Archives de catégorie : Cinéma

Les films que j’ai vus au cinéma ces dernières années.

Magic in the Moonlight, de Woody Allen

 

Affiche de Magic in the Moonlight, de Woody AllenSortie cinéma en fin d’après-midi mardi. Je suis allée voir Magic in the Moonlight, de . Je vais d’ailleurs voir la quasi totalité de ses films (relire mes avis par les liens en fin d’article).

L’histoire: dans les années 1920. A Berlin, Wei Ling Soo vient de donner un grand show de magie. Retour à Londres pour Stanley Crawford [Colin Firth], mais il quitte vite sa petite amie, à la demande d’un ancien camarade et ami magicien, Howard Burkan [Simon McBurney]. Adieu les vacances aux Galapagos, bonjour la Côte d’Azur des riches estivants. Il pourra rendre visite à sa vieille tante Vanessa [Eileen Atkins], mais est surtout chargé de démystifier Sophie Baker [Emma Stone], jeune et belle médium cornaquée par sa mère [Marcia Gay Harden] et qui est en passe de dépouiller les Catledge, riche famille crédule (surtout Grace [Jacki Weaver], prête à tout pour revoir son défunt mari), et à épouser le fils, Brice [Hamish Linklater]. Sauf que cette fois, Stanley n’arrive pas à discerner le « truc » et finit par croire, pour la première fois, qu’un « don » peut exister…

Mon avis: fan de jazz, magicien amateur, Woody Allen a créé le film qui concentre ses hobbies. Colin Firth campe le personnage du misanthrope, arrogant et rationaliste grognon. Alors certes, le clair de lune dans l’observatoire [il s’agit de celui de Nice, sur le Mont-Gros, qui forme avec celui du plateau de Calern à Caussols l’observatoire de la Côte d’Azur/OCA] où se sont réfugiés le magicien et la médium (ou plutôt deux jeunes gens engagés chacun de leur côté) après l’orage fait « un peu » (beaucoup) cliché. Au-delà de l’histoire, Woody Allen propose de réfléchir sur Niestche, mais surtout sur le pessimiste, qui est peut-être dans le vrai mais a une vie terne aux yeux des autres, et l’optimiste, qui, quitte à vendre aux autres ce qu’ils veulent entendre, sème la joie de vivre. Les amoureux de la Côte-d’Azur reconnaîtront aussi l’opéra de Nice (qui a servi de décor pour la salle de spectacle de Berlin), ou le bar du Negresco (le cabaret à Berlin), la Villa Eilenroc au Cap-d’Antibes (la grande fête), etc. Le travail sur les décors, les vêtements (super maillots de bain), la lumière rend l’ensemble cohérent et d’une grande fluidité. Minuit à Paris m’avait déçue, Blue Jasmine réconciliée avec Woody Allen, quel sera son prochain film?

Pour aller plus loin sur les observatoires, je vous conseille:

– le site de l’observatoire de la Côte d’Azur/OCA

Couverture de Observatoires astronomiques. Provence-Alpes-Côte d’Azur, de Jean Davoigneau et Françoise Le Guet TullyObservatoires astronomiques. Provence-Alpes-Côte d’Azur, de Jean Davoigneau et Françoise Le Guet Tully, Association pour le patrimoine de Provence, Collection Itinéraires du patrimoine n° 154, Aix-en-Provence, 1999 [j’ai ressorti mon exemplaire au retour du cinéma!].

– l’article en ligne des mêmes auteurs, Jean Davoigneau et Françoise Le Guet Tully, L’inventaire et le patrimoine de l’astronomie : l’exemple des cercles méridiens et de leurs abris, revue numérique In situ, n° 6, 2005. Plus technique mais richement illustré et avec de nombreuses autres références.

Pour Woody Allen, vous pouvez relire mes articles

Gone girl, de David Fincher

Affiche du film Gone girl, de David FincherSortie cinéma mercredi en fin d’après-midi, avec Gone girl, de David Fincher, en VO (adaptation du roman Les apparences de Gillian Flynn). Du même réalisateur, revoir Millenium : les hommes qui n’aimaient pas les femmes.

