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Halte à la douane! Revue « enfantines » sur Mouchin (1935). 7. Le passage à niveau

Réceptacle, fenêtre qui parle 2014Un grand merci à mon père qui est parti en reportage dans le village de Mouchin pour illustrer les lieux avec des photographies! Si vous êtes dans le Nord, allez voir les Les fenêtres qui parlent à Villeneuve d’Ascq, auxquelles il participe à nouveau (jusqu’au 13 avril 2014), sinon, découvrez-les sur son blog, ici et (où vous pourrez agrandir les images)!!

Couverture de la revue Enfantines, n° 67, halte à la Douane à Mouchin

Je continue à vous faire découvrir le numéro n° 67 de la revue Enfantines Halte à la douane sur , dans le Nord, paru en 1935. Le numéro est certes publié en ligne, mais c’est en mode image, avec une couverture différente de la mienne. Après les douaniers, la circulation, la fraude en auto, la fraude avec les chiens, les gendarmes et une belle ruse, voici le passage à niveau…

revue Enfantines, n° 67, halte à la Douane à Mouchin, pages 10 et 11

Le passage à niveau

La gare de Bachy Mouchin est sur la ligne Douai Tournai (Belgique). C’est la dernière gare française. Au delà, c’est la Belgique.
L'ancienne gare de Bachy, cliché Lucien DujardinTout de suite après la gare, il y a un passage à niveau, sur la route Lille-Valenciennes.
Un jour, le garde-barrière vit, couché près de la barrière, un homme vêtu assez misérablement.
– C’est un « soulot » (1) pensa-t-il, et il laissa le bonhomme cuver son vin.
Mais voilà que là-bas, sur la voie ferrée, débouche une auto! Elle file à bonne allure, roulant sur les traverses et le ballast!

revue Enfantines, n° 67, halte à la Douane à Mouchin, illustration page 11, une voiture défonce un barrage

Elle grimpe sur les quais, roule encore plus vite, traverse la gare… et va arriver au passage à niveau.
Notre « ivrogne », subitement désaoulé [sic], saute sur la manivelle de la barrière, soulève celle-ci juste à temps pour laisser l’auto braquer à droite, reprendre la route et filer vers l’intérieur du pays.
Voilà un exploit bien audacieux.
——
(1) Un ivrogne.

Voir la suite: un pauvre chien et les dernières pages consacrées à d’autres ruses.

Halte à la douane! Revue « enfantines » sur Mouchin (1935). 6. Une belle ruse

Couverture de la revue Enfantines, n° 67, halte à la Douane à MouchinJe continue à vous faire découvrir le numéro n° 67 de la revue Enfantines Halte à la douane sur , dans le Nord, paru en 1935. Le numéro est certes publié en ligne, mais c’est en mode image, avec une couverture différente de la mienne. Après les douaniers, la circulation, la fraude en auto, la fraude avec les chiens, et les gendarmes, voici une belle ruse… vue par les enfants de primaire (enfin, les garçons!) qui semblent plus admirer les fraudeurs que le pauvre douanier berné.

Et un grand merci à mon père qui est parti en reportage dans le village de Mouchin pour illustrer les lieux avec des photographies!

Voici donc la suite du manuel du parfait petit fraudeur trans-frontalier… mais il vous faudra attendre une nuit d’orage pour l’imiter!

revue Enfantines, n° 67, halte à la Douane à Mouchin, pages 9 et 10

Une belle ruse
Ceci se passait il y a quelques années. La route du Bas-Préau est interdite aux voitures de toutes sortes.

Le passage de la frontière au Bas-Préau à Mouchin, cliché Lucien Dujardin

Le pont sur l’Elnon marque aujourd’hui la frontière entre la France et la Belgique au Bas-Préau à Mouchin. Cliché Lucien Dujardin.

