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Shakespeare Songs, par Isabelle Druet et Anne Le Bozec, au TAP

Et voici déjà l’avant-dernier spectacle de ma saison 2016-2017 au théâtre et auditorium de Poitiers / TAP, cette fois pour un récital d’Isabelle Druet (mezzo-soprano) et Anne Le Bozec (piano), Shakespeare Songs. Le programme avait été enregistré dans la salle en 2016 et est sorti en CD en décembre chez NoMadMusic.

Le spectacle : sur la scène de l’auditorium (loin d’être complet), le piano seul au milieu de la scène, entrent Isabelle Druet, vêtue d’une longue robe rouge, et Anne le Bozec, mèche en houppette, tailleur noir large avec revers de manches rouges. La salle n’est pas entièrement plongée dans le noir (pour lire les traductions remises avec le programme?), les artistes entrent directement dans le « vif du sujet », le programme s’organise autour de textes de ou inspirés de Shakespeare, sur une longue période chronologique, couvrant tout le 19e siècle, jusqu’au milieu du 20e siècle : Hector Berlioz, Johannes Brahms, Mario Castelnuivi-Tedesco,  Ernest Chausson, Ivor Gurney, Erich Wolfgang Korngold, Gioacchino Rossini, Camille Saint-Saëns, Franz Schubert, Robert Schumann, Jean Sibelius, Hugo Wolf.

Mon avis : , une petite présentation aurait peut-être fait la transition au début du spectacle et / ou à l’entracte, éventuellement par quelqu’un du TAP, plutôt que le petit mot  la fin juste avant le bis? La chanteuse est très expressive, avec un choix de pièces souvent courtes, parfois avec des jeux très intéressants d’allitérations comme dans le Lied des transferierten Zettel, d’après le songe d’une nuit d’été, de Hugo Wolf, où il est question de grives,  de pinsons, de roitelets, de coucous, d’alouettes et autres moineaux… très chantants! Un récital parfait…

Pour aller plus loin : écouter un extrait proposé par France-Musique… avec le morceau proposé en « bis », une pièce en anglais de Francis Poulenc.

Macbeth de Verdi, adapté par Fabrizio Cassol et Brett Bailey au TAP à Poitiers

Le théâtre et auditorium de Poitiers après l'ouverture du viaduc, février 2014Jeudi soir, je suis allée voir Macbeth de Verdi, adapté par Fabrizio Cassol et mis en scène par Brett Bailey (revoir l’année dernière Exhibit B), au théâtre et auditorium de Poitiers / TAP. Heureusement que j’avais choisi la représentation de 19h30 (comme pour beaucoup de spectacles de ma saison 2015-2016 ), à part des micro-endormissements de 20h10 à 20h20 (merci à mon voisin qui a veillé à me réveiller jusqu’à ce que le « coup de barre passe »), j’ai réussi à tout voir!

Le spectacle: sur la scène, à gauche (à jardin), dix chanteur(se)s noir(e)s [la compagnie Third World Bunfight], victimes de guerre, exilés de force ou anciens enfants soldats, comme le souligne le générique. À droite (à cour), douze musicien(ne)s blanc(he)s [le No Borders Orchestra] et le chef d’orchestre [Premil Petrovic]. Au centre, un podium surmonté d’un écran sur lequel sont projetées des textes sur les massacres constatés par les médias ou l’ONU, des photos en noir et blanc, de Marcus Bleasdale et Cedric Gerbehaye, qui en témoignent, des motifs de tissus africains, des oiseaux comme composés en pièces de tan-gram qui s’animent, etc. De chaque côté de la scène, une petite estrade individuelle sur laquelle un soliste vient de temps à autre prendre place. Et deux écrans de surtitrage en français et en anglais (le texte est en italien). Fabrizio Cassol a condensé l’opéra, passé de 2h50 environ à 1h40, et l’a transposé, avec Brett Bailey à la mise en scène, dans le Congo victime d’une guerre civile.