Le film (présentation officielle): 

A l’occasion de son cinquième anniversaire de mariage, Nick Dunne [Ben Affleck] signale la disparition de sa femme, Amy [Rosamund Pike]. Sous la pression de la police et l’affolement des médias, l’image du couple modèle commence à s’effriter. Très vite, les mensonges de Nick et son étrange comportement amènent tout le monde à se poser la même question : a-t-il tué sa femme ?

Mon avis: un film de 2h30, mais mené avec un rythme qui fait qu’il y a peu de moments creux. Nick a pris une amante depuis 18 mois, une ancienne étudiante, il est censé avoir été victime de la crise, mais possède une immense maison dans son Missouri natal (où il est revenu suite au cancer puis à la mort de sa mère). Un film très américain, que ce soit la maison du couple ou celle de l’ex petit ami d’Amy, encore plus grande, le lancement de la campagne de recherche par les riches parents de la disparue (grand barbecue, campagne sur le terrain et sur les réseaux sociaux, etc.), les médias (dont un show télévisé), l’encadrement par un avocat à la mode (efficace mais coûteux, il demande une avance de 100.000$…), une femme au foyer sans occupation particulière (sauf la manipulation de ses amants successifs). Des questions plus universelles, comme la relation d’un frère et d’un sœur jumeaux, les tensions dans un couple, l’apparence et le non-dit. C’est bien écrit, bien filmé, je ne me suis pas ennuyée… mais je ne suis pas non plus complètement emballée, je ne sais pas, l’attitude d’Amy devient prévisible, la caricature du monde des médias et du fric trop appuyée, je n’ai pas retrouvé ce « petit quelque chose », indéfinissable, qui fait la différence entre un bon film et un film qui marquera longtemps, comme Seven ou plus récemment et dans une oindre mesure Millenium : les hommes qui n’aimaient pas les femmes.

Mommy de Xavier Dolan

Mommy de Xavier DolanDimanche, je suis allée voir Mommy de Xavier Dolan, qui a reçu le prix du Jury au festival de Cannes en 2014, en VO sous-titrée… et oui, film québecois, mais sous-titres nécessaires pour l’accent et les expressions de certains acteurs [du même réalisateur, voir aussi Juste la fin du monde].

Le film: au Canada, en face de Montréal, en 2030. Steve [Antoine-Olivier Pilon], un jeune adolescent souffrant de TDAH [trouble de déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité], est viré du centre éducatif où il se trouve pour avoir commis vols et autres délits: il vient de mettre le feu au réfectoire, plusieurs adolescents sont blessés, dont un gravement brûlé. Deux choix s’offrent à sa mère, Diane “Die” Després [Anne Dorval], veuve depuis trois ans: le reprendre avec elle ou l’abandonner dans un hôpital au nom d’une nouvelle loi. Elle décide de l’accueillir à la maison, même s’il nécessite une surveillance de tous les instants et de suivre les cours à domicile. La voisine d’en face, Kyla [Suzanne Clément], une prof’ en congé sabbatique depuis deux ans, à cause de difficultés d’expression, leur vient en aide…

Mon avis: une mère récupère son enfant perturbé et doit le gérer seule puis avec une voisine, qui sans doute s’implique trop. Comme épée de Damoclès, une nouvelle loi qui permet aux parents de se « débarrasser » d’un enfant malade psychique dans un hôpital, en le confiant à la charge de l’État. Le film montre une relation très forte, parfois violente, pathologique, entre le fils et sa mère. Il aborde les difficultés du huis-clos, mais aussi un manque de suivi médical du fils, le choix étant visiblement soit de le garder à domicile sans aide, soit de l’abandonner (en perdant les droits parentaux) dans un hôpital psychiatrique.