Pour éviter qu’elles puissent passer, malgré l’interdiction, cette route est barrée.
On a enlevé des pavés et enfoncé obliquement, tout en travers de la route des rails d’acier. Impossible de passer avec une auto à travers ce barrage.
Cette nuit-là, il faisait un temps épouvantable: éclairs, tonnerre, pluie, vent, nuit noire.
Le douanier de faction, à quelque vingt mètres du barrage, s’était mis tranquillement à l’abri dans sa baraque.
Des fraudeurs, profitant de l’obscurité et du bruit que faisait la tempête, entreprirent de démolir le barrage.
Les rails sont enlevés et nos fraudeurs enfoncent dans le sol, à la place des rails, des bouts de tuyaux de poêle d’égale longueur. Ils les enfoncent légèrement, les calent avec quelques cailloux, se retirent en emportant les rails.
Puis la tempête cesse, la pluie aussi. Le jour point, et, dans l’aube naissante, le douanier de service voit que sa route est toujours bien barrée; il est tranquille.
Quelques instants plus tard, il voit arriver devant lui, venant de Belgique, une forte auto.
Le douanier ne s’en soucie pas, se disant: elle se trompe de route et il faudra bien qu’elle s’arrête au barrage.
Mais l’auto, loin de ralentir… accélère, prend de la vitesse, arrive à toute allure sur le barrage, fait sauter les « tuyaux de poêle » au grand ébahissement du pauvre douanier qui, le temps de revenir de son effroi, voit passer, impuissant, une auto bien chargée de tabac!
Vite au téléphone de la cabine pour alerter toute la douane, mais le téléphone ne répond pas, et pour cause: tous les fils sont coupés!
Et l’auto est bien loin.
Depuis cette aventure… on a rapproché le barrage de la cabine du douanier.

Voir la suite: le passage à niveau et un pauvre chien et les dernières pages consacrées à d’autres ruses.

Halte à la douane! Revue « enfantines » sur Mouchin (1935). 5. Pauvres gendarmes

Couverture de la revue Enfantines, n° 67, halte à la Douane à MouchinJe continue à vous faire découvrir le numéro n° 67 de la revue Enfantines Halte à la douane sur , dans le Nord, paru en 1935. Le numéro est certes publié en ligne, mais c’est en mode image, avec une couverture différente de la mienne. Après les douaniers, la circulation, la fraude en auto et la fraude avec les chiens, voici les gendarmes… pas à Saint-Tropez, chez les ch’tis et vus par les enfants de primaire (enfin, les garçons!).

Et un grand merci à mon père qui est parti en reportage dans le village de Mouchin pour illustrer les lieux avec des photographies!

revue Enfantines, n° 67, halte à la Douane à Mouchin, pages 8 et 9

Et maintenant, voici quelques histoires…

Pauvres gendarmes
Un jour, une auto de fraude ayant réussi à franchir la frontière, se trouvait en panne, sur le bord de la route, dans la plaine de Planard.
Le calvaire de Mouchin vers Planard, cliché Lucien DujardinLes deux fraudeurs descendent et auscultent le moteur. Un ouvrier arrive avec son vélo.
– Bonjour, mon camarade; tu n’as pas vu de douaniers par là? Nous sommes des fraudeurs et notre auto est en panne.
– Non! je n’ai pas vu de douaniers, mais j’ai vu deux gendarmes. Et ils arrivent par ici.
– Ca, c’est mauvais! Quoi faire? Tiens, voilà dans ce champ un mont de fumier et une fourche. Bonne affaire!
L’un des fraudeurs s’en va tout seul, à pied, sur la route et l’autre va dans le champ. L’auto reste seule sur le bord du chemin.
Les gendarmes arrivent.
– Tiens! Tiens! Qu’est-ce que c’est que cette auto? Fouillons-là. Ah! mais, c’est une auto de fraude? Et pleine de tabac encore. Bonne prise!
Le fraudeur, qui s’était mis consciencieusement à répandre le fumier dans le champ arrive tout doucement, l’air innocent, vers les gendarmes.

revue Enfantines, n° 67, halte à la Douane à Mouchin, illustration page 9, les gendarmes poussent une voiture

