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Je viens, de Emmanuelle Bayamack-Tam

pioche-en-bib.jpgCouverture de Je viens, de Emmanuelle Bayamack-TamUn livre recommandé dans la sélection d’été du magazine Causette et trouvé dans une annexe de la médiathèque.

Le livre : Je viens, de Emmanuelle Bayamack-Tam, éditions POL, 2014, 462 pages, ISBN 9782818035412.

L’histoire : de nos jours à Marseille. Charonne, la vingtaine, est une jeune fille métisse, obèse, abandonnée à sa naissance, adoptée à l’âge de 5 ans, par des parents qui l’auraient bien rendu quelques mois plus tard à l’aide sociale à l’enfance, « trop noire »… Dans la grande maison, il y a sa grand-mère, Nelly, nonagénaire, ex-star d’une grande beauté, Charlie, son deuxième époux, raciste, atteint de la maladie d’Alzheimer depuis quelque temps. Quand ils ne sont pas en vadrouille au Bhoutan, il y a aussi les parents de Charonne, Gladys, la fille – la soixantaine – de Nelly et Fernand (qui fut son grand amour malgré son infidélité), et Régis, le fils de Charlie et d’une mère qui les a abandonnés quand il avait douze ans. Ajoutez à ces personnages les employés de maison, une famille philippienne, les parents, aidés pour leurs vieux jours par leurs enfants (un garçon adopté et 6 filles), et un mystérieux personnage qui semble habiter le bureau, et vous aurez le tableau général de cette maisonnée…

Mon avis : trois chapitres d’environ 150 pages chacun, avec pour narratrice successivement Charonne (personnage récurrent de l’auteure mais je n’ai pas lu ses autres romans), Nelly et Gladys, la même histoire, un point de vue et donc des « vérités » qui varient pour chacune. Un seul lieu, une grande maison située à Marseille (mais ça pourrait être ailleurs), quelques rares escapades, dans le parc voisin, à l’hôtel (pour la nuit de noces de Nelly et Fernand), d’autres biens hérités de Fernand (la villa à Cassis etc., juste mentionnés). L’amour ou le manque d’amour filial, mais aussi le racisme, la beauté (de Nelly jeune), la laideur (supposée de Charonne), sont au cœur de ces trois récits successifs d’une même histoire familiale. Il y a aussi la tentation du suicide : par Charonne, la mal-aimée, rejetée à sa naissance puis par ses curieux parents adoptifs, de Nelly, qui veut en finir avec sa déchéance et surtout celle de Charlie, en mettant de côté des médicaments… Un récit à la limite du conte, surtout lors des apparitions du « fantôme » dans le bureau, sur fond de Petrouchka, ce conte russe mis en ballet par Igor Stravinski. Alors, vous demandez-vous? Ai-je aimé ce livre? Je ne sais pas, je l’ai lu de manière fragmentée, sur une quinzaine de jours, je l’avais choisi en raison de la critique que j’avais lue mais aussi parce que POL offre l’avantage d’avoir un interligne suffisant pour ne pas devoir emporter l’ordinateur et la caméra en vacances, c’était sans compter sur le fait que les pages ne sont pas assez opaques et que le texte du verso des pages brouille ma lecture, impossible de lire plus de quinze à vingt pages à la fois, cela n’aide pas pour apprécier un ouvrage. Chacun des trois gros chapitres de 150 pages forme un bloc compact, sans subdivision (sous-chapitre, saut de page), un choix de l’auteur mais cela n’aide pas à « respirer », ni à reposer la vue surtout. De plus, à nouveau, comme il y a des mois avec résonne/raisonne dans N’entre pas dans mon âme avec tes chaussures de Paola Pigani, mon cerveau a eu des difficultés à restituer le sens d’une phrase mal orthographiée :  » ma décision est prise est je n’y reviendrai pas  » (page 239)… Bref, l’inconfort matériel de la lecture ne m’a sans doute pas aidée à apprécier ce roman à sa juste valeur.

