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La grande poste d’Angers (suite)

Poste d'Angers, façade rue Saint-Julien, 1, la façade

Cet automne, je vous ai montré la façade principale rue Franklin-Roosevelt de la grande poste d’Angers… je vous invite à relire ce premier article pour son historique. Rappelons juste qu’elle a été construite à partir de 1934 par l’architecte des PTT Gabriel Guchet (ouverte en 1937). Un déplacement intempestif de la molette de mon appareil photographique et j’étais rentrée avec des clichés flous de la façade rue Saint-Julien… Ma petite visite mi-mars à Bouchemaine a été l’occasion de faire les photographies manquantes…

Poste d'Angers, façade rue Saint-Julien, 2, la partie haute sculptée La sculpture se concentre sur les parties hautes…

Poste d'Angers, façade rue Saint-Julien, 3, le relief central avec Mercure Au centre, Mercure, messager des dieux, et lui-même dieu du commerce et des voleurs, fréquemment représenté sur les postes… Il est beaucoup plus viril que la tête de celui qui surplombe la porte de la grande poste de Poitiers.

Poste d'Angers, façade rue Saint-Julien, 4, détails du relief central avec Mercure Le sculpteur (j’ai dû mal chercher, je n’ai pas pu l’identifier) lui a donné tous les attributs possibles, les foudres dans sa main droite, le casque ailé, le caducée dans sa main gauche, les ailes aussi aux pieds (et oui, le dieu aux pieds ailés)… Sur le droite, un bateau vogue sur les flots…

Poste d'Angers, façade rue Saint-Julien, 6, l'Ancien monde … car ce Mercure relie l’Ancien continent (sur la droite, avec une vue de Paris…)

Poste d'Angers, façade rue Saint-Julien, 5, New-York … au Nouveau monde symbolisé par New-York à gauche de la façade, avec la statue de la Liberté et les gratte-ciel.

Poitiers, le sacrifice des guichets et des mosaïques de la poste

Poitiers, l'intérieur de la poste, 1, avant travaux en 2011, cliché A.C. Je vous ai parlé de l’extérieur de la grande poste de Poitiers en novembre 2008, article repris avec plus de photographies en avril 2011. Depuis, il y a eu de nombreux débats en ville autour de cet édifice : la poste (ou plus exactement sa filiale Post’immo, propriétaire du bâtiment) a décidé de la « moderniser », en supprimant les guichets pour en faire un édifice à la mode d’aujourd’hui, c’est-à-dire un truc foutoir avec des petits comptoirs en plastique partout… Une pétition (voir ici dans la tribune de l’art) n’a eu aucun effet, l’édifice n’est pas protégé au titre des monuments historiques et l’architecte des bâtiments de France a validé le permis de construire. Un article paru le 11 novembre dans la Nouvelle République m’a fait bondir, déjà le titre, L’art nouveau renouvelé, puis les premières lignes…  » Les esprits se sont calmés «  … ben voyons… Il ne s’agit ici ni d’une restauration, ni même d’une restitution, mais bien d’une dénaturation (suivre les liens ou voir en fin d’article) du projet d’origine de l’architecte Hilaire Guinet. Le hall de la poste rouvrira le 5 décembre 2011, à quelques jours du centenaire de la pose officielle de la première pierre (le 17 décembre 1911). L’inauguration du nouvel espace est prévue pour début février 2012.

Au début du mois, Grégory Vouhé a publié un bel article sur le sujet dans l’Actualité Poitou-Charentes n° 94 (voir en fin d’article). Je le cite pour la description de l’intérieur de la poste :

« Cette façade invite à gagner la grande salle, où Guinet a déployé toute la mesure de son talent, cette fois en collaboration avec les fameux mosaïstes Alphonse Gentil et Eugène Bourdet qui s’étaient associés en 1901 pour fonder une société de grès et céramique installée à Billancourt. De la piscine de Roubaix,actuel musée d’Art et d’Industrie, aux mosaïques du centre de tri postal Saint-Jean de Bordeaux en passant par de nombreux décors réalisés à Nancy, la plupart de leurs oeuvres sont reconnues et protégées au titre des Monuments historiques, mais non le décor poitevin, destiné à être pour partie refait à neuf, pour partie dénaturé. De grandes qualités, sol et guichet s’inscrivent pourtant dans le plan ovale très original dessiné par Guinet, auquel répond aussi le plafond porté par des piliers dont les chapiteaux ornés de lis constituent les rares exemples de style Art nouveau en Poitou« .

