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Château d’eau et monument aux morts à Châtellerault

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 02, vue générale En visitant l’autre jour l’intérieur du château d’eau de Blossac, à Poitiers, je me suis souvenue que je ne vous ai jamais montré un château d’eau de la même conception, de grandes cuves à même le sol, sur un point plutôt haut de la ville, à Châtellerault, dans le jardin public square Gambetta, près de l’avenue Schumann, sur l’allée du Souvenir-Français. Il faut dans un premier temps que vous fassiez abstraction de la colonne avec sa statue au sommet et de la statue située un peu en avant…

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 03, inauguration du château d'eau Le château d’eau a été construit un peu avant celui de Poitiers, ainsi qu’en atteste l’inscription au milieu du grand mur de façade :  » En l’année 1868 sous le règne de Napoléon III empereur des Français / Alexandre Rivière, chevalier de la légion d’honneur et maire de Châtellerault / a fait installer en vertu des délibérations du conseil municipal / cette distribution d’eau dont les travaux ont été réalisés par MMrs Coudère, Prévignault, Sichère et Bollée / sous la direction de M. Carmejeanne, architecte de la ville « .

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 04, château d'eau Voici quatre vues de la partie « château d’eau » de cet ensemble, avec au sommet un périmètre de protection sur lequel sont installées des ruches.

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 01, carte postale ancienne Au sommet de ce monument a été ajouté en 1890 une grande colonne encadrée de deux lions en bronze et surmontée d’une Liberté de Gustave Michel, œuvre de série fondue par Louis Gasne et dont on trouve, à Jonzac, une version dans une mise en scène très différente (1894, voir ici le monument du centenaire de la Révolution à Jonzac).

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 06, la Révolution

Il s’agit d’un monument érigé pour le centenaire de la fête de la fédération qui, le 14 juillet 1790, a célébré le premier anniversaire de la chute de la Bastille. Une fête pleine d’enthousiasme de la Révolution… juste avant le déchaînement de la Terreur. La colonne porte en son centre l’inscription « A la gloire de la Révolution française », surmontée des armoiries de la ville de Châtellerault. Tout autour de la colonne sont inscrites des dates et des devises (certaines illisibles, puisqu’il est impossible de faire le tour à l’arrière de la statue, en raison du périmètre de protection du château d’eau), mais on peut au moins lire « Égalité / 5 mai/ 14 juin/ 20 juin/ 4 août », dates qui correspondent aux événements suivants:

5 mai 1789 : ouverture de la réunion des États-Généraux au château de Versailles

14 juin 1789 : l’abbé Grégoire quitte les bancs du clergé et va rejoindre le Tiers État

20 juin 1789 : serment du jeu de paume par les députés de l’Assemblée nationale

4 août 1789 : abolition des privilèges.

Sur le socle en dessous de la colonne sont portés les noms de grands révolutionnaires, là encore, impossible de faire le tour, mais je pense avoir réussi à tous les reconstituer :  » La Fayette/ Desmoulins / Brissot / Sieyes/ Pétion/ Grégoire/ Danton/ Bailly / Mirabeau / Condorcet « . Vous pouvez en découvrir les exploits très résumés par exemple ici. Tiens, cela me rappelle ma première « colle » d’histoire moderne et contemporaine de classe préparatoire à l’école des Chartes, deux semaines pour tout savoir sur les années 1789-1791!