La chambre sous-marine de Joost Zwagerman

Couverture de zwagermanJ’ai acheté un lot de livres de la collection « Motifs » chez un soldeur il y a quelques mois.

Le livre : La chambre sous-marine de Joost Zwagerman, traduit du néerlandais par Alain Van Crugten, 1ère édition Calman-Lévy, 1994, ISBN 9782702123058 ; ré-édition collection Motifs (n° 117), éditions du serpent à plumes, 2001, 438 pages, ISBN 9782842612238.

L’histoire : à Amsterdam, dans les années 1990. A quinze ans, Simon Prins avait déjà visité le quartier chaud de sa ville natale, Alkmaar. Étudiant à Amsterdam, il est devenu un client assidu de quelques prostituées, passant devant les « vitrines », finissant dans les chambres de passe sordides. Jusqu’au jour où il repère la chambre sous-marine de Lizzie Rosenthal, dont il tombe amoureux, passant de client à amant…

Mon avis : je ne connaissais pas du tout cet auteur néerlandais qui aurait eu toute sa place il y a quelques années dans le cadre du défi lecture Octobre fritissime. Ce livre nous emmène dans le milieu de la prostitution à Amsterdam. Le sujet est abordé du point de vue du client, un client probablement atypique, étudiant qui a découvert la prostitution adolescent et est devenu « accro », circulant devant les « vitrines » lorsqu’il n’a pas les moyens de se payer une passe. Alors qu’il a « levé le pied », il repère face à sa chambre celle d’une « fille ». À travers le portrait de la prostituée dont le narrateur tombe amoureux, nous assistons à la chute d’une fille, Lizzie Rosenthal, venue de sa province faire des études, qui se prostitue pour gagner un peu d’argent, puis évidemment abandonne ses études. Un sujet je pense rarement abordé dans le cadre d’un roman (et non d’un polar), bien servi par l’écriture de son auteur.

Logo de Octobre, le mois FritissimeIl y a quelques années, ce livre aurait eu toute sa place dans le défi Octobre fritissime, littérature et patrimoine du Benelux.

Les temps sauvages de Ian Manook

Couverture de Les temps sauvages de Ian ManookAprès Yeruldelgger, j’ai acheté et lu la suite.

Le livre : Les temps sauvages de Ian Manook, éditions Albin Michel, 2015, 528 pages, ISBN 9782226314628.

L’histoire : de nos jours en Mongolie. Le commissaire Yeruldelgger est victime d’un complot. Il est alerté par un ornithologue sur le comportement étrange d’un gypaète… qui le met sur la piste d’un homme mort dans une crevasse. Sa collaboratrice, Oyün, enquête sur la mort d’un cavalier sur son cheval, surmonté d’un yack, mort également. Mais voici qu’il est suspendu par la police des polices, suspecté d’avoir assassiné une prostituée qui l’a aidé dans sa précédente enquête. Elle aurait adopté un enfant des rues, porté disparu comme Gantulga, gamin envoyé poursuivre son apprentissage au septième monastère des moines Shaolin par le commissaire. Les deux garçons se seraient vu peu avant leur disparition.  Et voici que six jeunes garçons sont retrouvés morts dans un container au Havre…

Mon avis : comme dans le premier tome, le lecteur est plongé dans une Mongolie tiraillée entre traditions et modernité, coincée entre ses puissants voisins, Chine et Russie. Certaines scènes, notamment de tortures, sont un peu dures, mais l’auteur laisse ensuite le temps de souffler pendant quelques pages. Alors que l’auteur est Français, ce sont peut-être les pages au Havre qui sont le moins crédibles. Corruption, trafics de matières premières, d’êtres humains, vengeance personnelle, rien ne manque dans ce polar qui se dévore. Même si la rentrée approche, il vous restera peut-être un peu de temps pour attaquer ce gros volume haletant!

