Archives par étiquette : roman graphique

Yossel, 19 avril 1943, de Joe Kubert

pioche-en-bib.jpgCouverture de Yossel, 19 avril 1943, de Joe KubertMardi (28 octobre 2014) a été inauguré à Varsovie le Musée de l’Histoire des Juifs Polonais (Muzeum Historii Żydów Polskich) ou Polin, dans le quartier qui a succédé à l’ancien ghetto, l’occasion pour moi de vous parler de cet album découvert chez Yaneck / Les chroniques de l’invisible. Je n’avais aucune chance de le trouver « par hasard » dans les bacs de la médiathèque, vu qu’il est « enterré à la réserve », ce qui est dommage…

Le livre: Yossel, 19 avril 1943, de Joe Kubert, traduit de l’anglais par Anne Capuron, éditions Delcourt, 2003, 121 planches, ISBN 978-2847896695.

L’histoire: 19 avril 1943, terrés dans les égouts, les derniers survivants du ghetto de Varsovie attendent l’assaut final. Yossel, un jeune adolescent, dessine et dessine encore. Retour quelques années en arrière, en 1939. La vie n’est pas facile pour la famille de Yossel, à Yzeran près de Varsovie. Un jour, ils sont regroupés avec d’autres juifs et envoyés dans le ghetto de Varsovie. Yossel, repéré par les nazis, dessine pour eux jour après jour. Ceux-ci n’ont même pas à faire la sélection, le Conseil des Anciens s’en charge, sourd aux avertissements, persuadés que les gens partent dans un camp de travail. Un jour, un rabbin est envoyé avec eux à Auschwitz, affecté aux Sonderkommandos puis aux Fours crématoires. Il réussit miraculeusement à s’échapper, revenir dans le ghetto, témoigner. Errant, il rencontre Yossel, raconte son histoire, tente de convaincre les gens pour le soulèvement du ghetto…

Une double page de Yossel, 19 avril 1943, de Joe KubertMon avis: contrairement à Art Spiegelman (Maus, un survivant raconte : tome 1 : mon père saigne l’histoire ; tome 2 : Et c’est là que mes ennuis ont commencé), Joe Kubert n’est pas le fils de l’un de ces déportés dont il raconte la (sur)vie. Il est né en 1926 de parents qui ont réussi à fuir la Pologne alors que sa mère était enceinte de lui. Arrivé à l’âge de deux mois à New-York, il explique dans son introduction qu’il a écrit ce roman graphique à partir de documentation et de témoignages, sans s’être rendu sur place, et son choix de laisser l’album au crayonné, sans procéder à son encrage, et en se libérant de la contrainte des cases. Cela donne une impression de spontanéité, mais donne parfois un dessin chargé, surtout qu’il y a un texte dense dans les phylactères.  Un roman graphique qui mérite son nom, roman, même s’il se base en grande partie sur des faits réels. Un peu comme un roman historique. Et qui au-delà, aborde la question de la survie (de Yossel grâce à ses dessins, du Sonderkommando, rabbin qui finit par ne plus croire en Dieu) et insiste sur le rôle clef du Conseil des Anciens dans la soumission du ghetto et l’envoi des « sélectionnés » aux camps… A découvrir, et pour la médiathèque de Poitiers, ça serait une bonne idée de le sortir de la réserve, que des lecteurs puissent « tomber dessus » par hasard, en cherchant de la lecture dans les bacs.

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Palestine, une nation occupée, de Joe Sacco

pioche-en-bib.jpgCouverture de Palestine, une nation occupée, de Joe SaccoJ’avais programmé cet article pour dans quelques semaines, j’ai changé l’ordre de publication et le publie dès aujourd’hui, au vu de l’actualité.

Après Gaza 1956, Goražde et Šoba (et dans un autre style Le premier jour de la bataille de la Somme, 1er juillet 1916) de , j’ai emprunté un autre titre du même auteur à la médiathèquePalestine, une nation occupée a reçu le prix France Info et le prix Tournesol au festival international de la BD d’Angoulême en 1999.

