un peu glauque, avec une mauvaise blague sur le handicap, j’ai assisté ensuite à un grand numéro d’équilibre, parfait même si la musique est parfois un peu forte pour moi. Je trouve cependant que ce n’est pas vraiment un spectacle de noël, comme c’était annoncé. Les collégiens qui avaient préparé cette représentation en atelier avec les artistes ou les handicapés (sourds et handicaps mentaux) présents ont certes ri, mais les enfants accompagnés de leurs parents à côté et derrière moi étaient perplexes et avaient beaucoup de questions sur le handicap (« c’est pour de vrai qu’ils l’ont abandonné? »), sans profiter visiblement du spectacle. Prendre une mini-pelle mécanique comme un fauteuil roulant géant, pilotable par ss manettes, est une bonne idée, mais le spectacle manque un peu de « récit », d’histoire à côté de la performance pour la performance.

Les spectacles de fin d’année précédents étaient plus adaptés au jeune public et aux adultes; revoir  El Niño Costrini de Sebastiàn Guz, le Slava’s Snowshow, Pierre et le loup, etc… Amis poitevins, vous pouvez encore voir ce spectacle ce soir et demain après-midi, amis d’ailleurs, il passera peut-être un jour près de chez vous, sinon, allez voir le site de la compagnie du Cirque intextrémiste. Pour ma part, j’ai prévu demain d’aller à la sieste acoutisque… sur la scène de l’auditorium, euh, le TAP conseille d’apporter oreiller et doudou! J’aurai fait la sieste (au sens propre) juste avant, je devrais donc réussir ensuite la « sieste acoustique », je vous raconte très vite cette nouvelle expérience qui s’annonce.

Modèles, de Pauline Bureau

Le théâtre et auditorium de Poitiers après l'ouverture du viaduc, février 2014Je poursuis ma saison 2014-2015 au  théâtre et auditorium de Poitiers / TAP, avec Modèles, de Pauline Bureau et la Compagnie La Part des Anges. Un spectacle créé en 2011 à Montreuil.

Le spectacle: cinq jeunes femmes (Sabrina Baldassarra, Laure Calamy, Sonia Floire, Gaëlle Hausermann, Marie Nicolle ) et un musicien (Vincent Hulot) sur scène, encadrées par Pauline Bureau, sur un texte collectif (les mêmes plus Benoîte Bureau, Sophie Neveux, Emmanuelle Roy, Alice Touvet) et avec des vidéos des mêmes actrices recréant des interviews de Pierre Bourdieu, Marie Darrieussecq, Virginie Despentes, Marguerite Duras, Catherine Millet, Virginia Woolf. Plus quelques mannequins de cire sur les côtés. Elles racontent leur enfance dans les années quatre-vingts, les premières règles, la « première fois », l’avortement, la vie de femme entre boulot et tâches ménagères, etc.

Mon avis: l’ouverture du spectacle par la reconstitution d’une interview de Bourdieu m’a fait un peu peur, entrée en matière par un grand classique… Puis le rythme s’accélère, avec une alternance de saynètes, interviews et passages en musique.

Chacune peut se retrouver dans ces textes, visiblement beaucoup moins le monsieur qui était assis à ma gauche. Est-ce qu’il oublierait de laver son bol le matin, de faire les courses et de préparer le repas en s’occupant du bébé pour laisser le temps à sa femme de traiter les derniers dossiers urgents au bureau? Certains passages peuvent être crus (reconstitution d’une entrevue de Virginie Despentes sur un viol subi, les premières règles, etc.), mais avec un rythme soutenu, elles abordent tous les aspects de la vie d’une femme, y compris d’un point de vue idéologique (l’héritage des féministes, de mai 1968) ou intime (la brutalité du gynécologue et l’avortement incomplet). Pas de leçon de morale, juste des constats, chaque actrice retraçant la vie d’une femme à la personnalité très différente. Certains passages musicaux sont trop forts pour moi (oui, j’ai encore du mal à gérer le bruit), mais sinon, j’ai passé une excellente soirée! S’il passe près de chez vous, n’hésitez pas à y aller, avec Monsieur et les enfants (enfin, pas trop petits, les enfants)!

Pour rebondir, voir ou revoir Apocalypse bébé de Virginie Despentes et La douleur de Marguerite Duras, mise en scène de Patrice Chéreau, avec Dominique Blanc.

