Archives par étiquette : sculpture

Le monument aux morts de 1914-1918 à Nantes

Le monument aux morts de 1914-1918 à Nantes, vue actuelle (2012)

Le monument aux morts de Nantes a aujourd’hui un curieux aspect, celui d’un grand mur nu avec la liste des soldats morts à la guerre (5832 d’après le site de la ville de Nantes), situé au bout des cours Saint-Pierre et Saint-André, aujourd’hui square du Maquis-de-Saffré, à l’opposé du monument de la guerre de 1870. Il a été inauguré le 17 juillet 1927.

Le monument aux morts de 1914-1918 à Nantes, carte postale prise en 1927 ou 1928 La mise en scène était différente à l’origine, comme on peut le voir sur cette carte postale ancienne. En mai 1927, la ville de Nantes avait acheté un tirage de la Délivrance de Émile [Oscar] Guillaume (1867-1942), réalisée après la première bataille de la Marne et éditée par la fonderie Barbedienne. Plusieurs villes (Amiens, Bruxelles, Colmar, Liège, Lille, Metz, Reims, Mézières, Saint-Quentin, Strasbourg et Verdun) l’avaient commandée dès 1919, d’après le catalogue du fondeur.

Le monument aux morts de 1914-1918 à Nantes, carte postale ancienne Son histoire à Nantes est compliquée et rapportée en partie sur le site des archives municipales… Jugée impudique, elle est victime d’un attentat dans la nuit du 10 au 11 novembre 1927, 17 membres de la ligue des Jeunesses patriotes sont arrêtés et condamnés, la statue récupérée et remise en place, mais déplacée finalement en 1931. En 1937, le maire de l’époque, Léopold Cassegrain, la fait remettre à sa place d’origine. Elle est retirée en 1942 pour échapper aux fontes allemandes (c’est curieux, parce que l’envoi à la fonte épargnait les monuments aux morts). Elle est alors stockée, perd ses bras dans des conditions mal éclaircies.

Nantes, la délivrance déplacée du monument aux morts de 1914-1918, 1, de loin Elle est finalement restaurée en 1980, les bras sont restitués par le sculpteur Douillard et les fondeurs Douet, Heuz, Bertrand et Flasquin. En 1987, elle est installée sur l’extrémité est de l’Île de Nantes, à l’angle sud-est de l’hôtel de Région. Vous pouvez la voir également sur cet article de Mamazerty.

Nantes, la délivrance déplacée du monument aux morts de 1914-1918, 2, quatre vues Elle est sur un socle beaucoup plus haut qu’à l’origine, mais j’ai quand même pu en prendre quelques vues… Elle est certes nue, mais je ne vois pas en quoi elle a pu déchaîner un tel rejet dans les années 1920…

Nantes, la délivrance déplacée du monument aux morts de 1914-1918, 3, inscriptions Sur le socle est portée une inscription impossible à lire vue la position actuelle du socle…

Il manque sur place un petit panneau ou une plaque pour expliquer aux gens l’origine de cette statue…

En 2008, la ville de Nantes en a acheté une autre copie qui avait appartenu à Aristide Briand et se trouve désormais au château de Nantes.

Pour mémoire : revoir la victoire plantureuse en haut-relief de Camille Raynaud sur le monument aux morts de 1914-1918 à Toulouse, qui avait aussi fait scandale…

Photographies de juin 2012 pour le monument aux morts et octobre 2012 pour la statue déplacée.

Le monument aux morts de Parthenay (Deux-Sèvres)

Parthenay, le monument aux morts de 1914-1918, 1, vue de loin Je vous ai déjà montré le monument aux instituteurs morts pour la France, au Marchioux à Parthenay. Ce monument ne concernait que les instituteurs élèves de l’école normale. Je vous emmène cette fois dans le jardin public avenue du Général-de-Gaulle (entre la gare et le centre-ville).

Parthenay, le monument aux morts de 1914-1918, 3, vu de face et de dos Dédié « Aux morts pour la Patrie », il se compose d’un socle en pierre surmonté d’un obélisque massif sur lequel est apposée une plaque en bronze avec un soldat dans un médaillon, auquel une fillette vient apporter un bouquet de fleurs. Il a été inauguré le 26 novembre 1922.

