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Patients, de Grand Corps Malade et Mehdi Idir

Ma dernière sortie cinéma a été pour Patients, de Grand Corps Malade (>Fabien Marsaud) et Mehdi Idir, au cinéma commercial, donc tunnel de publicité de 25 minutes avant le film, son beaucoup trop fort – c’est une manie -, de quoi être dans de mauvaises conditions, mais pas le choix de la salle, les CGR Poitiers centre-ville et Buxerolles abusent sur le volume sonore (voir Ouvert la nuit, d’Édouard Baer), mais cela ne semble toujours pas poser de problème aux gérants, à croire qu’ils ont une majorité de clients sourds.

Le film : de nos jours, en banlieue parisienne. Ben [Pablo Pauly], un jeune basketteur qui voulait poursuivre des études de sport, se réveille tétraplégique après un accident, il a plongé dans une piscine où il n’y avait pas assez d’eau. Le voici transféré dans un centre de rééducation, il commence à récupérer un mouvement dans le pied, l’espoir, il découvre la dépendance pour le moindre geste de la vie courante, l’aide-soignant qui s’obstine à lui parler à la troisième personne, François le kiné [Yannick Renier] qui va le faire progresser au fil des mois, les autres « pensionnaires » ; Farid [Soufiane Guerrab], handicapé depuis qu’il a 4 ans ; Toussaint [Moussa Mansaly], qui ne progresse plus ; Steeve [Franck Falise] en pleine déprime ; Samia [Nailia Harzoune], une des rares filles, la médecin-chef [Dominique Blanc]…

Mon avis : j’ai bien aimé ce film qui, sur un ton léger, plein d’humour, de vannes entre résidents et sans pathos, aborde  la plupart des sujets, même les plus intimes, manger, boire, « évacuer » (comme disent pudiquement les formulaires des maisons du handicap), se (faire) laver, mais aussi s’intégrer dans une micro-société où se mêlent accidentés aux conséquences physiques (tétraplégiques, totaux ou partiels, paraplégiques) et/ou psychiques, traumatisés crâniens, la place des soignants, de la famille, des amis (qu’en reste-t-il au fil des mois?). Le grand slam final de Grand Corps Malade, sur le générique de fin, met des mots sur tous ces maux, l’alternance d’espoirs et de retours en arrière, son cheminement et celui de beaucoup d’autres! Les acteurs et les figurants (résidents d’un centre de rééducation) se mêlent pour dresser un tableau plutôt « optimiste » de la rééducation, sans (trop) verser dans le côté « bisounours », sans cacher les difficultés, ceux qui sortent avec l’espoir de continuer les « réinsertion » et les autres « remisés » par exemple dans les maisons d’accueil spécialisées auxquelles il est à peine fait allusion… Alors oui, ce film a plein d’imperfections, aborde un sujet et passe trop vite à un autre, la scène de nuit dans les bois aurait pu être plus soignée du point de vue de la « photographie » par exemple, mais je lui trouve la grande qualité de médiatiser ce sujet que beaucoup préfèreraient enterrer auprès du grand public.

PS: et pensez à rédiger vos directives anticipées !!! Elles ne sont pas réservées aux personnes en fin de vie mais devraient permettre à chacun, en bonne santé, d’anticiper un éventuel accident et ce que l’on souhaite pour soi en matière de réanimation, de définir où l’on place pour nous, si cela devait arriver, la limite de l’acharnement déraisonnable !

Deux pièces de théâtre au TAP…

Le parvis du théâtre ausitorium de Poitiers Ces deux derniers vendredis, je suis allée voir des pièces de théâtre au théâtre auditorium de Poitiers. Deux textes à lire aussi. Pour le TAP, la salle a juste un an et les sièges grincent déjà de manière très désagréable. J’espère aussi n’avoir pas attrapé les microbes, ils y avaient plein de gens qui toussaient samedi… sans compter le ronflement d’un spectateur trois rangs derrière moi !

D’abord Un nid pour quoi faire, sur un texte d’Olivier Cadiot adapté par Ludovic Lagarde, comme le colonel des zouaves vu il y a peu au même endroit. Cette fois, pas un homme seul en scène, mais neuf dans un chalet à la montagne dans la Forêt noire. Le sujet, c’est une cour royale exilée dans un chalet aménagé façon Ikéa, avec la cour et le roi qui dorment dans la même pièce, et accueillent un nouvel arrivant qui a répondu à une petite annonce recherchant un conseiller en image… Un beau délire… qui dérape carrément dans le dernier quart d’heure qui, à mon avis, est de trop… Une réflexion sur le pouvoir et la tyrannie. Avec un usage intéressant de la vidéo utilisée sur le fond de scène.

Un genre beaucoup plus grave vendredi dernier avec La Douleur de Marguerite Duras, mise en scène par Patrice Chéreau et Thierry Thieû Niang. Une performance remarquable, extraordinaire de Dominique Blanc, seule en scène pendant une heure vingt d’un texte poignant. Le décor est minimaliste, une table avec deux chaises rouges d’un côté, sept chaises de l’autre. Le texte est un récit autobiographique de Marguerite Duras, qui attend avec une énorme douleur des nouvelles des on mari, déporté par les nazis à Dachau. Seule dans son appartement, dans les locaux qui reçoivent le retour des prisonniers et des déportés en ce printemps 1945. Toute l’horreur de l’attente, des espoirs, des déceptions, jusqu’au retour d’un presque cadavre. Un texte extrêmement fort, et une actrice magnifique. Si la pièce passe vers chez vous, n’hésitez pas à y aller, mais prévoyez une petite transition avant de rentrer chez vous… Le texte est si fort, la performance si époustouflante…