Le livre : Palestine, t. 1, une nation occupée de Joe Sacco (scénario et dessin), traduit de l’anglais (États-Unis) par des inconnus (aucune information dans l’ours, seulement des remerciements de l’éditeur), éditions Vertige Graphic,  141 planches et deux pages d’introduction, 1996 (plusieurs rééditions), ISBN 9782908981230.

L’histoire: en 1991-1992, en Palestine (Cisjordanie et bande de Gazah) et en Israël, en pleine intifada. En journaliste, Joe Sacco rend compte de son enquête sur les événements, il cherche des témoins directs, rapporte leurs témoignages, se rend dans les hôpitaux. Le taxi, le passage des check-points, l’implantation des colonies, les interrogatoires et la torture, la répression (destruction d’oliviers, seule ressource d’une famille, maisons rasées), la vie dans les camps mais aussi dans les prisons, la place de la femme dans cette société.

Exemple d'une double page de de Palestine, une nation occupée, de Joe SaccoMon avis: le volume rassemble des épisodes parus dans des revues, sous la forme de BD-reportages. Les bandes dessinées de Joe Sacco, à l’encre et pleines de détail, sont denses… Certaines pages aussi, à la limite de la lisibilité pour moi (même avec le visio-agrandisseur, texte trop dense)! Surtout que le lettrage alterne les minuscules et les majuscules, encore moins lisibles. C’est dommage car ce texte est très intéressant. Le passage qui m’a peut-être le plus frappé est celui sur la prison de Ansar III, une petite ville qui ressemble presque à un camp nazi (au moins à un camp d’internement, genre Frontstalag ou « ghetto moderne » comme Térézine): entassement dans des pièces ou des tentes, manque d’hygiène, de points d’eau et de toilettes, utilisation de gaz lacrymogènes, politique de gardiennage (pour éviter la compassion des gardiens), organisation du camp avec une « université populaire » ou au moins le partage de l’instruction.

Je vais chercher à la médiathèque la suite, Palestine, dans la bande de Gaza.

Pour rebondir sur des sujets voisins, suivre le mot-clef Palestine et voir en particulier:

Palestine de Hubert Haddad

Gaza 1956 de ,

Chroniques de Jérusalem de Guy Delisle

Comment comprendre Israël en 60 jours (ou moins) de Sarah Glidden

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Sept saisons de Ville Ranta

pioche-en-bib.jpgCouverture de Sept saisons de Ville RantaJ’ai déjà lu un certain nombre d’albums de Ville Ranta (L’exilé du Kalevala, Papa est un peu fatigué, Suite paradisiaque). Aussi, quand j’ai vu ce titre dans les nouvelles acquisitions de la médiathèque, je n’ai pas hésité, je l’ai emprunté!

Le livre : Sept saisons de Ville Ranta (scénario et dessin), traduit du finnois par Kirsi Kinnunen, éditions Çà et Là, 2013, 265 pages, ISBN 978-2-916207-89-6.

L’histoire : à Oulu, port finlandais au bord de la mer Baltique, vers 1840. Après trois ans de voyage à travers le monde, Maria Piponius revient dans sa ville natale. Elle tombe amoureuse de Hans Nyman, pasteur, journaliste et enseignant, veuf depuis un an, père de deux filles et à qui les convenances de la société luthérienne interdisent tout rapport sexuel (même si sa relation avec sa servante n’a rien de chaste), surtout qu’il espère bien être élu doyen de la communauté protestante d’Oulu. Cèderont-ils à leurs pulsions alors que la pensée piétiste le leur interdit?

Mon avis : Cet album rappelle L’exilé du Kalevala, qui se passe une dizaine d’année plus tôt, mais cette fois en couleurs dans la même verve que Suite paradisiaque. Ville Ranta s’est débarrassé de la contrainte des cases et des bulles, mais l’aquarelle délimite chaque scène, alternant des tons sombres, légers voire éclatants. Le titre annonce Sept saisons… qui sont finalement toutes très hivernales (Premières neiges, Au cœur de l’hiver, Glace et lumière, Nuits blanches, La rentrée, Bleu ténèbres et Neige mouillée). Les deux protagonistes sont torturés par leurs pulsions en désaccord avec leur rigorisme protestant, candidat  au poste de doyen de l’église luthérien pour l’un, piétiste et limite mystique pour elle. Le choc entre diktat de la religion et pulsions est très bien rendu au fil des pages, dans une ambiance froide et souvent neigeuse de ville du nord. Pulsions qui vont jusqu’à des scènes de sexe très réalistes entre hommes et femmes (comme Adam et Eve dans Suite paradisiaque) et même entre femmes lors d’un bain ou au sauna. L’ambiance de la petite ville, de son ambiance, de ses ragots peut parfois être lourde. A lire, surtout si vous avez déjà lu L’exilé du Kalevala.

