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Histoire de chaussettes chiliennes

Aujourd’hui, c’est à nouveau Maryse qui prend les clefs de mon blog!

Histoire de chaussettes chiliennes

Chaussettes chiliennes de MaryseEn fait ces chaussettes sont un prétexte pour vous parler du Chili en 1985, à l’époque du régime dictatorial d’Augusto Pinochet bien en place et déterminé à rester au pouvoir manu militari.

J’étais logée à Santiago, chez une amie chilienne, Nella, connue à la fac de Poitiers quelques années auparavant. Le couvre-feu à 23h écourtait les soirées hors de la maison: pas de restos, pas de ciné, sauf en fin d’après-midi, et bien sûr, pas de réunions nocturnes. Les hélicoptères sillonnaient la ville à basse altitude dès l’heure fatidique, avec d’énormes gyrophares qui scrutaient les rues, les trottoirs, les places et qui tiraient sur tout ce qui pouvait bouger. Les rafales de mitraillettes étaient stressantes et on en entendait souvent. Les enfants de mon amie se réveillaient alors en sursaut et pleuraient. Difficile de les rendormir. Ils faisaient beaucoup de cauchemars.

Le climat était tendu et dans la journée on voyait dans les rues adjacentes aux avenues principales du centre ville les chars et les militaires armés. Il y avait de quoi susciter la crainte et l’insécurité.
Je voyais lors de ces soirées en famille, Alejandro, son mari, qui s’emparait d’un bouquin et plongeait très vite dans un sommeil profond. Il rentrait tard du lycée où il enseignait l’histoire pour un salaire dérisoire. On discutait aussi beaucoup de la situation du pays, de la France (chez nous, c’était l’époque Mitterrand). Parfois des copains venus dîner, restaient coucher: on se couchait plus tard et on buvait du pisco.

Chaussettes chiliennes de Maryse, détail du pointNella, pour s’occuper lors de ces discussions, tricotait des bonnets, des écharpes et/ou des chaussettes pour l’hiver pour toute la famille. J’ai alors eu envie de l’accompagner, et elle est allée chercher son sac à laines (équivalent à celui que Véronique nous montrait il n’y a pas longtemps). Beaucoup de pelotons de laines de toutes les couleurs!
Que faire avec tout çà?

Chaussettes chiliennes de Maryse, enversDes chaussettes bien sûr, et en m’inspirant d’une paire qu’elle faisait en grosse laine écrue et marron, j’ai commencé un dessin. En tâtonnant un peu au début pour mélanger les couleurs, ce n’était pas évident, j’ai réussi à faire cette paire qui reste pour moi un souvenir inoubliable et un témoignage d’une belle amitié. Elle m’a fait cadeau de celle qu’elle faisait avec moi et c’est mon fils aîné qui les porte le soir en guise de chaussons.

No, de Pablo Larraín

Affiche de No, de Pablo LarraínLe printemps et ses giboulées donnent des envies de cinéma! Après Alceste à bicyclette et Camille Claudel 1915, je suis allée voir No, de Pablo Larraín. Je n’avais pas pu le voir mercredi dernier, quand il était suivi d’un débat autour de la dictature de Pinochet organisé par Sciences-Po Paris (la section hispanique est délocalisée depuis des années à Poitiers). J’avais entendu une longue interview de Pablo Larraín sur France Inter, dans l’émission de Paula Jacques/

Le film : Chili, 1988. Pressé par l’opinion internationale, après 16 ans au pouvoir où il était arrivé grâce à un coup d’État soutenu par les États-Unis, Augusto Pinochet finit par organiser un référendum demandant s’il doit rester ou non président pour les huit prochaines années. Il accepte également que l’opposition dispose pendant un mois d’une tribune de 15 minutes (en pleine nuit) sur la télévision nationale. L’opposition va chercher un jeune publicitaire dans une agence à la solde du pouvoir, René Saavedra (Gael García Bernal). Celui-ci choisit n angle d’attaque original, montrer la joie du peuple chilien à l’idée de se débarrasser de Pinochet. Avec peu de moyens, malgré les pressions du pouvoir sur lui, son enfant et son ex-femme, Verónica (Antonia Zegers), les opposants, ils réussissent à capter l’attention des gens, le but est de montrer que les gens peuvent voter librement et oser voter et exprimer leur NO. En face, la campagne est menée par les militaires, bientôt rejoints au poste de conseiller par le patron de René Saavedra, Lucho Guzmán (Alfredo Castro).

Mon avis : le spectateur du film est emporté par le peps qui se détache de cette campagne de publicité politique… qui est quand même organisée comme une campagne pour vendre une boisson ou autre. Le décalage avec la campagne du camp du oui, qui met en avant la personnalité et le bilan « positif » de Pinochet, est d’autant plus fort. Alors certes, cette campagne de publicité n’est probablement pas, contrairement au parti pris du film, la seule cause de la victoire du NO à ce référendum, mais elle y a probablement contribué en libérant la parole.. J’aurais bien aimé que le TAP cinéma propose également au moins une soirée avec les deux autres films de la trilogie de Pablo Larraín sur la dictature de Pinochet, Tony Manero et Santiago 73 Post Mortem, que je n’avais pas vus, c’est peut-être encore possible de les programmer dans les prochaines semaines?

Pièce détachée de Pieter Aspe

Couverture de Pièce détachée de Pieter Aspe

pioche-en-bib.jpgUn livre trouvé à la médiathèque parmi les nouvelles acquisitions.

Le livre : Pièce détachée de Pieter Aspe, traduit du néerlandais (Belgique) par Emmanuelle Sandron, éditions Albin Michel, 2011, 300 pages, ISBN 978-2226238290.

L’histoire : à Bruges en 2002 (année de Bruges capitale européenne de la culture). Le commissaire Van In épluche les faits divers de la nuit, un exhibitionniste et un cambriolage chez le « pape du théâtre flamand ». Justement, Hannelore, la juge et Van In hébergent Muriel, la cousine d’Hannelore, et son ami, Max, le metteur en scène de Purgatoire, la pièce de théâtre d’avant-garde qui doit lancer le nouveau théâtre. Quelques jours plus tard, un auriculaire tranché est retrouvé dans le parking du nouveau théâtre. Alors qu’il se rend dans un centre hippique voisin pour les besoins de l’enquête (il recherche leur employé), Van In se retrouve pris dans un incendie, vraisemblablement criminel, un corps est retrouvé dans les décombres… auquel il manque un doigt, justement… Fait troublant, la plupart des protagonistes viennent ou ont séjourné au Chili, sous la dictature de Pinochet. Et justement, un de ces criminels de la dictature est recherché en Belgique. A coup de demis (de bière) et de cigarettes (malgré une tentative d’arrêt), le commissaire et la juge vont tenter de débrouiller ces faits entremêlés… jusqu’à ce qu’un nouveau cadavre fasse irruption, mais je ne vous en dis pas plus.

Mon avis : pas facile de s’y retrouver au début du livre, beaucoup de personnages arrivent, se mettent en place, tantôt appelés par leur prénom, tantôt par leur nom… La lecture demande une grande concentration pour ne pas s’y perdre…(la confusion de la traduction par moment n’aide pas, il m’a fallu un instant pour comprendre que l’injonction de la page 168 était une injection…). Et puis on entre dans Bruges et dans le monde du théâtre contemporain d’avant-garde gentiment moqué. Un bon moment de lecture.