Archives par étiquette : tempête

Première personne du singulier de Patrice Franceschi

pioche-en-bib.jpgCouverture de Première personne du singulier de Patrice FranceschiJ’ai trouvé ce recueil, qui a reçu le prix Goncourt des nouvelles en 2015, parmi les nouvelles acquisitions de la médiathèque.

Le livre : Première personne du singulier de Patrice Franceschi, éditions du Seuil, collection Points, 2015, 197 pages, ISBN 9782757849736.

Les histoires : Noël 1884. Le capitaine Flaherty a disparu dans une tempête… retour sur sa carrière dans Un fanal arrière qui s’éteint. En mai 1940, en pleine débâcle et alors que les soldats fuient les uns après les autres, le sous-lieutenant Pierre Vernaud reçoit l’ordre de tenir pendant 24h le Carrefour 54 pour ralentir l’avancée allemande. Au début 2013, un journal de Syndney reçoit une information qui pourrait relancer l’enquête sur le Naufrage du lieutenant Wells dix ans plus tôt au large de l’Italie. Le 22 novembre 1943, deux résistants, Madeleine et Pierre-Joseph, chacun avec un enfant, se rencontrent sur le quai de la gare devant ce qui sera Le Train de six heures quinze.

Mon avis : j’ai beaucoup aimé ces quatre nouvelles, où l’auteur a glissé de petits renvois de l’une à l’autre : à la fin du Naufrage du lieutenant Wells le rédacteur en chef a entendu parlé de la mort tragique d’un capitaine il y a longtemps (Un fanal arrière qui s’éteint) ; au début du Train de six heures quinze, Madeleine est la cousine d’un héroïque sous-lieutenant du 101e régiment d’infanterie (Carrefour 54). Les descriptions des deux naufrages sont particulièrement réussies, impossible de fermer le livre au milieu de la tempête qui s’achèvera par la mort du capitaine Flaherty. Dans chaque nouvelle, le personnage principal doit prendre une décision importante qui décidera de son destin, au sacrifice de sa vie, jusqu’à se suicider ou s’exiler sur un îlot isolé. Le Naufrage du lieutenant Wells est le plus ancré dans l’actualité, avec un lieutenant qui ne supporte pas que le capitaine du cargo sur lequel il est refuse de ralentir et de se porter au secours d’une embarcation pleine de migrants, pour éviter les complications (et le temps perdu), l’équipage cosmopolite approuve le capitaine. Une situation qui hélas s’est déjà produite en Méditerranée ou dans l’océan Indien. A découvrir… et de mon côté, je lirai probablement d’autres ouvrages de Patrice Franceschi.

Étranges rivages de Arnaldur Indridason

pioche-en-bib.jpgCouverture de Étranges rivages de Arnaldur IndridasonHasard des lectures… Alors que je venais de terminer L’embellie de Auđur Ava Ólafsdóttir, Étranges rivages, réservé depuis plusieurs semaines, est arrivé sur mon compte à la médiathèque. De Arnaldur Indridason, j’ai déjà lu La voix, la Cité des jarres, La femme en vert, L’homme du lac, Hiver arctique, Hypothermie.

Le livre : Hypothermie de Arnaldur Indridason, traduit de l’islandais par Eric Boury, collection « Noir », éditions Métailié, 2013, 300 pages, ISBN 978-2-86424-901-6.

L’histoire : de nos jours en Islande, dans la région des fjords de l’est, à Eskifjördur, par un temps d’automne. Le commissaire Erlendur est revenu dans la maison de son enfance, abandonnée depuis le départ de sa famille pour Reykjavík quand il était enfant. Il y revient régulièrement, discrètement, à la recherche de son terrible passé: parti sur la lande avec son père et son petit frère Bergur, ils avaient été surpris par un terrible blizzard, le père avait pu rentrer par ses propres moyens, Erlendur avait fini par être retrouvé en hypothermie, mais pas son petit frère dont il avait fini par lâcher la main. A l’occasion d’une des ses promenades sur la lande, un chasseur lui raconte une autre histoire qu’il avait aussi entendu quand il était petit: en  janvier 1942, tout un groupe de soldats britanniques s’était égaré dans les mêmes conditions, certains avaient survécu, d’autres pas. La même nuit, une jeune femme, Matthildur, avait disparu mais son corps n’a jamais été retrouvé. Plus de 60 ans plus tard, Erlendur va tenter de reconstituer ce qui s’est passé ce jour là…

