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Journée internationale de la surdicécité, le 27 juin 2021

Article mis à jour le 21/06/2021

J’ai découvert la surdicécité (les « sourds-aveugles ») il y a fort longtemps, lorsque je faisais mes études à Paris et que la fille des gardiens, sourde de naissance, a été diagnostiquée avec le syndrome de Usher et allait perdre peu à peu la vision latérale. A 6 ans, elle était l’une des premières à avoir reçu un implant cochléaire, qui était jusqu’alors réservé à des enfants qui avait entendu et étaient devenus sourds, par exemple suite à une méningite.

En arrivant à Poitiers, j’ai découvert la grande communauté des sourds-aveugles, liée à l’invention de la langue des signes signées dans la main et qui a inspiré le film sur Marie Heurtin il y a quelques années. Ce passé explique que le Centre National de Ressources Handicaps Rares – Surdicécité (CRESAM) ait son siège à Poitiers. Il dépend de l’Association pour la Promotion des Personnes Sourdes, Aveugles et Sourdaveugles (APSA) dont je suis élue au conseil d’administration depuis un peu plus d’un an.

Le kiosque du parc de Blossac à Poitiers, juin 2021

Pour la journée internationale de la surdicécité, le CRESAM organise le 27 juin 2021 au  parc de Blossac à Poitiers un Bombardement de fils, action de tricot urbain, pour laquelle il est demandé de tricoter ou crocheter des carrés de 20 cm de côté, qui seront installées et cousus ensemble ce jour-là dans le parc (suivre ce lien pour les informations pratiques). La journée aura lieu de 11h à 17h, il s’agira de recouvrir le garde-corps du kiosque par tous les carrés en cours d’assemblage… Vous pouvez encore faire parvenir les vôtres ay CRESAM!

Les 26 carrés tricotés pour le bombardement de fils à Poitiers le 27 juin 2021

Le tricot étant pour l’instant la seule activité manuelle que j’ai reprise parce qu’il n’y a pas besoin de se concentrer sur la vue ni d’accommoder tout le temps la vue, même si j’ai bien récupéré, ce n’est pas la peine de déclencher de la fatigue visuelle. Je vais accélérer pour en faire d’autres et il me reste à rentrer les fils… J’en ai finalement tricoté 26, en jersey, avec des restes de laine, des bandes, des torsades, des damiers ou d’autres motifs, et les ai remis la semaine dernière au CRESAM qui a commencé l’assemblage.

Ce même 27 juin 2021, je voterai aux élections départementales et régionales, je ferai également une « promenade » de 10 km dans le cadre de la Course des Héros 2021, pour collecter des fonds au profit de l’association Valentin Apac, association de porteurs d’anomalies chromosomiques.

Le voyant de Jérôme Garcin

Couverture de Le voyant de Jérôme GarcinC’est une amie, Paulette (revoir son témoignage sur le Frontstalag 230 à Poitiers) qui m’a prêté ce livre qui a reçu plusieurs prix littéraires en 2015 (prix littéraire de la ville de Caen, prix Nice Baie des Anges, prix Relay des voyageurs-lecteurs). Du même auteur, je vous ai aussi parlé de Olivier et Bleus horizons.

Le livre : Le voyant de Jérôme Garcin, collection blanche, NRF, éditions Gallimard, 2015, 192 pages, ISBN 9782070141647.

L’histoire : né à Paris le 19 septembre 1924, Jacques Lusseyran est victime, à huit ans, d’un stupide accident à l’école qui le rend aveugle. Avec la force de sa volonté et celle de sa mère, il apprend en quelques mois le braille, manie une machine à écrire braille, apprend à se déplacer lors de vacances en Anjou à Juvardeil et réintègre sa classe dès la rentrée suivante. Il poursuit de brillantes études en sixième au lycée Montaigne à Paris puis à partir de la troisième à Louis-le-Grand, apprend l’Allemand. Evacué à Toulouse de septembre 1939 pour un an, il rentre à Paris et organise dès le 21 mai 1941 les « Volontaires de la liberté », dans l’appartement familial et au lycée, réseau qui devient vite officiellement reconnu puis intégré à une structure plus grande. Inscrit en khâgne en 1942, il est sorti de la salle du concours de l’ENS, un aveugle n’a rien à y faire selon un arrêté du ministre… Dès lors, il se consacre entièrement au réseau, avant d’être arrêté le 20 juillet 1943, déporté en janvier 1944 à Buchenwald…

Mon avis: une histoire hors du commun, racontée de manière simple et très efficace par Jérôme Garcin, presque comme un roman d’aventures pour la partie « exaltée » de la résistance, plus « déprimante » pour le retour du camp, les mariages, l’enseignement aux Etats-Unis, le retour en France jusqu’à l’accident de voiture qui lui coûte la vie le 27 juillet 1971. C’est aussi l’histoire d’un combat pour vivre normalement malgré son handicap, et surtout pour que les aveugles ne soient plus exclus de la fonction publique, ce qui ne sera finalement acquis qu’en 1955! Peu de déportés ont témoigné juste après leur retour, envie de se reconstruire mais surtout exclusion de « ceux qui étaient restés » et qui ne comprennent pas quel a été leur enfer. Jacques Lusseyran, lui, a très vite écrit et publié Et la lumière fut, que je vais essayer de trouver. Alors que Geneviève De Gaulle, dont il avait rejoint le réseau (et est tombé en même temps), vient symboliquement d’être inhumée au Panthéon, un éditeur pourrait avoir la bonne idée de rééditer ce témoignage…

Puisque je suis sur le sujet de la Seconde Guerre mondiale, juste pour information, la ville de Strasbourg a révélé ce week-end que suite à la polémique lancée par l’université de Strasbourg elle-même contre le livre de Michel Cymes, Hippocrate aux enfers, des restes humains des victimes des expérimentations nazzies ont bien été retrouvés ces drenières semaines, ils seront remis à la communauté juive pour être inhumé avec les autres victimes du Struthof…