Cela fait très longtemps que je n’avais pas lu de livre de Didier van Cauwelaert, en tout cas pas depuis plusieurs années… J’ai sorti ce livre, qui a reçu le prix Goncourt en 1994, au hasard de mes pérégrinations dans le rayon « basse vision » de la médiathèque. Même si je récupère peu à peu sur le plan visuel, les livres en gros caractères (et surtout avec de larges interlignes) restent plus faciles d’accès pour l’instant et retardent surtout l’apparition de la diplopie (vision double).
Le livre: Un aller simple de Didier van Cauwelaert (lu en large vision aux éditions VDB), éditions Albin Michel, 1994, 208 p., ISBN 9782226070104.
L’histoire: dans les années 1990, Aziz a été « recueilli » bébé par des Tsiganes des quartiers nord de Marseille, dans une Ami 6 qu’ils avaient volée après un accident mortel. Sans papier depuis ce jour, ayant quitté jeune l’école avec un livre de récits et de légendes du monde offert par son prof d’histoire-géo, il vit de vols et est amoureux d’une jeune tsigane. Mais le jour de ses fiançailles, il est arrêté par la police, accusé d’avoir volé la bague… qu’il assure avoir achetée. Ses papiers (marocains avec une carte de séjour, il n’avait pas les moyens de se payer un faux passeport français) sont faux, bien sûr, et le ministère des affaires étrangères vient de lancer un nouveau programme d’accompagnement des expulsés de France: il sera donc accompagné dans son retour, médiatisé, par Jean-Pierre, jeune et brillant fonctionnaire bombardé « attaché humanitaire », en pleine rupture, qui doit le raccompagner « chez lui » et veiller à ce qu’il trouve un emploi. Sauf qu’Aziz n’a jamais vécu au Maroc, il s’inspire de son livre de contes pour imaginer une histoire, gobée par Jean-Pierre, et les voici errant dans le Haut-Atlas…
Mon avis : au fil des pages, on passe du monde des Tsiganes de Marseille au monde de Jean-Pierre, parvenu aux plus hautes études et qui un jour a eu honte de ses parents, du milieu de la sidérurgie à Uckange en Moselle. Le tout avec une interminable errance dans l’Atlas… et dans la mémoire des personnages, après l’histoire reconstituée d’Aziz, Jean-Pierre commence à écrire un récit de leur aventure (une parenthèse vers le milieu du livre), poursuivi finalement par Aziz, le narrateur principal à la première personne. Ce livre est désormais au programme scolaire, on y étudie apparemment l’image du double etc., de quoi sans doute dégoutter les lycéens de cette lecture (revoir Une vie de Guy Maupassant pour comprendre…). Mais c’est aussi un livre agréable à lire et d’une étonnante actualité, entre les quartiers nord de Marseille, la fermeture des derniers hauts fourneaux de Lorraine, l’expulsion des sans-papiers qui se poursuit sans fin et sans solution (plus question d’accompagnement humanitaire!).