Archives de catégorie : Cinéma

Les films que j’ai vus au cinéma ces dernières années.

A perfect day de Fernando León de Aranoa

Affiche de A perfect day de Fernando León de AranoaSortie cinéma dimanche… Un peu mare des titres en anglais, même s’il y a ici un « sous-titre » officiel: A perfect day, un jour comme un autre,  de Fernando León de Aranoa.

L’histoire : dans les Balkans, en 1995. Dans une zone montagneuse, un cadavre a été balancé dans la nuit dans l’un des trois seuls puits et il faut l’enlever avant qu’il ne contamine l’eau. Une équipe d’humanitaire arrive, à bord de deux véhicules : Sophie [Mélanie Thierry], la française qui vient d’arriver et découvre son premier cadavre, Mambru [Benicio del Toro], qui effectue l’une de ses dernières interventions et doit rentrer chez lui dans une semaine, B. [Tim Robbins], qui bosse là comme ailleurs, et Damir [Fedja Stukan] le traducteur. La corde casse, il faut en trouver une autre, et passer aussi au briefing de sécurité piloté par les forces de l’ONU désabusé, récupérer au passage Katya [Olga Kurylenko], l’ex-petite amie de Mambru qui est là pour évaluer l’opportunité de poursuivre la mission ou de redéployer l’équipe sur un autre terrain. La journée s’annonce longue…

Mon avis : une journée dans un paysage grandiose, une zone montagneuse où deux véhicules se déplacent comme dans un labyrinthe qui n’est pas sans rappeler la quête nocturne du cadavre dans Il était une fois en Anatolie, de Nuri Bilge Ceylan. Au cours de cette pérégrination sont abordés de nombreux thèmes: la relation parfois complexe des humanitaires et des militaires (ONU et forces en présence), les profiteurs de guerre (vente d’eau), les mines (vaches mortes piégées), les crimes de la guerre civile, les conséquences sur les enfants, etc. Si les « vieux de la vieille » semblent désabusés, ils restent au service des autres, feront tout pour trouver une corde pour retirer un cadavre d’un puits, mais aussi, au passage, ils sauvent les prisonniers rassemblés près d’un bus par des militaires (miliciens?) qui font fi du cessé le feu. Même si le scénario est adapté d’un roman (Dejarse Llover de Paula Farias), le réalisateur a couvert sous la forme de reportage les guerres en Bosnie et en Ouganda et cela se ressent dans la manière d’aborder des sujets importants sans faire la leçon ou prendre parti. La complexité des situations est suggérée en permanence, parfois cachée derrière un humour que l’on pourrait penser mal placé mais qui est aussi une manière de survivre et de se protéger pour ces humanitaires.

Le fils de Saul de László Nemes

Affiche de Le fils de Saul de László NemesEn rédigeant l’article sur les César 2016, je me suis aperçue que je ne vous avais pas parlé du Fils de Saul de László Nemes, que j’avais vu lors de sa sortie. Comme certaines salles l’ont ressorti, je vous fais comme même un court avis…

Le film : en octobre 1944, dans le camp d’Auschwitz-Birkenau. Les Sonderkommando sont des prisonniers juifs isolés des autres, chargés des chambres à gaz et des fours crématoires, jouissant d’une certaine autonomie et d’une vie moins dure… jusqu’à être à leur tour éliminés. Parmi eux, Saul Ausländer [Géza Röhrig] tente de survivre et d’échapper à la prochaine « sélection » (de ceux qui seront éliminés). Un jour, un jeune garçon n’est pas mort après le gazage, il est emporté par le médecin qui va tenter de voir pourquoi il a survécu… avant de l’éliminer. Saul croit reconnaître en lui son fils, va tout tenter pour trouver un rabbin et procéder à des obsèques dans le camp en le faisant échapper au four crématoire.

