
Le visage de la République du monument aux morts de Chabanais, (c) Région Nouvelle Aquitaine, Gilles Beauvarlet, 2008
Le thème retenu pour les 33e journées du patrimoine (ce week-end, 17 et 18 septembre 2016) est « Patrimoine et citoyenneté ». L’occasion de revenir sur la petite phrase prononcée le 29 août 2016 à Colomiers par Manuel Valls:
« Sur la place des femmes nous ne pouvons transiger. Marianne, le symbole de la République, elle a le sein nu parce qu’elle nourrit le peuple, elle n’est pas voilée parce qu’elle est libre ! C’est ça la République ! C’est ça Marianne ! »
Je vous ai déjà montré ici de nombreux exemples d’allégories de la République, je vais partir de ce livre publié dans mon service par une de mes collègues : Les allégories de la République sur les monuments aux morts en Poitou-Charentes, de Charlotte Pon-Willemsen, édité dans la collection des Parcours du patrimoine chez Geste édition, 2008. Nous avions pour la couverture la République du monument aux morts de Chabanais, en Charente, par Georges Delpérier. Elle porte, superposés, un bonnet phrygien, une couronne végétale et… un voile de deuil!
Le voile de deuil est un attribut fréquent des allégories de la République, et ce dès le lendemain de la guerre de 1870, comme par exemple sur le monument aux mobiles de la Charente, par Raoul Verlet à Angoulême. La France porte le deuil de l’Alsace-Lorraine, au lendemain de la Première Guerre mondiale elle porte le deuil des millions de morts…

Le port du voile était un signe extérieur pour signifier le deuil pour les femmes (et je ne parle pas des fichus et autres couvre-chefs quasi obligatoires pour entrer dans les églises), il n’y a donc aucune raison que la République, allégorie (image symbolique) ne porte pas elle aussi le voile! Pour illustrer ceci, je vous ai choisi la mère du soldat du monument aux morts de 1914-1918, à Angoulême, par Émile Peyronnet.

Sur ce monument, la femme du soldat (mais pas la fillette, non pubère) porte aussi le voile…
… ainsi que la République monumentale!
Parmi les exemples que je vous ai déjà présenté sur mon blog, je peux aussi ajouter la République du monument aux morts de 1914-1918 à Niort, par Pierre Marie Poisson, elle porte un bonnet phrygien, mais ici, on voit bien qu’il est composé d’un pliage de tissu… rien d’autre qu’un voile de forme particulière qui ici couvre largement les cheveux et le dos!

Le visage de la République du monument aux morts de Cherves-Richemont, (c) Région Nouvelle Aquitaine, Raphaël Jean, 2008
Parmi les allégories de la République plus expressives dans la douleur du deuil, j’ai choisi de vous montrer celle du monument aux morts de Cherves-Richemont, en Charente, lui aussi par Raoul Verlet…
Allez, pour les nostalgiques de mes chroniques « patrimoine », je vous prépare pour demain un article sur les symboles de la République, et je vais essayer de mettre plus régulièrement des statues et autres monuments!
Pour le
Thomas Hippolyte Main (1797-1860), industriel enrichi dans le commerce des peaux avec le Canada et la chamoiserie, légua sa fortune à l’hôpital-hospice et à la ville de Niort à la condition qu’elle construise un pont sur la Sèvre, à la place d’un passage par passeur, pour éviter de faire le tour par les Vieux Ponts. Ce pont ou plutôt ces ponts, qui franchissent la Sèvre niortaise et sa dérivation, devaient avoir un trottoir. Le quartier du port était ainsi relié directement au centre-ville. Le projet définitif de construction des ponts est arrêté en juillet 1865, après un premier projet abandonné dans le prolongement de la rue de l’abreuvoir.
On les voit bien depuis le donjon, par exemple sur cette carte postale ancienne avec le
A peu près du même endroit, cela donne maintenant ceci…
Sur le terre-plein entre les deux ponts se trouvaient un buste en bronze de Thomas Hippolyte Main. Il a été fondu (ou au moins a disparu) en 1942 et il en reste aujourd’hui le socle. Les photographies datent du 13 juillet 2011, suite à la sécheresse du printemps, la ville avait décidé de ne pas fleurir les parterres.
Le socle porte les inscriptions « Main / 1777 – / 1860 », ce qui peut être ambigu avec l’oncle du donateur, Thomas Jean Main, qui alla espionner les anglais pour en rapporter le secret des peaux chamoisées.
Il reste des cartes postales anciennes qui le montrent en place. Il s’agissait d’un buste réalisé par Pierre-Marie Poisson (dont je vous ai parlé à Niort pour le monument à
Le voici à son emplacement d’origine sur une autre carte postale ancienne.
Il a été déplacé en 2006 de l’autre côté de la Sèvre niortaise, près du centre culturel du Moulin-du-Roc. Son emplacement d’origine est encore visible près du donjon (peut-être pas pour longtemps, l’espace entre le donjon et la Sèvre est en cours de réaménagement).
Le voici donc maintenant (photographie prise, comme les suivantes, au printemps 2010). Il a été commandé en 1922 et inauguré en juillet 1923. Il est dû au sculpteur d’origine niortaise
Le monument aux morts de Niort est constitué d’une large stèle avec 564 noms de soldats morts pour la France en 1914-1918 qui encadre une figure féminine très rigide… Le sculpteur a joué sur la verticalité de cette figure, accentuée par les plis de sa robe, et l’horizontalité de la stèle, renforcée par la position des bras posés au-dessus. Elle se tient debout sur un socle un peu surélevé par rapport au sol de la stèle et décoré de feuilles de laurier.
Il a assez peu changé depuis la carte postale ancienne.
On le voit mieux en s’approchant. Sur le socle est écrit « Jacques / de / Liniers / 1753-1810 / chef d’escadre / vice-roi / de Buenos Aires / né à Niort » et plus bas, « érigé / par souscription / de ses compatriotes / et de la colonie française / de Buenos Aires / 1910 ». Pour tout savoir sur lui, voir en fin d’article… En gros, Jacques de Liniers est né à Niort en 1753 et mort (fusillé) à Cabeza de Tigre en Argentine en 1810, après avoir combattu les Anglais dans cette colonie, il a été vice-roi de la vice-royauté du Río de la Plata de 1807 à 1809, et y est connu sous le nom de Santiago de Liniers. Il a plus de 5000 descendants identifiés dans le monde… dont 400 se sont retrouvés à Niort en 2010, pour les 200 ans de sa mort.
Le buste en bronze est signé « P.M. Poisson », pour
Autre époque, nous voyons un homme qui ressemble à ces grands savants et aventuriers de la prériode révolutionnaire…
Ne redescendez pas tout de suite en ville, montez juste quelques mètres plus haut et vous verrez ce vestige du rempart