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L’Enfant d’en haut d’Ursula Meier

Affiche de L'Enfant d'en haut d'Ursula Meier Deux gros mois sans cinéma, ça ne pouvait pas durer… Le cinéma, si on n’y va pas pendant une semaine ou deux, on ne voit pas de présentation et on y va de moins en moins… Après avoir lu et entendu plusieurs critiques sur ce film, je suis allée le voir, même si j’avais eu du mal avec le précédent film d’Ursula Meyer, Home, vu dans le cadre du festival télérama 2009.

Le film : dans les Alpes suisses, de nos jours. Simon (Kacey Mottet Klein), 12 ans, habite dans un HLM dans la vallée avec sa sœur, Louise (Léa Seydoux), plus ou moins présente entre deux aventures masculines, plus ou moins sans travail… Alors Simon prend régulièrement la télécabine pour se rendre dans la station huppée au-dessus… Là, anorak et sac à dos, chaussures de ski au pied, il profite de la négligence des riches touristes pour voler de quoi déjeuner, des lunettes de soleil, des casques, des skis… Il revend aux gamins de son quartier, aux saisonniers, au bord de la route, et organise un trafic de skis avec l’un des saisonniers du resto d’altitude. Un trafic qui prend de plus en plus d’ampleur, c’est désormais lui qui permet à sa sœur de vivre…

Mon avis : ça serait bien si les saisons étaient respectées dans les films… Apercevoir en début de film des feuilles d’arbre en train de sortir alors qu’on est en début de saison de ski, ça me gène… un détail, me direz-vous, mais cela arrive de plus en plus souvent au cinéma… J’avais eu le même problème il y a quelques mois avec Toutes nos envies de Philippe Lioret. Ceci dit, j’ai bien aimé le film, le rebondissement sur Louise (mais cela, il faudra que vous alliez voir les film pour comprendre), l’excellent jeu de l’adolescent (qui jouait déjà dans Home), le scénario (qui a eu l’Ours d’argent au dernier festival de Berlin), qui rappelle la grande tradition des films sociaux francophones (haro sur les riches, les pauvres font ce qu’ils peuvent pour survivre)…

Au-delà du lac de Peter Stamm

Couverture de Au-delà du lac de Peter Stamm pioche-en-bib.jpg

Le château de Schönbrünn à Vienne en Autriche en 1993, 2, de plus près

Pour le défi Mars, mois de l’Europe centrale organisé par Schlabaya, j’ai fait une descente à la médiathèque où j’ai emprunté une dizaine de livres… Bon, c’est limite pour l’Europe centrale… Les nouvelles se passent sur le lac de Constance, sa rive nord est allemande et entre dans le défi, mais sa rive sud, où semblent se passer ces nouvelles, est suisse et hors défi… du coup, je l’ai placé sur le dernier jour…

Le livre : Au-delà du lac de Peter Stamm, traduit de l’allemand par Nicole Roethel, éditions Christian Bourgeois, 2012, 175 pages, ISBN 978-2-267-02278-0.

L’histoire : une seule nouvelle porte une date, 2002, mais les dix doivent se passer autour de celle-ci, dans la région du lac de Constance, la rive (suisse ou allemande) n’est jamais précisée, mais les spécialistes disent qu’il s’agit de la rive sud, suisse, le Seerücken, région natale de Peter Stamm. Sauf une qui se passe lors de vacances en Toscane, avec des touristes suisses. Pas facile de parler d’un recueil de nouvelles sans dévoiler l’ensemble… Je ne vous parlerai que de la première, les estivants… Un universitaire qui doit boucler un texte à remettre à son éditeur décide d’aller le faire hors saison dans un hôtel chic, l’hôtel des thermes… Quand il arrive, accueilli par une femme, il paye d’avance la semaine, mais pas d’eau courante, pas d’électricité (son ordinateur est vite en panne de batterie), pas de repas chaud, juste des boîtes de conserve… Que se passe-t-il et pourquoi reste-t-il? Vous croiserez aussi un couple en vacances, un prêtre trop progressistes pour ses paroissiens, un vieil homme qui doit apporter une valise à sa femme opérée du cerveau, etc.

Mon avis : j’ai beaucoup aimé ces textes courts et efficaces, qui en quelques pages racontent une histoire complète, encrée dans la vie ordinaire, avec les décors (la nature tient une grande place). Surprenant de réussir à dire tant de choses, si évocatrices, en si peu de mots… A découvrir pour un instant de fraîcheur, loin du stress (même si les vacances en Toscane ne se finissent pas comme prévu…).