Voyage aux îles de la désolation d’Emmanuel Lepage

Couverture de Voyage aux îles de la désolation d'Emmanuel LepageLorsque j’ai lu La lune est blanche, écrit avec son frère, il était beaucoup question au début de ce titre, lu par les différents membres de l’expédition. Je l’ai trouvé à la médiathèque.

Le livre : Voyage aux îles de la désolation d’Emmanuel Lepage, éditions Futuropolis, 2011, 160 pages, ISBN 9782754804240.

L’histoire : Saint-Denis de La Réunion, mars 2010. Emmanuel Lepage embarque sur le Marion Dufresne, direction les Terres Australes et Antarctiques Françaises (TAAF). Pour ravitailler les anciennes îles de la Désolation, Crozet, Amsterdam, Saint-Paul et Kerguelen. A bord du bateau, l’équipage, les militaires et contractuels chargés de la logistique des bases, les scientifiques et quelques « touristes » (le dessinateur, un élu…). Emmanuel Lepage présente la vie à bord du bateau, les ravitaillements (en nourriture et en pétrole pour les groupes électrogènes), les îles abordées lors de son voyage mais aussi par les illustres pionniers…

Mon avis : un album qui, pour ce que j’en ai entendu (un de mes anciens chefs de service avait fait une rotation avec ce bateau pour « inspecter » des fouilles archéologiques sur un ancien site baleinier), reflète bien la vie à bord du Marion-Dufresne. Et d’abord l’instabilité du bateau et le mal de mer, la vie à bord, le confinement par mauvais temps, la promiscuité, le fameux tamponnement des enveloppes postées depuis les TAAF, etc. La grande priorité, pour les militaires à bord, c’est le ravitaillement des bases. Puis permettre le travail des scientifiques, quel que soit le sujet, étude sur le climat ou sur les espèces introduites volontairement et devenues une menace pour les espèces endémiques (comme les BLO, bêtes aux longues oreilles pour ne pas dire lapins, mot interdit comme tous ceux qui désignent des rongeurs à bord des bateaux). Les « touristes » (au premier rang desquels le dessinateur) peuvent-ils influencer sur les tâches premières de la mission ? Les dessins mêlent de nombreuses planches en noir et blanc et quelques planches en couleur. Nous sommes loin des dessinateurs accompagnant les missions scientifiques de Napoléon à nos jours (le muséum d’histoire naturel emploie toujours des dessinateurs), même s’il y a de belles vues de la faune rencontrée, et plus proches du reportage journalistique en bande dessinée tel qu’on peut le voir dans La Revue dessinée ou dans les reportages de guerre de Joe Sacco (Gaza 1956, Goražde, Šoba, Palestine, une nation occupée). Envie d’évasion, d’une ambiance fraîche après un été chaud ? N’hésitez pas, cet album est fait pour vous.

Voir aussi :
La lune est blanche de François et Emmanuel Lepage et sur un autre sujet Un printemps à Tchernobyl d’Emmanuel Lepage
Les naufragés de l’île Tromelin d’Irène Frain

La catin habite au 21, de Hervé Sard

Couverture de La catin habite au 21, de Hervé Sardpioche-en-bib.jpgJ’ai trouvé ce livre parmi les nouvelles acquisitions de la médiathèque.

Le livre : La catin habite au 21, de Hervé Sard, le Poulpe n° 287, éditions de la Baleine, 2014, 180 pages, ISBN 9782842195328.

L’histoire : à Paris de nos jours. Au comptoir de son bistrot préféré, le Poulpe apprend la disparition d’une prostituée à Sainte-Mère-des-Joncs, près de Nantes. Le démarrage du chantier du nouvel aéroport du Grand-Ouest traîne, après les tensions des dernières années. Personne ne semble s’inquiéter de cette disparition, chez l’employeur de la demoiselle, qui gère les réservations par internet, les deux gérantes ne l’ont jamais vues et s’interrogent sur sa réalité. Une seule solution pour le Poulpe, aller voir sur place ce qui se passe… Visite à l’hôtel, chez le maire, chez le notaire, dans la maison occupée par la dame, la retrouvera-t-il?