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 07, la Révolution, 4 vues La Liberté est coiffée d’un bonnet phrygien recouvert par une couronne végétale. Vêtue à l’antique, elle porte une épée courte dans un baudrier (qui au passage lui met en valeur les seins…), elle tient au sol de la main droite les tables de la Loi (la Constitution) et de la gauche un flambeau, soit une position inversée par rapport à la statue de la Liberté (la Liberté éclairant le monde) de Frédéric Bartholdi. Comme cette dernière, elle foule des pieds des chaînes brisées. Au dos de la colonne se trouve la dédicace, qu’il n’est pas possible de lire en entier sans entrer sur le château d’eau, j’ai seulement pu lire, entre les branches du cèdre : « République française / Ce monument a été érigé en l’an 1890 / Carnot président de la République/ M. Cleiftie préfet / M. Denoël sous-préfet/ Duvau maire/ et J.C. Duh… adjoints/ la statue … / et … « . Pour un récit de cette inauguration et les discours, voir Le Mémorial du Poitou, 40e année, n° 58, samedi 19 juillet 1890, qui donne même les paroles (de Camille Dehogues père) et la musique (de Camille Dehogues fils) d’une « Cantate dédiée à Monsieur le maire de Châtellerault à l’occasion de l’inauguration du monument commémoratif de la Révolution française […] exécutée par l’orphéon et l’harmonie de Châtellerault […] à la suite de deux répétitions seulement »!
Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 08, lion

Les lions (oui, Grégory préfère dire des tigres, mais la commande et la description de l’inauguration parlent de « lions millésimés 1789 et 1889 ») assis gardent bien le monument…

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 05, de profil Mais quand on arrive aujourd’hui devant le monument, il y a encore un troisième élément remarquable, le monument aux morts de 1914-1918 érigé en 1926…

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 09, monument 1914-1918 Il s’agit d’un soldat vêtu à l’antique portant dans sa main droite une petite Victoire.

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 10, signature Aimé Octobre

Il porte la signature « Octobre Aimé 1926 ». Je vous ai déjà parlé de Aimé Octobre, grand prix de Rome en 1893, pour la grande poste (1913) et le monument aux morts (1925) de Poitiers ainsi que pour le monument aux morts d’Angles-sur-l’Anglin (1926), sa commune natale, dont la Victoire est un modèle agrandi de la petite victoire portée par le soldat de Châtellerault. Il avait déjà réalisé en 1903 le monument aux morts de 1870 de l’arrondissement de Châtellerault, situé à quelques centaines de mètres (je vous le montrerai très bientôt).

Un modèle en plâtre du monument de 1914-1918 a été présenté au Salon de 1926 sous le n° 3588 et un tirage en bronze exposée au Salon de 1927 sous le n° 3435. Un élément de plâtre pour ce modèle, daté 1926, a été donné par son fils Daniel Octobre en 1944 au musée Sainte-Croix de Poitiers où il est conservé.

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 11, marque de Rudier

Il porte au dos la marque du fondeur « Alexis Rudier / fondeur Paris », également une « vieille connaissance » de mes fidèles lecteurs… (voir les monuments aux morts de La Rochelle et Angers, Héraklès archer à Toulouse, la statue du maréchal Joffre à Paris).

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 12, dédicace Sur le socle en pierre, sous la statue en bronze se trouve une très touchante dédicace :

 » Ce monument a été consacré / par la / ville de Châtellerault / à l’impérissable souvenir / du dévouement sublime de ses enfants / héroïques serviteurs de la Patrie / pendant la grande tourmente « . Il a été inauguré le 14 juillet 1927.

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 13, soldat

Voici deux vues du groupe sculpté en bronze… Vous trouvez que la Victoire a une drôle d’allure? Et oui, elle a été victime de vandalisme, vous le verrez mieux sur une autre vue. Elle était intacte en 2008, voir dans ce dossier documentaire.

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 14, tête du soldat Le soldat a un visage inexpressif, comme beaucoup de statues d’empereurs romains, il est coiffé à l’antique…

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 15, soldat de face et de dos

Il est drapé dans une toge qui lui laisse les jambes et l’épaule droite nues. Il tient dans la main gauche une épée et des feuilles de chêne.