Mon avis : comme dans la pièce de Shakespeare adaptée par Verdi, Macbeth [Owen Metsileng] reste un général, sa femme [Nobulumko Mngxekeza] une intrigante et Banquo [Otto Maidi] ne se laisse pas faire. Les trois sorcières sont aussi bien là, habillées et masquées de blanc. La transposition au cœur de la guerre civile du Congo est très forte, surtout que les chanteurs sont aussi (et même avant-tout) des comédiens, tous bougent, changent de costumes, manipulent des décors simples (caisses gerbables, sacs de vêtements, malle, chaise en plastique, …), rien à voir avec un opéra classique statique. Le tout est souligné et mis en valeur par un très beau travail sur la lumière [Felice Ross]. Cela donne l’impression très forte d’assister à une pièce de théâtre chantée, un retour à Shakespeare plus qu’à Verdi… alors que l’opéra est pourtant bel et bien là, même s’il est coupé et adapté autour de la guerre civile et ses conséquences, la souffrance des civils, l’exil, les viols de guerre (suggéré mais bien là), les meurtres, les profiteurs à l’affût de gros bénéfices qui s’accaparent des compagnies minières néo-colonialistes. Un spectacle très fort, s’il passe près de chez vous, n’hésitez pas à aller le voir!

Pour découvrir un extrait proposé par la compagnie Third World Bunfight

MACBETH by BRETT BAILEY / Third World Bunfight par Free State Productions sur Vimeo.

Henry VI de Shakespeare mis en scène par Thomas Jolly

Cartes à publicité pour Henry VI de Shakespeare mis en scène par Thomas JollyPour cette saison 2014-2015, le théâtre et auditorium de Poitiers / TAP a choisi de donner Henry VI, l’œuvre monumentale de Shakespeare écrite entre 1588 et 1590 et mise en scène par Thomas Jolly (le « culotté » metteur en scène de 32 ans) et sa compagnie la Piccola Familia, 13h30 de spectacle, 18h30 avec les entractes, qui a triomphé à Avignon en 2014 (d’une seule traite) et dans de nombreuses salles (sous des formats variables). Une vingtaine d’acteurs pour environ 200 personnages. Ici, nous avions le choix entre 4 soirées (mmm… irréaliste pour moi) ou deux dimanches, de 14h30 à 23h environ, ce que j’ai préféré. Il fallait oser monter ce cycle de trois pièces shakespearienne d’un coup, enfin, en 4 épisodes chacun partagés en deux. Les cartes à publicité annonçaient la couleur, ça va conspirer, ça va saigner, ça va vous emporter (dans les bras de Morphée?)!

L’histoire: le règne d’Henry VI revu et corrigé par Shakespeare… de son accession au trône jeune enfant le 1er septembre 1422 -il était né le 6 décembre 1421 et avait donc à peine 1 an-, à la mort de son père Henry V en pleine guerre de Cent Ans à sa mort le 21 mai 1471, en passant par la guerre des Deux Roses.

Le spectacle: un grand praticable avec une variante d’échafaudage sert de décor principal, les lettres permettent de se repérer: Bordeaux, Londres, etc., tous les lieux sont précisés. Pour le reste, des manchons en toile permettent de simuler les colonnes du palais royal par exemple, des chaises « à tout faire » (chevaux, bûcher de Jeanne d’Arc) meublent aussi la première partie. Pour éviter que le public ne se perde dans les méandres de cette histoire complexe, une rhapsode (narratrice à l’Antique) a été ajouté à la pièce originale et permet régulièrement de se situer… l’actrice, Manon Thorel, eut droit à plusieurs ovations! Quelques petits bémols, en cette période de grippe, Thomas Germaine (Henri VI adulte) a fini à chaque fois avec la voix cassée, peut-être aussi parce qu’il poussait trop la voix. Le metteur en scène a en effet choisi de faire crier beaucoup de personnages… ce qui rend parfois incompréhensibles les tirades de Geoffrey Carey (principalement dans les rôles de Humphrey de Gloucester puis de Alexander Iden) avec son accent british. Sinon, j’ai beaucoup aimé ce mélange entre tradition et parties résolument modernes, la tenue de Jeanne d’Arc est… « d’enfer » (avant qu’elle n’aille le rejoindre), mais chut, laissons la surprise à ceux qui verraient la pièce ultérieurement. Comme promis, « ça a saigné », et même beaucoup, sur fond de musique calme ou carrément électro-rock, de lumière tamisée ou de faisceaux lasers… Ces changements de rythmes et d’ambiances sont bienvenus pour maintenir l’attention! Quelques petites piques ajoutées ici et là aussi, par exemple, de passage à Poitiers, ça, c’est dans la pièce, il est question de … farci poitevin, succès garanti et ceux qui commençaient à perdre pied sont vite revenus dans la pièce. Un grand moment de théâtre, n’hésitez pas à embarquer dans l’aventure si elle se profile près de chez vous!