Mon avis : comme dans L’embellie de Auđur Ava Ólafsdóttir, il y a des grands travaux, de la pluie (et des tenues avec des pantalons étanches), et même quelques flocons, dans un paysage hostile… La perte du petit frère et l’attrait pour les disparitions sur la lande sont toujours en toile de fond de la série d’enquêtes du commissaire Erlendur. Cette fois, l’ensemble du livre est consacré au sujet de la perte, de la quête, du remord, du deuil impossible en l’absence de corps. Une enquête auprès d’octogénaires en toile de fond, mais c’est surtout la dure vie islandaise, entre la lande, le blizzard et les tempêtes qui mettent les pêcheurs à rude épreuve, qui est au cœur du roman, sans oublier les modifications récentes du pays (construction d’un barrage, d’une usine d’aluminium) qui défigurent les paysages. J’ai beaucoup aimé!

Take shelter de Jeff Nichols

Affiche du film Take shelter de Jeff Nichols Je poursuis le festival Télérama 2013 avec Take shelter de , un film qui a reçu plusieurs prix en 2011 dont le grand prix de la semaine internationale de la critique au Festival de Cannes et le grand prix du Festival du cinéma américain de Deauville [depuis, du même réalisateur, j’ai aussi vu Mud].

Le film : de nos jours dans l’Ohio. Curtis LaForche (Michael Shannon) travaille dans une carrière en équipe avec Dewart (Shea Whigham). Il vit avec sa femme, Samantha (Jessica Chastain) et sa fille sourde Hannah (Tova Stewart). En quelques jours, sa vie bascule à cause de violents cauchemars qui commencent tous par une tornade, cauchemars qui évoluent en vision en plein jour… Il a peur de devenir schizophrène comme sa mère, qui a basculé dans la maladie quand il avait dix ans. De son côté, sa femme met tous ses espoirs dans la possibilité de poser un implant cochléaire à sa fille, implant que la mutuelle de Curtis accepte de prendre en charge. Gardera-t-il son emploi et sa famille malgré ses actes irrationnels?

Mon avis : cela faisait longtemps que je n’avais pas vu de film apocalyptique (depuis Les derniers jours du monde des frères Jean-Marie et Arnaud Larrieu, je pense). Les scènes de tornades – celles des cauchemars et celles qui surviennent « en vrai » sont assez saisissantes. Mais contrairement à de nombreux critiques, j’ai eu du mal avec cette famille américaine à outrance, la femme soumise, qui prépare le petit déjeuner pour sa famille, gère le « qu’en dira-t-on », les rendez-vous pour la fillette (apprentissage de la langue des signes en particulier), le repas dominical avec ses parents après la messe. Le reste est aussi caricatural, le barbecue géant entre collègues, l’abri anti-tornade. Curtis fou comme sa mère ou prophète apocalyptique, je ne suis pas entrée dedans, et je me moque du débat pour savoir si la scène finale est une ultime vision ou une vraie tornade, si le film est une allégorie de la chute des États-Unis ou pas.

Le festival Télérama 2013 et ses films…
Ceux que j’ai vus avant le festival et dont je vous ai parlé (pas beaucoup cette année)

Ceux que j’ai vus pendant le festival

Ceux que je ne verrai pas

  • Moonrise Kingdom de Wes Anderson
  • Margin Call de J.C. Chandor
  • Holy Motors de Leos Carax
  • Tabou de Miguel Gomes
  • The Deep Blue Sea de Terence Davies
  • Les adieux à la reine de Benoît Jacquot
  • Elena de Andreï Zviaguintsev

Pêcheur d’Islande de Pierre Loti

Couverture des oeuvres de Pierre Loti
Logo du défi J'aime les classiques Ce mois-ci s’achève le défi J’aime les classiques proposé par les Carabistouilles de Marie, avec un livre de Pierre Lotil. Je continuerai en 20111 de lire ou relire mensuellement un classique dont je vous parlerai le dernier mercredi du mois.

Le livre : Pêcheur d’Islande, de Pierre Loti (pseudonyme de Julien Viaud), première édition chez Calmann-Lévy en 1886. Je l’ai lu en édition spéciale Omnibus / Grand Livre du mois, 1989, p. 527 à 647. La bibliothèque nationale de France / Gallica propose en ligne une édition de 1900 et tous les autres textes de Pierre Loti en numérisation des versions originales ou en recueil d’œuvres complètes chez Calmann-Lévy.

