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Le wagon de Arnaud Rykner

Couverture du wagon d'Arnaud Rykner logo du chalenge 1% rentrée littéraire 2010pioche-en-bib.jpgJ’ai trouvé ce livre à la médiathèque dans les nouvelles acquisitions… et poursuis ainsi ma marche vers le 2 % de livres de la rentrée littéraire 2010 (dans le cadre du challenge du 1 % rentrée littéraire 2010, repris par Schlabaya). [Depuis, j’ai aussi lu La belle image d’Arnaud Rykner].

Le livre : Le wagon de Arnaud Rykner, collection La brune, éditions du Rouergue, 2010, 139 pages, ISBN 978-2-8126-0163-7.

L’histoire : Compiègne, le 2 juillet 1944, Dachau, le 5 juillet 1944. Dans le dernier train de déportés qui partit de Compiègne, le narrateur, enfermé dans un wagon, fait le récit de ce terrible wagon. Ils étaient 100 hommes par wagon au départ, 22 wagons au total. Sous une chaleur étouffante, sans eau, sans nourriture. Entassés au point de ne pouvoir tenir tous debout ensemble. Quelqu’un réussi à organiser le wagon, alternativement, la moitié debout, la moitié assis. Ils ont de plus en plus chaud, de plus en plus soif, les premiers meurent, puis vient un vent de folie, ils s’entretuent, une quarantaine meurent, le wagon pue, les déjections, les corps en décomposition… Comment vont-ils survivre dans cette fournaise? Cela ne vaut-il d’ailleurs pas mieux de mourir tout de suite?

Mon avis : un terrible roman, inspiré d’un travail d’historien, à cheval sur le documentaire et le roman. Un texte court, très beau, terrible, les riverains témoins, les Allemands et leur organisation (pour vider les morts et les regrouper dans les deux wagons de tête, par exemple), la Croix Rouge impuissante (les infirmières distribuent une soupe claire à une « escale »). Un livre à lire pour ne pas oublier qu’après le débarquement en Normandie, il y eut encore des trains de déportés. Sur celui dont il est question ici, 500 sur plus de 2000 sont morts en trajet. L’introduction ne dit pas combien reviendront, quelques mois plus tard, de Dachau ou des camps où les rares survivants ont dû être évacués. Un livre à lire absolument, mais peut-être pas le soir avant de vous coucher si vous souhaitez dormir après…

La rafle, de Roselyne Bosch

Affiche de La Rafle Je suis allée voir La rafle, de Roselyne Bosch avec Mélanie Laurent, Jean Reno, Gad Elmaleh,etc.

Le film : juin 1942, à Paris, butte Montmartre. Un groupe d’enfants se rend à l’école, Joseph a honte de l’étoile jaune qu’il porte pour la première fois, essuie les propos racistes de la boulangère, mais des encouragements du brocanteur, puis de l’instituteur. A l’école de filles, pareil, la professeur demande qu’en cas de descente de police, chacune aide leurs deux camarades juives à fuir. Jo et sa famille se sont réfugiés des pays de l’est dans se quartier où vivent beaucoup de juifs, bien intégrés avec leurs voisins. Au cours des semaines qui suivent, la limitation des libertés des juifs s’accroît, malgré tout, aucun d’eux ne croît aux rumeurs d’extermination massive. Mais les Allemands demandent que des milliers de juifs leur soient livrés, la police française négocie, le 16 juillet plutôt que le 14, et des juifs étrangers (enfin, c’est plus facile quand on en déchoit des milliers de leur nationalité française). L’objectif pour Paris est de 24000. Le 16 juillet au matin, la rafle débute, 13000 juifs, dont une majorité de femmes, d’enfants, d’infirmes, sont internés au vélodrome d’hiver, la solidarité des voisins, permet à d’autres de fuir. Suivent les conditions démentes de détention au vélodrome, où un médecin juif tente d’apporter le secours qu’il peut (il ne reçoit que deux infirmières de l’extérieur), les conditions sont terribles, dans la chaleur, sans eau (les pompiers finiront par arriver, désobéir et dérouler les lances à incendie pour distribuer de l’eau). Puis vient l’internement dans des camps en France, en attendant la déportation.