Pour aller plus loin : voir le site officiel de Ville Ranta.

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Blast tome 3, la tête la première, de Manu Larcenet

Couverture de Blast tome 3, la tête la première, de Manu Larcenetpioche-en-bib.jpgEn vous parlant du tome 4 de Blast, pourvu que les bouddhistes se trompent, de Manu Larcenet, je m’étais aperçue que, après tome 1, grasse carcasse et le tome 2, l’apocalypse selon saint Jacky, j’avais oublié de vous parler du tome 3! Je l’ai ressorti de la médiathèque pour vous en parler.

Le livre : Blast, tome 3, la tête la première, de Manu Larcenet (scénario et dessin), éditions Dargaud, 2012, 204 pages, ISBN 9782205071047.

L’histoire : dans un commissariat quelque part en France, il y a pas mal d’années. Polza Mancini est toujours en garde à vue, les policiers tentent de le faire raconter sa vie en le confrontant à certains faits, et lui parle. D’abord son errance dans des maisons inoccupées, son entrée chez celle d’un suicidé dont il s’approprie les dessins, il s’inflige de graves lacérations, se retrouve interné à l’hôpital psychiatrique où il fait la connaissance de Roland Oudinot, schizophrène qui suit plus ou moins son traitement, avant de s’évader devant le refus du psychiatre de le laisser sortir…

Mon avis : comme dans les autres tomes de la série, le noir domine, entrecoupé par quelques cases très colorées. Entre quelques très belles planches dans la nature et aux sculptures géantes (moaï sur troncs d’arbres qui ont continué à grandir) de Roland, la confrontation à la folie de Mancini est brutale: pensées suicidaires, lacération, confrontation avec le psychiatre. Lui-même victime d’un viol, il souffre, mais tourne autour de la question des enquêteurs pour avouer: a–il tué Carole, la fille de Roland? Non, répond-il, en attendant la suite… dans le tome 4 de Blast, pourvu que les bouddhistes se trompent.

Une série à découvrir, même si c’est violent, cette confrontation à la folie qui a mené aux meurtres…

Manu Larcenet

Le combat ordinaire

Blast

Manu Larcenet et Daniel Casanave

  • Crevaisons (Une aventure rocambolesque du Soldat inconnu, tome 5)

Jean-Yves Ferri et Manu Larcenet

Le retour à la terre

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Ne vous inquiétez pas, de Tian

pioche-en-bib.jpgCouverture de Ne vous inquiétez pas, de TianJ’ai emprunté à la médiathèque la suite de L’année du Lièvre, de Tian, (revoir le tome 1, Au revoir Phnom Penh). Un troisième tome est annoncé.

Le livre : L’année du Lièvre, tome 2 Ne vous inquiétez pas de Tian (scénario, dessins et couleur), collection Bayou, éditions Gallimard, 2013, 116 pages, ISBN 9782070629589.

La présentation de l’éditeur :

Phnom Penh, 1975. Après la prise du pouvoir par les Khmers rouges, Khim, Lina et leur famille sont obligés de quitter la ville sans savoir où aller. Pour avoir tenté de passer la frontière, ils sont arrêtés et transférés dans un village. Ils vont y subir de plein fouet la violence du nouveau régime : les adultes travaillent dans les champs sans relâche tandis que les enfants apprennent à devenir des espions et à se méfier de leurs parents…

Mon avis : un album en couleur moins sombre dans sa forme que d’autres que j’ai lu ces derniers mois sur le sujet du Cambodge, mais plus dur que le premier tome, Au revoir Phnom Penh. Ici, il s’agit de « casser » les intellectuels en les soumettant au travail agricole. Les enfants sont endoctrinés, élevés à dénoncer leurs parents s’ils ne se soumettent pas. Les délateurs peuvent se trouver partout, ne serait-ce que pour améliorer leur propre condition de vie (pas toujours avec succès d’ailleurs). Torture morale, torture physique, disparitions, espoirs des familles peuplent cet album qui donne une autre vision (autobiographique) du génocide khmer vécu de l’intérieur, ne pas oublier, tout montrer, mais avec plus de retenue que dans les albums de Séra  (voir L’eau et la terre, Cambodge, 1975-1979 et Lendemains de cendres, Cambodge, 1979-1993). A découvrir absolument, en attendant la parution de la suite!

