Archives par étiquette : prix littéraire

Mauvais genre de Chloé Cruchaudet

Logo BD for Womenpioche-en-bib.jpgJe vous parle rarement deux jours en suivant de bandes dessinées… Mais cela faisait plusieurs semaines que j’étais sur la liste d’attente de la médiathèque pour avoir cet album, dont on parle beaucoup en ce moment, récupéré hier et en lice pour le prix du meilleur album qui sera remis demain à Angoulême à l’occasion du  41e festival international de la Bande dessinée (revoir autour de la bande dessinée à Angoulême : le musée, transformé en 2012 en musée privé par Art Spiegelman, le festival 2011, le buste d’Hergé, les murs peints : Margerin et Morris, façade d’une mutuelle par Sineux). Il a déjà reçu le Grand prix de la critique de bande dessinée 2014. [PS: il a finalement reçu le prix du jury, le grand prix est revenu à Come prima d’Alfred, le prix spécial du jury à La propriété, de l’israelienne Rutu Modan, une auteure dont je vous ai parlé pour Exit wounds. Le grand prix revient à Bill Watterson, le créateur de Calvin et Hobbes, qui présidera le festival 2015].

Le livre : Mauvais genre de Chloé Cruchaudet (scénario, dessins et couleurs), collection Mirages, éditions Delcourt, 2013, 160 pages, ISBN 978-2-7560-3971-8.

L’histoire : Dans un prétoire dans les années 1920. Une femme comparaît, on ne comprend pas pourquoi au premier abord. Retour en arrière, quelque part sur le front lors de la Première guerre mondiale. Paul, séparé de Louise juste après leur mariage, est confronté à la mort de trop, celle d’un camarade décapité devant lui, alors qu’il venait de « pêter les plombs ». Il décide de se mutiler un doigt, fera tout pour que sa blessure se sur-infecte. Mais voilà, un doigt en moins, ça ne suffit pas à être réformé. Il décide de déserter, retrouve Louise qui le cache dans un hôtel à Paris. Un peu par hasard, parce qu’il veut sortir prendre l’air et s’acheter une bouteille, il revêt les habits de Louise. Vient alors l’idée de continuer à vivre au grand jour, sous les traits d’une femme, Suzanne… ce qui va le mener à prendre un métier féminin, puis au bois de Boulogne.

Mon avis: La première guerre mondiale est à la mode en cette année de commémoration du centenaire, en voici une histoire singulière, celle d’un déserteur. Dans le concert de louanges autour de cet album, je vais avoir une note un peu discordante. J’ai beaucoup aimé le scénario, mais eu beaucoup plus de mal avec le dessin, noir et blanc aquarellé en gris, sauf, au fil des pages, des rehauts de rouge, notamment pour des vêtements. L’alcool semble jouer un rôle important: lors de la rencontre avant guerre dans une guinguette, pour la première sortie de Paul après sa désertion, pour faire la fête avec les collègues de travail, ce qui l’amènera à découvrir le bois de Boulogne. J’ai préféré la première partie, l’ambiance des tranchées rappelle les sombre tableaux d’Otto Dix par exemple. La suite est une belle histoire d’amour, un travestissement presque « par accident », de plus en plus assumé au fil des jours et des mois, des années même… puisqu’il a fallu attendre 1928 pour que les déserteurs soient amnistiés. Le retour à la vie de Paul sera tragique pour « Suzanne ».

PS: j’ai aussi reçu l’avis de Maryse, sans blog, à qui j’avais prêté l’album avant son retour à la médiathèque. Le voici:

Cette BD m’a été prêtée par Véronique, et moi qui ne suis pas trop BD, je l’ai lue d’un trait et relue. Scénario et graphisme superbes. Pour moi, enfin un contre-héros. Le poilu classique honoré et glorifié, terminé! Ici, c’est un homme qui déserte, qui se travestit pour vivre et survivre. On ne sait pas trop si on le plaint ou si on le déteste. Il se transforme en femme et on est surpris d’être tenu en haleine pour savoir jusqu’où il est capable d’aller. En face, sa femme qui l’a épousé avant qu’il ne parte à la guerre. Au début, elle est effacée, timide puis son personnage devient de plus en plus important, elle encourage son mari dans sa transformation, lui donne des conseils. Elle évolue et partage ses goûts homosexuels et « pervers » dans les bois où tout est permis. Elle devient plus putain que lui, jusqu’au bout…sans vous révéler la fin bien sûr. Vraiment à lire et relire… Très Bien +++++

Pour aller plus loin : voir le site officiel de Chloé Cruchaudet.