Mon avis : même si certains détails ne collent pas toujours avec l’Histoire (pour cela, il y a les documentaires, les travaux historiques, les témoignages, suivre les liens sur les mots-clefs en fin d’article…), ce film poignant n’est pas un film sur les camps de concentration, ni même sur les camps voisins d’Auschwitz et Birkenau. Il permet d’en toucher l’organisation, la dureté, les trafics internes aussi, mais c’est avant tout un film sur le mode de survie d’un père, comment il se rattache à l’amour de son fils, même d’un fils qu’il croit reconnaître, même d’un fils mort, sauver l’âme de ce fils (trouver un rabbin et l’enterrer en disant le kaddish) pour tenter de survivre lui-même, de trouver ne serait-ce que quelques jours un sens à sa vie, quitte à la mettre en danger, ainsi que celles de ses compagnons de douleur. Par le choix de l’immersion au sein du Sonderkommando, par la manière de filmer au cœur du groupe, dans le bruit du camp, le spectateur ressent presque la chaleur étouffante et la puanteur qui s’échappe des fours crématoires. Un film à voir absolument!

Saint-Amour de Benoît Delépine et Gustave Kervern

Affiche de Saint-Amour de Benoît Delépine et Gustave de KervernCe week-end, ma sortie cinéma était pour Saint-Amour de Benoît Delépine et Gustave Kervern [voir aussi les films où il a un rôle principal,  Dans la cour de Pierre Salvadori et Cigarettes et chocolat chaud de Sophie Reine].

Le film : bien qu’officiellement en retraite depuis cinq ans, comme chaque année, Jean [Gérard Depardieu], veuf, éleveur dans le Morvan, vient présenter son meilleur taureau au salon de l’agriculture. Il est accompagné de son fils, Bruno [Benoît Poelvoorde] qui n’a pas la foi pour reprendre l’élevage et profite comme chaque année de sa semaine de vacances au salon pour faire le « tour de France des vins », de stand en stand. Jean l’embarque en taxi, avec Mike [Vincent Lacoste] au volant. Ils y croiseront un propriétaire de la maison d’hôte dépressif [Michel Houellebecq], un enterrement de vie de jeune fille, Venus [Céline Sallette], une femme en mal d’enfant.

Mon avis : vous croyez que c’est normal de plus rire pour un documentaire (Merci Patron ! de François Ruffin la semaine dernière) que pour une comédie ? Bon, je pensais que ce film était au moins drôle et rendait hommage aux vignobles traversés, mais à part une plaquette sur le vin achetée sur une aire d’autoroute (et largement montrée à maintes reprises), il est peu question de vin de qualité, de terroir, même pas pour le Saint-Amour (un vin du sud du Jura) qui donne son nom au film, seulement beaucoup de beuveries et de « coucheries » (suggérées la plupart du temps)… Bon, aller, je n’ai pas aimé et me suis souvent ennuyée, mais beaucoup de spectateurs semblent apprécier ce film si on en juge par les entrées de la première semaine, une personne sur les trois qui étaient avec moi l’a aimé, l’autre a dit « bof », la dernière « sans intérêt », je partage son avis…

Merci Patron ! de François Ruffin

Affiche de Merci Patron ! de François RuffinJe suis allée voir Merci Patron !, premier  (documentaire) de François Ruffin, patron de Fakir, le journal indépendant d’Amiens « fâché avec tout le monde ou presque », comme dit sa devise (suivre le lien pour le découvrir).

Le film : 2012, dans le Nord de la France (Nord, Pas-de-Calais et Picardie). François Ruffin commence son enquête en fan absolu de Bernard Arnault, T-shirt, voiture, mug, tout le clame: « merci Bernard »! Sur le mode de la parodie, il va essayer de réconcilier d’ex-salariés du groupe de luxe contrôlé par « Bernard » et licenciés pour cause de fermeture, délocalisations, etc. Le voici à Poix-du-Nord, près de Valenciennes, avec l’ancienne déléguée CGT (une soeur-ouvrière) d’une usine qui fabriquait des costumes Kenzo, rachetée et fermée par LVMH, délocalisée en Pologne… Jocelyne et Serge Klur tirent la langue pour vivre avec quelques centaines d’euros par mois à deux, heureusement que le jardin leur apporte les légumes, mais ils sont menacés d’expulsion. Il les embarquent, avec un inspecteur des impôts (belge… le siège du groupe étant en Belgique) et d’ex-vendeurs de la Samaritaine à l’assemblée générale du groupe. Il est expulsé manu-militari. Peu après, devant les menaces de saisie des biens des Klur, il monte une opération de « chantage », si « Bernard » ne paye pas, ils perturberont les grands raouts et événements privés organisés pour les actionnaires…