 Ceux-ci demandent au « cultivateur »:
– Vous n’avez pas vu le propriétaire de cette voiture?
– Non! elle était déjà là quand je suis arrivé dans mon champ.
Les gendarmes. – Vous ne vous y connaissez pas dans la mécanique?
Le fraudeur. – Si, un peu.
Les gendarmes. – Alors, vous e pourriez pas essayer de dépanner cette voiture?
Le fraudeur. – Je vais essayer.
Et le fraudeur, abandonnant sa fourche, se met à vérifier le moteur. celui-ci se met à marcher.
Les gendarmes. – Vous allez conduire cette voiture au bureau des douanes.
Le fraudeur. – Volontiers… mettez-vous à côté de moi.
Et l’auto démarre, fait 20 mètres, et s’arrête.
Bon! encore la panne. Descendons.
Tout le monde descend, et le moteur ne consent pas à tourner.
Le fraudeur. – Si vous poussiez un peu derrière, peut-être qu’étant lancée, elle se mettrait en route?
Les gendarmes. – On va pousser, mettez-vous au volant.
Et les gendarmes poussent

Voir la suite: une belle ruse, le passage à niveau et un pauvre chien et les dernières pages consacrées à d’autres ruses.

Halte à la douane! Revue « enfantines » sur Mouchin (1935). 4. La fraude avec les chiens

Couverture de la revue Enfantines, n° 67, halte à la Douane à MouchinJe continue à vous faire découvrir le numéro n° 67 de la revue Enfantines Halte à la douane sur , dans le Nord, paru en 1935. Le numéro est certes publié en ligne, mais c’est en mode image, avec une couverture différente de la mienne. Après les douaniers, la circulation et la fraude en auto, voici la fraude avec les chiens… avec une « prime au rendement » pour les douaniers. Âmes sensibles s’abstenir. L’illustration est un bois gravé par les enfants (enfin, les garçons!). Et un grand merci à mon père qui est parti en reportage dans le village de Mouchin pour illustrer les lieux avec des photographies! J’en ai aussi ajouté sur les précédents articles, n’hésitez pas à aller les (re)lire, je ferai aussi un article complet pour vous présenter les lieux après la transcription de toutes les pages de la revue! Pour aujourd’hui, la flèche indique la ligne d’arbres qui borde l’Elnon, le ruisseau qui marque la frontière tout au long du village depuis 1713 (avant les traités d’Utrecht, Tournai était en France et la frontière différente, vivent les guerres de Louis XIV)…

revue Enfantines, n° 67, halte à la Douane à Mouchin, pages 6 et 7

La fraude avec les chiens.
C’est la petite fraude.
Les fraudeurs utilisent des petits chiens, car il est interdit de franchir la frontière avec de grands chiens (taille autorisée: 3m325).
Le fraudeur résident en France se rend plusieurs fois, accompagné de ses chiens, en Belgique, chez des amis.
Après quelques passages, les chiens connaissent la route. Alors, un jour, le fraudeur laisse ses chiens en Belgique sous la garde de son complice et retourne seul chez lui.
La frontière franco-belge au bas-préau à Mouchin, photographie de Lucien DujardinLe soir venu, on met sur le dos des chiens une charge de tabac (une « blatte » ou ceinture) et on les lâche.
Comme ils ont faim (on les laisse quelquefois plusieurs jours sans manger, ils rentrent à toute vitesse, galopant à travers champs et ruisseaux avec leur charge sur le dos (de 1 à 2 kg, suivant leur force et leur entraînement).

revue Enfantines, n° 67, halte à la Douane à Mouchin, illustration page 7, un douabier tire sur un chien

Malheureusement pour elles, ces pauvres bêtes se font souvent prendre. Les douaniers les poursuivent et les tuent au revolver.
Ils leur coupent ensuite une patte afin de pouvoir prouver à leurs gradés qu’ils ont capturé un chien (à chaque chien tué, les douaniers touchent une prime de 15 francs).
C’est bien malheureux de voir ces pauvres petits chiens utilisés à cette triste besogne.

Voir la suite: les gendarmes, une belle ruse, le passage à niveau et un pauvre chien et les dernières pages consacrées à d’autres ruses.