Châtellerault, monument à la révolution et aux morts de 1914-1918, 16, la Victoire aux ailes cassées

La Victoire est une stricte réplique miniature de celle du monument aux morts d’Angles-sur-l’Anglin, vêtue d’une longue robe, nu-tête, coiffée d’un chignon. De dos, on voit bien la fracture de son aile gauche… La ville de Châtellerault va-t-elle la faire restaurer correctement???

Photographies prises en août 2012.

Pour aller plus loin : voir Les allégories de la République sur les monuments aux morts en Poitou-Charentes, de Charlotte Pon-Willemsen, édité dans la collection des Parcours du patrimoine chez Geste édition, 2008 (ISBN 978-2-84561-483-3) .

Et cet article paru depuis : Grégory Vouhé paru dans l’Actualité Poitou-Charentes n° 106 (automne 2014) : De la femme éplorée à la Victoire, p. 24.

L’Herakles archer d’Antoine Bourdelle à Toulouse

Herakles archer de Bourdelle à Toulouse, 01, dans son square

Au bout des allées de Barcelone, près du canal de Brienne à Toulouse, à proximité de l’ancien stade des Ponts Jumeaux, se trouve L’Héraklès archer d’Antoine Bourdelle, monument dédié aux sportifs morts pour la France en 1914-1918. Le comité des Pyrénées de la Fédération française de rugby voulait, lors de la commande en 1922, avant tout rendre hommage à Alfred Mayssonnié, mort dès les premiers jours de combat, le 6 septembre 1914 et qui est aussi associé au monument par une stèle (voir plus bas).

Dès 1922, Antoine Bourdelle (Montauban, 1861 – Le Vésinet, 1929) accepte de céder juste pour le prix du bronze l’un des tirages de son Héraklès archer et dessine pour l’abriter un temple constitué de huit colonnes sans base ni chapiteau. Le monument est inauguré le 19 avril 1925. Cet Héraklès archer ou Héraklès tue les oiseaux du lac Stymphale est l’une des œuvres les plus connues d’Antoine Bourdelle, peut-être parce qu’elle a orné pendant des années les cahiers de la marque Héraklès… Le plâtre original, réalisé en 1909, de grandes dimensions (250X240X100 cm), est aujourd’hui conservé au musée Ingres à Montauban, sa ville natale, don de sa veuve Cléopâtre Bourdelle en 1953 (le plâtre était resté jusqu’alors dans l’atelier de l’artiste). Plusieurs tirages en bronze sont conservés dans des collections publiques en France (au jardin-musée Bourdelle d’Égreville en Seine-et-Marne, au musée Bourdelle – tirage et plusieurs plâtres préparatoires – et au musée d’Orsay à Paris, au musée des beaux-arts de Lyon) et à l’étranger (au Metropolitan Museum of Art à New York, au National Museum of Western Art à Tokyo, dans un parc de Buenos Aires en Argentine).

Herakles archer de Bourdelle à Toulouse, 02, vues de face et de dos Cette sculpture représente le sixième des douze travaux d’Hercule, celui où il doit abattre de ses flèches les oiseaux du lac Stymphale. On ne voit qu’Hercule / Herakles bandant son arc, en appui contre un rocher.

 

Herakles archer de Bourdelle à Toulouse, 03, signature de Bourdelle sur l'Hercule Antoine Bourdelle, qui a apposé sa marque et la signature « ANTOINE / BOURDELLE / SCULP / 1909 / PARIS ».

Herakles archer de Bourdelle à Toulouse, 04, signature de Rudier sur l'Herkule Le fondeur, Alexis Rudier, a également apposé sa marque (que je vous ai déjà montrée sur la statue du maréchal Joffre à Paris et les monuments aux morts de La Rochelle et Angers).