La Métamorphose version androïde d’Oriza Hirata

Le théâtre et auditorium de Poitiers après l'ouverture du viaduc, février 2014Dans le cadre de ma saison 2014-2015 au  théâtre et auditorium de Poitiers / TAP, je suis allée voir la semaine dernière La Métamorphose version androïde d’Oriza Hirata (traduit par Mathieu Capel assisté de Hirotoshi Ogashiwa) d’après la nouvelle de Franz Kafka, avec l’androïde Repliee S1 créé par le Pr Hiroshi Ishiguro et l’ingénieur Takenobu Chikaraishi, manipulé par Thierry Vu Huu qui lui donne aussi sa voix. Le spectacle a été créé par le Festival d’automne en Normandie (dont c’était la dernière
édition…)

L’histoire : En 2040 quelque part dans le sud de la France. Grégoire
Samsa [l’androïde Repliee S1] se réveille un matin sous les traits d’un
robot androïde. Seul le haut de son corps est mobile, il ne peut pas se lever pour aller travailler. C’est la guerre en Méditerranée, les
départs au front se multiplient, le travail se fait de plus en plus
rare, les émigrés et les réfugiés affluent. Stupeur de sa sœur
[Laetitia Spigarelli] puis de sa mère [Irène Jacob]. Le père [Jérôme
Kircher], débordé par son propre travail menacé, refuse tout simplement d’y croire. Puis peu à peu, ils finissent par accepter cet autre Grégoire qui leur parle, et leur pose aussi problème: il ne travaille plus, l’argent ne rentre plus, d’autant que le père puis la sœur sont licenciés, ce n’est pas le bénévolat de la mère dans une association d’alphabétisation des migrants qui va faire bouillir la marmite. La présence de Grégoire menace l’acceptation d’un locataire, Monsieur Darmon, un médecin réfugié spécialiste du cerveau [Thierry Vu Huu]…

Le spectacle et mon avis: Comme un personnage principal, un lit, une fenêtre à l’arrière, un cadre qui marque le mur vers le reste de l’appartement, une porte, la porte de la chambre, les voix
off des autres membres de la famille, à l’arrière, invisibles à
certains moments. Sur le lit [je n’ai pas pu m’empêcher de repenser à  Romain Duris dans La nuit juste avant les forêts, seul en scène sur un lit dans une pièce de Koltès] un robot, corps métallique mais un masque blanc de théâtre traditionnel japonais à la place de la tête et des mains également gantées de blanc. La bouche, les lèvres, les yeux, les bras, les mains bougent, la voix est enregistrée mais parfaitement synchronisée. Je ne sais pas, mais je pensais que le robot serait plus mobile. Un questionnaire avait été distribué à l’entrée, ramassé à la fin, sur la crédibilité et l’acceptabilité des robots. Je ne sais pas ce qu’ils pourront en tirer, il y avait énormément de questions négatives, ce qui complique la compréhension de la réponse! (ex fictif: le robot n’est pas crédible, à noter sur une échelle allant de 0 « je n’y crois pas » à 10 « j’y crois »).
Il faudrait que je me replonge dans la Métamorphose de Kafka, écrite en pleine première guerre mondiale (1915), lue il y a des lustres (au
lycée?), car ici, dans la transposition, l’auteur nous invite à réfléchir sur la guerre, l’immigration, les réfugiés, le bénévolat. La brève intervention du locataire pousse la réflexion sur les états végétatifs, les organes artificiels, jusqu’où peut-on parler d’un humain? Un spectacle que je vous conseille s’il passe près de chez vous!

Exhibit B de Bett Bailey à Poitiers

Flux de Rainer Gross à Poitiers, mai 2014, dans la cour du muséeDans le cadre de Peaux de tigre et de pouilleux, Du colonisé à l’étranger, organisé par le théâtre et auditorium / TAP et l’université de Poitiers du 12 au 16 novembre 2014, j’ai juste vu:

– « l’exposition » proposée par la  fondation pour l’éducation contre le racisme de  Lilian Thuram (des panneaux aux textes beaucoup trop denses, qui doivent à peu près reprendre ceux de Exhibitions, exposition au musée du quai Branly à Paris en 2012, sans les objets) dans le foyer du théâtre

– et, dans le cadre de ma saison 2014-2015 au  théâtre et auditorium de Poitiers / TAP, Exhibit B de Bett Bailey présenté au musée Sainte-Croix.