Halte à la douane! Revue « enfantines » sur Mouchin (1935). 3. La fraude en auto

Couverture de la revue Enfantines, n° 67, halte à la Douane à MouchinJe continue à vous faire découvrir le numéro n° 67 de la revue Enfantines Halte à la douane sur , dans le Nord, paru en 1935. Le numéro est certes publié en ligne, mais c’est en mode image, avec une couverture différente de la mienne. Après les douaniers, et la circulation, voici la fraude en voiture… L’illustration est un bois gravé par les enfants (enfin, les garçons!). La route était encore pavée quand j’étais petite, mais désormais, il ne reste des pavés que sur quelques chemins agricoles, juste pour le folklore du Paris-Roubaix! Le tabac était déjà moins cher en Belgique qu’en France…

Et si vous voulez continuer sur le thème du tabac, vous pouvez voir les publicités des années 1960-1970 publiées il y a quelques jours par Pourquoi pas Poitiers.

Et un grand merci à mon père qui est parti en reportage dans le village de Mouchin pour illustrer les lieux avec des photographies!

revue Enfantines, n° 67, halte à la Douane à Mouchin, pages 4 et 5

La frontière franco-belge au bas-préau à Mouchin, photographie de Lucien Dujardin

La flèche indique la ligne d’arbres qui borde l’Elnon, le ruisseau qui marque la frontière tout au long du village de Mouchin depuis le traité d’Utrecht de 1713. Cliché Lucien Dujardin

La fraude en auto
Pour frauder en auto, les contrebandiers opèrent de plusieurs façons.
La plus courante est la suivante :
Profitant d’une nuit noire, par mauvais temps, des porteurs, un ballot de tabac sur le dos, franchissent en un point quelconque la frontière.

Ils se dirigent alors vers l’intérieur du village et dissimulent les ballots dans la paille d’une meule, dans la grange d’une ferme, dans un hangar ou, tout simplement, quelquefois dans un fossé ou derrière une haie.
Dans la journée, une auto arrive et, rapidement, le chargement s’effectue. L’auto démarre et file à toute allure.
Quelquefois encore, par temps sec, et quand les champs sont dénudés, l’auto chargée en Belgique, se lance sur la route, rentre dans une pâture, fonce droit à travers champs et jardins, culbute les haies, rejoint la route pavée… et file!

revue Enfantines, n° 67, halte à la Douane à Mouchin, illustration page 5, douaniers derrière une voiture

Il faut alors aux fraudeurs une auto puissante qui ne les laisse pas en panne dans les champs!
Pour protéger leur fuite et éviter qu’on puisse les signaler, les fraudeurs n’hésitent pas, au besoin, à couper les fils téléphoniques.
L’auto passée, les fraudeurs vont écouler leurs marchandises vers les centres miniers. Ils vendent leur tabac aux mineurs beaucoup plus cher qu’ils ne l’ont acheté, mais meilleur marché que le tabac de la régie française. Aussi la clientèle ne manque pas.

Voir la suite: la fraude avec les chiens, les gendarmes, une belle ruse, le passage à niveau et un pauvre chien et les dernières pages consacrées à d’autres ruses.

Halte à la douane! Revue « enfantines » sur Mouchin (1935). 2. La circulation

Couverture de la revue Enfantines, n° 67, halte à la Douane à MouchinJe continue à vous faire découvrir le numéro n° 67 de la revue Enfantines Halte à la douane sur , dans le Nord, paru en 1935. Le numéro est certes publié en ligne, mais c’est en mode image, avec une couverture différente de la mienne. Après les douaniers, voici la circulation… A méditer pour ceux qui veulent revenir sur la libre circulation en Europe. Qui se plaint des taxes??? les garçons d’une école primaire, méthode Freinet (au moins pour cet atelier d’écriture), au milieu des années 1930 dans un petit village du Nord… [PS: et si vous voulez continuer sur le thème du tabac, vous pouvez voir les publicités des années 1960-1970 publiées le même jour par Pourquoi pas Poitiers].

Et un grand merci à mon père qui est parti en reportage dans le village de Mouchin pour illustrer les lieux avec des photographies!

revue Enfantines, n° 67, halte à la Douane à Mouchin, pages 3 (bas) et 4

La circulation

la route de Douai à Tournai, passage de l'ancien poste frontière de Mouchin, cliché Lucien Dujardin

La route de Douai à Tournai, passage de l’ancien poste frontière de Mouchin, cliché Lucien Dujardin

Pour aller en Belgique, de Mouchin, une seule route est ouverte à la circulation automobile, hippomobile ou cycliste. C’est la route nationale de Douai à Tournai, qui franchit la frontière à Bercu. L’est la route « légale ».