Herakles archer de Bourdelle à Toulouse, 05, de dos Malgré les tags qui salissent l’œuvre, on peut admirer la position de l’archer…

Herakles archer de Bourdelle à Toulouse, 05, deux vues de profil

Sur ces deux vues, on voit toute la puissance de l’archer… et de son modèle, le commandant André Doyen-Parigot, ami d’Auguste Rodin chez qui Antoine Bourdelle travaillait… Il a dû poser nu pendant des séances qui se sont étalées sur plusieurs mois, avec pour exigence qu’il ne puisse pas être reconnu… Nous voyons donc son corps, mais pas son visage… remplacé par un visage un peu figé, à l’Antique.

Herakles archer de Bourdelle à Toulouse, 06, relief de l'hydre et Herakles gravé Au-dessus de la signature se trouve un petit relief qui porte la scène complète de la lutte d’Hercule contre l’hydre de Lerne (le deuxième des douze travaux d’Hercule), identifiée par les inscriptions « HYDRE » et en grec « YΔPA ». Sur le côté sont inscrits les mots « HERAKLES » et en grec « HPAKΛHΣ ».

Herakles archer de Bourdelle à Toulouse, 07, relief avec le lion de Némée Un autre petit relief est inséré dans la sculpture, un homme luttant contre un lion, donc Hercule luttant contre le lion de Némée (le premier des travaux d’Hercule). Ces deux reliefs ont été ajoutés par Antoine Bourdelle seulement sur la version de 1923 de Herakles archer, même si la date apposée avec la marque du sculpteur est 1909…

Herakles archer de Bourdelle à Toulouse, 08, le relief de Messonier par Bourdelle Le monument est complété par une stèle à l’effigie d’Alfred Mayssonnié, positionnée sur l’un des petits côtés du « temple ».

Herakles archer de Bourdelle à Toulouse, 09, le relief de Messonier par Bourdelle, détail Voici un détail de ce portrait de Mayssonié…

Herakles archer de Bourdelle à Toulouse, 10, signature du relief de Messonier par Bourdelle Le bronze a également été réalisé par Antoine Bourdelle, qui a apposé sa marque et la signature « ANTOINE / BOURDELLE / A / MAYSSONIE / 1925 ».

Herakles archer de Bourdelle à Toulouse, 11, le relief de Voivenes par Andrau De l’autre côté par rapport à la stèle à Mayssonnié se trouve une autre stèle, dédiée « a[u] [d]octeur / Paul Voivenel / inspirateur / de ce / monument », (1881-1975), psychiatre, amateur de rugby, qui avait négocié avec Antoine Bourdelle la réalisation de ce monument.

Herakles archer de Bourdelle à Toulouse, 12, signature du relief de Voivenes par Andrau Elle porte la signature « Andrau », probablement le sculpteur toulousain Joseph Andrau (1907-1987). Je n’ai trouvé aucune information sur cette seconde stèle…

Les monuments aux morts de Toulouse dont j’ai déjà parlé ou dont je parlerai prochainement:

le monument aux morts de Haute-Garonne (inauguré en 1928) : vue générale de l’œuvre de l’architecte Jaussely, les reliefs de André Abbal, de Henri Raphaël Moncassin, et ceux de Camille Raynaud

– le monument aux morts de Toulouse en 1914-1918 dans le cimetière de Salonique

– le monument aux morts de Indochinois, au dos du précédent, dans le cimetière de Salonique

– le monument aux morts de Skikda (Philippeville) dans le cimetière de Salonique

– le monument aux sportifs morts (Héraklès archer d’Antoine Bourdelle)

– le monument aux morts des quartiers Bayard-Matabiau-Concorde-Chalets, non loin de la gare

– le monument aux mortsdes quartiers Colone, Arago, Juncasse, Marengo, près de l’observatoire

– le monument aux morts du quartier Saint-Michel, allées Jules Guesde, non loin du muséum

– et pour la guerre de 1870, le monument du Souvenir français dans le cimetière de Terre-Cabade

Le monument aux morts d’Angers

Angers, monument aux morts, 1, devant le palais de justice

Le monument aux morts d’Angers se trouve depuis 1988 devant le palais de justice.