Mon avis : ce documentaire est JUBILATOIRE! Avec beaucoup d’humour, un financement par les lecteurs de Fakir et les militants qui le soutiennent, François Ruffin tourne en ridicule ce Bernard Arnaud si suffisant, que l’on voit tout au long de sa carrière par des extraits d’interviews, un Bernard si condescendant (quoi, ces gens qu’il a licenciés ne comprennent pas que c’est pour son bien à lui???), mais qui voit pointer la menace et cède à un chantage qui ressemble à une blague de potache et qui fonctionne au-delà des espérances des protagonistes! La dette de Klur est épongée, lui retrouve un emploi (en CDD puis six mois plus tard en CDI avec une petite pression en plus) dans le magasin Carrefour de son choix, sur intervention du chef de la sécurité de Bernard Arnaud (euh, pas sûre que lui garde longtemps son emploi!). Le ton humoristique rend encore plus percutant ce film condensé en 1h30!

Le service de sécurité rapproché de Bernard Arnaud est issu de nos si doués renseignements généraux… Pas étonnant qu’ils laissent passer les terroristes quand on voit comment l’un de leur ex-haut responsable se fait piéger!!! La mobilisation de la force publique (aux frais de l’État je suppose) sous la forme d’une rangée de CRS pour « sécuriser » une assemblée générale pose aussi question du point de vue du (de la) citoyen(ne) et de l’actionnaire (où est la démocratie supposée des assemblées générales d’actionnaires?)! La presse du groupe de Bernard Arnaud a été muselée : Le Canard enchaîné (24 février 2016) a rapporté pourquoi et comment les journalistes du Parisien Aujourd’hui en France et des Échos n’ont pas pu faire de critique positive du film. La presse du groupe Lagardère a aussi tenté de limiter les « dégâts » possibles en matière de publicité des gros annonceurs du luxe: Elle, mais aussi Europe 1 en ont fait les frais, avec une annulation d’une interview de François Ruffin sur Europe 1, puis une reprogrammation sur un autre créneau de la radio, après une mobilisation sur les réseaux sociaux pour relayer cette censure!!!

César 2016…

Affiche de Mustang de Deniz Gamze ErgüvenSi je n’ai pas vu le film primé pour le meilleur film (Fatima de Philippe Faucon) j’ai vu la plupart des films récompensés, ce qui ne sera sans doute pas le cas pour les Oscar ce week-end, puisque parmi les films sélectionnés, je n’ai vu que Mustang de Deniz Gamze Ergüven et Le fils de Saul de László Nemes. Vous pouvez voir ou revoir mes avis en suivant les liens… et voir que ce ne sont pas forcément des films que j’ai préférés. Je suis très heureuse des récompenses de Mustang de Deniz Gamze Ergüven.

Les films primés aux César que j’ai vus

  • Trois souvenirs de ma jeunesse (meilleur réalisateur pour Arnaud Desplechin)
  • Marguerite de Xavier Giannoli (meilleure actrice pour Catherine Frot, meilleurs costumes pour Pierre-Jean Larroque, meilleurs décors pour Martin Kurel, meilleur son pour François Musy et Gabriel Hafner)
  • La loi du marché de Stéphane Brizé (meilleur acteur pour Vincent Lindon)
  • Mustang de Deniz Gamze Ergüven (meilleur scénario original pour Deniz Gamze Ergüven et Alice Winocour, meilleur premier film, meilleur montage pour Mathilde Van de Moortel, meilleure musique originale pour Warren Ellis)