Le passage de la frontière au Bas-Préau à Mouchin, cliché Lucien Dujardin

Le passage de la frontière au Bas-Préau à Mouchin, cliché Lucien Dujardin

La route du « Bas-Préau » est interdite aux voitures de toutes sortes, comme aux vélos. Seuls les piétons sont autorisés à circuler.
Les piétons, en plus des routes citées ci-dessus, peuvent se rendre en Belgique par de nombreux sentiers. Ils n’ont besoin d’aucun papier. Mais on les fouille et on les interroge quand ils rentrent en France:
– Vous n’avez rien à déclarer? Pas de tabac? Pas de cigarettes? Pas d’allumettes?
Les automobilistes doivent être munis d’un « tryptique » [sic] valable un an (coût: 60 francs). Ce tryptique [sic] est délivré par les soins d’un « automobile club » quelconque dont il faut faire partie.
Il faut ensuite, à l’automobiliste qui veut se rendre en Belgique, un permis international de conduite (20 fr.), un carnet fiscal de passages (10 francs), un carnet à souches (5 fr.), et il doit encore acquitter 8fr.40 de taxes diverses.
Tout cela est bien cher… et bien compliqué!
Les cyclistes doivent avoir leur vélo plombé. Cette opération se fait une fois par an et oblige le propriétaire du vélo à acquitter un droit fixe de 3 francs (prix du plomb).

Voir la suite: la fraude en auto, la fraude avec les chiens, les gendarmes, une belle ruse, le passage à niveau et un pauvre chien et les dernières pages consacrées à d’autres ruses.

Halte à la douane! Revue « enfantines » sur Mouchin (1935). 1. Les douaniers

Couverture de la revue Enfantines, n° 67, halte à la Douane à MouchinPeu après l’ouverture de mon blog, en janvier 2008, je vous ai parlé du numéro n° 67 de la revue Enfantines Halte à la douane sur , dans le Nord, paru en 1935. Le numéro est certes publié en ligne, mais c’est en mode image, avec une couverture différente de la mienne. Comme je teste des logiciels de reconnaissance de caractères (il faut quelques corrections), je vous en propose au fil des prochaines semaines une transcription, avec les illustrations réalisées par les enfants en gravure. Oserait-on encore donner des gouges à des enfants de primaire? Bon, visiblement, seuls les garçons y ont eu droit… L’école de filles devait sans doute accéder à d’autres activités plus domestiques (sans commentaire, quoique, vous pouvez toujours revoir mes articles avec la famille modèle du 19e siècle, La défense du foyer… par Emile André Boisseau, ou celui plus « hard » sur ce que l’on peut voir dans nos églises médiévales!). Tant que vous êtes sur le site de la pédagogie Freinet, allez aussi voir les autres numéros de cette revue, ils sont souvent savoureux. Ce numéro est globalement contre la douane, les droits de douane pour les passages à pied, en voiture et même en vélo, sur le trafic de tabac. Toutes les ruses contre les douaniers sont rapportées, jusqu’à l’usage de petits chiens pour passer le tabac. Il n’y avait pas seulement les douaniers au Bas-Préau (les gens du coin comprendront, pour les autres, c’est un chemin qui était jusqu’à l’ouverture des frontières européennes réservé aux riverains, en principe sans marchandise), mais aussi une tranchée pour empêcher le passage ! Pendant la Seconde Guerre mondiale, une tranchée anti-char s’y trouvait. C’est parti pour la première histoire… assez sérieuse dans ce premier épisode, pour la suite, les douaniers n’auront pas toujours le beau rôle… Aujourd’hui, la vie quotidienne des douaniers et la distinction entre les fraudeurs professionnels et les pauvres ouvriers… qui ne peuvent pas faire autrement pour leur tabac! Un pot de vin, au sens propre (en direct ou sur une ardoise, un peu comme dans la mode actuelle des cafés suspendus, mais destinés aux douaniers et pas à ceux qui ne peuvent se le payer, et du plus fort que du café, ou alors arrosé, « à la bistouille »), dans l’un des cafés près de la douane devait pouvoir arranger les choses… Shenghen et la disparition de la douane à Mouchin a fait disparaître la plupart de ces bistrots, il ne reste guère que le gallodrome (salle pour les combats de coq), mais c’est une autre histoire…

Un grand merci à mon père qui est parti en reportage dans le village de Mouchin pour illustrer les lieux avec des photographies! J’en ai aussi ajouté sur les précédents articles, n’hésitez pas à aller les (re)lire, je ferai aussi un article complet pour vous présenter les lieux après la transcription de toutes les pages de la revue!

revue Enfantines, n° 67, halte à la Douane à Mouchin, revers de couverture et page 1

Les douaniers.