Carte postale ancienne, le monument aux morts d'Angers à son ancien emplacement Il avait été inauguré le 29 octobre 1922 à l’entrée du jardin du Mail voisin.

Angers, monument aux morts, 2, vue de la sculpture Il se compose d’un groupe sculpté comprenant, du bas vers le haut, un soldat mourant, sa femme qui l’enlace et une Victoire qui domine, installé sur un haut piédestal qui porte l’inscription  » A LA GLOIRE / DES ENFANTS D’ANGERS ET DE D’ANJOU / COMBATTANTS DE LA GRANDE GUERRE 1918 « .

Angers, monument aux morts, 3, le groupe sculpté de plus près Voici de plus près l’ensemble du groupe sculpté. Les plâtres préparatoires de la tête du Poilu mourant, le buste de la Victoire et l’Angevine ont été déposés par le musée de Tours au musée Jules-Desbois à Parçay-les-Pins (également dans le département du Maine-et-Loire, mais très à l’est d’Angers, en limite de l’Indre-et-Loire).

Angers, monument aux morts, 4, signature du sculpteur Desbois Il porte la double signature de  » Desbois / et / Grégoire », Jules Desbois (Parçay-les-Pins, 1851 – Paris, 1935) ayant été assisté du sculpteur H. Grégoire.

Angers, monument aux morts, 5, marque du sculpteur Rudier Le fondeur est Alexis Rudier, de Paris, dont on peut voir aussi la marque « Alexis RUDIER / Fondeur. Paris »..

Angers, monument aux morts, 6, vue de côté Quand on tourne, on voit le mouvement aérien de la Victoire, qui semble flotter dans l’air au-dessus de la femme penchée sur son mari, le Poilu mourant.

Angers, monument aux morts, 7, vue de dos De dos, désolée, à contre-jour, on voit le mouvement « enroulant » de la Victoire.

Angers, monument aux morts, 8, visages des trois personnages Le mouvement de la superposition des trois personnages est très fort…

Angers, monument aux morts, 9, détail du visage de la femme Voici un détail de la tête de la femme du soldat, qui porte une coiffe angevine.

Poitiers, les reliefs de Jonchère dans la cour du musée

Poitiers, le musée Sainte-Croix, 01, la cour Je vous ai déjà montré la cour du musée Sainte-Croix à Poitiers à l’occasion de l’expédition Glen Baxter en juin 2010. Comme je vous l’ai déjà dit, l’ancien musée dans l’hôtel de ville était devenu trop petit. L’ancien couvent Sainte-Croix, qui venait d’être libéré par les sœurs (installées depuis lors à la Cossonière à Saint-Benoît), est choisi pour accueillir le nouveau musée, qui a ouvert en 1974. L’architecte Jean Monge (1916-1991) a détruit les bâtiments du 19e siècle mais maintenu une grande cour rappelant l’ancien cloître. Bon, béton brut, parfois avec des effets de cannelures, labyrinthe à l’intérieur, sauvegarde de justesse des vestiges archéologiques gallo-romains (le comble pour un musée avec des collections archéologiques aurait été de les détruire), je ne le trouve pas terrible au niveau de l’architecture. Mais vous pouvez profiter en ce moment (et jusqu’au 5 février 2012) des salles rénovées sur le Moyen-Âge et d’une exposition sur le thème de l’âge roman en Poitou-Charentes, qui est accompagnée d’un très beau catalogue.