Parthenay, le monument aux morts de 1914-1918, 2, la signature du sculpteur Elie Ottavy

Il porte la signature du sculpteur [Antoine] Élie Ottavy (Lyon, 1887 – Paris, 1951), auteur de monuments aux morts dans toute la France (voir dans l’Aude, de l’un des monuments de Cambrai, etc.), qui avait proposé en 1923 de compléter le monument avec des plaques en bronze, mais ce projet, trop cher, a été rejeté par la commune. L’architecte du monument est E. Bidet (voir un dessin du projet en figure 1 et une description du projet rejeté p. 97 de l’article de Michel Bernier, en référence en bas de cette page).

Parthenay, le monument aux morts de 1914-1918, 4, la fillette de face et de dos

La fillette est représentée debout, à peu près grandeur nature, un pied légèrement en avant, elle vient se recueillir sur le médaillon représentant son père mort à la guerre. Elle est vêtue d’une robe à manches courtes dont les deux jupons ne descendent pas plus bas que les genoux, serrée à la taille par une cordelette nouée dans le dos. Elle est coiffée d’une longue tresse retenue par un nœud.

Parthenay, le monument aux morts de 1914-1918, 5, bouquet de fleurs et souliers de la fillette

Elle tient un bouquet de marguerites et de roses au creux de son bras gauche et porte des souliers plats.

Parthenay, le monument aux morts de 1914-1918, 6, détail du médaillon avec le soldat

De sa main droite elle dépose une fleur sur le médaillon où est figuré le portrait de profil de son défunt père, coiffé du casque de Poilu. Le médaillon est encadré de palmes et de branches de chêne, surmontées de rameaux de chêne (symboles de la force) et de laurier (symboles de la victoire) entre lesquels prennent place de matériel du soldat (grenade, ceinturon, gourde, pochette-cartouchière en cuir, fourragères, couteau).

Ces photographies datent de février 2012.

Pour aller plus loin : voir l’article de Michel Bernier, Les monuments commémoratifs de la Première Guerre mondiale en Gâtine, Bulletin de la société historique de Parthenay et du Pays de Gâtine, n° 3, 2007, p. 91-106.

Le monument aux morts de 1914-1918 à Cahors

Cahors, monument aux morts de 1914-1918, 1, vue de face

Pour cette semaine qui se terminera le 11 novembre, j’ai choisi de vous présenter chaque jour un monument aux morts de 1914-1918 dont j’ai fait les photographies ces trois dernières années… Ne vous étonnez donc pas de voir cette semaine trois articles par jour, pour les lectures (cet après-midi et mercredi), je suis restée dans le thème des deux dernières guerres mondiales…

Le monument aux morts de Cahors a été inauguré tardivement, le 10 novembre 1935. Il a été conçu par l’architecte Maurice Barthet (1887-1958) à partir d’un groupe sculpté de François Sicard (1862-1934), sculpteur dont je vous ai parlé pour les atlantes de l’hôtel de ville de Tours et pour le buste du poète Racan.

Ce groupe se compose de deux statues debout, représentant le soldat de retour de la guerre et sa femme qui l’a attendu. À l’origine, il s’agit d’une commande de l’État de plâtres à différents artistes pour le défilé de la victoire en 1918 à Paris sur les Champs-Élysées. Le soldat fut ensuite présenté au salon des artistes français de 1927, sous le numéro 3562. Acheté par l’État, ce Retour du soldat n’a pas été affecté à une commune et ne l’est finalement qu’en décembre 1934, juste après la mort de l’artiste, à la ville de Cahors. Le modèle en plâtre du groupe complet est conservé au musée des beaux-arts de Tours. Les deux statues du groupe sculpté encadrent une large stèle portant la liste des soldats morts, surmontée de l’inscription « Aux enfants de Cahors / morts pour la France / 1914 / 1918 ». Les noms des morts des autres conflits ont été ajoutés postérieurement, ceux de 1939-1945 sont peu lisibles, masqués par les statues.

Cahors, monument aux morts de 1914-1918, 2, dédicace Au dos se trouve la dédicace :  » Ce monument a été érigé / par souscription publique / monsieur Jacquier / étant préfet / monsieur A. de Monzie / député du Lot / président du conseil général / étant maire de Cahors / MCMXXXV « .

Cahors, monument aux morts de 1914-1918, 3, signatures

La signature mentionne : « F. Sicard statuaire / membre de l’institut / M. Barthet architecte SADG / E. Mompart sculpteur / G. Soupiré entrepreneur « . La sculpture ornementale du monument a été réalisée par Émile Mompart, qui signa plusieurs monuments aux morts dans le Lot.

Cahors, monument aux morts de 1914-1918, 4, le soldat, la mère et le bébé

La stèle sépare les deux éléments du groupe sculptés, comme deux étrangers qui se ré-apprivoisent peu à peu, à gauche le soldat, en face, sa femme portant leur bébé.