Les films sélectionnés aux César mais non primés que j’ai vus

Les films primés aux César que je n’ai pas vus

  • Fatima de Philippe Faucon (meilleur film, meilleur espoir féminin pour Zita Hanrot, meilleure adaptation)
  • La tête haute d’Emmanuelle Bercot (meilleur espoir masculin pour Rod Paradot, meilleur acteur dans un second rôle pour Benoît Magimel)
  • L’hermine (meilleure actrice dans un second rôle pour Sidse Babett Knudsen)
  • Birdman d’Alejandro González Iñárritu (meilleur film étranger)
  • Demain de Cyril Dion et Mélanie Laurent (meilleur documentaire)
  • Valley of Love (meilleure photographie pour Christophe Offenstein)
  • Le petit Prince de Mark Osborne (meilleur film d’animation)
  • Le Repas dominical de Céline Devaux (meilleur court métrage d’animation)
  • La Contre-allée de Cécile Ducrocq (meilleur court métrage)

Les innocentes d’Anne Fontaine

Les innocentes d'Anne FontaineJe suis allée voir hier Les innocentes d’Anne Fontaine (revoir mon avis sur un de ses films précédents, La fille de Monaco).

L’histoire : en Pologne, en décembre 1945. Dans un hôpital temporaire de la Croix Rouge,  Mathilde Beaulieu [Lou de Laâge], fille d’ouvriers communistes, assiste Samuel [Vincent Macaigne], le chirurgien juif dont toute la famille a été décimée à Bergen-Belsen. Un jour, une jeune sœur d’un couvent de bénédictines vient chercher de l’aide : l’une des religieuses souffre en couches depuis 24 heures. Contre l’ordre établi (les Polonais doivent être aidés par la Croix-Rouge polonaise), elle finit par se rendre au couvent, pratique une césarienne avec les moyens du bord, avant d’apprendre que sept religieuses sont enceintes et sur le point d’accoucher, toutes ont été violées il y a 9 mois par des soldats soviétiques. La Mère supérieure [Agata Kulesza] lui fait jurer le silence, elle confiera l’enfant au village, il n’est pas question qu’elle revienne. Mais l’une des religieuses, Maria [Agata Buzek], promet de la faire entrer pour vérifier les suites de la césarienne. Au retour de cette deuxième visite, des soldats russes arrêtent son véhicule et entreprennent de la violer, arrêtés in-extremis par leur supérieur. Il ne la laisse cependant pas passer et elle doit retourner au couvent…

Mon avis : Anne Fontaine s’est inspirée de l’histoire de Madeleine Pauliac dont elle a eu connaissance par son neveu, qui détenait son journal intime. Elle mêle plusieurs thèmes, les viols commis par des soldats, les enfants abandonnés ou orphelins de guerre, la foi / les fois (catholique, juive, communiste?), l’occupation de la Pologne dans les mois qui suivent la Deuxième Guerre mondiale. La vision semble parfois un peu simplistes: les médecins soignent sans arrière-pensée, alors que dans le camp des religieuses, il y a certes la foi pour la quasi totalité (pas toutes), mais aussi le secret, l’infanticide, le suicide… pas très catholiques! Révéler le secret serait la mort du couvent, dont les biens sont convoités par le nouveau gouvernement communiste. La mère supérieure a cru bon de se débarrasser des premiers bébés en les confiants à Dieu (au pied d’un calvaire dans le froid de l’hiver polonais) plutôt qu’à une famille, mais elle est « punie » (je fais un raccourci qui me semble implicite dans le film) car victime d’une syphilis à un état avancé, qu’elle refuse de laisser soigner. Je trouve que ce film n’est cependant pas aussi fort que Ida, de Paweł Pawlikowski, qui abordait le thème d’une petite fille juive cachée dans un couvent polonais.

