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Œuvres vives de Linda Lê

pioche-en-bib.jpgCouverture de Œuvres vives de Linda LêJ’ai déjà essayé, et plus ou moins apprécié, plusieurs œuvres de Linda Lê : Cronos, A l’enfant que je n’aurai pas, Lame de fond. Comme les précédents, je l’ai emprunté à la médiathèque.

Le livre : Œuvres vives de Linda Lê, éditions Christian Bourgeois, 2014, 334 pages, ISBN 978-2-267-02676-4.

L’histoire : de nos jours, au Havre et à Paris. Le narrateur, jeune journaliste, part couvrir quelques événements culturels au Havre. Alors qu’il vient de lire un livre de l’auteur local Antoine Sorel, connu de quelques lecteurs seulement, il apprend par la presse son suicide par  défenestration du sixième étage. Il décide de chercher des témoins pour retracer la vie de celui-ci, le voici sur la piste du grand-père, qui fit partie des Vietnamiens envoyés travailler en France pendant la Première Guerre mondiale, de son père, qui l’a élevé à la dure, de son frère puis peu à peu de ses ami(e)s qui révèlent peu à peu la personnalité sombre et complexe de cet auteur…

Mon avis : la narration à la première personne permet de se glisser assez vite dans la quête de cet écrivain mal-aimé de ses parents, alcoolique, peu lu et en gros oublié de tous. Cette quête est l’occasion pour lui de découvrir et aimer peu à peu la ville du Havre. A Paris, il se réfugie ou donne des rendez-vous dans des lieux que j’aime bien aussi pour leur calme, comme le musée Rodin (voir Matisse-Rodin) ou le musée national Delacroix (voir Une passion pour Delacroix, La collection Karen B. Cohen). Voilà un cocktail qui aurait dû me faire aimer ce livre, et pourtant, je me suis ennuyée par moment. Dans Lame de fond, il était déjà question d’un correcteur (au lieu d’un écrivain), originaire du Vietnam comme l’auteur, et d’une recherche des origines. Comme dans ce livre, il y a beaucoup d’allusions à des lieux (au Havre et à Paris), à des livres, etc., et j’ai eu ici l’impression de reprendre la même quête veine, 3 ans plus tard. Je vous laisse vous faire votre opinion par vous-même…

Sur Le Havre, je vous conseille Un homme est mort de Kris et Étienne Davodeau, qui avait donné lieu à un BD concert, Un homme est mort, il y a quelques années à Poitiers, basé sur le film disparu de René Vautier, lui-même décédé récemment. Sur la présence des Vietnamiens en France pendant la première guerre mondiale, voir le monument aux morts Indochinois dans le cimetière de Salonique à Toulouse.

[PS: 30 août 2015 :
Je trouve que Linda Lê est très irrégulière… Je me suis ennuyée à la lecture d’Œuvres vives. Télérama (n° 3423, p. 17) semble regretter la faible vente de ce titre, mais je ne dois pas être la seule à ne pas en avoir fait la promotion…

Logo rentrée littéraire 2014Ce livre entre dans le cadre du défi 1% de la rentrée littéraire organisé à nouveau cette année par Hérisson (Il faut que je mette mes index à jour…).

Lame de fond de Linda Lê

Couverture de Lame de fond de Linda Lê

pioche-en-bib.jpgJ’ai trouvé ce livre parmi les nouvelles acquisitions de la médiathèque, une auteure dont j’ai déjà lu Cronos et A l’enfant que je n’aurai pas (que je n’ai pas aimé) [depuis, j’ai aussi lu Œuvres vives]. Lame de fond faisait partie de la sélection finale pour le prix Goncourt 2012.

Le livre : Lame de fond de Linda Lê, collection les affranchis, éditions Christian Bourgeois, 2012, 277 pages, ISBN 978-2-267-02380-0.

L’histoire : Paris, hiver 2010. Van soliloque dans son cercueil au cimetière de Bobigny. Exilé du Vietnam, il était correcteur professionnel pour des maisons d’édition, il vient d’être volontairement renversé par sa femme, Lou, au sortir de sa visite à Ulma, sa demi-sœur. Par la bouche de Ulman, Lou, Van et leur fille Laure racontent à tour de rôle leur vie passée et présente.

Mon avis : les chapitres, présentés à tour de rôle dans la bouche de l’un des protagonistes, clairement identifié (ouf), sont regroupés autour du déroulement d’une journée métaphorique (au cœur de la nuit, aube, midi, crépuscule), puisqu’en fait, ils se déroulent sur des mois avec des retours sur des dizaines d’années, et non sur le récit d’une journée. Une langue riche et ciselée, qui me convient beaucoup mieux que l’écriture trop familière de Les affreux de Chloé Schmitt. Le récit est l’occasion d’aborder la question de l’émigration, l’histoire du Vietnam dans les années 1960-1970, de l’intégration dans la société française : la belle-mère bretonne n’a jamais accepté le choix de sa fille de vivre avec un étranger, Van a perdu l’usage de sa langue maternelle et s’est toujours refusé à retourner au Vietnam. Si j’ai apprécié la lecture, c’est aussi parce que ces sujets ne me sont pas totalement étrangers, sinon, il me semble qu’il vaut mieux lire rapidement un livre sur l’histoire du Vietnam avant de se lancer dans ce roman dont la lecture nécessite un certain nombre de pré-requis historiques, mais aussi un bagage lexicologique conséquent.

Sur des sujets voisins : voir Couleur de peau miel, tome 1 et le tome 2, de Jung, et son adaptation au cinéma. Le sujet de la colonisation et de la décolonisation sont également abordés de manière originale dans les tomes 2, l’Empire, et 3, la décolonisation, de la Petite histoire des colonies françaises de Grégory Jarry et Otto T.