En revanche, le film ne montre pas du tout un adolescent atteint de TDAH trouble de déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité), diagnostic avancé par la mère dans une confidence à sa voisine, encore moins autiste comme j’ai pu l’entendre dans la bouche de critiques! C’est un enfant en grande souffrance, sa mère dit qu’il a été diagnostiqué TDAH à la mort de son père, donc vers 13 ans. Or on le voit sagement assis avec la voisine à faire un cours de mathématiques, pour les TDAH que j’ai pu fréquenter, c’est absolument impossible à moins d’être shooté à la ritaline. Bon, donc, nous avons un adolescent perturbé, qui exprime son malaise par la violence et la délinquance, avec de graves troubles psychologiques, mais pas un TDAH. A un moment, la mère parle de trouble oppositionnel, ce qui est très différent, mais semble mieux correspondre au comportement de Steve: le trouble oppositionnel avec provocation (TOP) est à inclure dans la famille des psychoses et peut être annonciateur de la schizophrénie. Certes, c’est un film, une fiction (d’ailleurs l’introduction prend soin de placer le film dans l’avenir), mais c’est dommage d’avoir collé cette étiquette de TDAH (trouble neurologique) alors qu’une autre, le TOP (trouble psychique), aurait sans doute mieux convenu à son problème. Si beaucoup de gens vont voir ce film et connaissent des enfants TDAH, ils risquent de se faire une idée fausse de ce qu’ils deviendront à l’adolescence!

Ces réserves mises à part, c’est un film que j’ai bien aimé.

Ce film a été inclus dans le festival Télérama 2015, dans lequel j’ai vu:

Hippocrate de Thomas Lilti

Trois semaines sans cinéma, c’est assez rare pour moi… Je suis allée voir hier Hippocrate de Thomas Lilti [du même réalisateur, voir aussi mon avis sur Médecin de campagne].

L’histoire: de nos jours dans un grand hôpital parisien. Benjamin [Vincent Lacoste] commence son premier semestre d’internat dans le service de médecine interne de son père, le professeur Barois [Jacques Gamblin]. Il va faire équipe avec Abdel [Reda Kateb], médecin algérien qui fait fonction d’interne pour valider en France son diplôme. Une nuit de garde, un patient alcoolique et SdF pour lequel le jeune interne ne fait pas d’électro-cardiogramme (la machine est en panne), et au réveil, il est mort. La hiérarchie couvre, ça l’arrange. Mais voici qu’une vieille dame est admise, qui va poser de graves questions de conscience et d’éthique…

Mon avis: interne débordé (et qui fume trop), baisse des moyens des hôpitaux, salle de garde avec blagues de carabins, père grand patron absent, voilà un cocktail pour une comédie assez réussie. S’y ajoutent des sujets qui méritent un débat sérieux, les FFI (médecins étrangers faisant fonction d’interne, des médecins expérimentés qui repassent un internat pour valider leur diplôme étranger) et la question de la fin de vie. Côté acteurs, j’ai un faible pour Reda Kateb, découvert dans Gare du Nord de Claire Simon. Le cas de la vieille dame, d’abord opérée d’une fracture du col du fémur alors qu’à 88 ans, elle souffre d’un cancer généralisé. Elle arrive dans un service de médecine interne, avec la morphine elle peut avoir un meilleur confort de vie, mais l’intérêt du service est de la faire transférer ailleurs, quitte à la nourrir de force par sonde gastrique pour la faire sortir plus vite (elle émargerait sur un autre budget et le service récupèrerait un livre lit [oups, grosse fatigue pour moi! merci Grégory!]). On dépasse l’acharnement et la maltraitance quand elle est ranimée contre sa volonté. Et là, on rejoint la question des directives anticipées, et de leur caractère non contraignant pour les médecins, ce qui est à mon avis inadmissible. Une bonne comédie, n’hésitez pas à aller la voir!

Ce film a été inclus dans le festival Télérama 2015, dans lequel j’ai vu:

Winter sleep, de Nuri Bilge Ceylan

Je suis allée voir à une séance de 16h (le film dure 3h16) de Nuri Bilge Ceylan, qui a reçu la palme d’or au festival de Cannes 2014. De ce réalisateur, je vous ai parlé de Il était une fois en Anatolie et de Les trois singes.