Pour aller plus loin sur l’histoire du Cambodge, voir aussi:

L’eau et la terre, Cambodge, 1975-1979 et Lendemains de cendres, Cambodge, 1979-1993, de Séra

L’année du Lièvre, tome 1, Au revoir Phnom Penh, de Tian

L’élimination de Rithy Panh

Kampuchéa de Patrick Deville.

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Une vie chinoise, 3, le temps de l’argent, de Ôtié et Li Kunwu

pioche-en-bib.jpgUne vie chinoise, tome 3, le temps de l'argent, de Ôtié et Li KunwuJ’ai emprunté à la médiathèque les trois tomes de Une vie chinoise. Après le temps du père, et le temps du parti voici le temps de l’argent pour clore cette plongée dans la grande mutation de la Chine ces cinquante dernières années, par le prisme d’une histoire personnelle et autobiographique de Li Kunwu dans le Yunnan.

Le livre : Une vie chinoise, tome 3, le temps de l’argent, de Philippe Ôtié (scénario) et Li Kunwu (dessin), collection Made in, éditions Kana, 2011, 271 pages, ISBN 9782505008828.

L’histoire : dans le Yunnan, à partir de 1982 et surtout dans les années 1990 et 2000. La Chine est en pleine évolution vers la société de consommation, de nombreux commerces privés voient le jour, des familles éclatent, la corruption semble généralisée. A Kunming, la capitale du Yunnan, des gratte-ciel vient le jour au détriment des vieux quartiers dont les maisons à cour carrée sont peu à peu détruites. Xiao Li, qui vient d’épouser FengFeng, une jeune doctoresse, fille d’un ami de son père, est journaliste-dessinateur au journal officiel de la province, le Yunnan Ribao (et bientôt aussi pour des campagnes publicitaires). En parallèle, quelques flashs vers sa vie actuelle, des entretiens avec son éditeur, l’interrogation sur comment parler du 6-4 (nom donné aux événements de la place Tien an Men en juin 1989) alors qu’il n’y a pas assisté.

Mon avis : comme les précédents, cet album est en noir et blanc, à la plume et au pinceau. Le mode narratif est un peu différent, avec des planches sur la réalisation de l’album en cours et des interrogations de l’auteur. Une trilogie à découvrir absolument pour sa découverte assez différente de la Chine par rapport à ce que rapportent les médias occidentaux ou les dissidents chinois… et particulièrement ce troisième tome, où les messages publicitaires remplacent sur les murs les messages de la propagande officielle… A la fin de l’album, il découvre Paris… et Angoulême, au festival international de la bande dessinée (revoir mes articles autour de la bande dessinée à Angoulême : le musée, transformé en 2012 en musée privé par Art Spiegelman, le festival 2011, le buste d’Hergé, les murs peints : Margerin et Morris, façade d’une mutuelle par Sineux).

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Couleur de peau: miel, tome 3, de Jung

pioche-en-bib.jpgCouverture de Couleur de peau, miel, tome 3, de JungAprès le tome 1 et le tome 2 puis l’adaptation au cinéma de Couleur de peau miel de Jung, j’ai emprunté le tome 3, qui est sorti il y a quelques mois, à la médiathèque.

Le livre : Couleur de peau : miel, tome 3 de Jung (scénario et dessin), Collection : Astrolabe, éditions Quadrants (Soleil), 2013, 142 planches noir et blanc, 978-2-302-03657-4 [les tois tomes existent aussi désormais en coffret].