Il y a à Mouchin une caserne de douanes. C’est un grand bâtiment composé de petits logements réservés aux douaniers mariés. Il y a aussi un bureau occupé par le brigadier.
La caserne étant beaucoup trop petite pour loger tous les douaniers, bon nombre de ceux-ci louent des petites maisons dans le village.
La caserne des douanes à Mouchin, cliché Lucien DujardinLe nombre total des douaniers affectés au service de la surveillance de la frontière pour le  secteur de Mouchin (de la gare de Bachy Mouchin à Planard, Calvaire) est de 38 hommes. Distance : 3 km 600.
Ces douaniers sont commandés par un Brigadier, aidé dans sa tâche par 4 sous-Brigadiers sous le contrôle d’un Lieutenant.
Les douaniers sont de service à tour de rôle, de jour ou de nuit. Il y a d’abord ceux qui sont de service aux postes fixés de surveillance (Poste frontière de Bercu et route du Bas Préau).
Ils sont logés dans des abris en briques ou en ciment. Leur rôle consiste à fouiller les personnes, arrêter les autos, vérifier les papier, sonder l’intérieur des camions, etc…

Il y a ensuite les douaniers de ronde, les embuscades, les patrouilles.
Une embuscade se compose de 2 douaniers. A un endroit désigné, au moment du départ, par un gradé, les 2 douaniers de service s’en vont se cacher derrière un buisson, un taillis, un talus, et ils y passent la nuit, veillant à tour de rôle.
Ils emportent une couchette. Une couchette, que les douaniers appellent « sac » ou « campement », est faite de 3 peaux de mouton cousues ensemble et formant sac. Elles sont doublées extérieurement de grosse toile verte imperméable, et fixées sur des sangles tendues sur un encadrement de bois posé sur quatre pieds.
Le « sac » peut se replier et se porter à dos avec des bretelles. C’est assez lourd: 18 à 20 kg. Son prix est de 700 francs environ.
Les douaniers en embuscade sont le plus souvent accompagnés d’un chien qui donnera l’éveil si un fraudeur approche.

revue Enfantines, n° 67, halte à la Douane à Mouchin, pages 2 et 3

Bien entendu, les douaniers sont armés. Ils portent sur le côté un gros revolver calibre 7 m/m5. Ils ont aussi une matraque en gros caoutchouc épais.
Comme vous pouvez vous en rendre compte, le métier de douanier est pénible. Passer la nuit à la belle étoile n’est pas toujours gai, surtout en hiver, par les gelées, les pluies torrentielles et les nuits noires.

A droite des arbres, la France, à gauche, la Belgique (au Bas-Préau à Mouchin), cliché Lucien Dujardin

A droite des arbres, la France, à gauche, la Belgique (au Bas-Préau à Mouchin), cliché Lucien Dujardin

Et la surveillance de la frontière n’est pas facile. Aucun obstacle naturel ne sépare la France de la Belgique. De plus, les douaniers sont trop peu nombreux pour surveiller nuit et jour tous les points de la frontière.
revue Enfantines, n° 67, halte à la Douane à Mouchin, première illustration, les douaniers poussent une voitureMalgré tout, les passages de fraudeurs sont relativement rares? Et gare à celui qui se fait prendre! De fortes amendes, de longs mois de prison, l’auto confisquée, voilà ce qui les attend (peines variant de 3 jours à 3 ans, amendes de 500 à 5.000 francs).
Malgré ces menaces, il y a encore des fraudeurs qui tentent l’aventure. les uns réussissent…, d’autres se font prendre, malgré toutes leurs ruses.
Ces fraudeurs « professionnels » ont toutes les audaces et peu de scrupules. Ils n’hésitent pas, le cas échéant, à se servir d’armes. Ils sont dangereux.
Il ne faut pas les confondre avec les ouvriers et les malheureux qui essaient quelquefois de « passer » un paquet de tabac ou une demi-livre de café; ceux-là ne sont pas des fraudeurs, les douaniers n’ont pas l’habitude d’être sévères à leur égard.
Cette petite fraude est dénommée par les douaniers « la pacotille ».