Le spectacle: 12 « tableaux humains » organisés par Bett Bailey, metteur en scène sud-africain qui a connu l’apartheid, avec des « performeurs », artistes professionnels ou non : Machita Doucoure, Alexandre Fandard, Guillaume Mivekannin, Éric Abrogoua, Jelle Samminadin, Jean-Philippe Mpeng-Backot aka « Soon », quatre chanteurs de Namibie – Marcellinus Swartbooi, Chris Nekongo, Lelsey Melvin Du Pont, Avril Nuuyoma – etc. Les douze tableaux vivants reproduisent les zoos humains ou les spectacles des expositions coloniales, mais aussi d’autres scènes comme les têtes coupées (envoyées par les colons allemands pour étudier les « races ») ou le sort des immigrés dans les centres de rétention.

Mon avis: interdit à Londres, faisant l’objet de pétitions contre sa présentation à Paris, ici, il n’y avait aucune polémique, pas un flic à l’horizon alors que j’avais un billet pour la toute première présentation du vendredi. J’ai bien apprécié la « mise dans l’ambiance ». Les groupes de 30 personnes (répartis au moment de la réservation des billets) sont rassemblés dans le hall du musée et emmenés en groupe avec des consignes de silence vers un autre espace du musée pour se mettre à l’aise, laisser sacs et manteaux. Tous les téléphones, pour une fois, semblaient bien éteints (enfin, un a sonné assez tôt pour un rappel à l’ordre). Montée du groupe au premier étage, dans ce qui ressemble à une « salle de classe », sans pupitres. Des chaises par rangs de trois, des numéros sur les chaises, un pupitre devant, une dame (« maîtresse d’école? »). Nous sommes appelés un à un par ces numéros, départs toutes les minutes environ. Ensuite, il faut suivre le parcours dans l’ordre, mais chacun à son rythme, en silence, enfin, avec en bruit de fond de très beaux chants qui se précisent au fur et à mesure qu’on s’approche [la chorale namibienne, composée de Marcellinus Swartbooi, Chris Nekongo, Lelsey Melvin Du Pont et Avril Nuuyoma, a donné la semaine suivante un concert-sandwich au TAP]. L’installation s’accompagne aussi de la mise en valeur ou le rebond sur des œuvres du musée, mises en valeur par l’éclairage (par exemple la Baigneuse de Pierre-Marie Poisson) ou laissées volontairement dans la pénombre (Les Nymphes de la prairie ou Les Trois grâces, d’Aristide Maillol, œuvre en dépôt faisant partie des spoliations de la Seconde guerre mondiale et donc des Musées nationaux récupération). L’ensemble, le tableau proposé, le cartel qui donne des informations qui interpellent (genre « technique mixte, personne noire, spectateur », etc.) ou qui expliquent des épisodes sombres de la colonisation, comme les têtes coupées, à la fois par la chorale dont les têtes émergent de caisses blanches, surmontées de photographies des têtes réellement coupées (le cartel explique ce qu’était « le cabinet de curiosités du Dr Fischer »), ou par la femme qui nettoient l’un des crânes, prisonnière derrière des barbelés. A chaque tableau, les performeurs tentent de capter droit dans les yeux le regard du spectateur. Avant de revenir, sonné, au monde réel, le spectateur passe par une salle ou les performeurs sont présentés, avec une photographie et leur motivation pour participer à cette expérience, puis une grande table avec des feuilles blanches et des crayons permet de laisser son impression, et surtout de ne pas repartir sans cette « transition ». Un spectacle dont personne ne ressort sans interrogations sur la nature humaine…

L’âme du Japon, quatuor Diotima au TAP

Le théâtre et auditorium de Poitiers après l'ouverture du viaduc, février 2014Après Au-Delà de DeLaVallet Bidiefono, j’ai poursuivi ma saison 2014-2015 au  théâtre et auditorium de Poitiers / TAP avec L’âme du Japon, par le quatuor Diotima.

Comme au précédent spectacle, j’ai été très gênée par l’éclairage créé par Yves Godin: j’emporterai une torche la prochaine fois pour voir mes interlocuteurs dans l’espace d’attente et surtout descendre en toute sécurité l’escalier : la profondeur des marches impossible à évaluer quand on voit mal en 3D avec l’ombre portée des contre-marches et la nôtre, inévitable avec un gros projecteur à l’arrière. Toutes les personnes un peu âgées (une part du public non négligeable) qui ont naturellement le champ visuel restreint doivent aussi être gênées.