Une autre époque de Alain Claude Sulzer

Couverture de Une autre époque de Alain Claude Sulzer pioche-en-bib.jpgJ’ai trouvé ce livre à la médiathèque dans la sélection des nouveautés.

Le livre : Une autre époque de Alain Claude Sulzer, traduit de l’allemand par Johannes Honigmann, éditions Jacqueline Chambon, 2011, 266 pages, ISBN 978-2-7427-9502-4(il est paru depuis en livre de poche).

L’histoire : quelque part en Suisse vers 2000, en Suisse et à Paris en 1970 et de 1948 à 1954. Le narrateur se rappelle des faits qui se sont passés il y a 30 ans. Alors qu’il avait 17 ans, il voit un détail qui lui avait échappé sur la photographie de son père qui est dans sa chambre, il porte une montre dont il réussit à déchiffrer le modèle. Or son père est un mystère, il a appris à 7 ans que l’homme qui l’a élevé n’est que le second époux de sa mère, qui s’est remariée quand il avait trois ans, son père Emil est mort quelques semaines après sa maison. Des années plus tard, il apprend qu’il s’agissait d’un suicide par médicament, mais il n’en sait guère plus sur lui. Un horloger lui donne des renseignements sur la montre, sa mère, Veronika, lui dit qu’elle ne l’a plus, qu’elle l’a donnée le jour de l’enterrement à André, parrain du narrateur, ami de son père, qui n’a jamais donné de nouvelles depuis ce jour là. Il fugue, prend de l’argent sur un compte qui contient des cadeaux faits par son grand-père paternel, direction Paris, à la recherche d’André et d’informations sur son père…

Mon avis : une autre époque, celle où les homosexuels pouvaient être internés à l’adolescence pour « corriger leurs penchants pervers », où ils pouvaient épouser une femme par convention sociale (ça existe toujours…)… Aujourd’hui encore, le taux de suicide des jeunes homosexuels est très supérieur à celui des jeunes (hommes ou femmes) hétérosexuels du même âge. Un très beau récit, qui peu à peu glisse de 1970 dans les années 1950. Vraiment, une écriture tout en finesse, très ciselée, un sujet pas facile très bien servi par ce beau texte.

logo tour du monde en lecture Ce livre entre dans le cadre du défi du tour du monde des livres, organisé par Livresque, au titre de la Suisse (germanophone, pour faire le pendant de la Suisse francophone avec Brésil, des hommes sont venus… de Blaise Cendrars).

La boîte de Pauline Martin

Couverture de La Boîte de Pauline Martin pioche-en-bib.jpgLogo BD for WomenJ’ai emprunté ce livre à la médiathèque en cherchant des auteures femmes, sans en connaître le thème à l’avance…

Le livre : La boîte de Pauline Martin (scénario et dessin), collection Aire Libre, éditions Ego comme X (Angoulême), 2000, 27 planches, ISBN 978-2910946203.

L’histoire : Février 1997, à Zurich. Pauline devait voir Giovanni hier, mais plusieurs fois, il a annulé… Elle apprend qu’il s’est suicidé pendant la nuit. Elle se reproche de n’avoir rien vu venir, de ne pas avoir perçu qu’il était déprimé. Ayant mis la main sur une boîte avec des images de Giovanni et des objets lui ayant appartenu, elle reconstruit ses souvenirs quand elle ne cauchemarde pas…

Mon avis : si j’avais connu le thème abordé, le suicide, je n’aurais probablement pas emprunté cette bande dessinée… et pourtant, je ne regrette pas, par son trait noir et blanc, Pauline Martin rend très bien ses sentiments, le déni, la culpabilité, la reconstruction personnelle qui passe par une phobie de la mort (et des transports, avions, voiture, etc.)…

Logo top BD des blogueurs 2011 Cette BD sera soumise pour le classement du TOP BD des blogueurs organisé par Yaneck / Les chroniques de l’invisible. Mes chroniques BD sont regroupées dans la catégorie pour les BD et par auteur sur la page BD dans ma bibliothèque.

Blaise Cendrars : Brésil, des hommes sont venus…

Couverture de Brésil, des hommes sont venus, de Blaise Cendrars, édition de Fata Morgana pioche-en-bib.jpgPour le classique du mois, j’ai choisi Blaise Cendrars, dont c’était le cinquantième anniversaire de la mort le 21 janvier… Il figure d’ailleurs à ce titre dans le recueil des célébrations nationales de 2011, sa fiche est ici, contrairement à celle de Céline, dont la fiche a été enlevée la semaine dernière (mais qui est toujours dans l’index récapitulatif, en tout cas, qui l’était encore lundi soir).

logo tour du monde en lecture Revenons à Blaise Cendrars, je vais l’inclure dans le cadre du défi du tour du monde des livres, organisé par Livresque, au titre de la Suisse – en attendant un autre auteur suisse. De toute façon, il est bien né en 1887 en Suisse, à La Chaux-de-Fonds, avec cette nationalité, et c’est en Suisse que ce trouve le centre d’étude Blaise Cendrars. Certes, il est devenu français après la Première Guerre mondiale : engagé volontaire dans la Légion étrangère, il a perdu le bras droit au combat en Champagne, le 28 septembre 1915 (il en a d’ailleurs parlé dans plusieurs livres, en particulier du passage de droitier à gaucher…).