L’histoire : en 2011 en Corée. Jung, accompagné de l’équipe qui réalise l’adaptation au cinéma de son histoire, repart sur les traces de son passé. Pour la première fois, il retourne en Corée et va essayer d’accéder à son dossier et à davantage d’informations sur ses parents naturels, revenant régulièrement sur son passé, dans ses souvenirs.

Mon avis : j’ai été plutôt déçue par ce dernier tome. Il est, je trouve, trop redondant par rapport à l’adaptation au cinéma et au tome 1 et au tome 2 (je vous invite vraiment à lire ou relire ces deux premiers tomes), avec des répétitions comme l’histoire de l’ulcère provoqué par un excès de tabasco. Certes, le dessin est toujours incisif, mais il n’approfondit pas la question de savoir s’il est « asiatique en Belgique » (successivement, au gré des vagues de touristes, Japonais, Chinois, etc.) ou étranger en Corée. De même, je trouve qu’il aborde de manière trop superficielle la question pourtant centrale de la quête de l’identité et surtout du mal-être qui a conduit nombre d’enfants adoptés, devenus adolescents ou adultes, à se suicider, ni sur la mort de sa soeur adoptive et elle aussi venue de Corée (accident? suicide?). Voir aussi l’avis de Audouchoc.

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Blast tome 4, pourvu que les bouddhistes se trompent, de Manu Larcenet

pioche-en-bib.jpgCouverture de Blast tome 4, pourvu que les bouddhistes se trompent, de Manu LarcenetJe viens d’emprunter le tome 4 de Blast, de Manu Larcenet, sélectionné dans les nouvelles acquisitions de la médiathèque. Tiens, je m’aperçois que j’ai oublié de vous parler du tome 3… En attendant [voir désormais tome 3, la tête la première], vous pouvez relire Blast mes avis sur le tome 1, grasse carcasse et le tome 2, l’apocalypse selon saint Jacky.

Le livre : Blast, tome 4, pourvu que les bouddhistes se trompent de Manu Larcenet (scénario et dessin), éditions Dargaud, 2014, 202 pages, ISBN 9782205072730.

L’histoire : dans un commissariat quelque part dans une grande ville française, il y a pas mal d’années (les policiers fument dans le bureau… et les policiers qui reviennent aujourd’hui sur l’affaire pour un documentaire sont à la retraite). Confronté aux faits collectés par les enquêteurs, Polza Mancini continue à raconter sa vie jusqu’aux faits qui l’ont amené dans ce bureau. Toujours aussi obèse, il passe ses derniers mois d’hiver avec Roland et Carole, sa fille. Roland dessine des portraits pornographiques et révèle peu à peu à Blast son passé, jusqu’à ce qu’il commette le viol de trop sur sa fille… Quel est le rôle de cet emballage de barre chocolatée Funky ? Blast a-t-il bien tué Roland, Carole et quelques autres personnes croisées dans les tomes précédents?

Mon avis : comme dans les précédents albums, le noir domine, entrecoupé par quelques cases très colorées, les cauchemars, les dessins pornographiques de Roland et quelques planches de « Comics » de Jasper l’ours bipolaire, qui viennent donner comme une « respiration » dans la noirceur des planches et du récit. De même, bien que noires, certaines planches, généralement de nuit, montrent un nature de toute beauté (forêt, écureuil, rapaces, cerfs, renard, etc.) qui tranche avec la lourdeur du récit sur fond d’alcoolisme, de viol, d’inceste, de suicide. La forme narrative est aussi intéressante, avec d’un côté l’opposition interrogatoire par les flics / plongée dans la vie de Mancini  puis, dans la dernière partie, interrogatoire des flics à la retraite par le documentariste / récit des instants qui ont précédé le dénouement de l’affaire. Une série à découvrir absolument, une œuvre magistrale de près de 1000 planches au total qui ne laissera personne indifférent.

Manu Larcenet

Le combat ordinaire

Blast

Manu Larcenet et Daniel Casanave

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Jean-Yves Ferri et Manu Larcenet

Le retour à la terre

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Au revoir Phnom Penh de Tian

pioche-en-bib.jpgCouverture de Au revoir Phnom Penh de TianUne bande dessinée dont j’avais lu une critique du deuxième tome dans Télérama, j’ai trouvé le début dans une annexe de la médiathèque, j’ai maintenant lu la suite, Ne vous inquiétez pas.