Logo du top BD des blogueurs 2013 Cette BD sera soumise pour le classement du TOP BD des blogueurs organisé par Yaneck / Les chroniques de l’invisible. Mes chroniques BD sont regroupées dans la catégorie pour les BD et par auteur sur la page BD dans ma bibliothèque.

Des fourmis dans les jambes d’Arnaud Gautelier et Renaud Pennelle

pioche-en-bib.jpgCouverture de Des fourmis dans les jambes d'Arnaud Gautelier et Renaud PennelleUne bande dessinée trouvée dans les bacs de la médiathèque. Elle a reçu le prix 2012 Paroles de patients et le trophée « Les Bds qui font la différence » au festival de la bande dessinée d’Angoulême en 2013.

Le livre : Des fourmis dans les jambes, de Arnaud Gautelier (scénario) et Renaud Pennelle (dessins), collection Atmosphères, éditions Emmanuel Proust, 2012, 139 pages suivies d’un dossier de trois pages du Dr David Laplaud, ISBN 978-2848103914.

L’histoire : de nos jours à Paris puis à Nantes. Alex Gaultier, graphiste en publicité, a 33 ans et vit depuis une grosse dizaine d’années avec une sclérose en plaques, marche avec difficulté avec des béquilles ou se déplace avec le « tank de la sécu » (le lourd fauteuil roulant de base) pour les trajets plus longs. Sa femme, Chloé, est au chômage, ils vivent dans un appartement avec Marion, leur fillette de 5 ans. Paris est complètement inadapté au handicap, inaccessibilité des trottoirs, des transports en commun, difficulté pour qu’on lui laisse une place. A l’hôpital, il est complètement dépersonnalisé (le neurologue l’appelle « on » et pas « vous », les traitements d’urgence aux corticoïdes en cas de poussée se font dans une salle bondée). Aussi, quand Chloé se voit proposer un travail à Nantes, plus près de chez ses parents, ils hésitent un moment (Alex est un « pur parisien » à qui « la province » fait peur) mais finissent par partir et trouvent un monde très différent, mieux adapté, des gens prêts à l’aider dans les transports, un suivi plus humain à l’hôpital, une prise en charge active…

Mon avis : l’album, basé sur l’histoire personnelle d’Arnaud Gautelier, aborde les diverses difficultés de la sclérose en plaques, les douleurs, les traitements, mais aussi la vie de couple, l’insertion dans la vie quotidienne et professionnelle, le regard des autres, très différent entre Paris et Nantes, avec de nombreuses touches d’humour. D’un point de vue graphique, le dessin au crayon rehaussé de lavis m’a un peu déroutée au début, surtout le traitement des visages, mais je me suis laissée portée par le récit.

Pour aller plus loin: voir le blog d’Arnaud Gautelier.

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Syngué Sabour, pierre de patience, de Atiq Rahimi

pioche-en-bib.jpgCouverture de Syngué Sabour, pierre de patience, de Atiq RahimiJe n’avais pas lu ce livre quand il a reçu le prix Goncourt en 2008 ni vu le film qui en a été adapté l’année dernière par l’auteur lui-même… mais en le voyant par hasard dans les rayonnages de la médiathèque, je l’ai emprunté [depuis, j’ai aussi lu La ballade du calame].

Le livre : Syngué Sabour, pierre de patience de Atiq Rahimi, éditions POL, 2008, 160 pages, ISBN 978-2-84682-277-0.

L’histoire : en Afghanistan (ou ailleurs, dit le début du livre), dans une chambre. Une femme veille, égrène un chapelet, psalmodie les noms de Dieu au fil des grains (99 grains à passer 99 tours par jour), depuis plus de deux semaines aux côtés d’un homme qui git, inerte, une balle dans la nuque, une perfusion dans le bras. Quand il n’y a plus de liquide, ce sera un mélange d’eau salée sucrée dans la bouche, des gouttes dans les yeux qu’il garde ouverts… Dehors, deux petites filles qui ne comprennent pas ce qui se passe, la guerre qui continue, la voisine qui tousse, les frères du blessé qui ont disparu, l’imam qui vient en visite le soir, une explosion toute proche, la femme qui craque et raconte à son époux, à ce corps qui continue de respirer sans réaction ce qu’elle a sur le cœur depuis leurs dix ans de mariage… dont seulement trois ensembles, lui ayant passé les autres « à la guerre ».