Poitiers, le musée Sainte-Croix, 02, entrée du musée Dans l’entrée du musée, voici…

Poitiers, le musée Sainte-Croix, 03, les reliefs en bronze d'Evariste Jonchère un relief qui y a été mis en place en 1986. Il s’agit du dépôt par l’État d’une œuvre retrouvée lors du rangement du palais de Chaillot pour l’aménagement de la cinémathèque dans les années 1980. C’est l’une des versions de l’art du théâtre, de Évariste Jonchère (Coulonges, 1892 – Paris, 1956), premier grand prix de Rome de sculpture en 1925 pour La vendange. Il existe en fait au moins quatre versions de cette œuvre, trois si j’en crois le catalogue de l’exposition de 1987 (voir la référence complète en fin d’article). La première est un plâtre préparatoire réalisé en 1936 et donné par Mme Jonchère en 1976 au département de Haute-Savoie, qui l’a déposé au conservatoire d’art et d’histoire d’Annecy (d’autres œuvres données au conseil général de Haute-Savoie sont à voir ici, le couple ayant habité près d’Annecy). Sur la base de ce plâtre, Évariste Jonchère a été chargé de réaliser un bronze pour le fronton de scène du théâtre du palais de Chaillot réalisé pour l’exposition internationale de 1937. Mais il a pris du retard pour confier son œuvre au fondeur Alexis Rudier (je vous ai montré sa marque de fondeur pour sur la statue du maréchal Joffre à Paris, je ne l’ai pas trouvée ici). Aussi, c’est une version en plâtre patiné qui a été réalisée et qui se trouve aujourd’hui au musée de Mont-de-Marsan (voir dans le dossier sans photographie dans la base Joconde). L’artiste a néanmoins terminé son œuvre qui a été fondue en 1938. C’est celle-ci qui se trouve à Poitiers. Elle diffère légèrement du plâtre patiné. Certains historiens de l’art ont donné comme titre à cette œuvre Apollon musagète, titre réfuté par Mme Jonchère. Le musée des années 1930 de Boulogne-Billancourt présente un autre plâtre préparatoire de cette œuvre, j’en ai trouvé par hasard la mention page 42 du livret pédagogique du musée. Comme je ne suis pas allée la voir, je ne peux pas préciser de quelle variante il s’agit.

Poitiers, le musée Sainte-Croix, 04, la signature Jonchère Entrons dans la visite de cette œuvre qui porte la signature « E. JONCHERE ».

Poitiers, le musée Sainte-Croix, 07, le centre des reliefs Le personnage central est encadré des deux femmes des groupes de droite et de gauche.

Poitiers, le musée Sainte-Croix, 08, le relief central Le voici de plus près. Il s’agit d’Apollon, dieu de la beauté, tenant une lyre, représenté de face, en position comme assise (mais sans siège) avec sa jambe gauche écartée. Il est nu, mais un drap couvre pudiquement son sexe.

Poitiers, le musée Sainte-Croix, 05, détail des musiciens et musiciennes De chaque côté se trouvent les arts liés à la musique, à la poésie et au théâtre. A gauche se trouvent autre femmes debout et un personnage allongé. La première femme à gauche est torse nu avec une robe drapée autour des reins. La seconde a un voile qui lui couvre partiellement la poitrine. La troisième, à l’arrière-plan, regarde les deux premières. La dernière à droite porte des ailes.

Poitiers, le musée Sainte-Croix, 06, détail du sonneur de trompe Un sonneur de trompe est allongé au sol. C’est le seul personnage qui semble être un homme (à part Apollon au centre).

Poitiers, le musée Sainte-Croix, 09, la partie droite du relief Enfin, le groupe de droite. La première femme à gauche, à côté d’Apollon, torse nu et avec une grande jupe qui lui arrive sous les fesses, tient une sorte de palme. Il s’agit de l’inspiration poétique. Une grande aile semble partir de son épaule, mais il s’agit peut-être juste d’un fond à la scène.

Poitiers, le musée Sainte-Croix, 10, détail des visages Derrière elle se tiennent deux femmes debout. Celle de gauche est torse nu, les seins bien visibles, les jambes drapées dans une robe. Ses cheveux sont coiffés en longues tresses. La seconde porte également un vêtement en haut et tient un masque dans la main gauche : il s’agit de la comédie.