Le film: de nos jours, en hiver, dans un petit village à moitié troglodyte au centre de l’Anatolie, en Cappadoce. Après avoir été comédien pendant 25 ans à Istanbul, Aydin [Haluk Bilginer] est retourné depuis plusieurs années dans son village natal, où il gère des biens hérités de son père et tient un petit hôtel, avec l’aide de Hidayet [Ayberk Pekcan], fréquenté par des touristes du monde entier. Avec lui vivent sa jeune épouse, Nihal [Melisa Sözen], et sa sœur Necla [Demet Akbağ], récemment divorcée. Rien ne va plus avec Nihal, ils vivent dans le même lieu, mais lui se réfugie dans son bureau, où il a pour ambition d’écrire une anthologie du théâtre turc (et en attendant rédige des articles pour une revue), et elle s’ennuie dans ses appartements, à la recherche d’une bonne cause à aider.

Mon avis: les paysages, quand on peut les apercevoir, sont superbes, avec quelques belles scènes extérieures, comme la capture d’un cheval. Cependant, l’essentiel du film se déroule en intérieur, dans le huis-clos de l’hôtel troglodytique, même si le bureau est séparé du reste de l’hôtel dont il est séparé par une cour. Une mention au début du générique de fin signale que Nuri Bilge Ceylan s’est inspiré de nouvelles de Tchékhov, les personnages tournent en rond, mariage (arrangé?), plus d’amour en tout cas, misanthropie (au moins en apparence) et arrogance du personnage principal, pouvoir de l’argent (riche propriétaire qui n’hésite pas à réclamer avec force son dû, tout en faisant des dons -pas si anonymes qu’il veut bien le dire- à des œuvres). Pas de doute, Nuri Bilge Ceylan a du talent pour tourner des scènes intérieures peu éclairées, comme dans Il était une fois en Anatolie, mais j’ai franchement préféré ce précédent film. L’action la plus « violente », ici, est la vitre de la voiture brisée par une pierre lancée par le fils d’un locataire auquel ils ont pris certains biens, dont la télévision, dont on apprendra plus tard qu’elle manque énormément à la grand-mère. Cette pierre, colère d’un petit garçon, aura une certaine importance dans l’hiver morne et monotone de ce village isolé, mais néanmoins relié à internet.

Ce film a été inclus dans le festival Télérama 2015, dans lequel j’ai vu:

Lucy de Luc Besson

Affiche du film Lucy de Luc BessonSortie cinéma (commercial, puisque les salles d’art et essai du TAP Castille sont fermées), avec Lucy de Luc Besson en … VF!

Le film: Taipei. Lucy [Scarlett Johansson], jeune étudiante, est forcée par son nouveau petit ami de porter une mallette dans un grand hôtel. Un chef de la mafia taïwanaise [Choi Min-sik] l’y attend, elle est battue, endormie, et se réveille avec une cicatrice au ventre, on lui a inséré un paquet de drogue qu’elle doit acheminer, comme quatre hommes, dans différentes villes européennes. Mais elle est tabassée, une partie du contenu se déverse dans son corps, la drogue décuple ses capacités cérébrales, elle passe de 10% d’utilisation de ces capacités à 100%, non sans avoir au préalable réussi à prévenir à Paris la police où elle a choisi Pierre del Rio [Amr Waked] et le Pr Norman, grand spécialiste du cerveau [Morgan Freeman].

Mon avis: agaçant!!! La première phrase en traduction française d Les images alternées entre le mafieux et la jeune fille et un guépard chassant une antilope avait commencé à m’agacer…. La première phrase de la traduction française frôlait l’éloge du créationnisme, la fin avec Lucy, Australopithèque la plus ancienne connue ou au moins la plus médiatisée et la plus complète (Little foot, en Afrique-du-Sud, squelette à la mode chez les préhistoriens et qui est en train de commencer à intéresser la presse grand public, pourrait être un peu plus vieux, autour de 3 millions d’années), Lucy donc qui apparaît juste après des dinosaures… alors que ces derniers ont disparu autour de 65 millions d’années (en laissant comme descendance les oiseaux). Certes, c’est du cinéma, les artistes disent ce qu’ils veulent, mais c’est déjà si difficile de dire qu’il y a 60 millions d’années de distance au moins entre les derniers dinosaures et les premiers hominidés… Les scènes de cascades n’apportent pas grand chose, la course dans Paris, sous les guichets du Louvre en particulier, et le carambolage de voitures de police pouvaient être évoquées sans ce fracas de véhicules. Bref, je n’ai pas aimé et je suis sortie agacée. Heureusement que c’est un film court (1h30 je crois, publicité en plus, je n’ai pas l’habitude…). Bref, pas aimé du tout, et gros problème pour la préhistoire!