Mon avis : un livre écrit en français par le poète persan Atiq Rahimi. Pas de séparation en chapitres, juste un saut de ligne ici ou là, un récit qui se lit d’un long souffle, au rythme de la respiration du blessé, de la litanie de sa femme qui peu à peu se transforme, passe de la femme soumise qui, mariée enfant à côté d’une photographie, a attendu trois ans le retour de l’homme, à la femme qui s’assume, finit par se prostituer avec un homme armé entré dans la pièce, alors qu’elle a caché dans un placard son mari pour le protéger, continuant à s’occuper de lui. Petit à petit, elle (s’)avoue qu’elle a déjà tenté de vivre pour elle-même, en se rebellant contre son père qui préférait ses cailles de combat à ses sept filles, en trouvant une solution à la stérilité de son mari, en survivant dans cette pièce au milieu des tirs… Un livre à découvrir!

Le coin du voile de Laurence Cossé

Couverture de Le coin du voile de Laurence CosséUn livre prêté par Emmanuelle / le Marquoir d’Élise lors de ma dernière journée à  (revoir les articles sur l’exposition Pierre Albert-Birot et la confiture). Il avait reçu le prix Roland de Jouvenel de l’académie française en 1997 (et le prix des écrivains croyants en 1996).

Le livre : Le coin du voile de Laurence Cossé, NRF collection blanche, éditions Gallimard, 1996, 263 pages, ISBN 9782070730298.

L’histoire : Paris, mai 1999. Bertrand Beaulieu, un casuiste, termine de lire son courrier du jour et repère une enveloppe envoyée par Mauduit, un prêtre défroqué qui lui a déjà envoyé ces derniers mois diverses preuves de l’existence de Dieu… qui s’étaient avérées erronées. Cette fois-ci, il en est sûr, en six feuillets, il s’agit d’une preuve irréfutable qui va changer le monde. Il s’en ouvre à l’un de ses collègues et amis, Hervé, puis à Hubert Le Dangeolet, le supérieur (le provincial) de l’ordre… qui prend l’avis de deux experts théologiens de la compagnie… tous semblent illuminés par ce qu’ils lisent. Le texte est enfermé dans un coffre-fort, mais très vite, le gouvernement, le Premier ministre, l’archevêque de Paris sont au courant. Une question cruciale: quelles seront les conséquences de cette révélation si elle est dévoilée au grand public? faut-il la garder secrète? Un voyage à Rome pour prendre d’autres avis s’impose…

Mon avis : Merci à toi, Emmanuelle / le Marquoir d’Élise, pour ce livre qui m’a bien plu… même si je n’ai toujours pas la « preuve irréfutable de l’existence de Dieu », 😉 , au centre du roman mais qui reste soigneusement cachée et mystérieuse… Au-delà du débat théologique, le processus de la rumeur, des fuites involontaires ou non est au cœur du livre. Un petit clin d’œil rigolo avec l’étude expresse commandée par le ministère de l’intérieur à une société de conseil pour savoir quelles seraient les conséquences de la révélation de la preuve de l’existence de Dieu sur l’économie mondiale… ou sur l’intuition des casuistes (jésuites, avec une saveur particulière aujourd’hui, le pape actuel étant issu de cette compagnie) qu’ils deviendraient inutiles si cette même preuve était divulguée. La fin est un peu curieuse… mais c’est un livre agréable et avec pas mal de pointes d’humour… A vous de lever un coin du voile en feuilletant les pages?

 

Un léger déplacement de Marie Sizun

pioche-en-bib.jpgCouverture de Un léger déplacement de Marie SizunUn livre trouvé à la médiathèque. Il a reçu le Prix Exbrayat 2012.

Le livre : Un léger déplacement de Marie Sizun, éditions Arléa, 2012, 230 pages, ISBN 9782869599710.

L’histoire : Paris, sans doute en 2007 (1962 plus 35 ans). Hélène / Ellen / Lena rentre à Paris après trente-cinq ans d’absence, pour régler la succession de l’appartement de ses parents rue du Cherche-Midi après la mort de sa belle-mère, Ida Zollmacher qui en avait l’usufruit depuis une trentaine d’années et la mort du père. Elle a laissé à New-York Norman, son mari, et leur petite librairie de Chelsea. A Paris, elle se trouve confrontée aux fantômes du passé, la mort de sa mère quand elle avait huit ans, l’arrivée de la comptable de la boutique de chaussures de son père, qui l’épouse très vite, et son fils Stéphane, mais aussi Ivan, un ami de son année de terminale, parti à la guerre d’Algérie l’été suivant… Ce retour sur le passé lui permettra-t-il d’affronter le présent et de se réconcilier avec ses trois personnalités, Hélène de ses parents, Ellen de New-York, Lena de sa belle-mère et Ivan?