Poitiers, le musée Sainte-Croix, 11, le personnage à droite Et enfin le dernier personnage assis tout à droite. C’est une femme, la tête effondrée sur ses genoux, en partie cachée par son bras. Elle tient de la main gauche une épée et un masque triste constitue son siège: il s’agit de la tragédie.

PS: à deux pas de là, sur le mur de la cour de la MJC Le Local (rue Saint-Pierre-le-Puellier à Poitiers), vous pouvez voir un peu sur le même thème la frise sculptée de Jean Claro…

Pour en savoir plus : Evariste Jonchère, 1892-1956 : premier Grand Prix de Rome de Sculpture en 1925, catalogue de l’exposition au musée Sainte-Croix à Poitiers, 24 mars – 18 mai 1987, sous la direction de Blandine Chavanne et Bruno Gaudichon.

Le monument aux morts de 1914-1918 à La Rochelle

Monument aux morts de La Rochelle, 01, vu du bout du Mail Le monument aux morts de 1914-1918 à La Rochelle se situe tout au bout du mail (on l’aperçoit au fond sur cette photo), il est sans doute plus sympathique de passer sur le front de mer plutôt que de parcourir cette allée pour le rejoindre…

Monument aux morts de La Rochelle, 02, vu de face Il est composé de grandes stèles sur lesquelles sont inscrites, sur la face principale, le nom des victimes de la guerre 1914-1918, et au centre se dresse un massif soldat en bronze…

Monument aux morts de La Rochelle, 03, vu de trois quarts Le monument est peut-être moins impressionnant comme ça, de trois quarts. Un banc court à l’intérieur, tout autour des stèles (encore faut-il que les anciens combattants ne soient pas trop invalides pour monter les marches pour pouvoir assister aux cérémonies).

Monument aux morts de La Rochelle, 05, la signature du sculpteur Alexis Costa Sur la terrasse (le rebord vertical sous la sculpture) gauche, la signature de l’artiste et la date,  » / 1920″. Joachim Costa (Lézignan-Corbières, 1888 – Narbonne, 1971) a présenté cette œuvre en plâtre au salon des artistes français en 1920 (sous le n° 2982), puis un tirage en bronze (celui-ci?) au salon d’automne en 1921 sous le n° 536. Le monument aux morts de La Rochelle a été inauguré le 19 novembre 1922. Vous pouvez découvrir ses œuvres sur ce site.

Monument aux morts de La Rochelle, 04, la signature du fondeur Alexis Rudier Et sur la droite de la terrasse, la marque du fondeur, « Alexis Rudier / Fondeur Paris » (dont je vous ai déjà parlé pour le monument du maréchal Joffre à Paris). Je n’ai pas trouvé la signature des architectes, Jean Béraud (Talmont-Saint-Hilaire, 1882-1954) et Charles François Bunel (Étampes, 1848 – 1926), architecte départemental de la Charente-Maritime. Jean Béraud et Joachim Costa, avec le même fondeur Alexis Rudier, ont réalisé un monument aux morts assez similaire (mais la canne est dans la main droite au lieu de la main gauche du soldat) pour Pézenas, dans l’Hérault. Une autre variante de ce soladat se trouve dans la ville natale de Joachim Costa, Lézignan-Corbières, dans l’Aude.

Monument aux morts de La Rochelle, 07, le soldat de face Le soldat de La Rochelle se tient debout. Il est vêtu de la lourde tenue d’hiver du poilu.

Monument aux morts de La Rochelle, 08, le côté gauche du soldat De côté, on voit mieux sa main gauche appuyée sur une canne autour de laquelle s’enroule un serpent.

Monument aux morts de La Rochelle, 09, le côté droit du soldat De l’autre côté, il a simplement la main de long du corps.

Monument aux morts de La Rochelle, 10, la tête du soldat Son visage est assez inexpressif. Il porte un casque.

Monument aux morts de La Rochelle, 11, le soldat de dos De dos, on voit peut-être mieux le serpent enroulé autour de la canne.