Du goudron et des plumes de Pascal Rabaté

Affiche du film Du goudron et des plumes de Pascal RabatéAprès une semaine riche en cinéma avec Les hommes! De quoi parlent-ils? de Cesc Gay, Jimmy’s Hall de Ken Loach, A la recherche de Vivian Maier de John Maloof et Charlie Siskel et Boyhood de Richard Linklater (il y aura moins de sorties cinéma en août, le TAP Castille, soit 3 des 4 salles d’art et essai à Poitiers, est fermé pour deux semaines), je suis allée voir Du goudron et des plumes de Pascal Rabaté, dont je vous ai déjà parlé pour plusieurs albums de bande dessinée (Les petits ruisseaux, Le petit rien tout neuf avec un ventre jaune, La Marie en plastique).

Le film: de nos jours, l’été, à Montauban. Christian [Sami Bouajila] démarche avec un apprentis des personnes âgées pour des diagnostics termites qui se terminent en travaux injustifiés. Divorcé, il accueille parfois sa fille de 12 ans, qui s’entraîne pour le défilé de majorettes qui ouvrira le « Triathlon de l’été », compétition populaire télédiffusée qui se déroulera dans quelques semaines à Montauban. Dans les tribunes, il se lie d’amitié (et bientôt plus) pour Christine [Isabelle Carré], enceinte de 4 mois d’un homme qui l’a plaquée et mère d’une fille également majorette. Un membre de l’équipe s’étant désisté, Christian est enrôlé, pas tout à fait consentant au début, comme rameur…

Mon avis: j’aime beaucoup les bandes dessinées de Pascal Rabaté mais je me suis copieusement ennuyée dans ce film. Même pas une vue de la belle ville de Montauban, que des lotissements et un gymnase. Ah si, quand même, on aperçoit vers la fin le monument aux morts, en marge de la place où se déroule la dernière étape du jeu télévisé… La seule chose qui m’a fait sourire, c’est l’absurdité mise dans les ronds-points, avec des panneaux bien visibles et disposés de manière rigolote, avec des « oeuvres centrales » plutôt bien vues, un gros pistolet rose et deux voitures qui se rentrent frontalement dedans. Ils auraient assurément reçu le prix du concours de la France moche lancé il y a quelques années par Télérama! On peut peut-être sauver aussi la voiture de société avec son gigantesque termite sur le toit, ou le frère dépressif [Zinedine Soualem], vendeur de farces et attrapes. Sinon, je ne suis même pas sûre de vous recommander de le voir quand il passera à la télévision, sauf à faire autre chose en même temps! Lisez plutôt ses bandes dessinées, revoir ici Les petits ruisseaux, Le petit rien tout neuf avec un ventre jaune, La Marie en plastique.

Les hommes! De quoi parlent-ils? de Cesc Gay

Affiche de Les hommes! De quoi parlent-ils? de Cesc GayEncore une sortie cinéma, et oui, le TAP Castille (3 des 4 salles d’art et essai à Poitiers) ferme aujourd’hui pour 15 jours, après, c’est moi qui serai en vacances, je voulais donc voir encore quelques films à l’affiche avant un sevrage en août. Cette fois, une envie de détente avec Les hommes! De quoi parlent-ils? de Cesc Gay.

Le film: de nos jours à Barcelone. Huit hommes, G. (Ricardo Darín), S. (Javier Cámara), E. (Eduard Fernández), M. (Jordi Mollà), P. (Eduardo Noriega), A. (Alberto San Juan), J. (Leonardo Sbaraglia), la quarantaine parfois bien mûre, un peu machos, par deux ou avec une femme, la leur ou pas, ont du mal à exprimer leurs sentiments amoureux ou ce qui les tracasse!