Cahors, monument aux morts de 1914-1918, 7, vue de côté On voit peut-être mieux ainsi la distance qui les séparent.

Cahors, monument aux morts de 1914-1918, 5, deux vues du soldat Le soldat porte sa tenue réglementaire, avec le casque de Poilu, mis en service en 1915.

Cahors, monument aux morts de 1914-1918, 6, deux vues de la mère et du bébé

Voici un détail de la mère, aux traits raides, vêtue d’une longue robe recouverte d’une cape, tenant au creux de son bras gauche leur enfant endormi.

Cahors, monument aux morts de 1914-1918, 8, vue de dos Le dos est massif, dominé par l’inscription patriotique « Pro Patria » (à la patrie).

Retour à Nantes après le voyage à Nantes…

Nantes, nuages et soleils sur le bâtiment Harmonie J’ai passé le week-end dernier à Nantes. Cela a été l’occasion pour moi de compléter mon Voyage à Nantes… réalisé lors un week-end pluvieux de début juillet, et aussi de revoir Mamazerty dimanche pour une promenade bien plus agréable, et même une pause au soleil dans un transat. J’avais vraiment eu la flemme de ressortir à 23h à l’époque sous la pluie battante pour voir l’installation lumineuse de François Morellet sur le bâtiment de la mutuelle Harmonie atlantique au centre de l’île de Nantes. Le bâtiment, construit dans les années 1960, vient d’être rénové par CANAL Atelier d’architecture (Daniel et Patrick RUBIN). Cette œuvre a aussi beaucoup fait parler dans la presse locale et spécialisée en art contemporain… elle indique la météo et le temps qu’il est censé faire dans 4 heures (seulement la nuit…) en allumant soit des nuages (arcs blancs), le soleil (cercle rouge) ou la pluie (tirets bleus)… Le week-end dernier, j’ai pu voir les nuages et le soleil… pas la pluie! Enfin, en vrai, si, un tout petit peu le samedi matin, mais pas sur l’immeuble .

Nantes, cerf et biche du jardin des plantes, quatre vues après démontage de l'oeuvre contemporaine

J’ai aussi pu repasser au jardin des plantes jardin des plantes et voir le Cerf (sans sa biche et son faon) de Georges Gardet sans l’œuvre d’art contemporain, Incident dans la prairie, de Johnny Gaitée (j’ai complété aussi dans l’article d’origine).

Retour sur Estuaire 2012 et mon voyage à Nantes :

.

La statue de Henri IV de l’hôtel de ville de La Rochelle

Hôtel de ville de La Rochelle, statue de Henri IV, 1, position Lors de ma dernière visite à la Rochelle en juin 2011, la restauration de l’hôtel de ville n’était pas achevée, mais la statue de Henri-IV flamboyait de toutes ses couleurs retrouvées. Il s’agit d’une statue en céramique polychrome, porcelaine ou grès (d’après le dossier documentaire) exécutée par le céramiste Théodore Deck (Guebwiller, 1823 – Paris, 1891, directeur de la Manufacture de Sèvres de 1887 à 1891) d’après le plâtre original de [Jean] Jules Salmson (Paris, 1823 – Coupvray, 1902) présenté en 1876 sous le n° 3598 au salon des artistes français, à découvrir au centre de cette photographie. Un autre exemplaire avait été attribué dès1876 au Musée de Nérac (Lot-et-Garonne). Il s’agissait de remplacer la statue du 17e siècle détruite lors de la Révolution. Cette statue se trouve dans la cour de l’hôtel de ville (au bout de la flèche jaune sur la photographie ci-dessus).

Hôtel de ville de La Rochelle, statue de Henri IV, 2, vue dans le clocheton

On le voit mieux ici dans le campanile à gauche de la façade sur cour.

Hôtel de ville de La Rochelle, statue de Henri IV, 3, vues de face et de profil

Henri IV se tient fièrement debout, jambe gauche légèrement en avant, main droite à la taille, tenant son gant dans l’autre main… Roi de Navarre, il a habité la ville, roi de France, il s’en est souvent dit l’ami… Il faut dire qu’en 1590, il a autorisé La Rochelle, ville où le culte protestant était autorisé (ainsi qu’à Montauban et Nîmes) par la paix de Boulogne de 1573 (après le premier siège de La Rochelle la même année), à ériger une nouvelle enceinte qui aura toute son importance lors du siège de la ville en 1627-1628 (voir le document pédagogique publié par la ville de la Rochelle et l’article sur Jean Guiton).