J’aurais pu relire Rhum, La main coupée, Bourlinguer ou L’or, mais j’ai choisi ce titre moins connu que je n’avais pas lu…

Le livre : Brésil, des hommes sont venus… de Blaise Cendrars. Première édition en 1952 à Monaco dans Documents d’art, coll. « Escales du monde », n° 6, réédité en 2010 par Gallimard, mais j’ai sorti de la médiathèque la version de Fata Morgana de 2003, qui avait réalisé une première édition en 1987, ici accompagnée d’illustrations de Tarsila do Amaral et de la majorité des commentaires qui accompagnaient les 105 photographies de Jean Manzon de la première édition de 1952, ainsi que de deux poèmes, dont le premier dédié à Saint-Paul (son ami São Paulo, qui l’avait invité au Brésil en janvier 1924, ou la ville du même nom?). L’édition de 2010 de Gallimard/Folio reprend quant à elle 40 de ces photographies.

L’histoire : le narrateur arrive au Brésil dans les années 1950 en paquebot, il aurait pu venir en avion, mais a préféré revivre l’impression des premiers arrivants… Le Brésil est-il un paradis sur terre? La lente colonisation par les Portugais (quelques milliers d’arrivants les 100 premières années), les comptoirs commerciaux, les fondations des jésuites, l’explosion des villes depuis, la forêt amazonienne sur la moitié du territoire, un portrait contrasté de ce pays…

Mon avis : j’ai bien aimé ce livre court, pour lequel les trois séjours de Blaise Cendrars à la fin des années 1920 (presque un an au total) ont dû bien l’aider. Les commentaires des photographies sont aussi intéressants que le texte principal, avec notamment une sorte de fascination devant les gratte-ciels -qu’il trouve trop petits par rapport à l’immensité du pays).

Logo du défi J'aime les classiques Je l’ai lu dans le cadre du défi J’aime les classiques proposé par les Carabistouilles de Marie (clic sur le logo pour voir mon récapitulatif).

Nicolas de Stael à la fondation Pierre Gianadda à Martigny

Affiche de l'exposition Nicolas de Stael, 2010, fondation Gianadda En faisant les liens internes du blog ce dernier mois, j’ai constaté que j’ai complètement zappé deux articles, l’un sur les œuvres de Laurette Atrux-Tallau aux Clefs dans le cadre de l’exposition art et vie en Aravis, acte 3, l’autre sur Nicolas de Stael à la fondation Pierre Gianadda à Martigny (Suisse). Je commence par celle-ci, que vous pouvez encore aller découvrir jusqu’au 21 novembre 2010 (tous les jours de 9 h à 19 h). J’y suis allée avec mon père, mi juillet, par une journée froide et pluvieuse. Comment décrire avec des mots l’œuvre de Nicolas de Stael? Impossible de faire mieux que Lunettes Rouges, qui a écrit plusieurs articles dont celui-ci, qui a agrémenté son article de plusieurs photographies (et qui en a écrit d’autres sur le même sujet, suivre les liens sur son article). Vous pouvez aussi lire le catalogue de la précédente exposition consacrée par la même fondation en 1995 (dans ma bibliothèque personnelle, pour ceux qui passeraient me voir…), ou encore le dossier établi par le centre Georges Pompidou à l’occasion de l’exposition de 2003, clic sur les vignettes pour voir l’image en grand. J’aime beaucoup ce travail sur la matière de Nicolas de Stael, les épaisses couches de peinture, les nuances dans les tons d’une même couleur dominantes, une façon de réintroduire du figuratif dans des œuvres apparemment abstraites. Un travail dans l’urgence, une grande production en quelques années, Nicolas de Stael s’est suicidé en 1955, à l’âge de 41 ans. Si vous passez à Martigny, n’oubliez pas de voir les dessins dans le couloir qui mène à la collection de voitures. Et s’il ne fait pas aussi mauvais temps que lorsque nous y sommes allés, le jardin de sculpture, les collections romaines dans les vitrines en haut en entrant, et en ville, les monuments romains (je dois avoir quelque part des photos argentiques de janvier 1992… j’y suis passée en semaine d’intégration avec l’école nationale du patrimoine, nous avions été loguement reçus par Léonard Gianadda).