Mon avis : un film très fort, une belle leçon d’histoire, très documentée. En ces jours où le débat sur l’identité nationale a été lancé et a dérapé dans la xénophobie et les propos indignes, ce film est un rappel indispensable de l’Histoire et de la responsabilité de chacun dans ce qui s’est passé, la complaisance de la majorité pour ces rafles, le défoulement abject de certains policiers français, et les petits gestes individuels puis collectifs qui ont quand même sauvé de trop rares personnes. Profitez du Printemps du cinéma (du 21 au 23 mars 2010) pour aller voir ce film, la place sera à 3,50 euros ce week-end…

Pour aller plus loin : voir le site officiel de la Rafle, avec notamment un espace pédagogique très intéressant.

Inglourious Basterds de Quentin Tarantino

Affiche de Inglourious basterds de Quentin Tarantino Dans le cadre du festival Télérama 2010, j’ai aussi vu Inglourious Basterds de Quentin Tarantino, prix d’interprétation masculine pour Christoph Waltz (dans le rôle du colonel Hans Landa) à Cannes en 2009. Encore un film au titre non traduit, alors qu’il est sorti au Québec sous le titre Le Commando des bâtards [depuis, du même réalisateur, j’ai aussi vu Django Unchained].

Le film : dans le centre de la France occupée, le colonel SS Hans Landa (Christoph Waltz) interroge un père de famille pour retrouver une famille juive d’agriculteurs qu’il soupçonne de cacher. Personne n’en réchappera, sauf une adolescente, Shosanna Dreyfus (Mélanie Laurent), qui parvient à s’enfuir et que l’on retrouvera en 1944 sous une nouvelle identité comme gérante d’un cinéma sur les boulevards parisiens.
Ailleurs en Europe, le lieutenant Aldo Raine (Brad Pitt) forme un commando de soldats juifs spécialisés dans des actions ciblées et risquées, connus sous le nom de « The Basterds » et dont la spécialité est de scalper les nazis qu’ils capturent, et d’en laisser échapper un vivant avec une croix gammée incisée sur le front.
À Paris, en 1944, le cinéma de Shosanna doit accueillir la première d’un film de propagande nazi sur un soldat snipper lors du débarquement, le gratin du régime allemand (Goebbels en tête) doit y assister. Le colonel Hans Landa est maintenant chargé de la sécurité de cette première. Shosanna d’un côté et le commando des basterds de l’autre vont chercher à mettre à profit ce rassemblement de nazis pour se venger… d’autant que Hitler décide d’assister à la soirée.

Mon avis : certaines scènes sont violentes, mais c’est probablement le film que j’ai préféré pour le festival Télérama 2010. Tous les acteurs sont fabuleux, l’histoire est bien ficelée, à voir…

Les films que j’ai déjà vus du festival Télérama 2010 :

Deux pièces de théâtre au TAP…

Le parvis du théâtre ausitorium de Poitiers Ces deux derniers vendredis, je suis allée voir des pièces de théâtre au théâtre auditorium de Poitiers. Deux textes à lire aussi. Pour le TAP, la salle a juste un an et les sièges grincent déjà de manière très désagréable. J’espère aussi n’avoir pas attrapé les microbes, ils y avaient plein de gens qui toussaient samedi… sans compter le ronflement d’un spectateur trois rangs derrière moi !