Photographies de juin 2011.

Pour en savoir plus : Hôtels de ville de Poitou-Charentes, de Charlotte Pon-Willemsen et Geneviève Renaud-Romieux, Collection Itinéraires du patrimoine, n° 208, édition et diffusion C.P.P.P.C. (Connaissance et Promotion du Patrimoine en Poitou-Charentes), 1999, ISBN : 2-905764-19-8.

Château d’eau et monument aux morts à Châtellerault

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 02, vue générale En visitant l’autre jour l’intérieur du château d’eau de Blossac, à Poitiers, je me suis souvenue que je ne vous ai jamais montré un château d’eau de la même conception, de grandes cuves à même le sol, sur un point plutôt haut de la ville, à Châtellerault, dans le jardin public square Gambetta, près de l’avenue Schumann, sur l’allée du Souvenir-Français. Il faut dans un premier temps que vous fassiez abstraction de la colonne avec sa statue au sommet et de la statue située un peu en avant…

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 03, inauguration du château d'eau Le château d’eau a été construit un peu avant celui de Poitiers, ainsi qu’en atteste l’inscription au milieu du grand mur de façade :  » En l’année 1868 sous le règne de Napoléon III empereur des Français / Alexandre Rivière, chevalier de la légion d’honneur et maire de Châtellerault / a fait installer en vertu des délibérations du conseil municipal / cette distribution d’eau dont les travaux ont été réalisés par MMrs Coudère, Prévignault, Sichère et Bollée / sous la direction de M. Carmejeanne, architecte de la ville « .

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 04, château d'eau Voici quatre vues de la partie « château d’eau » de cet ensemble, avec au sommet un périmètre de protection sur lequel sont installées des ruches.

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 01, carte postale ancienne Au sommet de ce monument a été ajouté en 1890 une grande colonne encadrée de deux lions en bronze et surmontée d’une Liberté de Gustave Michel, œuvre de série fondue par Louis Gasne et dont on trouve, à Jonzac, une version dans une mise en scène très différente (1894, voir ici le monument du centenaire de la Révolution à Jonzac).

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 06, la Révolution

Il s’agit d’un monument érigé pour le centenaire de la fête de la fédération qui, le 14 juillet 1790, a célébré le premier anniversaire de la chute de la Bastille. Une fête pleine d’enthousiasme de la Révolution… juste avant le déchaînement de la Terreur. La colonne porte en son centre l’inscription « A la gloire de la Révolution française », surmontée des armoiries de la ville de Châtellerault. Tout autour de la colonne sont inscrites des dates et des devises (certaines illisibles, puisqu’il est impossible de faire le tour à l’arrière de la statue, en raison du périmètre de protection du château d’eau), mais on peut au moins lire « Égalité / 5 mai/ 14 juin/ 20 juin/ 4 août », dates qui correspondent aux événements suivants:

5 mai 1789 : ouverture de la réunion des États-Généraux au château de Versailles

14 juin 1789 : l’abbé Grégoire quitte les bancs du clergé et va rejoindre le Tiers État

20 juin 1789 : serment du jeu de paume par les députés de l’Assemblée nationale

4 août 1789 : abolition des privilèges.

Sur le socle en dessous de la colonne sont portés les noms de grands révolutionnaires, là encore, impossible de faire le tour, mais je pense avoir réussi à tous les reconstituer :  » La Fayette/ Desmoulins / Brissot / Sieyes/ Pétion/ Grégoire/ Danton/ Bailly / Mirabeau / Condorcet « . Vous pouvez en découvrir les exploits très résumés par exemple ici. Tiens, cela me rappelle ma première « colle » d’histoire moderne et contemporaine de classe préparatoire à l’école des Chartes, deux semaines pour tout savoir sur les années 1789-1791!

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 07, la Révolution, 4 vues La Liberté est coiffée d’un bonnet phrygien recouvert par une couronne végétale. Vêtue à l’antique, elle porte une épée courte dans un baudrier (qui au passage lui met en valeur les seins…), elle tient au sol de la main droite les tables de la Loi (la Constitution) et de la gauche un flambeau, soit une position inversée par rapport à la statue de la Liberté (la Liberté éclairant le monde) de Frédéric Bartholdi. Comme cette dernière, elle foule des pieds des chaînes brisées. Au dos de la colonne se trouve la dédicace, qu’il n’est pas possible de lire en entier sans entrer sur le château d’eau, j’ai seulement pu lire, entre les branches du cèdre : « République française / Ce monument a été érigé en l’an 1890 / Carnot président de la République/ M. Cleiftie préfet / M. Denoël sous-préfet/ Duvau maire/ et J.C. Duh… adjoints/ la statue … / et … « . Pour un récit de cette inauguration et les discours, voir Le Mémorial du Poitou, 40e année, n° 58, samedi 19 juillet 1890, qui donne même les paroles (de Camille Dehogues père) et la musique (de Camille Dehogues fils) d’une « Cantate dédiée à Monsieur le maire de Châtellerault à l’occasion de l’inauguration du monument commémoratif de la Révolution française […] exécutée par l’orphéon et l’harmonie de Châtellerault […] à la suite de deux répétitions seulement »!
Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 08, lion