La terre et l’ombre de César Acevedo

Affiche de La Terre et l'ombre de César AcevedoMa sortie cinéma du week-end a été pour La terre et l’ombre de César Acevedo, qui a reçu la caméra d’or au dernier festival de Cannes (2015).

Le film : de nos jours en Colombie. Après une absence de 17 ans, Alfonso [Haimer Leal] revient dans sa ferme désormais isolée au milieu des champs de canne à sucre, dont elle est séparée juste par une cour et un arbre majestueux. Gerardo [Edison Raigosa], son fils, est alité, victime d’une maladie pulmonaire. Esperanza [Marleyda Soto], sa belle-fille, et Alicia [Hilda Ruiz], sa femme avec qui il est fâché, vont travailler à sa place dans les plantations de canne à sucre, Alfonso gardera son fils et Manuel [Felipe Cárdenas], son petit-fils.

Mon avis : si vous avez envie d’un film gai, n’allez pas voir celui-ci! Au fil des ans, les paysans ont été contraints de vendre leurs terres aux planteurs de canne à sucre, puis de travailler pour eux, en étant payés de manière aléatoire. Les cendres issues du brûlage des déchets retombent en pluies qui rendent l’air opaque et irrespirable, ont provoqué chez Gerardo une sorte de silicose. Et dire qu’on nous dit qu’un petit feu de jardin, ça pollue… à notre échelle, c’est ridicule, multiplié par des milliers, oui, on libère des particules dans l’air, mais comparé à ces brûlis géants, que pesons-nous ? (Allez, un petit effort, on limite quand même nos émissions). Le grand-père essaye quand même de transmettre des savoir-faire en lien avec la nature à son petit-fils: siffler comme les oiseaux, les attirer sur une mangeoire (on les entend mais ne les voit jamais), jouer avec un cerf-volant. Le film est parfois très lent, et pourtant, il ne montre pas certaines scènes que l’on attend : le cadavre est lavé, le fils lui dit adieu (scène là aussi suggestive, très belle, avec juste la main du père et une partie du visage du fils), puis le corps est emporté sans la famille dans une ambulance au milieu des flammes des brûlis, mais il n’y a pas d’enterrement. La cause du départ du grand-père il y a 17 ans, l’obstination de sa femme à rester sur place, sont sous-jacents en permanence, sans être abordés frontalement. La peine des personnages, les rancunes, les colères (cf. la grève des ouvriers agricoles aussi sont en permanence suggérés, avec de beaux plans sur les visages des personnages. À la sortie du film, je pense que vous ne mangerez plus de sucre de canne, sauf peut-être s’il est issu d’un label de production responsable (et bio… on ne montre pas les pesticides dans le film, mais ils sont aussi abondamment utilisés sur les plantations géantes)…

 

45 ans d’Andrew Haigh

Affiche de 45 ans d'Andrew Haigh

Ma sortie cinéma de la semaine a été pour 45 ans d’Andrew Haigh. Ce film est adapté de la nouvelle In Another Country de David Constantine. Les deux acteurs principaux, Tom Courtenay et Charlotte Rampling, ont reçu respectivement l’Ours d’argent du meilleur acteur et celui de la meilleure actrice au dernier festival international du film de Berlin.

Le film : de nos jours, dans la campagne anglaise. Nous sommes lundi. Samedi, Kate [Charlotte Rampling] et Geoff [Tom Courtenay] Mercer, un couple sans enfant,  fêteront leurs 45 ans de mariage avec leurs amis dans la salle des fêtes de la ville voisine. Comme chaque matin, Kate, professeur à la retraite, promène le vieux chien, Max, alors que Geoff, qui a eu un pontage il y a cinq ans, bricole à la maison. Au retour de la promenade, Geoff est perturbé, il vient de recevoir une lettre en allemand, qu’il a du mal à comprendre, mais les autorités suisses lui annoncent qu’ils ont retrouvé le corps de Katya, sa fiancé disparue dans un accident dans les Alpes… en 1962. En plein préparatifs, au fil de la semaine, Kate découvre l’importance de Katya dans la vie de celui qu’elle ne connaissait pas encore à l’époque…