Les entractes: contrairement à la pagaille qui avait régné pour l’entracte de L’âme du Japon, cette fois, tout était très bien organisé. En bas du grand escalier, une taverne attendait ceux qui n’avaient pas eu envie de réserver un repas ou qui avaient apporté leurs provisions et juste envie d’un cake et de bière anglaise… Pour les autres, nous avions la possibilité de réserver et pré-payer des repas à des prix très raisonnables (avec ou sans dessert, variante viande ou végétarienne, boisson comprise, par Thierry Nardo -désormais sous les halles- et Gargamel-le-Catering -rue des Trois-Rois, deux restaurateurs poitevins). Files bien organisées et grandes tablées en bois sous de jolis lustres (en récupération… couverts rouillés à la place des pampilles) et de grandes tapisseries… projetées sur les murs des foyers côté théâtre comme côté auditorium. Organisation impeccable 😉 , jusqu’à se caler sur… l’heure anglaise (18h30 le premier dimanche, 18h le deuxième)!

Badge j'ai vu Henry VI en entierBon, je l’avoue, je n’ai pas vu la fin les deux soirs, les amis avec qui j’étais ont renoncé à me réveiller toutes les 5 minutes après 21h30… mais cela n’a rien à voir avec la qualité de la pièce, juste avec le reste de fatigue de mes méningiomes. En revanche, l’endormissement le premier dimanche après le premier entracte est dû à un passage moins rythmé et plus long du coup, d’autres spectateurs ont aussi piqué du nez. J’ai quand même eu droit au badge « J’ai vu Henry VI en entier ».

Roméo et Juliette par David Bobee

Le parvis du théâtre auditorium de PoitiersJ’ai terminé ma saison 2012-2013 au théâtre et auditorium de Poitiers / TAP mardi dernier (14 mai 2013) avec Roméo et Juliette de Shakespeare mis en scène par David Bobee et son collectif Rictus, sur une nouvelle traduction de Pascal et Antoine Collin.

D’abord, un grand bravo à l’équipe du théâtre et auditorium de Poitiers / TAP qui a réussi, en deux ans, à passer d’un retard minimal de 20 minutes à chaque spectacle (quand ça n’a pas été de presque une heure pour Stéphane Guillon), à des spectacles qui commencent à l’heure! L’année dernière, ils avaient déjà programmé une mise en scène de Shakespeare par David Bobee, mais je n’avais pas eu envie de voir Hamlet avec un thanatopracteur dans un coin de la scène pendant le premier acte… Cette année, le TAP a choisi de programmer son Roméo et Juliette, suivi cette semaine (22 et 23 mai) par un autre mis en scène par Yves Beaunesne avec la Comédie Poitou-Charentes et transposé entre wallons (les Montaigu) et flamands (les Capulet)… Je n’ai pas pris cette deuxième version.

Le spectacle : sur une scène très sobre, quelques gros blocs parallélépipédiques. Est-il nécessaire de rappeler l’histoire? A Vérone, au 16e siècle. Deux familles, les Capulet (avec Juliette / Sara Llorca) et les Montaigu (avec Roméo / Mehdi Dehbi), s’affrontent et se chamaillent en permanence, sous l’arbitrage du Prince.