Voir la suite: la circulation, la fraude en auto, la fraude avec les chiens, les gendarmes, une belle ruse, le passage à niveau et un pauvre chien et les dernières pages consacrées à d’autres ruses.

 

Henri de Yolande Moreau

Affiche de Henri de Yolande MoreauJe suis allée au cinéma voir Henri, de (et avec, dans un petit rôle)  (dont je vous ai déjà parlé pour Séraphine et Où va la nuit, de Martin Provost, Les plages d’Agnès d’Agnès Varda,  Dans la maison de François Ozon, Camille redouble de Noémie Lvovsky).

Le film : de nos jours en hiver à Charleroi en Belgique. Henri (Pippo Delbono) tient avec sa femme Rita (Lio) un petit bistro / restaurant de quartier, la Cantina. Prise d’un malaise, celle-ci décède. Henri se retrouve seul, déprime, avec ses pigeons voyageurs et deux habitués du bar, Bibi (Jackie Berroyer) et René (Simon André). Sa fille Laetitia (Gwen Berrou) lui impose une aide, Rosette (Miss Ming), une jeune handicapée mentale du foyer voisin, les Papillons blancs, déjà venue aidée pour le repas qui a suivi l’enterrement. En mal d’amour, sujet récurrent au foyer, Rosette tombe amoureuse et se vante au foyer d’avoir fait l’amour et d’être tombée enceinte d’Henri. La direction du foyer la retire du restaurant. Henri, soûl, ne se souvient pas de la soirée où cela aurait pu se passer, il décide de partir réfléchir à la mer’ à Middlekerke, mais Rosette s’est glissée dans la voiture.

Mon avis : s’il y a quelques scènes qui m’ont beaucoup plu, comme ce tas de verre d’une usine de recyclage entre les terrils, l’envol de milliers de pigeons lors d’un concours, la plage déserte en hiver avec sa baraque à frites, de très bons acteurs (notamment les handicapés qui sont des comédiens de la Compagnie de l’Oiseau-Mouche, un Établissement et service d’aide par le travail/ESAT de Roubaix, qui fut en 1981 le premier Centre d’aide par le travail/CAT artistique de France), je me suis un peu ennuyée dans cette histoire au rythme lent. Au passage, certains critiques semblent s’émerveiller du nom des « papillons blancs », du rapport entre le papillon et les pigeons des concours de pigeons. Mais Yolande Moreau n’a rien inventé pour le nom de l’institution (ce qui n’empêche pas les jeux de mots/sons/images), les papillons blancs sont juste le nom donné depuis fort longtemps (les années 1950/1960) à une des composantes de l’UNAPEI et des UDAPEI (Union nationale / unions départementales des Associations de Parents et Amis de Personnes Handicapées Mentales), nom donné aussi aux foyers pour handicapés mentaux qu’ils gèrent.

Couleur de peau miel, le film

Affiche du film couleur de peau miel J’avais beaucoup aimé les deux tomes de la bande dessinée (revoir mes avis sur le tome 1 et le tome 2 puis le tome 3 après le film), je ne pouvais pas rater le film d’animation (coupé par des images du premier voyage de Jung en Corée et des images amateur de sa famille d’adoption), surtout qu’il y avait une séance spéciale au théâtre de Poitiers en présence de Jung et du réalisateur Laurent Boileau, séance organisée avec la librairie spécialisée en bandes dessinées, Bulles d’encre, l’association enfance et famille d’adoption 86 et Poitou-Charentes Cinéma.Le film a reçu le prix du public et le prix de l’Unicef au festival du film d’animation d’Annecy en 2012.