Mon avis : une campagne anglaise ordinaire, un couple vieillissant « normal », et pourtant, il se dégage une ambiance particulière de ce film. Une ambiance très « british », avec le salon de thé, la réunion des vieilles dames (avec thé et petits gâteaux) sur une péniche à la découverte de l’histoire des canaux, la réunion des anciens de l’usine où a travaillé Geoff, le dîner de gala de la soirée du samedi, la pluie fine (du mercredi?), aucun doute, nous sommes en Angleterre! Une ambiance intime, les deux personnages principaux sont remarquables, faisant passer beaucoup de choses dans le non-dit, comme dans les scènes dans le grenier par exemple, ou la tentative de relation sexuelle (« ça faisait si longtemps »…). Une semaine, une heure trente pour repasser le fil d’une vie qui aurait été si différente sans cet accident survenu 50 ans plus tôt… et si différente aussi cette semaine si le glacier suisse (à cause du réchauffement climatique?) n’avait pas fait ré-apparaître ce corps.

Comme un avion de Bruno Podalydès

Affiche de Comme un avion de Bruno PodalydèsDans le cadre du « festival télérama 2016 », je suis allée voir Comme un avion de Bruno Podalydès [revoir Adieu Berthe]. Au passage, ça me fait penser qu’il faut que je vous parle d’une pièce de théâtre vue en début de saison avec Denis Podalydès

Le film : de nos jours, en banlieue parisienne. Michel [] est animateur 3D dans l’entreprise dirigée par son ami Rémi [Bruno Podalydès]. Pour ses 50 ans, sa femme Rachelle [Sandrine Kiberlain] et ses amis lui offrent des cadeaux en lien avec l’aviation, à lui qui est fou d’aérospatiale depuis son enfance. Mais voilà qu’à l’occasion d’une discussion sur les palindromes, il découvre le mot kayak… et en achète un pliable! Après des entraînements « à terre », le voilà qui embarque… Sa première escale sera pour une buvette au bord de l’eau, tenue par une veuve, Laetitia [Agnès Jaoui], et Mila [Vimala Pons], une jeune fille qu’elle héberge au fond de son terrain, avec l’aide de Christophe [Jean-Noël Brouté] et Christophe [Michel Vuillermoz]…

Mon avis : je n’avais pas vu ce film lors de sa sortie car il passait au cinéma commercial (marre de la demi-heure de pub et du niveau sonore trop fort) et j’avais été assez déçue par Adieu Berthe. Les spectateurs qui sortaient de Comme un avion projeté juste avant Phantom Boy samedi semblaient détendus : « un film sans prétention mais un bon moment de détente », me résuma un ami croisé dans la file. Plutôt bien résumé… Il y a plein de petits moments drôles, comme l’étude du manuel des Castors juniors pour apprendre à survivre sur la rivière ou les brèves apparitions de Pierre Arditi en pêcheur grognon. Le bon conseil du film, méfiez-vous de la géolocalisation des photographies par votre téléphone si vous êtes en stage de yoga chez le meilleur ami de votre mec ou si vous racontez vos exploits en kayak sans bouger d’une buvette 😉 Une bonne comédie, finalement…

les films que j’ai vus avant le festival, 8 sur 16, c’est pas mal!

– les films que j’ai vus pendant le festival

– les films que je ne verrai pas, ceux qui ne me tentent pas et ceux qui ne passeront pas à Poitiers!

  • Life d’Anton Corbijn
  • Much loved de Nabil Ayouch
  • Birdman d’Alejandro González Iñárritu
  • Phoenix de Christian Petzold
  • Fatima de Philippe Faucon

Trois souvenirs de ma jeunesse d’Arnaud Desplechin

Trois souvenirs de ma jeunesse d’Arnaud DesplechinJe n’avais pas pu voir Trois souvenirs de ma jeunesse d’ (de ce réalisateur, revoir Jimmy P. et Un conte de Noël) lors de sa sortie en salle en mai 2015, séance de rattrapage donc à l’occasion du « festival télérama 2016 ».