Mon avis : j’ai beaucoup aimé ce roman au style clair, agréable à lire, sur le Paris d’hier et d’aujourd’hui, la quête du passé en partie effacé (ou reconstruit) par la mémoire. Retrouvera-t-elle le visage de sa mère, comme effacé? Pourquoi n’est-elle pas revenue à Paris en 35 ans, sauf quelques jours à la mort de son père il y a vingt ans? Et cette fois-ci, restera-t-elle ou laissera-t-elle le notaire s’occuper de la vente de l’appartement? Est-il bien raisonnable de le vendre? Et ce mystérieux demi-frère qui a mal tourné, drogue, prison, fâché avec Ida, qui est- il vraiment? Qu’est-ce qui est arrivé à Ivan en Algérie puis à son retour deux ans plus tard? Autant de questions qui se succèdent, se mêlent au fil du récit et soutiennent le rythme.

Laver les ombres de Jeanne Benameur

pioche-en-bib.jpgCouverture de Laver les ombres de Jeanne BenameurJ’ai emprunté à la médiathèque ce livre qui a reçu le prix du livre Poitou-Charentes en 2009 (j’en ai lu un certain nombre, voir le récapitulatif ici). PS: depuis, j’ai aussi lu de cette auteure Profanes.

Le livre : Laver les ombres de Jeanne Benameur, éditions Actes Sud, 2008, 159 pages, ISBN 978-2742777013.

L’histoire : de nos jours dans une grande ville. Lea, 36 ans [sa mère a 76 ans et l’a eu quand elle avait 40 ans], danseuse et chorégraphe, travaille au montage de son prochain spectacle tout en poursuivant une relation avec Bruno, son amant peintre pour qui elle finit par accepter de poser nue. En parallèle, à Naples, de 1940 à 1942, une jeune fille, Romilda /Suzanne, est contrainte à la prostitution par Jean-Baptiste, un homme dont elle pense être tombée amoureuse à l’âge de 16 ans dans le bistrot tenu par sa mère, seule après le départ du père à la guerre. Lea fuit la séance de pose, se retrouve chez sa mère, qui lui a dit il y a quelques jours qu’elle avait des choses importantes à lui révéler, dans une maison côtière où elle s’apprête à subir une violente tempête… une nuit de retrouvailles où tout sera dit, Naples (la grande maison, les clients soldats, la maladie), le mariage en France, l’arrivée tardive de l’enfant, la mort accidentelle du père quand elle avait 6 ans.

Mon avis : un récit fort, la mère et la fille en parallèle, hier (dans les années 1940) à Naples et aujourd’hui, jusqu’à ce qu’elles se retrouvent dans le huis-clos de la chambre alors que la tempête fait rage dehors… et qu’apparaisse en filigrane, intercalé à son tour, le récit de Bruno, abandonné en pleine séance de pose par Lea. Une forme qui donne une grande force à ce texte.

L’enfance d’Alan d’Emmanuel Guibert

pioche-en-bib.jpgL'enfance d'Alan d'Emmanuel GuibertPour la mise en ligne automatique de mes articles programmés sous word-press, le problème est réglé, Philippe / Tout Poitiers a trouvé un pluggin qui permet de forcer la mise en ligne de ces articles quand le serveur de l’hébergeur déconnecte trop vite: WP Missed Schedule. Ça semble bien fonctionner. Un grand merci à lui!

Une bande dessinée trouvée dans les bacs de la médiathèque. Il a reçu le Grand Prix de la Critique de l’ACBD (l’Association des Critiques et journalistes de Bande Dessinée) en 2013. De cet auteur, j’avais adoré le Photographe (voir tome 1, tome 2 et  tome 3). J’ai aussi lu La guerre d’Alan, tome 1tome 2 et tome 3 et et Des nouvelles d’Alain (Keller Alain, Guibert Emmanuel et  Lemercier Frédéric).

Le livre : L’enfance d’Alan, d’après les souvenirs d’Alan Ingram Cope de Emmanuel Guibert (scénario et dessin), collection Ciboulette, éditions de L’Association, 2012, 159 pages, ISBN 9782844144553.