Monument aux morts de La Rochelle, 12, le socle Le soldat est debout sur un socle de bronze lui-même posé sur un socle en calcaire. Sur ce dernier sont inscrits les textes suivants, à gauche  » Aux veuves / victimes des guerres « , au centre  » Aux Rochellais / morts pour la France / en défendant le droit / et la liberté du monde  » et à droite  » Aux orphelins / victimes des guerres « . Sur le bronze sous les pieds du soldat :  » cux de la grande guerre / 1914 – 1918 « .

Monument aux morts de La Rochelle, 13, le relief à gauche du socle Le socle de bronze porte aussi deux reliefs. Sur celui de gauche, quatre soldats (les têtes) semblent discuter dans le froid, deux d’entre eux fument la pipe.

Monument aux morts de La Rochelle, 14, le relief à droite du socle Quatre autres soldats sur le relief de droite, aussi avec la pipe pour deux d’entre eux.

Monument aux morts de La Rochelle, 16, l'autre côté du monument Sur les côtés, les noms des victimes des conflits suivants…

Monument aux morts de La Rochelle, 15, un côté du monument … et une petite niche avec des cendres des fours crématoires.

Monument aux morts de La Rochelle, 17, le monument de dos Et pour terminer, une vue du dos du monument, tout nu, avec juste la lumière qui filtre entre les stèles.

Toutes ces photographies datent du 25 juin 2011.

Le maréchal Joffre à Paris, par Maxime Réal del Sarte

Paris, monument de Joffre par Réal del Sarte, 1, de face devant l'école militaire Je vous ai déjà montré un certain nombre d’œuvres de cet artiste, ultra-catholique et membre d’une ligue peu recommandable, à revoir dans les articles suivants (aussi pour des précisions sur l’artiste):

Aujourd’hui, je vous emmène à Paris, devant l’école militaire (et donc pas loin de la tour Eiffel, à l’autre bout du champ de Mars). Les photographies datent d’octobre 2010. Réalisée en 1939, elle a échappé aux fontes des nazis en 1940/1942, contrairement à une autre œuvre du même auteur représentant le général Mangin, qui se trouvait place Denys-Cochin et qui a été détruite en octobre 1940 (sa tête a pu être sauvée et se trouve aujourd’hui au musée du chemin des Dames). Mais revenons au sujet du jour…

Paris, monument de Joffre par Réal del Sarte, 2, l'inscription à la bataille de la Marne Le maréchal Joffre, vainqueur de la bataille de la Marne en septembre 1914, ainsi qu’il est rapporté sur l’inscription…

Paris, monument de Joffre par Réal del Sarte, 3, du côté gauche …vous accueille à cheval, sur un haut socle.

Paris, monument de Joffre par Réal del Sarte, 4, la signature du sculpteur Maxime Real del Sarte Le bronze porte les signatures du sculpteur « M[axime] REAL DEL SARTE »…

Paris, monument de Joffre par Réal del Sarte, 5, la signature du fondeur Alexis Rudier … et du fondeur « Alexis Rudier / fondeur Paris ».

Paris, monument de Joffre par Réal del Sarte, 6, le monument vu de gauche Allez, on tourne, voici l’autre face… Le cheval marche au pas, la patte avant gauche levée.

Paris, monument de Joffre par Réal del Sarte, 7, l'avant du cheval et le maréchal (côté droit) Un détail du maréchal Joffre, coiffé de son képi et portant un lourd manteau…

Paris, monument de Joffre par Réal del Sarte, 8, l'avant du cheval, côté gauche Sur l’image précédente, on voyait bien les éperons, voici maintenant un détail des pièces d’harnachement du cheval et de l’épée au côté gauche du maréchal.

Paris, monument de Joffre par Réal del Sarte, 9, le monument vu de dos Une dernière petite vue, de dos (il cache la vue sur la tour Eiffel!).