Archives par étiquette : autisme

Chuuut de Janine Boissard

Logo de pioché en bibliothèque

Couverture de Chuuut de Janine BoissardJ’avais emporté mon visioagrandisseur maison, en vacances, mais en bus ou dans les salles d’attente, je lis encore un peu des livres en large vision empruntés à la médiathèque. L’offre n’est pas terrible, et une bonne partie est composée de romans du terroir…

Le livre: Chuuut!, de Janine Boissard, éditions Robert Laffont, 330 pages, 2013, ISBN 978-2-221-13146-0 (lu en édition large vision, Libra Diffusio, 367 pages).

L’histoire:aux environs de Cognac, un château au milieu des vignes, occupé par la famille d’Edmond de Saint Junien, lui et sa femme au centre, les enfants et petits-enfants dans les ailes, enfin, pas tous… Roselyne, l’aînée, est partie il y a des années en Belgique, mais chuuut, il ne faut pas en parler, et pour cause, elle s’est enfuie avec un proxénète. Et voilà qu’un coup de fil révèle sa mort (du SIDA) et l’existence d’un fils, Nils, 18 ans. Le patriarche part immédiatement le chercher, il occupera la partie réservée à sa mère. Il fait vite connaissance de la famille, Philippine et Fine, les cousines inséparables, le cousin autiste, les autres cousins un peu glandeurs, préférant le golf aux études. Pendant les vacances d’été, les cousines l’aident à monter une cabane, mais voici que Maria, la fille du gardien, 4 ans, y est retrouvée assassinée, Nils auprès d’elle, voilà le coupable tout trouvé, même s’il clame son innocence, le grand-père lui trouvera la meilleure avocate.

Mon avis: les secrets de famille sont au centre de ce roman, secret de la vie de la fille aînée, mais aussi de la lourdeur de gérer un autiste qui devient adolescent. Il y a quelques semaines, j’ai eu une discussion avec Grégory, qui trouvait que Nativité cinquante et quelques de Lionel-Edouard Martin, dans la sélection pour le prix des lecteurs Poitou-Charentes, était « formaté » pour les lecteurs de romans du terroir, répondant à leurs attentes. Alors non, l’écriture de Nativité cinquante et quelques est infiniment meilleure que celle de Chuuut! L’alternance des points de vue, avec une narration qui passe de Fine à Nils ou à l’avocate, donne un peu plus de vigueur à ce texte, je vous rassure, contrairement à d’autres livres, pas de risque de vous perdre, à chaque changement de narrateur. Pas question que le lecteur fasse un effort, lecture facile (pas mal écrit, juste lisse, très lisse, guimauve fade), sur un sujet pourtant crédible, avec un château que l’on imagine sans peine dans le Cognaçais, avec ses grandes propriétés du 19e siècle closes de murs. Il ne manque que, à la dernière page, « ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfant ». Qui, « ils »? Nils assurément, et Fine ou l’avocate? Suspense insoutenble 😉 je vous laisse lire ce roman si vous avez le courage…

Sur la route de Banlung de Rochel et Vink

pioche-en-bib.jpgCouverture de Sur la route de Banlung de Rochel et VinkJe poursuis ma découverte de l’histoire contemporaine du Cambodge. Après Kampuchéa de Patrick Deville, L’élimination de Rithy Panh, L’eau et la terre, Cambodge, 1975-1979 et Lendemains de cendres, Cambodge, 1979-1993 de Séra, voici la suite de l’histoire avec l’organisation des élections de 1993, racontée dans cette bande dessinée trouvée dans les bacs de la médiathèque.

Le livre : Sur la route de Banlung, Cambodge, 1993, de Jacques Rochel (scénario), Vink (scénario et dessins) et Hubert (couleurs), avec la collaboration de Ciné, éditions Dargaud, 56 pages suivies d’un dossier sur les élections de 1993, 2011, ISBN 978-2205065091.