Les lions (oui, Grégory préfère dire des tigres, mais la commande et la description de l’inauguration parlent de « lions millésimés 1789 et 1889 ») assis gardent bien le monument…

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 05, de profil Mais quand on arrive aujourd’hui devant le monument, il y a encore un troisième élément remarquable, le monument aux morts de 1914-1918 érigé en 1926…

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 09, monument 1914-1918 Il s’agit d’un soldat vêtu à l’antique portant dans sa main droite une petite Victoire.

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 10, signature Aimé Octobre

Il porte la signature « Octobre Aimé 1926 ». Je vous ai déjà parlé de Aimé Octobre, grand prix de Rome en 1893, pour la grande poste (1913) et le monument aux morts (1925) de Poitiers ainsi que pour le monument aux morts d’Angles-sur-l’Anglin (1926), sa commune natale, dont la Victoire est un modèle agrandi de la petite victoire portée par le soldat de Châtellerault. Il avait déjà réalisé en 1903 le monument aux morts de 1870 de l’arrondissement de Châtellerault, situé à quelques centaines de mètres (je vous le montrerai très bientôt).

Un modèle en plâtre du monument de 1914-1918 a été présenté au Salon de 1926 sous le n° 3588 et un tirage en bronze exposée au Salon de 1927 sous le n° 3435. Un élément de plâtre pour ce modèle, daté 1926, a été donné par son fils Daniel Octobre en 1944 au musée Sainte-Croix de Poitiers où il est conservé.

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 11, marque de Rudier

Il porte au dos la marque du fondeur « Alexis Rudier / fondeur Paris », également une « vieille connaissance » de mes fidèles lecteurs… (voir les monuments aux morts de La Rochelle et Angers, Héraklès archer à Toulouse, la statue du maréchal Joffre à Paris).

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 12, dédicace Sur le socle en pierre, sous la statue en bronze se trouve une très touchante dédicace :

 » Ce monument a été consacré / par la / ville de Châtellerault / à l’impérissable souvenir / du dévouement sublime de ses enfants / héroïques serviteurs de la Patrie / pendant la grande tourmente « . Il a été inauguré le 14 juillet 1927.

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 13, soldat

Voici deux vues du groupe sculpté en bronze… Vous trouvez que la Victoire a une drôle d’allure? Et oui, elle a été victime de vandalisme, vous le verrez mieux sur une autre vue. Elle était intacte en 2008, voir dans ce dossier documentaire.

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 14, tête du soldat Le soldat a un visage inexpressif, comme beaucoup de statues d’empereurs romains, il est coiffé à l’antique…

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 15, soldat de face et de dos

Il est drapé dans une toge qui lui laisse les jambes et l’épaule droite nues. Il tient dans la main gauche une épée et des feuilles de chêne.

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 16, la Victoire aux ailes cassées

La Victoire est une stricte réplique miniature de celle du monument aux morts d’Angles-sur-l’Anglin, vêtue d’une longue robe, nu-tête, coiffée d’un chignon. De dos, on voit bien la fracture de son aile gauche… La ville de Châtellerault va-t-elle la faire restaurer correctement???

Photographies prises en août 2012.

Pour aller plus loin : voir Les allégories de la République sur les monuments aux morts en Poitou-Charentes, de Charlotte Pon-Willemsen, édité dans la collection des Parcours du patrimoine chez Geste édition, 2008 (ISBN 978-2-84561-483-3) .

Et cet article paru depuis : Grégory Vouhé paru dans l’Actualité Poitou-Charentes n° 106 (automne 2014) : De la femme éplorée à la Victoire, p. 24.