Le spectacle: L’âme du Japon était organisé en une grande soirée à partir de 19H. En première partie d’une heure, il y avait une  démonstration d’instruments traditionnels : un instrument qui ressemble au tympanon médiéval, dans la famille des cithares posées, le koto, une grande flûte en bambou, le shakuhashi, et un vibraphone ou orgue à bouche, le shô. L’entracte de 50 minutes était suivi du quatuor Diotima avec au programme un quatuor de Debussy, substitué par un quatuor de Ravel à cause de l’absence d’un musicien de la formation, remplacé au pied levé par une musicienne qui apparemment connaissait mieux l’autre pièce, puis deux pièces contemporaines d’une quinzaine de minutes chacune du compositeur japonnais contemporain Toshio Hosokawa, accompagné de la création d’une composition florale par un maître d’Ikebana.

Mon avis: j’ai beaucoup aimé la première partie m’a beaucoup plu, avec une présentation détaillée des instruments et de leur possibilités. Le Vol des grues en particulier était de toute beauté.

Pour l’entracte, le traiteur japonais des halles de Poitiers, Moshi Moshi, avait préparé 200 plateaux repas pour 550 spectateurs. Comme il n’y avait pas eu de réservation et de pré-paiement comme ce fut le cas il y a quelques années pour je ne sais plus quel spectacle, ce fut la foire d’empoigne et certains spectateurs (un groupe de six amis derrière moi en tout cas) ont jeûné… Pour ma part, je m’étais prévu à manger (sans sel), j’ai bien fait, je crains toujours les bousculades.

Au retour, le quatuor a averti qu’il ne souhaitait pas applaudissements entre les morceaux, considérant que les 3 pièces formaient un tout. Rien à dire sur le quatuor de Ravel. Puis est revenue sur scène la musicienne avec le shô, bientôt suivie d’une maître de l’ikebana avec deux aides derrière les trois grands bacs posés sur scène avec de grandes branches. Le shô s’est arrêté mais la mise en place des plantes et fleurs s’est poursuivie pendant un long moment dans le silence (entrecoupé par des pleurs d’enfant, des toux, le bruitage de l’appareil photo d’un journaliste -il aurait quand même pu couper le son! Il fut d’ailleurs rappelé à l’ordre et a arrêté). Enfin, le quatuor, rejoint par la joueuse de shô, a entamé la première pièce de Toshio Hosokawa, une musique si répétitive et ennuyeuse que beaucoup de spectateurs se sont endormis… à commencer par ma jeune voisine que j’avais chargé de me réveiller au cas où je sombrerai dans les bras de Morphée (j’ai toujours une excuse). J’ai lutté un moment et ai poursuivi en somnolant. Les applaudissements furent court et juste polis, dommage, car je pense que la plupart des spectateurs ont beaucoup aimé les 2/3 du spectacle. En tout cas, ça en discutait le lendemain au TAP cinéma en attendant  la séance de Mommy de Xavier Dolan, et je n’ai vu pour l’instant personne de mes amis (je ne les ai pas tous revus) qui soit séduit par la fin…

Au-Delà de DeLaVallet Bidiefono au TAP

Le théâtre et auditorium de Poitiers après l'ouverture du viaduc, février 2014J’ai commencé ma saison 2014-2015 au  théâtre et auditorium de Poitiers / TAP avec Au-Delà de DeLaVallet Bidiefono.

Je voudrais d’abord parler du nouvel éclairage. Depuis la saison dernière, l’éclairage des espaces est confié à un artiste-éclairagiste. Il s’agit cette fois d’une « œuvre » (éphémère et mouvante) d’Yves Godin. Inauguré avec le lancement de saison, il m’avait gênée ce soir là, mais je me disais que c’était dû au changement, et que comme il devait être évolutif selon les différentes occupations du lieu (accueil, sortie, spectacle dans le grand escalier, etc.), je me disais « patiente, vois à l’usage ». Je dois vous avouer que la descente du grand escalier vers les salles de spectacle m’a posé de grandes difficultés. La lumière y est beaucoup trop faible, et surtout, un spot placé en haut projette dans le sens descente une ombre portée sur la moitié des marches. J’ai déjà beaucoup de mal à évaluer la profondeur des marches en général, cette fois, même en ayant pratiqué cet escalier de nombreuses fois et en me guidant sur la main courante, la descente a été périlleuse, mes « capteurs proprioceptifs« , comme dirait ma neurologue, renvoyant des indications différentes de la vue, mon cerveau est perdu et ne sait pas adapter le bon dosage musculaire pour ajuster « pile poil » l’énergie nécessaire à la pose du pied sur la marche suivante. Je retourne voir un autre spectacle samedi, si c’est pareil, il faudra que je demande, comme après mon opération mais pour d’autres raisons (il y a un an, c’était le risque de bousculade pour ma « rondelle » de crâniotomie pas consolidée), à utiliser l’accès handicapés. C’est un peu moins gênant dans le sens montée, mais le spot éclaire trop la zone au niveau des yeux et pas assez le sol! L’éclairage de l’espace devant la salle est aussi très faible, avec les places non numérotées, il faut arriver assez tôt pour avoir une bonne place, et c’est désagréable de ne pas voir les gens avec qui on discute dans cet espace avant de pouvoir entrer dans la salle.