L’histoire : de 1883 à 1885 en mer d’Islande et en Bretagne. Cinq hommes font un repas de fête (pour la Vierge…), le capitaine, trois matelots, et Sylvestre, tout juste 17ans ; ils attendent encore Yann… Ces marins bretons partent chaque hiver pour plusieurs mois sur la Marie pêcher le cabillaud qu’ils transforment en morue salée dans les eaux froides de la mer d’Islande, au milieu des tempêtes qui se déchaînent. À bord, 6 hommes, trois couchettes, et le mousse, septième homme qui semble ne pas compter beaucoup… Yann est tout contrit d’abandonner sa belle à terre, Gaud, fille d’un gros commerçant de Paimpol. Leur relation n’est déjà pas facile, avec la différence de classe sociale, mais l’attendra-t-elle pendant ses mois en mer ? Et puis en reviendra-t-il, tout simplement ? L’interminable attente à terre, dans la lande bretonne battue par les vents, alors que tant de bateaux périssent en mer, de marins sont portés disparus cette année, tout retard dans la rentrée au port vers la fin août n’est-il pas annonciateur de mauvaise nouvelle ?

Mon avis : j’avais en souvenir une description des grandes tempêtes de la mer d’Islande, je ne me souvenais pas des parties sur l’attente à terre qui sont tout aussi fortes. Pas de doute, c’est un sujet que Pierre Loti connaissait bien, en tant qu’officier de la marine. Pour ces descriptions, je ne regrette absolument pas d’avoir relu ce livre!

Pour aller plus loin : si vous passez sur la côte atlantique, n’hésitez pas à faire un détour par Rochefort pour visiter la maison Pierre Loti (attention, le nombre de place à chaque visite est limité, en juillet et août, il faut impérativement réserver, plus d’informations sur le site de la ville de Rochefort. Si vous faites abstraction des orgies qui s’y sont passées et des actes délictueux (Loti aimait des garçons dont certains étaient beaucoup trop jeunes), vous apprécierez cette visite surprenante.

Dans la brume électrique de Bertrand Tavernier

Affiche du film dans les brumes électriques de Tavernier Ce soir, je suis allée voir Dans la brume électrique de Bertrand Tavernier (depuis, j’ai aussi vu Quai d’Orsay, du même réalisateur). Il s’agit d’un film adapté d’un polar de James Lee Burke, produit par Michael Fitzgerald. Suite à des divergences de vues entre le réalisateur, Bertrand Tavernier, et ce producteur, il existe deux versions de ce film, une française et mondiale hors États-Unis (celle que j’ai vue donc), qui dure presque deux heures, et une pour les États-Unis, plus courte, moins poétique, avec des plans séquences plus courts d’après ce que j’ai lu dans la presse.

Le film : En Louisiane, à New-Iberia, peu de temps après le passage du cyclone Katrina (fin août 2005). Dans une ville marquée par le passage du cyclone, en pleine reconstruction, l’inspecteur Dave Robicheaux, est sur les traces d’un tueur en série qui vient de tuer et mutiler affreusement une jeune fille qui vivait de prostitution. Parallèlement, une star holliwoodienne, Elrod Sykes, tourne un film à proximité, a sombré dans l’alcoolisme, ce qui n’est pas sans rappeler son passé à l’inspecteur… Il a découvert un cadavre qui gît dans les marais depuis les années 1960, noir victime d’un lynchage. Le tout avec des visions de la guerre de sécession (1861-1865) et d’apparitions dans les brumes qui s’élèvent des marais.

Mon avis : Tomy Lee Jones est magnifique dans le rôle de l’inspecteur Robicheaux, « border line » par rapport à la déontologie policière… et même au-delà de la ligne et de la limite bien souvent. J’ai beaucoup aimé le rythme souvent lent du film, qui ne montre pas mais suggère les crimes, les victimes. Et l’ancrage dans la vie d’après-cyclone, les malversations et le profit que peuvent tirer certains mafieux des dispositifs pour la reconstruction, le petit commerce en bord de marais. Si vous voulez un film d’action, passez votre tour, si vous souhaitez voir un film qui revisite le genre du polar, foncez !

Pour aller plus loin : le site officiel du film.