Poitiers, l'intérieur de la poste, 2, guichet avant travaux en 2011, cliché A.C Sur la première photographie, avant travaux, on voit les guichets qui portent des panneaux de mosaïque, le sol réalisé dans la même technique… Voici un détail de l’un de ces guichets…

Poitiers, l'intérieur de la poste, 6, sol de mosaïque, cliché G.V. … et la mosaïque centrale.

Poitiers, l'intérieur de la poste, 2bis, détail mosaïque d'un guichet, cliché G.V. Voici un détail de l’un des coqs en mosaïque…

Poitiers, l'intérieur de la poste, 3, signature da la mosaïque, cliché G.V. Ces mosaïques portent la signature « Gentil Bourdet / Billancourt – Paris », l’un des principaux mosaïstes parisiens des années 1920 (à retrouver sur leur site) : en 1925, à l’exposition internationale des arts décoratifs à Paris, dans la galerie des marbres (Plumet), la décoration en mosaïque a été confiée sur onze travées à la Maison Biret (qui a aussi réalisé les mosaïques de la gare de la Rochelle) et pour treize travées à la Maison Gentil et Bourdet… (voir aussi la citation plus haut pour d’autres réalisations). Ils sont également les auteurs des carreaux de céramique que l’on voit en bas des guichets sur la photographie précédente.

Poitiers, l'intérieur de la poste, 4, guichets sacrifiés, cliché G.V. Pour les besoins de leur bureau de poste qui ressemblera à un supermarché bourré d’automates et où il impossible de trouver quelqu’un pour poster une lettre avec des beaux timbres (en tout cas, c’est le cas dans les bureaux déjà transformés que j’ai fréquentés…), les guichets ont été massacrés, transformés en consoles, la partie latérale a été « démontée » ainsi que plusieurs éléments (boiseries mais aussi les panneaux de mosaïque et les carreaux de céramique, qui formaient un tout) pour faire de la place (enfin, « démontés », c’est ce que dit la poste, j’espère qu’ils sont conservés en lieu sûr et ne seront pas détruits ou vendus à des antiquaires). Le permis de construire (consultable à la mairie) disait : « une travée [du guichet] ne sera pas reposée pour permettre le passage. Des éléments de bois moulurés dans l’esprit des consoles [sic, il s’agissait de guichets…] seront posés pour fermer les deux extrémités du caisson« . En réalité, les éléments déposés semblent bien plus importants.

Poitiers, l'intérieur de la poste, 5, guichets sacrifiés, cliché G.V. A l’origine, la mosaïque s’arrêtait au niveau des guichets. En les reculant, il a fallu combler le vide. Pour cela, une mosaïque neuve a été réalisée par la société périgourdine Socra, pour l’essentiel « reprise à l’identique » (dixit la presse sous la dictée de post-immo), elle a été en réalité créée d’après l’original, avec un seul gros quart de « mosaïque existante conservée et rénovée » !!

Merci à G. V. et A. C. qui m’ont confié les photographies qui illustrent cet article.

Quelque définitions…

Si vous avez la flemme de suivre les liens qui mènent vers le centre national de ressources textuelles et lexicales (CNRTL), voici quelques définitions tirés de ce dictionnaire de référence…

Restauration : « b) Mod., ARTS . Remise en état d’une œuvre artistique, d’un monument ancien, en essayant de respecter l’état primitif, le style; activité, métier de restaurateur« .

Restitution : « ARCHÉOL., ÉPIGR. Action de restituer, de rétablir dans son état premier, original, ce qui a subi des altérations; résultat de cette action« .

Dénaturer : « 1. Changer dans sa nature, dans son apparence ou sa présentation, par une modification spontanée ou voulue; priver de son caractère naturel. (Quasi-)synon. contrefaire« .

Pour en savoir plus, voir:

Un article de Grégory Vouhé paru dans l’Actualité Poitou-Charentes n° 94 (automne 2011) : Le chef-d’oeuvre d’Hilaire Guinet, p. 20-23.

– le site des mosaïstes Gentil et Bourdet.

La grande poste d’Angers

La poste centrale d'Angers, 1, deux vues générales de l'extérieur. La grande poste d’Angers, rue Franklin-Roosevelt, a été construite à partir de 1934 par l’architecte des PTT Gabriel Guchet (ouverte en 1937), en remplacement de l’ancienne poste qui est maintenant un café place du ralliement (je vous le montrerai…). Je tire les informations du dossier établi par le service de l’inventaire des Pays-de-la-Loire (avec des photographies des destructions de 1993), complété par ce que j’ai remarqué sur place… Je n’ai pas eu le temps de faire de recherches plus approfondies et pas trouvé le nom du sculpteur… Pas de doute, c’est un bâtiment typique des années 1930, qui a l’intérieur a été entièrement ravagé par les aménagements de la poste (comme ce qui est actuellement en train de se passer pour la grande poste de Poitiers, avec pour résultat des guichets et des mosaïques massacrés) : en 1961, puis en 1992, la poste d’Angers a perdu ses vitraux (qui étaient consacrés aux productions de l’Anjou), les mosaïques des sols et des comptoirs (ça rappelle furieusement ce qui est en train de se passer à Poitiers, je vous en reparle très vite) ainsi que les parties ouvrantes de la grille d’entrée. Nous avons donc maintenant une enveloppe qui n’a plus rien à voir intérieurement avec le projet initial. l’extérieur est préservé, l’intérieur massacré…