Le film : de nos jours, Paul Dédalus [], anthopologue, la petite cinquantaine, rentre du Tadjikistan pour prendre un poste au ministère des affaires étrangères à Paris. Il se souvient de son enfance à Roubaix, de son père [Olivier Rabourdin], représentant de commerce souvent absent, de sa mère folle, abandonnant son petit frère Ivan et sa petite sœur Delphine, il se réfugiait alors chez sa tante, apprenant le russe avec l’amie de celle-ci… Il a 11 ans lorsque sa mère se suicide. Retour à la douane, son passeport coince, un homonyme est né le même jour que lui, au même endroit, vivait en Australie jusqu’à sa mort deux ans avant. Comment est-ce possible? Il avait 16 ans, un voyage scolaire à Minsk, avec son meilleur ami, il avait passé des documents à des juifs désireux de fuir l’URSS, il avait laissé son passeport… Trois ans plus tard, en 1989. Paul [Quentin Dolmaire] est étudiant pauvre à Paris, il couche où il peut, en auberge de jeunesse, chez d’autres étudiants, étudie comme un fou pour se faire accepter de la professeur Béhanzin [Eve Doe-Bruce]. Quand il a assez d’argent et qu’il pense que son père ne sera pas là, il rentre en week-end, retrouver Ivan [Raphaël Cohen], Delphine [Lily Taïeb], son cousin Bob [Teo Fernandez], ses copains, dont Kokalvki [Pierre Andrau] qui entame des études de médecine, jusqu’à ce qu’il rencontre Esther [Lou Roy Lecollinet]… lycéenne de 16 ans, qui couche avec tous les garçons du lycée. Commence une folle histoire d’amour…

Mon avis : Mathieu Amalric apparaît peu, mais le costume d’anthropologue lui va bien (cf Jimmy P., ethnologue psychanalyste). Claude Lévy-Strauss devient un auteur à connaître si l’on va voir un film d’Arnaud Desplechin. Comme dans Jimmy P. aussi, il y a en toile de fond la judaïté, le rapport aux religions (le frère catholique mystique, des scènes avec le curé dans l’enfance et l’adolescence, une discussion entre adolescent sur l’athéisme). Les trois souvenirs sont de longueur très inégales : l’enfance et le séjour en Russie doivent faire moins de 30 minutes à eux deux, Esther occupe quasiment la dernière heure et demie. La plus grande partie du film, c’est donc Quentin Dolmaire qui incarne le personnage complexe de Paul en étudiant pauvre sérieux qui ne sait pas comment parler aux filles. En face de lui, Esther / Lou Roy Lecollinet en lycéenne dévergondée, « Marie couche-toi là » comme dit la mère de Bob. Des fêtes futiles dans la grande maison de Roubaix (mais les frère et sœur rangent le lendemain!), des centaines de lettres, des crises de désespoir d’un côté comme de l’autre, d’autres relations pour les deux mais un amour fou entre eux, et la révélation de deux jeunes acteurs! Une petite réserve sur les scènes à Douchanbe. On y entend parler russe, certes, le Tadjikistan est une ancienne république soviétique, plus de la moitié de la population est russe aujourd’hui encore, mais les vieux tadjiks que l’on aperçoit devraient parler le Tadjik, une langue proche du farsi (perse) parlé aussi au nord de l’Afghanistan (oui… j’ai travaillé sur la néolithisation précoce de hautes vallées du Tadjikistan dans un passé lointain…). Mais allez voir ce film sans réserve, il est encore temps de profiter jusqu’à mardi des séances de rattrapage du festival Télérama!

les films que j’ai vus avant le festival, 8 sur 16, c’est pas mal!

– les films que j’ai vus pendant le festival

– les films que je ne verrai pas, ceux qui ne me tentent pas et ceux qui ne passeront pas à Poitiers!

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