Le monument aux mobiles du Lot, à Cahors

Cahors, monument aux mobiles du Lot (morts de 1870), 1, deux vues générales Je vous ai déjà montré un certain nombre de monuments aux morts de 1870, en général dits monuments aux [troupes] mobiles, vous pouvez revoir ceux de Tours, Poitiers, Angoulême, La Rochelle et Niort. Cette fois, je vous emmène voir le monument aux mobiles du Lot, à Cahors, en ville haute, non loin du rempart, place Lafayette. Les photographies sont de mars 2011. Vous pouvez en lire le dossier documentaire ici, et notamment l’illustration du projet soumis en 1876. Il se compose d’un très haut socle cubique, avec à l’avant un soldat allongé, surmonté d’un autre cube moins large, avec un soldat sur chaque face, et une sorte de colonne octogonale terminée en couronne crénelée.

A l’avant du socle du soldat allongé, sur une plaque rapportée, on peut lire :  » A la mémoire / des Mobiles et des soldats du Lot / morts pour la défense nationale / 1870-1871 « . Sur les faces sud et nord du du socle inférieur,  » Armée du Rhin / Défense nationale / Armée de Paris  » et  » Armée du Nord / 1re et 2me armées de la Loire / Armée de l’Est « .

Cahors, monument aux mobiles du Lot (morts de 1870), 2, signature C.A. Calmon 1879 La sculpture a été réalisée par Cyprien Antoine Calmon (Creysse, 1837 – Cahors, 1901), dont la signature ( » C. A. Calmon, 1879 « ) se trouve sur le côté du commandant allongé. Le monument par lui-même a été dessiné par Coëque-Verdier, architecte, élève d’Abadie de l’arrondissement, et Ficat, exécuté par l’entrepreneur Deltheil. Le monument a été inauguré le 27 mai 1881 par Léon Gambetta.

Cahors, monument aux mobiles du Lot (morts de 1870), 3, deux vues du gisant En avant du monument est sculpté en marbre blanc (euh, s’il était propre…) un soldat allongé, identifiable grâce à l’inscription sur la terrasse à l’avant,  » Le commandant des Mobiles du Lot mort à Origny le 10 décembre 1870 « , soit Ferdinand Foulhiade (1828-1870)… Chauve, mais avec une belle moustache… il ne semble pas trop souffrir, pourtant, il est tombé au sol, allongé en appui sur son coude gauche, mortellement blessé, et continuant à encourager ses soldats.

Cahors, monument aux mobiles du Lot (morts de 1870), carte postale ancienne L’épée qu’il brandissait de la main droite a disparu, mais on peut la voir sur cette carte postale ancienne.

Cahors, monument aux mobiles du Lot (morts de 1870), 4, les quatre soldats debout

Sur chaque face se trouve un soldat dont la provenance géographique peut être déterminée par le blason de la ville qui le surmonte, soit ici de gauche à droite Figeac, Martel, Gourdon et Cahors. Ils portent des armes différentes et représentent les différents corps d’armée (là, je ne suis pas douée pour vérifier les identifications proposées avec précautions dans le dossier documentaire, qui propose dans l’ordre un fantassin, un artilleur, un cavalier et un mobile, je n’ai pas chez moi de livre sur les uniformes et armements de la fin du 19e siècle). Ce dossier précise que le monument est construit en pierre de Poitiers… une pierre que je ne connais pas pour être apte à la sculpture, car elle est pleine de blocs de silex, il s’agit plus vraisemblablement de pierre de Chauvigny, réputée pour ses qualités et largement exportée dans toute la France. Le reste du monument serait, selon le même dossier, construit en pierre de Chancelade (petite commune à l’entrée nord de Périgueux en Dordogne, surtout connu pour ses restes humains préhistoriques…).

 

Vierge à l’Enfant à Poitiers et à Parthenay

Poitiers, église Sainte-Radegonde, Vierge de la Rédemption

Une fois n’est pas coutume, je vous présente deux œuvres du milieu du 19e siècle qui représentent le même thème, l’une se trouve dans l’église Sainte-Radegonde de Poitiers, l’autre sur la façade de l’église Saint-Laurent à Parthenay. Bon, si vous préférez revoir une magnifique statue du milieu du 17e siècle dans l’église Sainte-Radegonde de Poitiers, vous pouvez retourner lire l’article sur statue d’Anne d’Autriche en sainte Radegonde, auquel Grégory Vouhé vient de consacrer un article dans le dernier numéro de l’Actualité Poitou-Charentes (Grégory Vouhé, Nicolas Legendre, Anne d’Autriche et Radegonde, L’actualité Poitou-Charentes, n° 98, octobre-décembre 2012, p. 36). Revenons à notre Vierge du jour… A Sainte-Radegonde, il s’agit d’une œuvre de série en plâtre, comme on en trouve dans de nombreuses églises. Elle a été tirée d’après un moulage approximatif d’une belle Vierge à l’Enfant en marbre du 12e siècle donnée par la famille royale à l’église Saint-Laud d’Angers. Cette Vierge, très endommagée, avait fait l’objet d’une restauration approximative, mais son modèle en plâtre a connu, dès sa parution vers 1850, un certain succès… La Vierge tient dans ses bras l’Enfant Jésus et foule au pied une femme nue croquant une pomme, l’artiste (de l’original) jouant sur EVA (Ève) / AVE (Maria), le culte de Marie la nouvelle Eve, rédemptrice des péchés, se développe justement à la fin du 12e siècle. Un autre exemplaire de ce plâtre se trouve dans l’église de Civaux, une variante avec l’Enfant qui joue avec un oiseau dans l’église de Lhommaizé, toutes deux dans la Vienne.