Elle reste néanmoins extérieurement très colossale… au sens propre, avec ses colonnes lisses à gros chapiteaux en fleur de lotus et ses façades en arc de cercles.

La poste centrale d'Angers, 2, relief au-dessus de l'entrée et caducée Le caducée ailé et les foudres (les éclairs terminés en flèche, en arrière-plan) rappellent Mercure, messager des dieux, et lui-même dieu du commerce et des voleurs, fréquemment représenté sur les postes… Mercure est aussi représenté sur un bas-relief imposant sur la rue Saint-Julien, encadré de l’ancien et du nouveau continent, mais oups, mes trois photos de ces reliefs sont inutilisables (ouf, je suis retournée à Angers début 2012, voir maintenant la façade rue Saint-Julien). Revenons donc sur la façade principale. Au-dessus de l’entrée, les armoiries de la ville sont encadrées de deux monuments symboliques d’Angers…

La poste centrale d'Angers, 3, reliefs au-dessus de l'entrée, la cathédrale et le château A gauche, la cathédrale, à droite, le château d’Angers, chacun avec une corne d’abondance qui part du blason central… en dépit de gros nuages qui s’amoncellent au-dessus des deux reliefs.

La poste centrale d'Angers, 4, les reliefs avec la poste ancienne

Deux séries de reliefs ont pris place à gauche et à droite de la porte principale, sur des reliefs au-dessus des fenêtres du rez-de-chaussée. Sur la gauche sont représentés les moyens anciens de faire parvenir le courrier : les pigeons voyageurs (qui eurent encore une grande importance pendant la première guerre mondiale), les ballons et le dirigeable, le voilier, la callèche qui transporte aussi des voyageurs « avec armes et bagages ».

La poste centrale d'Angers, 5, les reliefs avec la poste moderne

Sur la droite, voici les moyens modernes de transport du courrier : le train (à vapeur), le bateau façon transatlantique (aussi à vapeur, avec un minuscule petit bateau à voile sur sa droite), le camion façon croisière jaune et l’avion biplan de l’aéropostale…

Un beau décor sculpté… En prenant mes photographies, une dame d’un certain âge s’est arrêtée… elle vit près de cette poste depuis 30 ans et n’avait jamais remarqué la sculpture… Nous avons papoté un petit moment…

Photographies d’octobre 2011.

Retour sur la grande poste à Poitiers…

La grande poste de Poitiers, carte postale ancienneEn ouvrant une page pour ranger les dates portées signalées au cours de mes articles (et oui, c’est la faute à Monique / Bidouillette / Tibilisfil et à son défi relevé ici pour Cahors et là pour Poitiers, Confolens et Lessac), je suis retournée vérifier la grande poste de Poitiers, et j’ai vu que c’étaient des photographies réalisées avec mon ancien appareil photographique… La poste centrale ou grande poste de Poitiers a été construite à partir de 1910 par l’architecte poitevin Hilaire Guinet (qui y a aussi réalisé l’immeuble de la banque de France rue Jean-Jaurès), à l’emplacement de l’ancien couvent de la Visitation transformé en prison sous la Révolution puis démoli en 1904, actuellement dans l’angle formé par la rue des Écossais et la rue Arthur-Ranc.

Poitiers, complément de la grande poste, 1, signature de l'architecte Guinet Je suis donc allée refaire quelques photographies de détail… D’abord de plus près la signature de l’architecte Hilaire Guinet et la date 1919.

Poitiers, complément de la grande poste, 2, signature du sculpteur Octobre Et celle du sculpteur Aimé Octobre, avec la date 1913 (et oui, la grande guerre a ensuite interrompu le chantier de la poste), grand prix de Rome en 1893, dont je vous ai montré les monuments aux morts de Angles-sur-l’Anglin (1926), de Poitiers et les monuments aux morts de 1870 et de 1914-1918 à Châtellerault.