Revenons au spectacle, Au-Delà de DeLaVallet Bidiefono et sa compagnie Baninga, originaire de Pointe-Noire à Brazzaville au Congo, dont je vous ai déjà parlé via Lumières de Pointe-Noire d’Alain Mabanckou.

La présentation du site du TAP, où vous pouvez aussi voir des vidéos de Au-delà

À Brazzaville, on a la sensation diffuse que la vie ne tient qu’à un fil. Le souvenir de la guerre civile fait encore sursauter au moindre bruit et la plus petite fièvre peut emporter l’homme le plus solide. Comme d’autres artistes congolais, DeLaVallet Bidiefono – chorégraphe et interprète dans Hamlet mis en scène par David Bobee au TAP en 2012 – se présente comme le « guerrier » d’un combat pour une vie meilleure passant par la liberté d’expression. Spectacle pour six danseurs, deux musiciens et un chanteur, Au-delà témoigne de la frontière ténue entre l’ici et l’au-delà, dans ce pays où la mort flirte avec le quotidien. La danse aux influences métissées est magnifique, frontale et mordante, comme un énergique coup de fouet contre la fatalité.

Mon avis: mon avis ne pourra être que partiel… malgré le punch des danseurs et musiciens et le niveau sonore, je me suis endormie comme chaque jour vers 21h15/21h20, même si j’avais fait une sieste avant d’aller au spectacle à 20h30… J’ai bien fait de prendre dès que cela était possible des spectacles à 19h ou 19h30! Je ne sais donc pas comment l’un des danseurs s’est retrouvé maculé de faux sang, découvert avec le salut final… Le spectacle mêle danse (sept danseurs, cinq hommes -dont deux en tenue traditionnelle- et deux femmes), musique (percussions et guitare en direct et bande enregistrée), texte écrit par Dieudonné Niangouna et chanté par Athaya Mokonzi (quelle voix…). Avec beaucoup de rythme, ils abordent les thèmes de la mort et de la violence. Dit comme ça, cela ne vous donne peut-être pas envie d’aller au spectacle, mais il est d’une grande esthétique, d’une grande maîtrise des corps et de la danse.

Ma saison 2014-2015 au TAP

Le théâtre et auditorium de Poitiers après l'ouverture du viaduc, février 2014Après une petite saison 2013-2014 au théâtre et auditorium de Poitiers / TAP (l’année dernière, au moment de la programmation, je n’avais pas encore la date de mon opération et n’avais rien pris en novembre-décembre), je me suis rattrapée cette année! La présentation de la saison était mercredi dernier, et comme d’habitude, j’ai ajouté des spectacles, notamment Exhibit B, Au-Delà et John Dowland, et ça m’a confirmé mon avis pour Modèles. J’ai aussi craqué pour Henry VI, 17h de spectacle sur deux dimanches (pauses incluses)… Voici donc en détail mes choix, pour la plupart, j’ai pu choisir des représentations à 19h30, même si pour les deux premières, je vais rentrer tard et qu’il faudra sans doute que je demande à mon voisin de siège de me réveiller au cas où (l’année dernière, j’ai même réussi l’exploit de m’endormir pendant L’empereur d’Atlantis, l’opéra écrit dans le camp de concentration de Terezin par Viktor Ullmann avec un livret de Peter Kien!