Mon avis: envie d’été et de vacances, d’évasion à Barcelone? Pas de chance, on aperçoit à peine la ville et le film se passe en hiver, en commençant par une grosse averse! Mais un bon moment de détente, en tout cas, toutes les femmes dans la salle ont bien ri à certaines situations, les hommes beaucoup moins, est-ce que le réalisateur a touché « là où ça fait mal » (sous la ceinture)? Le titre original est d’ailleurs plus expressif, citation d’une tirade du film: « Una pistola en cada mano ». Le montage en petites saynètes, confidences à deux entre deux hommes (amis ou simples relation) ou homme et femme (la légitime ou pas)  pour finir tous ensembles dans un appartement est assez efficace tout en se moquant du genre des telennovelas dont dont aurait ici plusieurs épisodes à la suite. Dépression, crise sentimentale, parfois économique (E., sans emploi, en instance de divorce, est retourné vivre chez sa mère à 46 ans), ils tentent de se sortir de situations pas toujours faciles… La collègue de travail lourdement draguée par P. alors qu’il attend un enfant ou la femme du meilleur copain vont finalement peut-être leur faire comprendre la vie! Le film a plutôt été éreinté par la critique (ou plutôt, par des critiques masculins, Jérémie Couston dans Télérama, Frank Nouchi dans Le Monde, Christophe Narbonne dans Première, qui ont dû se sentir visés dans leur ego), mais moi, j’ai passé un bon moment au cinéma!

Jimmy’s Hall de Ken Loach

Affiche de Jimmy's Hall de Ken LoachJe vous le disais lundi, il y a des semaines « avec » et des semaines « sans », côté cinéma. Pour la première fois, le TAP Castille (3 des 4 salles d’art et essai à Poitiers) fermera 15 jours, du 2 au 17 août 2014, puis je serai en vacances, donc pas ou très peu de cinéma en août, si je souhaite voir certains films, c’est maintenant, ils ne passeront plus en septembre! Je suis donc allée voir Jimmy’s Hall de Ken Loach [du même réalisateur, voir aussi mon avis sur Moi, Daniel Blake].

Le film: 1932 dans la campagne irlandaise, dans le comté de Leitrim. Jimmy Gralton [Barry Ward] revient dans la ferme familiale tenue par sa mère après 10 ans d’exil aux États-Unis. Il y a dix ans, il avait ouvert un bal (« Hall ») monté par la communauté et animée par elle, avec cours de dessins, d’apprentissage de la lecture, de chant et bien sûr danses. Menés par le curé, le Père Sheridan [Jim Norton] et les propriétaires terriens, les « bien-pensants » de la commune avait obtenu l’exil de Jimmy Gralton. Après la guerre civile et la nomination d’un nouveau gouvernement, et à la demande des « anciens jeunes », en tête desquels Oonagh [Simone Kirby], l’amour de sa vie qu’il a abandonnée et qui s’est mariée après son départ, il rouvre le lieu, le jazz rapporté grâce à un gramophone et des leçons de danse et de musique trouve sa place à côté de la musique traditionnelle. Les conservateurs, curé en tête, ne l’entendent toujours pas de cette oreille…