L’histoire : en Californie à la fin des années 1920 et dans les années 1930. Dans son enfance, Alan Ingram Cope a déménagé 14 fois entre Los Angeles, Alhambra, Santa Barbara, Pasadena… Il a quatre ans en 1929 lorsque survient la grande dépression. Ses parents tirent un peu le diable par la queue, même si son père est professeur, et doivent aussi régulièrement accueillir les grands parents, chassés de chez eux par l’un des oncles d’Alan. L’enfant vit une vie heureuse, découvre son environnement (gare aux plantes venimeuse), sa famille au cours de visites, qui s’achève par une tragédie à la fin de l’album, alors qu’Alan a onze ans…

Mon avis : Emmanuel Guibert a rencontré par hasard Alan Ingram Cope sur l’île de Ré en 1994, ils sont devenus amis, Alan est mort en 1999. De leurs rencontres, Emmanuel Guibert a tiré une série sur la deuxième guerre mondiale (La guerre d’Alan, en trois tomes, que je n’ai pas encore lus). Il aborde désormais la vie d’Alan avant la guerre, en commençant par le début, l’enfance (l’adolescence est annoncée dans un second tome). L’album est en noir et blanc, avec une grande place au texte, qui parfois occupe la majeure partie de la page, et, comme dans Le Photographe, quelques photographies redessinées. Une dizaine de planches, en introduction, sont en couleur et soulignent la différence entre la Californie d’aujourd’hui et la Californie des années 1930, passée d’une banlieue assez rurale « sans smog » à une mégalopole. J’ai bien aimé ce récit d’une vie toute simple, ordinaire, oserai-je dire normale?

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Le sermon sur la chute de Rome de Jérôme Ferrari

Couverture de Le sermon sur la chute de Rome de Jérôme Ferraripioche-en-bib.jpgUn livre récupéré à la médiathèque après une longue et lente remontée sur la liste d’attente des réservations, prix Goncourt 2012 oblige.

Le livre : Le sermon sur la chute de Rome de Jérôme Ferrari, éditions Actes sud, 2012, 202 pages, ISBN 978-2-330-01259-5.

L’histoire : en Corse, entre 1918 et nos jours. Enfin, 1918, c’est une photographie de famille, celle de Marcel, qui n’est pas sur la photo (il n’est pas encore né), pas plus que son père, encore prisonnier en Allemagne. L’histoire tourne autour du petit-fils de Marcel, Matthieu Antonetti, et surtout autour du bar du village. Ce bar a déjà été repris par un homme du cru, il n’a jamais payé le loyer, puis par un couple du continent, avec enfants, après un début prometteur, la mère finit par fuir, laissant son mari qui a été converti au jeu -excessif. Matthieu Antonetti, qui avait commencé des études de philosophie à Paris, décide de revenir au village avec son meilleur ami, Libéro, et de reprendre le bar.

Mon avis : j’ai eu beaucoup de mal avec le style, des phrases parfois très longues, où l’on se perd, se noye. Pas facile au début de se repérer dans le temps: est-on en 1918, dans l’histoire de Marcel, qui fuit sa Corse natale, ou aujourd’hui, dans l’évolution de la vie du bar, ou à une autre époque? Le bar est-il maudit ou les patrons successifs condamnés à sombrer en se laissant manipuler par les clients (jeu d’argent, alcool, tournées non payées) ou les serveuses qui prennent le pouvoir (par le sexe, tout en détournant une partie de la recette)? La nature humaine est-elle faite uniquement de stupre et de corruption? Quant au rapport avec le titre et le sermon de saint Augustin sur la fragilité du monde terrestre, je n’ai pas vraiment compris…

Logo rentrée littéraire 2012Ce livre entre dans le cadre du défi 1% de la rentrée littéraire organisé à nouveau cette année par Hérisson.

La parenthèse d’Elodie Durand

Couverture de La Parenthèse d'Elodie Durand Logo BD for Womenpioche-en-bib.jpgJe réédite cet article paru il y a deux ans… Élodie Durand sera présente à Niort (hôpital) le vendredi 15 mars 2013 à 19h30 et à Poitiers (CHU) le samedi 16 mars à 17h30, pour un débat autour de l’épilepsie. Toutes les informations sur le site de l’association 9e art. L’album a reçu le prix de la révélation au festival d’Angoulême 2011 et le prix Libération.