Mon avis : cela fait fort longtemps que je n’ai pas lu un livre de la collection du Poulpe, créée par Jean-Bernard Pouy (voir 1280 âmes). Au début de la série, je les ai presque tous lus, attirée par cette série à contraintes, avec les mêmes personnages (Gabriel dit le Poulpe, Cheryl sa petite amie, Gérard le bistrotier, Pedro le fabricant de faux papiers), quelques lieux incontournables (le bistrot de la Sainte-Scolasse). Les romans sont plus ou moins réussis selon les auteurs. J’ai arrêté lorsque les éditions de la Baleine ont eu des difficultés, et au final, j’ai dû lire une cinquantaine de titres sur les 287 paru dans cette série depuis 1995. Ce nouvel opus qui se passe à Sainte-Mère-des-Joncs aurait dû m’attirer par son thème. Cela a très mal commencé page 13 avec une phrase obscure « Infichu capable de se souvenait de sa date de naissance »… Finalement, comme je vous le disais lundi, le neurologue a raison, même si je fais quelques fautes d’orthographe suite à mon opération, j’en fais moins que beaucoup de monde et arrive à corriger celles que je vois… mais là, mon cerveau a quand même eu du mal à comprendre la phrase (comme il y a des mois avec résonne/raisonne dans N’entre pas dans mon âme avec tes chaussures de Paola Pigani). Le passage sur la mémoire olfactive page 45 ne m’évoque plus grand chose, vu le peu d’odeurs que j’arrive à percevoir (ça ne s’est pas beaucoup amélioré depuis cet article sur mon anosmie). Côté contraintes et intégration dans la série, c’est le service minimum, Cheryl est évacuée en deux lignes (en vacances), Gérard le bistrotier apparaît brièvement, de même que Pedro. Aucune allusion à un épisode précédent. Côté écriture et intrigue, ce titre est plus que décevant, même si l’idée développée au fil du « scénario » (pas vraiment un roman à mon sens) est assez intéressante… Si vous souhaitez découvrir cette série, choisissez un autre titre, plutôt écrit par un auteur reconnu de polars!

Les boîtes en carton de Tom Lanoye

Couverture de Les boîtes en carton de Tom Lanoyepioche-en-bib.jpgUne amie m’avait recommandé un autre titre de cet auteur (La langue de ma mère) mais il n’est pas au catalogue de la médiathèque, j’ai donc pris ce titre en attendant qu’il soit (peut-être?) acheté…

Le livre : Les boîtes en carton de Tom Lanoye, traduit du néerlandais (Flandre) par Alain van Crugten, éditions de la Différence, 2013, 160 pages, ISBN 9782729120122.

L’histoire : au début des années 1970, en Belgique néerlandophone. Alors qu’il a une douzaine d’années, il est inscrit par sa mère à une colonie de vacances organisée et payée par Les Mutualités Chrétiennes, qui fournissent même la « boîte en carton », un carton à plier qui fera office de valise, la même pour chaque participant, histoire qu’il n’y ait pas de distinction sociale. Sa vie à la maison, sa mère, sa sœur, sa tante (que de femmes!), et la colonie de vacances, la découverte du corps d’un autre colon, qu’il fantasme… Quelques années plus tard, il retrouve ce compagnon de colonie et participe avec lui à un voyage scolaire en Grèce. Déclarera-t-il sa flamme ? Connaîtra-t-il l’amour avec ce jeune homme ?