Le livre : L’année du Lièvre, tome 1, Au revoir Phnom Penh de Tian (scénario, dessins et couleur), préface de Rithy Panh, collection Bayou, éditions Gallimard, 2011, 120 pages, ISBN 9782070629572.

L’histoire : Phnom Penh, 17 avril 1975. Les Khmers rouges viennent de prendre le contrôle de la capitale du Cambodge. Ils chassent les habitants de la ville, parmi eux, Lina, sur le point d’accoucher, son mari médecin et toute la famille. Très vite, ils apprennent à survivre, réussissent à échanger les maigres biens qu’ils ont emporté contre de la nourriture ou de l’aide, échappent aux premiers massacres en cachant leur métier.

Mon avis : un album en couleur beaucoup moins sombre dans sa forme que d’autres que j’ai lu ces derniers mois sur le sujet du Cambodge. Le bébé né dans la débâcle, c’est l’auteur de cet album… Des cartes au fil des pages (en tête de chaque chapitre) permettent de se repérer. Le traitement beaucoup plus doux que celui de Séra (voir L’eau et la terre, Cambodge, 1975-1979) m’a semblé finalement plus efficace pour comprendre cette période noire et le génocide commis par les Khmers rouges. Il parle aussi d’une histoire différente, puisqu’ici, la famille a réussi à se cacher et à échapper aux massacres et à l’internement dans des camps de travail à la campagne. Un album à lire absolument!

Pour aller plus loin sur l’histoire du Cambodge, voir aussi:

L’eau et la terre, Cambodge, 1975-1979 et Lendemains de cendres, Cambodge, 1979-1993, de Séra

L’élimination de Rithy Panh

Kampuchéa de Patrick Deville.

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Une vie chinoise, 2, le temps du parti, de Ôtié et Li Kunwu

pioche-en-bib.jpgCouverture de Une vie chinoise, tome 2, le temps du parti, de Ôtié et Li KunwuJ’ai emprunté à la médiathèque les trois tomes de Une vie chinoise. Après le temps du père, voici le tome 2 (le temps du parti) en attendant le tome 3 (le temps de l’argent) pour une plongée dans la grande mutation de la Chine ces cinquante dernières années, par le prisme d’une histoire personnelle et autobiographique de Li Kunwu dans le Yunnan.

Le livre : Une vie chinoise, tome 2, le temps du parti, de Philippe Ôtié (scénario) et Li Kunwu (dessin), collection Made in, éditions Kana, 2009, 198 pages, ISBN 9782505007616.

L’histoire : 13 septembre 1976, Mao Zedong est enterré à Pékin, toute la Chine est en deuil, Xiao Li aussi, dans son Yunnan. La « bande des quatre » (Zhang Chunqiao, Wang Hongwen, Yao Wenyuan et Jiang Qing, épouse de Mao), qui avait été à l’origine de la révolution culturelle est arrêtée, le parti communiste se relance… Deng Xiaoping lance le mouvement de libération (de la pensée, de l’art)… dans certaines limites! Après dix ans de camp de rééducation, le père de Xiao Li est libéré et redevient dirigeant de son secteur, mais lui reste à la porte à sa première candidature, parce que ses grands-parents étaient des propriétaires terriens. Ses talents de dessinateur sont remarqués, il est embauché comme journaliste caricaturiste dans le journal régional… et finit par être accepté au parti communiste!

Mon avis : un album en noir et blanc qui mêle travail à la plume et peinture au pinceau. La « nouvelle révolution » de Deng Xiaoping semble plus légère que la grande famine ou la révolution culturelle (revoir le temps du père), mais reste dans « la ligne ». Le narrateur ne peut entrer (à sa première demande) au parti communiste à cause du passé de propriétaire terrien de ses grands-parents. La production agricole reste ne obsession du pouvoir. Comme soldat, il est envoyé plusieurs années dans une ferme isolée, avant d’être appelé à être un dessinateur officiel au service de la propagande. Un album qui m’a bien plu, rendant compte de la vie en Chine « de l’intérieur », de la part d’un fervent soutien du régime, endoctriné dès son enfance, et non de la part d’un dissident…

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