L’histoire : 1993 au Cambodge. L’ONU supervise l’organisation des premières élections libres du Cambodge. Jacques Rochel, un français vivant à New-York, né d’une mère vietnamienne, est envoyé dans la région de Ratana Kiri, une province proche du Viêt Nam et berceau des Khmers rouges. Il est notamment affecté chaque mois à la réception et à la distribution du paiement en liquide des personnes recrutées pour l’organisation des élections. Cette valise contenant 200 000 $ est convoitée par les Khmers qui continuent à occuper la région, et se méfient de ce Jacques qui parle chinois et semble aussi compromis avec les ennemis vietnamiens (ils ont renversé le régime Khmer rouge en 1979) pour rencontrer une médecin venue de l’autre côté de la frontière. Restée dans le New-Jersey, sa femme lui apprend que leur fils aîné vient d’être diagnostiqué comme autiste. Entre fantômes du passé et avenir de son fils, Jacques Rochel terminera-t-il sa mission de six mois au Cambodge?

Mon avis : une bande dessinée aux dessins assez classiques (effet renforcé par le lettrage très « carré », je finis par préférer les expressions plus libres dans le dessin et les textes) sauf deux grandes peintures pleine page. L’ONU tente d’organiser des élections libres à coups de dollars qui servent à payer des locaux chargés de convaincre les gens de se faire faire des cartes d’électeurs puis de voter, tout en restant neutres. Un amour de jeunesse de l’un des expatriés peut-il menacer ainsi la neutralité des élections? Le coût de ces élections pour la communauté internationale (des milliards de dollars) laisse pantois… surtout après l’indifférence dans laquelle la communauté internationale a laissé les Khmers rouges saigner le pays de 1975 à 1979. Quant à la famille laissée aux États-Unis, le diagnostic d’autisme et l’organisation de sa prise en charge, elle est peu évoquée, une remarque ici et là où pointe l’inquiétude du père impuissant à distance…

Logo top BD des bloggueursCette BD sera soumise pour le classement du TOP BD des blogueurs organisé par Yaneck / Les chroniques de l’invisible. Mes chroniques BD sont regroupées dans la catégorie pour les BD et par auteur sur la page BD dans ma bibliothèque.

Bleus Marine, de Catherine Normier

Couverture de Bleus Marine, de Normier Il y a quelques semaines, la critique de Zazimuth m’a donné envie de lire ce livre. Un petit tour virtuel à la médiathèque, et zut, ils n’ont pas le livre, il n’est plus non plus en librairie… C’est Flo (pas de blog) qui l’avait prêté à Zazimuth, du coup, le livre fait un crochet par chez moi avant de repartir chez Flo…

Le livre : Bleus Marine. Histoire d’une différence, récit de Catherine Normier, éditions du reflet, 1999, Librio 2001, 126 pages, ISBN 2-290-31580-X.

L’histoire : Paris, à la fin des années 1990. Pour les 20 ans de sa fille Marine, l’auteure, enseignante de harpe, fait le récit du parcours de sa fille, autiste, et celui de sa famille, son père Nicolas, son frère Grégoire et sa fille Pauline, de son ami Simon, aussi autiste, de l’errance du diagnostic aux difficultés de prise en charge, d’éducation…

Mon avis : Un récit tendre et émouvant. Jusqu’à ces dernières années, l’autisme, ou plutôt les troubles envahissants du développement, aux causes multiples (une petite partie sont dues à des anomalies chromosomiques, voir Valentin Apac, association de porteurs d’anomalies chromosomiques pour plus d’informations), était mal diagnostiqué, mal compris des médecins, et comme beaucoup de maladies handicapantes, faisaient l’objet d’annonces catastrophiques quand on n’accusait pas purement et simplement la mère d’être la cause des troubles. Un récit poignant donc, d’une mère qui s’est battue pour avoir un diagnostic, puis pour essayer de faire progresser Marine, au moins pour qu’elle puisse vivre sans trop de souffrance dans notre société qui rejette tant le handicap, quel qu’il soit, et encore plus le handicap mental et le poly-handicap (handicap mental, physique et/ou sensoriel, fréquent dans le cas d’anomalies chromosomiques). Même le handicap visuel peut faire l’objet de rejets absurdes et honteux : la semaine dernière, un restaurant indien de Poitiers a refusé l’accès à un aveugle à cause de la présence de son chien… Le restaurateur risque 400 euros d’amende, pour refus d’accès d’un chien public (notion qui regroupe les chiens pour aveugles mais aussi ceux d’aide aux personnes souffrant d’autres types de handicap)… et je n’y irai plus tant qu’il n’aura pas déclaré publiquement qu’il regrette son geste dû à une méconnaissance (j’espère, que c’est une méconnaissance et pas un acte délibéré de discrimination).