Mon avis : dans ce roman à fort caractère autobiographique, traduit en français plus de dix ans après sa parution en Belgique, Tom Lanoye n’hésite pas à faire de nombreuses digressions (sa mère jetant la friteuse en flammes et se brûlant gravement pour éviter à la maison de prendre feu, les nationalistes flamands, le milieu ultra-catholique, etc.) avant de revenir à son sujet principal, le récit de ce voyage scolaire où il connut son premier amour homosexuel. L’ensemble est narré avec beaucoup de recul et d’humour -quelques pages à ne pas rater sur le voyage en Grèce-, même s’il raconte en de brefs mais explicites passages ses fantasmes et ses masturbations après le retour de colonie. Le récit met également en avant les regards, les gestes, bref, la communication non-verbale entre les deux garçons. Je vais essayer de trouver La langue de ma mère, si l’écriture est aussi intéressante que pour cette première découverte, le thème (la mère victime d’un AVC qui « perd sa langue ») devrait être moins compliqué que la lecture de descriptions de masturbation masculine, même si rien n’empêche de sauter une page lors de la lecture d’un livre, car la majorité du livre est consacré à autre chose.

Logo de Octobre, le mois FritissimeIl y a quelques années, ce titre aurait eu toute sa place dans le défi Octobre fritissime, littérature et patrimoine du Benelux..

Puzzle de Franck Thilliez

Couverture de Puzzle de Franck ThilliezJ’ai acheté ce livre en poche, emporté lors de mon grand week-end à Brive-la-Gaillarde au début du mois de mai. C’est un auteur dont j’ai lu la plupart des ouvrages lors de déplacements (voir La mémoire fantôme, La chambre des morts, Le syndrome [E], Deuils de miel, Gataca, L’anneau de Moebius, Train d’enfer pour Ange rouge, La forêt des ombres, Vertige).

Le livre : Puzzle de Franck Thilliez, éditions Pocket, 2014, 477 pages, ISBN 9782266246446 [édition originale : Fleuve noir, 2013, 477 pages, ISBN 9782265093577].

L’histoire : de nos jours, dans les Alpes. Les corps de huit randonneurs sont retrouvés assassinés, dans un refuge. Près d’eux, un homme, Lucas Chardon, hébété, le meurtrier ? Il ne sait pas ce qu’il fait là. Déplacement. Quelque part dans la banlieue parisienne comme point de départ. Alors qu’ils ont été partenaires de chasses au trésor pendant longtemps, deux jeunes gens se sont séparés depuis un an lorsque Chloé vient relancer Ilan qui s’est isolé dans la maison de ses parents, scientifiques mystérieusement disparus en mer : elle a trouvé comment entrer dans un jeu mystérieux, Paranoïa, dont l’enjeu serait la somme de 300 000 euros. Les voilà qui passent les « présélections », dans un hangar puis à travers les rues de Paris. Les gagnants de la présélection,huit hommes et femmes au total, se retrouvent quelque part dans les Alpes, dans un ancien hôpital psychiatrique qui va constituer le terrain de jeu. Les voici à Swanessong avec un avertissement : « L’un d’entre vous va mourir »… et le premier cadavre (d’un candidat) ne va pas tarder à surgir, sur fond d’indices qui rappellent à Ilan la vie de ses parents.

Mon avis : comme dans d’autres livres, Franck Thiliez nous plonge dans l’univers de la psychiatrie via le passé de l’hôpital / terrain de jeu. L’énigme est bien montée, avec des indices semés au fil des pages pour arriver à la conclusion… qui va enfin éclairer le début du livre. Les joueurs ont le choix entre l’entraide (ne serait-ce que pour manger le premier jour) ou l’individualisme du « jouer perso ». Le lecteur navigue sans cesse entre normalité et folie, réalité et jeu, « tout n’est qu’un jeu », rappelle l’organisateur de ce jeu de piste… Virgile Hadès 😉 Hadès, dieu des enfers, Virgile, le poète latin qui accompagne Dante dans l’enfer (et le purgatoire) de sa Divine comédie. Certes, Franck Thilliez a joué sur la facilité avec le nom de ce personnage, mais il est aussi certainement pour quelque chose dans la montée (subconsciente) de l’intrigue. Le lecteur arrive lui-même aux portes de l’enfer, de la folie, celle des organisateurs du jeu, des anciens patients, des joueurs… ou même la sienne ? Allez, sur la plage, dans un train ou en voiture (pas le conducteur !), n’hésitez pas à vous perdre parmi ces pièces de puzzle jusqu’à trouver la dernière pièce qui éclairera l’ensemble !