D’abord Un nid pour quoi faire, sur un texte d’Olivier Cadiot adapté par Ludovic Lagarde, comme le colonel des zouaves vu il y a peu au même endroit. Cette fois, pas un homme seul en scène, mais neuf dans un chalet à la montagne dans la Forêt noire. Le sujet, c’est une cour royale exilée dans un chalet aménagé façon Ikéa, avec la cour et le roi qui dorment dans la même pièce, et accueillent un nouvel arrivant qui a répondu à une petite annonce recherchant un conseiller en image… Un beau délire… qui dérape carrément dans le dernier quart d’heure qui, à mon avis, est de trop… Une réflexion sur le pouvoir et la tyrannie. Avec un usage intéressant de la vidéo utilisée sur le fond de scène.

Un genre beaucoup plus grave vendredi dernier avec La Douleur de Marguerite Duras, mise en scène par Patrice Chéreau et Thierry Thieû Niang. Une performance remarquable, extraordinaire de Dominique Blanc, seule en scène pendant une heure vingt d’un texte poignant. Le décor est minimaliste, une table avec deux chaises rouges d’un côté, sept chaises de l’autre. Le texte est un récit autobiographique de Marguerite Duras, qui attend avec une énorme douleur des nouvelles des on mari, déporté par les nazis à Dachau. Seule dans son appartement, dans les locaux qui reçoivent le retour des prisonniers et des déportés en ce printemps 1945. Toute l’horreur de l’attente, des espoirs, des déceptions, jusqu’au retour d’un presque cadavre. Un texte extrêmement fort, et une actrice magnifique. Si la pièce passe vers chez vous, n’hésitez pas à y aller, mais prévoyez une petite transition avant de rentrer chez vous… Le texte est si fort, la performance si époustouflante…

Du passé faisons table rase de Thierry Jonquet

Couverture de DU passé faisons table rase de Thierry Jonquet pioche-en-bib.jpgAprès avoir lu Mon vieux de Thierry Jonquet, j’ai emprunté à la médiathèque un de ses livres plus anciens. Si vous lisez des ouvrages de cet auteur décédé au mois d’août, mettez un petit mot sur le blog de mille et une pages, qui a prévu de lui rendre hommage à la fin du mois de septembre.

Le livre : Du passé faisons table rase, de Thierry Jonquet, dans l’édition de la collection Furies, aux éditions Dagorno, 1994, 249 pages, ISBN 2-910019-20-9, publié pour la première fois en 1982 chez Albin Michel, dans la collection Sanguine, sous le pseudonyme de Ramon Mercader, du nom de l’assassin de Trotski, mais existe dans plusieurs autres éditions, par exemple chez Actes sud (Babel noir n° 321) ou en Folio Policier.

L’histoire : en 1972, quatre personnes sont discrètement assassinées en Amérique du Sud, en France et en Allemagne, dans des crimes  » parfaits  » maquillés en suicide ou en accidents. En 1947, de retour du STO, où il avait été volontaire, René Castel a adhéré, par intérêt (protection, faire comme la majorité), au parti communiste, comme il avait en 1935 débarqué à Paris et opté pour une option politique opposée. En 1978, au siège du parti communiste, l’un des dirigeants, Jacques Delouvert, rescapé d’un camps de déporté, reçoit des documents qui laissent supposer le passé sulfureux pendant la guerre du chef du parti… Une campagne électorale est en cours, tourne autour de l’insécurité en banlieue, le mari d’une militante est assassiné. Une cellule des services secrets s’en mêle. Le lien entre tous ces événements ? La guerre, la résistance, les profiteurs de guerre, le parti communiste…

Mon avis : cette histoire est un peu (beaucoup même) dépassée, le parti communiste n’a plus son importance d’après guerre ni même de l’union de la gauche de 1981, toute d’actualité lors de la publication du roman. Le passé au STO de Georges Marchais n’intéresse plus personne, ni la distinction entre des STO volontaires et des STO contraints… Cela dit, l’écriture est efficace, les magouilles que l’on espère d’un autre temps m’ont finalement tenue en halène.

Post-scriptum : de Thierry Jonquet, décédé en août 2009, j’ai lu et parlé de :