Les neiges du Kilimandjaro de Ernest Hemingway

Couverture des neiges du killimandjaro de Ernest Hemingwy, couverture de 1982 J’ai relu ce livre qui était dans ma bibliothèque… J’ai décidé d’essayer de reprendre la lecture des livres des lauréats de prix Nobel de littérature, ceux qui sont dans ma bibliothèque et si possible un de chaque auteur, si j’arrive à les trouver, certains ne semblent avoir jamais été traduits en français. Pour Hemingway, je vous ai déjà parlé du Vieil homme et la mer.

Le livre : Les neiges du Kilimandjaro suivi de dix indiens, de Ernest Hemingway, traduit de l’anglais par Marcel Duhamel, Folio n° 151, 188 pages, 1982, ISBN 2-07-036151-9 (première édition dans la collection en 1972, il y en a eu d’autres depuis, ici, la couverture est extraite du film adapté de la nouvelle titre, avec Gregory Peck et Ava Gardner, réalisé par Henry King, en 1952. Pour mémoire, première édition en anglais de la nouvelle titre dans Esquire en 1936, certaines autres sont un peu plus tardives).

L’histoire : ce recueil regroupe douze nouvelles de longueur variable, une bonne quarantaine de pages pour les les neiges du Kilimandjaro et l’heure triomphale de Francis Macomber, quelques-unes seulement pour d’autres. Certaines se passent dans l’Afrique colonisée, en particulier les deux plus longues, qui toutes deux parlent de la chasse au gros gibier, les autres sont variées, en Europe (attente devant une gare dans hommage à la Suisse, en Palestine au 1er siècle de notre ère (c’est aujourd’hui vendredi), aux États-Unis, etc. Voici le titre des autres nouvelles : dix indiens, la capitale du monde, le vieil homme près du pont, la lumière du monde, la fin de quelque chose, une journée d’attente, là-haut dans le Michigan, trois jours dans la tourmente.

Mon avis : j’ai bien aimé la chasse au lion et aux buffles de l’heure triomphale de Francis Macomber, surtout sa chute, la lente agonie du héros des neiges du Kilimandjaro, avec le retour sur le passé, l’attente hypothétique de l’arrivée de secours pour la voiture en panne avant que la gangrène ne tue l’homme, et ses relations avec sa femme riche… J’ai adoré la courte nouvelle c’est aujourd’hui vendredi, discussion chez un marchand de vin de deux légionnaires qui ont assisté à la crucifixion du Christ et la commente avec cynisme. J’ai moins aimé les autres…

logo tour du monde en lecture J’ai sélectionné ce livre pour le tour du monde en lecture proposé par Livresque.

Tulpan de Sergueï Dvortsevoy

Comme promis, je vous parle de Tulpan, de Sergueï Dvortsevoy.

Le film : Dans les steppes du Kazakhstan. Asa a fait son service dans la marine. Il n’a plus de famille sauf sa sœur, chez qui il vient habiter – ou plutôt, dans la yourte de son beau-frère. Il aimerait avoir lui aussi son propre élevage de moutons, mais le grand chef, propriétaire des troupeaux, ne lui en confiera que s’il se marie, fonde une famille et sa yourte… Mais dans ces steppes semi-désertiques, il n’y a qu’une fille non mariée, Tulpan, et Asa doit négocier d’abord le mariage avec les parents… Mais la mère trouve qu’Asa a de trop grandes oreilles (oreilles décollées, en fait). Parallèlement, Asa apprend sur le tas la vie de berger et le partage de la yourte (un couple, 3 enfants et lui), la confrontation à la mort de nombreux agneaux au moment de leur naissance.

Mon avis : sublime ! Les paysages de steppe, les mini tornades, les orages, les chameaux, les moutons,… Rien que la venue du vétérinaire vaut d’aller voir le film ! Une chose, je n’ai pas compris pourquoi ce film, co-production kazakh, allemande et suisse, est en russe et non en kazakh, sauf pour les très beaux chants… Ceux de la petite fille sont magnifiques. Le grand frère qui écoute les informations dans la journée pour les transmettre à son père est très sérieux, alors que le petit dernier est craquant… Il paraît que le tournage a été plus ou moins un enfer (interviews entendues la semaine dernière), mais quel film ! Il a d’ailleurs été primé à Cannes en 2008 (prix Un certain regard, prix de la jeunesse et prix de l’éducation nationale).