Les mots qu’on ne dit pas, de Véronique Poulain

pioche-en-bib.jpgCouverture de Les mots qu'on ne dit pas, de Véronique PoulainCe titre faisait partie des livres recommandés pour cet été par le magazine Causette. Je l’ai trouvé à la médiathèque.

Le livre : Les mots qu’on ne dit pas, de Véronique Poulain, éditions Stock, 2014, 144 pages, ISBN 9782234078000.

L’histoire : ses parents sont nés juste après-guerre, sourds tous les deux, la mère de naissance, comme son oncle, son père suite à une méningite contractée bébé. Ils se sont rencontrés à un bal à Paris, où leurs propres parents sont venus, pour qu’ils aient la meilleure éducation, ont eu une fille, Véronique, entendante… Elle passe ses premiers mois en nourrice, puis ses grands-parents, qui habitent au-dessus de chez les parents, la prenne avec eux, elle navigue entre le mode des entendants et ses parents sourds, en joue, en soufre, s’adapte dans les deux cultures…

Mon avis : un livre très court, 144 pages, dont au moins un tiers de vide (chapitres de deux ou trois pages, avec de grands blancs au début et souvent à la fin). Ses parents et son oncle sont très « engagés » dans le monde des sourds, la reconnaissance de la langue et la « fixation » du dictionnaire. Mais elle parle surtout des stratégies de l’enfant, de ses cousins aussi, surtout sa cousine Ève, pour s’adapter et grandir dans cette double culture, la difficulté de vivre avec des sourds (bruyants!), le regard sur le handicap, le manque d’efforts de la société pour comprendre ses parents, de ses camarades de classe… Elle oscille entre la fierté de la double culture, parfois la honte quand ses parents ne comprennent qu’ils font un bruit inadapté en société, rapporte souvent le cocasse des situations. Un beau témoignage!

Logo rentrée littéraire 2014Ce livre entre dans le cadre du défi 1% de la rentrée littéraire organisé à nouveau cette année par Hérisson (il reste quelques jours pour la rentrée 2014!).

Le voyant de Jérôme Garcin

Couverture de Le voyant de Jérôme GarcinC’est une amie, Paulette (revoir son témoignage sur le Frontstalag 230 à Poitiers) qui m’a prêté ce livre qui a reçu plusieurs prix littéraires en 2015 (prix littéraire de la ville de Caen, prix Nice Baie des Anges, prix Relay des voyageurs-lecteurs). Du même auteur, je vous ai aussi parlé de Olivier et Bleus horizons.

Le livre : Le voyant de Jérôme Garcin, collection blanche, NRF, éditions Gallimard, 2015, 192 pages, ISBN 9782070141647.

L’histoire : né à Paris le 19 septembre 1924, Jacques Lusseyran est victime, à huit ans, d’un stupide accident à l’école qui le rend aveugle. Avec la force de sa volonté et celle de sa mère, il apprend en quelques mois le braille, manie une machine à écrire braille, apprend à se déplacer lors de vacances en Anjou à Juvardeil et réintègre sa classe dès la rentrée suivante. Il poursuit de brillantes études en sixième au lycée Montaigne à Paris puis à partir de la troisième à Louis-le-Grand, apprend l’Allemand. Evacué à Toulouse de septembre 1939 pour un an, il rentre à Paris et organise dès le 21 mai 1941 les « Volontaires de la liberté », dans l’appartement familial et au lycée, réseau qui devient vite officiellement reconnu puis intégré à une structure plus grande. Inscrit en khâgne en 1942, il est sorti de la salle du concours de l’ENS, un aveugle n’a rien à y faire selon un arrêté du ministre… Dès lors, il se consacre entièrement au réseau, avant d’être arrêté le 20 juillet 1943, déporté en janvier 1944 à Buchenwald…