Vierge de la rédemption à Saint-Laurent de Parthenay C’est probablement de l’un de ces moulages que s’est inspiré le sculpteur de Parthenay. L’église Saint-Laurent y a été profondément modifiée à partir de 1852 par l’architecte Segrétain (dont je vous ai parlé pour la préfecture des Deux-Sèvres à Niort). La statue a été commandée en 1861 à M. Bonneau, sculpteur de Châtellerault, qui l’a réalisée en pierre de Chauvigny.

Pour aller plus loin : voir sur le site du diocèse de Poitiers La statue de la façade du collatéral nord de l’église Saint-Laurent de Parthenay

Anne d'Autriche en Radegonde (Poitiers, église Sainte-Radegonde) avec des rubans sur son sceptre Allez, je vous montre quand même la jolie Radegonde / Anne d’Autriche de Legendre… photographies prises cette semaine, le 10 octobre 2012. Qui a mis ces rubans de satin et quels vœux ont alors été prononcés? Clic sur l’image pour voir l’article…

Adrien Dubouché par Raoul Verlet à Limoges

Le monument à Adrien Dubouché à Limoges, 2, signature Raoul Verlet, 1898 En vous montrant l’autre jour le monument à Sadi Carnot à Angoulême, j’ai pensé que, en dehors du monument aux mobiles de la Charente que je vous ai déjà montré, j’avais en stock d’autres œuvres de cet artiste, comme celle-ci, signée R[aoul] Verlet 1898…, ou encore les monuments à Villebois-Mareuil à Nantes et Grez-en-Bouère, que je vous montrerai une autre fois…

Le monument à Adrien Dubouché à Limoges, 1, vue générale Aujourd’hui, je vous emmène donc à Limoges (photographies de novembre 2010), dans le musée national de la céramique Adrien Dubouché, un musée qui par ailleurs a bien besoin d’une rénovation et d’une reprise des vitrines (présentation vieillotte, avec dans certaines de la moquette vieillissante et pas terrible pour la conservation des œuvres). mais le sujet du jour se trouve dans le hall d’entrée, il s’agit d’un monument en bronze dédié à Adrien Dubouché, dont la maquette en plâtre, datée de 1894, a été donnée en 1926 avec le fond d’atelier de l’artiste par sa veuve au musée des Beaux-Arts d’Angoulême. Un autre portrait d’Adrien Dubouché a été présenté par Raoul Verlet au Salon des artistes français en 1899 sous le n° 3988, étant donnée la date de 1898 inscrite sur le bronze, il s’agit sans doute du tirage qui se trouve maintenant à Limoges.. Adrien Dubouché, de son nom complet de baptême François Louis Bourcin-Dubouché (Limoges, 1818 – Jarnac, 1881), époux de Ermance Bisquit, héritière des cognacs Bisquit, était entre autre un riche collectionneur dont le don est à l’origine de la collection du musée national de la céramique.Le socle a été conçu par l’architecte du musée, Henri Mayeux, en l’insérant dans le dessin de la mosaïque.

Le monument à Adrien Dubouché à Limoges, 2, de face et de côté Assis sur son fauteuil, barbiche et moustache très « troisième République », Adrien Dubouché examine l’une des pièces de sa collection… Au passage, remarquez les catalogues représentés par l’artiste sous le siège…

Le monument à Adrien Dubouché à Limoges, 4, détail de la partie supérieure, tête, buste et main Voici de plus près le visage et le vase…

Pour aller plus loin, lire le catalogue réalisé par Béatrice Rolin, Fantômes de pierre : La sculpture à Angoulême 1860-1930, éditions du Germa à Angoulême (1995).