Après une saison méditerranéenne, ce sont les dragons d’Asie qui vont débouler au théâtre et auditorium de Poitiers (réservations en ligne ouvertes, sur place la semaine prochaine), bon, j’ai réservé en ligne, en agrandissant mon écran à 180% (comme d’habitude), je cherchai la bonne case pour réserver en ligne et n’ai pas vu l’avertissement sur la page d’accueil que le « pass intégral » d’Henry VI n’était pas disponible en ligne… Bon, ça s’est arrangé avec un mél au service des publics, merci à eux: le jour des réservations sur place, il y a trop de monde, je crains les bousculades, je préférai la boutique en ligne, j’ai fait très très attention avec la foule de mercredi soir. Je croise les doigts pour pouvoir tout suivre!

Voici donc mes choix:

dans la programmation asiatiqueL’âme du Japon (Quatuor Diotima, programme avec Claude Debussy, Toshio Hosokawa des musiques japonaises traditionnelles… et des sushis à l’entracte), La Métamorphose version androïde (d’après Kafka, par Oriza Hirata), hommes et robots, j’avais entendu une émission pendant ma convalescence sur leur spectacle précédent, un ciné-concert autour de Oyuki la vierge de Kenji Mizoguchi et le quatuor Francis et ses peintres, et, en fin de saison, Crazy Camel, danse butō par la compagnie Dairakudakan.

– « LE » monument de la saison, choisi sur les deux dimanches (pour 4 soirs en semaine, je pense que ce n’est pas jouable pour moi, même en février): Henry VI de Shakespeare, mis en scène par Thomas Jolly (27 ans), 21 acteurs, 200 rôles, 400 costumes avec la figuration… et 17h de spectacle (entractes compris mais annoncés « accompagnés » dans une auberge élisabéthaine)! Grand succès à Avignon cet été, il a même fait la une du Monde, le directeur du théâtre en avait parlé lors du bilan de saison (avant le succès estival).

– le spectacle de noël (toujours un grand moment), j’ai même pris les deux… Extension par le Cirque inextrémiste (trois acrobates dont un tétraplégique au volant d’une minipelle mécanique sur scène) et… une sieste acoustique de Bastien Lallemant (avec Albin de la Simone, entre autres invités), ça tombe bien, j’arrive à peine à la sauter de temps à autre, la sieste! Les doudous sont même recommandés! Spectacle allongé sur scène, et d’autres siestes, pas encore ouvertes à la réservation, sont promises en janvier et en mars. Nous avions déjà eu un spectacle de danse allongés sur la scène du théâtre,  Castor et Pollux, par Cecilia Bengolea et François Chaignaud (et l’année dernière, je n’avais pas pris les contes dans des lits superposés)

– le colloque organisé avec l’université de Poitiers, Peaux de tigre et de pouilleux, du colonisé à l’étranger, portera sur autrui, l’autre, les autres, les zoos humains, la colonisation. Un spectacle très original est annoncé au musée, Exhibit B de Bett Bailey (en 12 tableaux humains) pour réfléchir sur les zoos humains, en attendant que je vous parle de la cité de l’immigration et du palais des colonies créé pour l’exposition coloniale de 1931 (devenu musée des arts africains et océaniens puis cité de l’immigration, avec aquarium au sous-sol), je vous invite à relire mon avis sur Exhibitions, exposition qui m’avait un peu laissée perplexe dans son traitement, sujet voisin.

– musiques du monde et danse: Au-Delà, de Delavallet Bidiefono (République du Congo)

– danse:  rien, à part Crazy Camel, danse butō dans le cadre de la saison asiatique, mais j’ajouterai sans doute des propositions du festival A corps, qui sera dévoilé en février)

– théâtre: à part les 17h de Henry VI et La Métamorphose version androïde dans la saison asiatique, j’ai choisi Modèles, de Pauline Bureau, une vision apparemment originale du féminisme

– musique classique: en plus de L’âme du Japon, j’ai choisi John Dowland : Lachrimae par Thomas Dunford (luth), et Couperin, leçons de ténèbres sous la direction de Hervé Niquet (François Couperin, Marc-Antoine Charpentier et Michel-Richard Delalande au programme)

Je sèche à nouveau la danse classique (Giselle, trop vu comme le Lac des Cygnes en ex-URSS), le jazz (le ciné-concert de la saison asiatique Oyuki la vierge de Kenji Mizoguchi s’en approche) et l’électro! (euh, le bruit trop fort me gène encore énormément, pour la neurologue du centre anti-douleur, c’est dû au « traumatisme crânien » de l’opération).

Pour comparaison, vous pouvez revoir mes saisons 2013-2014, 2012-2013, 2011-2012, 2010-2011 et 2009-2010.