Article du 25 mars 2011

J’ai lu une critique qui m’a tentée (oups, je n’ai pas noté, impossible de retrouver chez qui), je l’ai réservé à la médiathèque et l’ai lu juste avant qu’il ne reçoive le prix de la révélation au Festival d’Angoulême 2011.

Le livre : La parenthèse de Élodie Durand (scénario et dessin), collection Encrages, éditions Delcourt, 2010, 221 pages, ISBN 978-2-7560-1703-7.

L’histoire : Paris, au milieu des années 2000. Avec l’aide de ses proches, Judith tente de reconstituer son histoire. 1995. Judith a 20 ans, est étudiante en maîtrise. Cet été là, alors qu’elle est monitrice de colonie de vacances, elle ressent les premiers malaises, ou plutôt, ses camarades repèrent des malaises (absences, perte de l’équilibre…) dont elle ne se souvient pas. Elle finit par consulter un neurologue, elle souffre de crises d’épilepsie. Des crises de plus en plus fréquentes, résistantes aux multiples traitements, dont la cause finit par être être connue, elle a une minuscule tumeur (maligne ? bénigne ?) au cerveau. Le problème, en plus des crises d’épilepsie, c’est qu’elle est inaccessible à la chirurgie. Après la biopsie, une méthode expérimentale est tentée à Marseille… Le traitement, délicat, sera-t-il efficace ?

Mon avis : un témoignage puissant sur une tumeur mal placée au cerveau, mais surtout sur l’épilepsie non maîtrisée par les médicaments. Si ceux-ci ne parviennent pas à limiter les crises, ils shootent en revanche complètement Judith. La perte de mémoire, de plus en plus importante, jusqu’à perdre tous ses souvenirs, la lecture, l’écriture, est liée aux crises bien sûr, mais aussi aux traitements… Trois ans de longs traitements… Les dessins réalisés pendant sa maladie et réintégrés dans le récit sont d’une force terrifiante. Le dessin en noir et blanc est fort, tout au long du récit, avec par moment des cases pleines à craquer… Mais pourquoi avoir appelé le personnage Judith, alors qu’il s’agit apparemment d’un récit autobiographique d’Élodie Durand? Parce qu’en se reconstruisant, elle ne se reconnaît pas dans les souvenirs absents et reconstruits avec l’aide de ses proches et notamment de ses parents?

Pour aller plus loin : voir le site de Élodie Durand.

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Certaines n’avaient jamais vu la mer, de Julie Otsuka

Couverture de Certaines n'avaient jamais vu la mer, de Julie OtsukaUn livre prêté par une amie… il a reçu le prix Fémina étranger en 2012.

Le livre : Certaines n’avaient jamais vu la mer de Julie Otsuka, traduit de l’anglais américain par Carine Chichereau, collection domaine étranger, éditions Phébus, 2012, 142 pages, ISBN 9782752906700.

L’histoire : en 1919 [ce n’est pas dit, mais au moment de la déportation des Japonais en 1942, une fille était arrivée depuis 23 ans], sur un bateau entre le Japon et les États-Unis. Des dizaines de très jeunes filles japonaises, beaucoup vierges, sont du voyage, elles doivent retrouver à l’arriver un Japonais travaillant aux États-Unis, à qui elles ont été mariées par procuration avant leur départ. Après une longue et éprouvante traversée, la première nuit à San Francisco se passe dans des hôtels, des chambres borgnes… Puis c’est le désenchantement, point de riche mari, mais des travailleurs pauvres employés dans des exploitations agricoles ou des maisons…

Mon avis : la fin de l’histoire, le regroupement des travailleurs japonais dans des camps d’internement, je l’ai découverte il y a des années dans  Es-tu maître de l’aube ?, de Pearl Buck et beaucoup plus récemment dans Citoyenne 13 660 de Miné Okubo et dans Si loin de vous de Nina Revoyr. En revanche, aucun de ces ouvrages n’abordait la question de ces filles, parfois mineures, mariées de force, ni le quasi esclavagisme des ouvriers agricoles japonais… Entre les deux guerres, à force de travail, la plupart vont améliorer leurs conditions de vie, avec l’espoir mis dans la scolarisation des enfants nés de ces unions.

La forme du livre est originale, mais pas toujours facile à suivre: les voix de différentes femmes se mêlent pour témoigner tour à tour du voyage, de l’arrivée, du travail, de la déportation… des voix qui se mêlent dans la narration d’un « nous » collectif ou plutôt ensemble d’individualités.

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Ce livre entre dans le cadre du défi 1% de la rentrée littéraire organisé à nouveau cette année par Hérisson.