Mon avis: entre musique irlandaise et jazz, la bande son est remarquable! Que Ken Loach ait choisi de raconter cet épisode de l’histoire irlandaise (d’après une histoire vraie racontée par Paul Laverty), qui montre l’emprise de l’église sur la société, n’est sans doute pas un hasard! L’Église catholique reste très influente en Irlande, qui reste l’un des pays les plus rétrogrades d’Europe en matière d’avortement, autorisé seulement depuis août 2013 suite à un scandale (octobre 2012, mort de Savita Halappanavar au cours d’une fausse-couche après un refus d’avortement) dans les cas où la mère est en danger, mais pas en cas de viol ou d’inceste. Elle est à peine écornée par les scandales qui éclatent, pédophilie couverte par la hiérarchie et découverte de charniers d’enfants dont elle avait la charge, dont l’un de 800 bébés et enfants à Tuam (enfants souvent de mère célibataires, recueillis par l’Église, dénutris, objets de mauvais traitements, guère mieux que le sort réservé aux enfants qui ne naissaient pas parfaits dans les Lebensborn, voir Dans le berceau de l’ennemi de Sara Young). Point de ces scandales ici, mais une emprise insidieuse et durable de l’Église. Pas question pour le curé que d’autres que ceux qu’il a agréés enseignent à lire (quels livres?), à penser indépendamment, en respectant la liberté de conscience et de religion! Dénonciation en prêche de ceux qui fréquentent le Hall, union avec les propriétaires terriens (dont l’expulsion des fermiers pauvres est remise en cause par les progressistes), encouragement à la haine, Ken Loach montre ici toute la capacité de nuisance de l’Église! La guerre civile de 1922/1923 est à peine esquissée, c’est pourtant elle qui a entériné la partition de l’Irlande avec la partie nord qui est restée britannique. Ken Loach a choisi de montrer la vie d’un village, la campagne vallonnée, paisible s’il n’y avaient pas ces haines.

A la recherche de Vivian Maier de John Maloof et Charlie Siskel

Affiche de A la recherche de Vivian Maier de John Maloof et Charlie Siskel Il y a des semaines sans cinéma et d’autres avec plusieurs sorties en quelques jours. Cette semaine donc, après Boyhood de Richard Linklater et avant Jimmy’s Hall, je suis allée voir A la recherche de Vivian Maier de Charlie Siskel et John Maloof.

Le film:  en 2007 à Chicago. John Maloof achète aux enchères un carton plein de négatifs dans lequel il espère trouver des vues de Chicago pour illustrer sa thèse de doctorat. N’y ayant pas trouvé son bonheur, il laisse la caisse de côté et l’ouvre à nouveau en 2009, plonge dans les négatifs et rouleaux de pellicule. Découvrant le travail de Vivian Maier, il découvre qu’elle vient de mourir et part à la recherche des autres cartons qu’il n’avait pas acheté lors de la vente. Le voici avec 100 000 négatifs, 700 rouleaux de pellicule couleur et des films en 8 et 16 mm, mais les musées qu’il contacte refusent de l’aider. Pourtant, il sent qu’il est face à une œuvre majeure, il part à la recherche du passé de cette dame, tombe sur son garde-meuble toujours payé par l’un des enfants qu’elle avait gardé. Car si elle a abondamment photographié, elle a été nounou à Chicago, une nounou pas toujours sympa, qui gardait des tas de papiers qui vont mener John Maloof sur les traces de sa mère, à Saint-Julien-en-Champsaur dans les  Hautes-Alpes. Si elle n’a pas exposé ou fait connaître son œuvre, à la fin des années 1950 (elle avait alors une trentaine d’années), elle avait été en relation avec un photographe de son village natal…

Mon avis: Je préfère le titre anglais, Finding Vivian Maier, qui a une notion de découverte… parce que s’il recherche,  John Maloof trouve aussi des éléments, parfois contradictoires, qui vont révéler la personnalité diverse de Vivian Maier, secrète, obsessionnelle, mais une grande artiste, qui a photographié de magnifiques scènes de rue, les riches, mais surtout les pauvres, les délaissés (à découvrir sur le site créé par John Maloof), et aussi de très beaux autoportraits. Par sa ténacité, John Maloof, après avoir développé des milliers de négatifs, a réussi à organiser des expositions et publier des livres, qui permettent de financer la numérisation de ces clichés, triés, indexés, conditionnés pour une bonne conservation, sans l’aide des musées, le MomA à New-York refuse obstinément de reconnaître le travail de cette artiste méconnue, morte pauvre et sans famille. Une superbe découverte qui a transformé la vie de John Maloof et sans doute des enfants qu’elle a gardés, ou plutôt traînés dans des quartiers parfois malfamés, les promenades lui permettant de photographier encore et encore. Une quête à découvrir, comme l’œuvre ainsi révélée!

Pour aller plus loin, voir  Vivian Maier, site officiel créé par John Maloof