Mon avis : presque trois heures de spectacle, sans entracte, menées à un train d’enfer par la troupe cosmopolite de David Bobee, entrecoupées de chants en arabe, d’acrobaties, de hip-hop, sur un texte modernisé (parfois osé…), vous pouvez les apercevoir sur la page officielle de la troupe. Cette tragédie a soulevé de nombreux rires dans la salle (la nourrice / Véronique Stas est irrésistible), avec des passages très légers, d’autres plus graves (et oui, Tybalt /Pierre Cartonnet meurt quand même, ainsi que Mercutio / Pierre Bolo, Roméo et Juliette). Un grand spectacle, il n’est pas si fréquent de voir une troupe de spectacles avec des acteurs venus de divers horizons, qui jouent avec leurs accents, leurs talents d’acrobates ou de danseurs, au service d’un texte qui, s’il est donné dans une nouvelle traduction, reste globalement fidèle à l’original. Si vous avez l’occasion de voir cette adaptation, n’hésitez pas, foncez!

 

La tempête à la halle aux grains à Toulouse

Pendant mon dernier séjour à Toulouse, mes amis m’ont invitée à un spectacle à La Halle aux Grains. Après avoir été un marché aux céréales à partir de 1864 puis un palais des sports en 1952, cette salle a été aménagée en salle de concert en 1974.

Le spectacle:

La Tempête de Shakespeare a été adaptée par le chorégraphe argentin Mauricio Wainrot, sur une musique du compositeur américain Philip Glass. Ce ballet a été créé au mois d’octobre 2006 par le Ballet contemporain du Théâtre Saint-Martin de Buenos Aires et est repris par le ballet du Capitole dirigé par Nanette Glushak.

Prospéro, duc de Milan, se consacre plus à la lecture, aux sciences et à aux arts, à sa famille qu’à la gestion de son duché, qu’il délègue à son frère… qui finit par le chasser du pouvoir et l’exiler sur une île déserte avec sa fille Miranda. Mais Prospéro avait acquis des pouvoirs magiques, il réussit à déclencher une violente tempête et à faire échouer sur l’île ceux qui l’avaient banni, son frère Antonio, le roi de Naples et son fils Ferdinand. Il leur fait subir toute une série d’épreuves… Avec l’aide d’Ariel, l’esprit des airs, il combat la sorcière Sycorax puis son fils, Caliban.

La distribution

Musique (enregistrée) : Philip Glass
Chorégraphie : Mauricio Wainrot
Décors, costumes et installation vidéo : Carlos Gallardo
Lumières : Patrick Méeüs

Prospéro – Valerio Mangianti
Miranda – Maria Gutierrez
Susanna – Ina Lesnakowski
Caliban – Kazbek Akhmedyarov
Alonso – Vladimir Bannikov
Ferdinand – Demian Vargas
Antonio – Dmitri Leshchinskiy
L’épouse d’Antonio – Paola Pagano
Ariel – Juliette Thélin, Davit Galstyan, Hugo Mbeng, Takafumi Watanabe
Sycocax – Pascale Saurel
Trinculo – Jérémy Leydier
Stéphano – Guillaume Ferran
Le ballet du Capitole de Toulouse

Mon avis : Mauricio Wainrot a adapté La Tempête de Shakespeare de cinq actes en deux actes, dans un décor sobre, des sortes de grandes souffleries au fond (j’aurais dit des cheminées de paquebot, d’autres on parlé de souffleries d’usine), quelques projections vidéo complètent le décor.

Une heure et demie sans entracte, c’est un peu rude dans une salle où l’on n’est pas très bien installé, même si le spectacle est superbe. Valerio Mangianti joue un Propéro fascinant, c’est une bonne idée d’avoir démultiplié Ariel avec quatre danseurs (pas facile à comprendre cependant de prime abord… le costume et le programme avec les quatre noms aident à faire le lien…), certains passages frôlent la danse classique plus que le ballet contemporain, j’ai beaucoup aimé, même s’il vaut mieux connaître l’histoire écrite par Shakespeare pour bien comprendre ce qui se passe sur scène.