Laure Chabanne, Henri Mayeux et le musée national Adrien Dubouché à Limoges, une leçon d’art décoratif, Livraisons d’histoire de l’architecture, n°3, 1er semestre 2002, p. 129-138.

Le monument à Sadi Carnot par Raoul Verlet à Angoulême

Angoulême, monument à Sadi Carnot, 1, vu de loin Cela fait longtemps que je ne vous ai pas emmenés à Angoulême… Aujourd’hui, il faut se déplacer, à vos risques et périls (un périmètre de sécurité est en place depuis quelques mois, le monument s’affaisse vers le rempart) au bout des allées de New-York, après l’hôtel de ville et le théâtre…

Angoulême, monument à Sadi Carnot, 2, vue rapprochée Le voici d’un peu plus près, au sommet de la colonne, un buste du président Sadi-Carnot (« A Carnot La Charente », dit l’inscription sous le buste), avec une allégorie féminine à ses côtés et une autre au pied du monument…

Angoulême, monument à Sadi Carnot, 3, signatures de Verlet sculpteur et Deglane architecte … qui porte la signature du sculpteur Raoul Verlet (Angoulême, 1857 – Cannes, 1923) (« R. Verlet sc. ») et de l’architecte « H. Deglane Arch. ». Raoul Verlet, je vous en ai déjà parlé pour le monument aux morts de 1870, dit monument aux mobiles de la Charente, juste à côté de l’hôtel de ville d’Angoulême, je vous en reparlerai pour d’autres monuments dans les prochains mois, voir le monument à Adrien Dubouché à Limoges et les monuments à Villebois-Mareuil à Nantes et Grez-en-Bouère. Vous pouvez déjà aller voir la fontaine place Amédée-Larrieu à Bordeaux chez Virjaja. Raoul Verlet prolongera quelques années plus tard sa collaboration avec Henri [Adolphe Auguste] Deglane au Grand Palais à Paris…

Angoulême, monument à Sadi Carnot, 4, signature de Mien entrepreneur Sur l’autre extrémité du socle se trouve la signature de l’entrepreneur (« A. Mien entr »).

Angoulême, monument à Sadi Carnot, 5, dédicace Au dos, une plaque explique les circonstances de la construction (en majuscules, mais je vous mets le texte en minuscules, plus facile à lire):

 » Erigé par souscription départementale / à la mémoire de / Marie François Marie Sadi Carnot / président de la république française mort à Lyon le 24 juin 1894 / ce monument a été inauguré le 2 mai 1897 / sous l’administration de Mr Léopold Viguié, préfet de la Charente / de M. Jean Dezole maire d’Angoulême / le même jour au nom du comité d’initiative et des souscripteurs / M. Rambaud de Larocour président du conseil général en a fait remise / à la ville d’Angoulême ».

Angoulême, monument à Sadi Carnot, 6, buste de Carnot Au sommet donc, le buste du président dont l’assassinat avait frappé toute la France (en créant des rues Carnot, comme à Poitiers, je vous montrerai aussi un de ces jours le monument érigé à Lyon…).

Angoulême, monument à Sadi Carnot, 7, deux vues de l'allégorie du haut A sa gauche (à droite quand on regarde le monument), une femme ailée, allégorie de la Renommée, qui flotte en l’air, pieds nus, et dépose devant lui une palme et une branche d’olivier. Une autre renommée de Raoul Verlet (réalisée en 1900) est visible à Angoulême, sur le monument aux morts de 1870 commandé par le Souvenir Français au cimetière de Bardines, il faudra que j’aille le photographier la prochaine fois que j’irai à Angoulême, en attendant, vous pouvez le découvrir dans le livre Les allégories de la République sur les monuments aux morts en Poitou-Charentes, par Charlotte Pon-Willemsen, dont je vous ai parlé ici, et dans ce dossier en ligne.

Angoulême, monument à Sadi Carnot, 8, vues de l'allégorie du bas Au pied du monument, une autre allégorie, cette fois la France en deuil, également pieds nus et vêtue à l’Antique (deux caractéristiques assez fréquentes des allégories), qui se tient la tête voilée, soutenant un drapeau. Elle vous rappelle peut-être un peu la France en deuil également sur le monument aux morts de 1870, dit monument aux mobiles de la Charente (toujours Raoul Verlet… mais réalisé une dizaine d’années plus tôt).

Ces photographies datent de l’automne 2010.

Pour aller plus loin, lire le catalogue réalisé par Béatrice Rolin, Fantômes de pierre : La sculpture à Angoulême 1860-1930, éditions du Germa à Angoulême (1995).