Mon avis: une histoire hors du commun, racontée de manière simple et très efficace par Jérôme Garcin, presque comme un roman d’aventures pour la partie « exaltée » de la résistance, plus « déprimante » pour le retour du camp, les mariages, l’enseignement aux Etats-Unis, le retour en France jusqu’à l’accident de voiture qui lui coûte la vie le 27 juillet 1971. C’est aussi l’histoire d’un combat pour vivre normalement malgré son handicap, et surtout pour que les aveugles ne soient plus exclus de la fonction publique, ce qui ne sera finalement acquis qu’en 1955! Peu de déportés ont témoigné juste après leur retour, envie de se reconstruire mais surtout exclusion de « ceux qui étaient restés » et qui ne comprennent pas quel a été leur enfer. Jacques Lusseyran, lui, a très vite écrit et publié Et la lumière fut, que je vais essayer de trouver. Alors que Geneviève De Gaulle, dont il avait rejoint le réseau (et est tombé en même temps), vient symboliquement d’être inhumée au Panthéon, un éditeur pourrait avoir la bonne idée de rééditer ce témoignage…

Puisque je suis sur le sujet de la Seconde Guerre mondiale, juste pour information, la ville de Strasbourg a révélé ce week-end que suite à la polémique lancée par l’université de Strasbourg elle-même contre le livre de Michel Cymes, Hippocrate aux enfers, des restes humains des victimes des expérimentations nazzies ont bien été retrouvés ces drenières semaines, ils seront remis à la communauté juive pour être inhumé avec les autres victimes du Struthof…

Viva de Patrick Deville

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Logo rentrée littéraire 2014Couverture de Viva de Patrick DevilleAlors que la rentrée littéraire 2015 pointera son nez dans moins d’un mois, il est grand temps que je vous parle de quelques livres de la précédente rentrée littéraire que j’ai lus ces dernières semaines sans vous en parler (comptes-rendus regroupés Hérisson). Un livre emprunté à la médiathèque et passé ensuite par les mains de Maryse et Vito, vu le thème… Vous pouvez aussi (re)lire mes avis sur Kampuchéa, Peste et choléra, également de Patrick Deville.

Le livre : Viva de Patrick Deville, éditions du Seuil, 224 pages, 2014, ISBN 9782021135961.

L’histoire : Dans les années 1930 au Mexique, un peu aux Etats-Unis et en Europe. En 1937, Léon Trotsky débarque pour l’ultime étape de son exil et est d’abord hébergé par l’éditeur Malcolm Lowry, concentré sur la rédaction de son chef-d’oeuvre Au-dessous du volcan, avant d’investir la maison bleue de Frida Kahlo. A Mexico, Tampico ou Cuernavaca se croisent aussi Diego Rivera, Tina Modotti, B. Traven, André Breton, Antonin Artaud et beaucoup d’autres. Se sachant menacé, Trosky écrit, revient sur sa longue fuite, préparant une riposte aux procès de Moscou, attendant les malles contenant ses papiers et écrits…

Mon avis : le livre est probablement très documenté et assez fidèle à la réalité, mais la narration non linéaire, avec de constants changements de lieux et de temps, rend le livre on ne peu plus confus. Même si je connais un peu cette histoire, c’est sans aucun doute beaucoup trop peu pour réussir à suivre ce récit. S’il avait été plus chronologique, ou au moins avec des repères qui permettent de savoir si l’on est en 1920, en 1937 ou plus tard, le livre aurait gagné en clarté!!! Bref, probablement très intéressant, mais je m’y suis sentie complètement perdue!