Le film : (reprise du résumé que j’avais rédigé pour la bande dessinée): 2007, en Belgique. Jung décide de partir à la recherche de ses origines. Retour en arrière, à Séoul, à la fin des années 1960, donc bien après la séparation des deux Corées. Jun Jung-sik, 5 ans, erre dans les rues, chaparde pour vivre quand un policier l’attrape et l’emmène au Holt, un grand orphelinat américain où il va rester que 2 mois, matricule 8015, couleur de peau : miel. Les enfants semblent tous trouver très vite des parents d’adoption et se dispersent aux quatre coin du monde. Jung arrive dans une famille belge, où il y a déjà quatre enfants. Une éducation sévère, une mère qui ne semble pas l’aimer, les jeux avec ses frère et sœurs, l’arrivée à l’école, les copains, les bêtises, toute une enfance avec en arrière plan l’image de cette mère qui l’a abandonnée…

Mon avis : j’ai trouvé le film beaucoup plus apaisé que la bande dessinée. C’est peut-être l’effet de la voix off, écrite par Jung à la première personne et dite par un acteur. Certes, la mère adoptive reste un personnage complexe, qui a du mal à exprimer son amour, mais c’est la même chose avec ses quatre autres enfants naturels, peut-être moins avec la petite dernière, également adoptée en Corée, il ne faut pas oublier que la Corée du Sud a envoyé à l’adoption internationale 200.000 enfants. La vie à l’orphelinat et sa découverte errant dans les rues me semblent évoqués plus rapidement que dans la bande dessinée, mais il y a ici aussi le retour et la confrontation à un dossier quasiment vide à l’orphelinat, rien n’est même sûr, ni le nom, ni la date de naissance… Les bêtises de l’enfance, la recherche de l’identité pendant l’adolescence, le refuge dans le dessin sont bien rendus (mais il n’y a pas le voyage au Japon qui était dans la bande dessinée, ni le cancer de Valérie, sa sœur adoptée…). Un film à voir absolument, et deux albums à (re)lire, en attendant le troisième tome annoncé pour l’année prochaine.

Pièce détachée de Pieter Aspe

Couverture de Pièce détachée de Pieter Aspe

pioche-en-bib.jpgUn livre trouvé à la médiathèque parmi les nouvelles acquisitions.

Le livre : Pièce détachée de Pieter Aspe, traduit du néerlandais (Belgique) par Emmanuelle Sandron, éditions Albin Michel, 2011, 300 pages, ISBN 978-2226238290.

L’histoire : à Bruges en 2002 (année de Bruges capitale européenne de la culture). Le commissaire Van In épluche les faits divers de la nuit, un exhibitionniste et un cambriolage chez le « pape du théâtre flamand ». Justement, Hannelore, la juge et Van In hébergent Muriel, la cousine d’Hannelore, et son ami, Max, le metteur en scène de Purgatoire, la pièce de théâtre d’avant-garde qui doit lancer le nouveau théâtre. Quelques jours plus tard, un auriculaire tranché est retrouvé dans le parking du nouveau théâtre. Alors qu’il se rend dans un centre hippique voisin pour les besoins de l’enquête (il recherche leur employé), Van In se retrouve pris dans un incendie, vraisemblablement criminel, un corps est retrouvé dans les décombres… auquel il manque un doigt, justement… Fait troublant, la plupart des protagonistes viennent ou ont séjourné au Chili, sous la dictature de Pinochet. Et justement, un de ces criminels de la dictature est recherché en Belgique. A coup de demis (de bière) et de cigarettes (malgré une tentative d’arrêt), le commissaire et la juge vont tenter de débrouiller ces faits entremêlés… jusqu’à ce qu’un nouveau cadavre fasse irruption, mais je ne vous en dis pas plus.

Mon avis : pas facile de s’y retrouver au début du livre, beaucoup de personnages arrivent, se mettent en place, tantôt appelés par leur prénom, tantôt par leur nom… La lecture demande une grande concentration pour ne pas s’y perdre…(la confusion de la traduction par moment n’aide pas, il m’a fallu un instant pour comprendre que l’injonction de la page 168 était une injection…). Et puis on entre dans Bruges et dans le monde du théâtre contemporain d’avant-garde gentiment moqué. Un bon moment de lecture.