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A perfect day de Fernando León de Aranoa

Affiche de A perfect day de Fernando León de AranoaSortie cinéma dimanche… Un peu mare des titres en anglais, même s’il y a ici un « sous-titre » officiel: A perfect day, un jour comme un autre,  de Fernando León de Aranoa.

L’histoire : dans les Balkans, en 1995. Dans une zone montagneuse, un cadavre a été balancé dans la nuit dans l’un des trois seuls puits et il faut l’enlever avant qu’il ne contamine l’eau. Une équipe d’humanitaire arrive, à bord de deux véhicules : Sophie [Mélanie Thierry], la française qui vient d’arriver et découvre son premier cadavre, Mambru [Benicio del Toro], qui effectue l’une de ses dernières interventions et doit rentrer chez lui dans une semaine, B. [Tim Robbins], qui bosse là comme ailleurs, et Damir [Fedja Stukan] le traducteur. La corde casse, il faut en trouver une autre, et passer aussi au briefing de sécurité piloté par les forces de l’ONU désabusé, récupérer au passage Katya [Olga Kurylenko], l’ex-petite amie de Mambru qui est là pour évaluer l’opportunité de poursuivre la mission ou de redéployer l’équipe sur un autre terrain. La journée s’annonce longue…

Mon avis : une journée dans un paysage grandiose, une zone montagneuse où deux véhicules se déplacent comme dans un labyrinthe qui n’est pas sans rappeler la quête nocturne du cadavre dans Il était une fois en Anatolie, de Nuri Bilge Ceylan. Au cours de cette pérégrination sont abordés de nombreux thèmes: la relation parfois complexe des humanitaires et des militaires (ONU et forces en présence), les profiteurs de guerre (vente d’eau), les mines (vaches mortes piégées), les crimes de la guerre civile, les conséquences sur les enfants, etc. Si les « vieux de la vieille » semblent désabusés, ils restent au service des autres, feront tout pour trouver une corde pour retirer un cadavre d’un puits, mais aussi, au passage, ils sauvent les prisonniers rassemblés près d’un bus par des militaires (miliciens?) qui font fi du cessé le feu. Même si le scénario est adapté d’un roman (Dejarse Llover de Paula Farias), le réalisateur a couvert sous la forme de reportage les guerres en Bosnie et en Ouganda et cela se ressent dans la manière d’aborder des sujets importants sans faire la leçon ou prendre parti. La complexité des situations est suggérée en permanence, parfois cachée derrière un humour que l’on pourrait penser mal placé mais qui est aussi une manière de survivre et de se protéger pour ces humanitaires.

Jimmy P. d’Arnaud Desplechin

Affiche de Jimmy P. d'Arnaud DesplechinRetour au cinéma avec Jimmy P., psychothérapie d’un Indien des plaines, d’ (de ce réalisateur, revoir Un conte de Noël et Trois souvenirs de ma jeunesse).

Le film : 1948, dans un ranch du Montana. Jimmy Picard (Benicio Del Toro), indien Blackfoot qui a combattu en France à la fin de la Seconde Guerre mondiale, vit chez sa sœur. Il souffre de maux de tête, de surdité partielle et d’hallucinations visuelles. Grâce à un programme réservé aux anciens combattants, elle l’emmène à l’hôpital militaire de Topeka, dans le Kansas, spécialisé dans les maladies du cerveau. Les médecins sont perplexes, posent un diagnostic de schizophrénie, mais décident néanmoins de prendre l’avis de Georges Devereux (), un ethnologue et psychanalyste juif roumain, étudiant à Paris dans les années 1930 et qui vit chichement à New-York après deux ans d’immersion ethnographique chez les Indiens mohaves. Après une phase d’observation, la direction de l’hôpital lui accorde une séance quotidienne, ce sera son seul patient auquel il se lie rapidement…

Mon avis : le film, en anglais, est adapté du livre de Georges Devereux, Psychothérapie d’un Indien des plaines, publié en 1951. Arnaud Desplechin a fait le choix de montrer, en alternance avec les séances de psychanalyses (pas très conventionnelles, d’ailleurs, l’école française de psychanalyse fait savoir à l’hôpital qu’elle ne le recommande pas), les rêves et des scènes de la vie passée de Jimmy Picard (enfance, adolescence, père à 17 ans ayant abandonné la mère et sa fille, guerre), ainsi que quelques scènes du suivi de contre-analyse de Georges Devereux… et ses relations complexes avec son (ex) petite-amie anglaise, Madeleine (Gina McKee), désormais mariée à un autre homme et en partance prochaine pour Paris. L’alternance des scènes intimes (séances de psychanalyse, huis-clos avec Madeleine dans le bungalow) et de grands espaces (rêves et réminiscence de Jimmy Picard) donne un certain rythme au film que j’ai beaucoup aimé.

Pour aller plus loin : Georges Devereux (1908-1985) est le pionnier de l’ethnopsychanalyse, son œuvre se poursuit au sein du Centre Georges Devereux (Université de Paris VIII). Ses archives professionnelles et personnelles sont conservées à l’IMEC (Institut mémoires de l’édition contemporaine), soit 180 boîtes à découvrir dans le fonds Georges Devereux.