Poitiers, complément de la grande poste, 3, allégorie féminine à gauche Concentrons-nous aujourd’hui sur sa sculpture, mais si vous passez à Poitiers, entrez aussi pour voir les mosaïques et les guichets… Faites vite, avant que les projets de massacre de ce joyau ne soient mis en œuvre par la poste au nom de la modernisation… Beaucoup de bureaux de poste anciens sont fiers de montrer qu’ils prennent soin de leur patrimoine, à Poitiers, on a toujours un train de retard, comme dans les années 1970, on continue à détruire l’art nouveau, les sites médiévaux pour y construire des horreurs en parpaing (la résidence à côté de l’église Saint-Hilaire, dans l’ancien cloître), les sites romains (gaz de France s’acharnant au marteau-piqueur sur l’amphithéâtre antique de Poitiers il y a quelques semaines)…

Revenons à la façade de la poste. À gauche, Aimé Octobre a représenté une femme à moitié dénudée, sans aucun doute une figure allégorique, mais je ne l’ai pas identifiée…

Poitiers, complément de la grande poste, 4, détail de l'allégorie féminine Elle ne porte aucun attribut clair (pour Grégory, c’est esquisse d’un instrument aratoire et il propose d’y voir l’agriculture, en réponse au commerce de Mercure, par comparaison avec l’agriculture de Louis Ernest Barrias sur le fronton de l’hôtel de ville de Poitiers).

Poitiers, complément de la grande poste, 5, l'allégorie masculine (Hermère ou Mercure) À droite, un homme nu qui tient un globe et un Caducée, il s’agit donc de Mercure ou Hermès, dieu du commerce… et des voleurs (c’est le même dieu, le premier pour les romains, le deuxième pour les grecs).

Poitiers, complément de la grande poste, 6, détail du caducée Voici de plus près le caducée, cette sorte de bâton avec un serpent enroulé et les ailes, allusions aux pieds ailés du Dieu antique.

Poitiers, complément de la grande poste, une tête au-dessus de la porte Et au-dessus de la porte, il y a une jolie tête de femme portant un casque ailé (allégorie de la poste?) émerge d’une guirlande de roses et de fruits (symboles de l’abondance…).

PS : suite au commentaire de Grégory Vouhé : je trouvais cette tête trop féminine pour être une tête de Mercure… Le modèle préparatoire est plus masculin… Adopté, je suis maintenant d’accord pour Mercure, qui est une figure classiquement représentée sur les postes… Mercure, messager des dieux, et lui-même dieu du commerce et des voleurs.

Depuis cet article, les guichets et les mosaïques ont été massacrés.

Pour en savoir plus, paru après cet article : Un article de Grégory Vouhé paru dans l’Actualité Poitou-Charentes n° 94 (automne 2011) : Le chef-d’oeuvre d’Hilaire Guinet, p. 20-23.

La grande poste de Poitiers

La grande poste de Poitiers, carte postale ancienne La poste centrale ou grande poste de Poitiers a été construite à partir de 1910 par l’architecte poitevin Hilaire Guinet (qui y a aussi réalisé l’immeuble de la banque de France rue Jean-Jaurès), à l’emplacement de l’ancien couvent de la Visitation transformé en prison sous la Révolution puis démoli en 1904, actuellement dans l’angle formé par la rue des Écossais et la rue Arthur-Ranc.

La grande poste de Poitiers, signatures du sculpteur et de l'architecte Il ne fut achevé qu’en 1919, ainsi qu’en atteste la signature sur la façade. Elle est surtout remarquable pour son décor, que ce soit en façade ou à l’intérieur la mosaïque et les quatre piliers art nouveau à chapiteaux ornés. J’ai repris cet article avec plus de photographies ici. Depuis cet article, les guichets et les mosaïques ont été massacrés.

La grande poste de Poitiers, le fronton sculpté Alors, si vous passez devant la poste, pensez à regarder le fronton et la façade sur la rue Arthur-Ranc. Par rapport à cette vue ancienne, l’installation pour le télégraphe a disparu, mais le reste est presque inchangé. Les sculptures mériteraient un petit coup de nettoyage, mais sont vraiment de qualité.

La grande poste de Poitiers, élévation rue Arthur-Ranc Le sculpteur de l’ensemble (signé et daté 1913) est Aimé Octobre, qui est né à Angles-sur-l’Anglin et a plus tard réalisé de nombreux monuments aux morts, dont celui de Poitiers situé aujourd’hui au bout de la Rue Arthur-Ranc, sur le boulevard de Verdun (je vous l’ai déjà présenté ici), celui de sa commune natale ou encore de Châtellerault.

 

Pour en savoir plus, paru après cet article : Un article de Grégory Vouhé paru dans l’Actualité Poitou-Charentes n° 94 (automne 2011) : Le chef-d’oeuvre d’Hilaire Guinet, p. 20-23.