Revoir aussi le monument aux morts annamites (indochinois) à Toulouse en 1914-1918.

Logo rentrée littéraire 2012

Ce livre entre dans le cadre du défi 1% de la rentrée littéraire organisé à nouveau cette année par Hérisson.

 

A l’enfant que je n’aurai pas, de Linda Lê

Couverture de A l'enfant que je n'aurai pas, de Linda Lê

pioche-en-bib.jpgJ’ai trouvé ce livre parmi les nouvelles acquisitions de la médiathèque, une auteure dont j’avais lu l’année dernière Cronos. Depuis, j’ai aussi lu Lame de fond et Œuvres vives.

Le livre : A l’enfant que je n’aurai pas de Linda Lê, collection les affranchis, Nil éditions, 2011, 65 pages, ISBN 2-84111-563-1.

L’histoire : Linda Lê a décidé de ne pas avoir d’enfant, s’en explique à cet enfant qu’elle n’aura pas et à S., son dernier compagnon, qui aurait voulu des enfants… Elle revient sur son enfance étouffée par sa mère, Big Mother. Elle explique pourquoi elle ne pourrait pas s’attacher à un enfant, renoncer à ce qu’elle est maintenant pour un enfant…

Mon avis : un très court texte autobiographique, peut-être une forme de thérapie aussi, après une tentative de suicide et une psychanalyse. Un choix de non-maternité assumé, au moins en apparence… En revanche, je ne sais pas pourquoi, j’ai eu l’impression d’être mise en situation de voyeurisme dans cet lettre adressée à cet enfant qui n’arrivera jamais parce que non désiré, je n’ai pas du tout adhéré au texte (mais il est si court que je suis allée jusqu’au bout…).

Logo rentrée littéraire 2011Ce livre est le dernier lu dans le cadre du défi 1 % rentrée littéraire 2011, coordonné cette année par Hérisson.

Kyra Kyralina de Panaït Istrati

Couverture du tome 1 des oeuvres complètes d'Istrati

pioche-en-bib.jpgLe château de Schönbrünn à Vienne en Autriche en 1993, 2, de plus près Pour le défi Mars, mois de l’Europe centrale organisé par Schlabaya, j’ai fait une descente à la médiathèque où j’ai emprunté une dizaine de livres…

Le livre : Kyra Kyralina de Panaït Istrati, lu dans Œuvres I, édition établie et présentée par Linda Lê, éditions Albin Michel, 2005, [1ère édition en 1923, dans la revue Europe, texte réuni en volume en 1924], pages 49-175, ISBN 978-2752901347.

L’histoire : à une époque indéterminée (après 1867), à Braïla, un port de Roumanie. Adrien part à une foire avec Stavro, un marchand forain. Ce dernier fait la connaissance de Mikhaïl, avec qui il a une relation homosexuelle. Les trois hommes racontent des histoires qu’ils ont vécues. Stavro finit par céder et raconter son enfance, peu après la guerre de Crimée (qui eut lieu de 1853 à 1856). Il vivait avec sa mère et sa sœur, Kyra. Son père ne faisait des apparitions que pour battre sa mère, qui de son côté faisait la fête avec des hommes en son absence. Un jour, le père cogne plus fort que d’habitude, laisse la mère pour morte enfermée dans la cave, emmène de force son fils. Celui-ci arrive à s’échapper, à retrouver sa mère. Celle-ci, avec l’aide de ses frères, réussit à s’échapper, mais les frères ratent le père sur qui ils ont tiré. Les deux enfants, hébergés dans un hôtel, devaient être à l’abri… mais pas goût de la liberté, ils rencontrent un homme et finissent enlevés par lui, emmenés en Turquie sans doute. Stavro est séparé de sa sœur, il vit dans une sorte de prison dorée sans jamais l’oublier ou renoncer à la retrouver…

Mon avis : le roumain Panaït Istrati (1884-1935) a écrit ce texte directement en français. C’est la première des quatre œuvres formant le cycle des Récits d’Adrien Zograffi et des membres de sa famille, génération d’Haïdoucs. Le roman se présente un peu comme un conte oriental, raconté entre amis au coin du feu (enfin, d’une grange). Je ne me suis pas ennuyée, il y a du rythme, mais pas vraiment séduite non plus…

Pour aller plus loin : les archives ont été déposées en 1997 par l’Association des amis de Panaït Istrati à l’Institut Mémoires de l’édition contemporaine (IMEC).

Cronos de Linda Lê

Couverture de Cronos de Linda Lê logo du chalenge 1% rentrée littéraire 2010pioche-en-bib.jpgJ’ai trouvé ce livre à la médiathèque dans les nouvelles acquisitions… et poursuis ainsi ma marche vers le 2 % de livres de la rentrée littéraire 2010 (dans le cadre du challenge du 1 % rentrée littéraire 2010, repris par Schlabaya).

Le livre : Cronos de Linda Lê, éditions Christian Bourgeois », 2010, 164 pages, ISBN 978-2-267-02107-3 (en couverture, Objet invisible, 1934-35, de Alberto Giacometti).

L’histoire : à Zaroffcity, une cité imaginaire à une époque non précisée. La terreur règne, sous le contrôle du dictateur intronisé après un coup d’État et qui se fait appeler le Grand Guide, et surtout de son ministre de l’Intérieur, Karaci, surnommé la Hyène. Au sein du palais, l’appartement de sa femme Una, fille d’un astronome et qui se refuse à lui, qui n’apparaît même que rarement à ses côtés, quand les menaces de s’en prendre à son père, devenu sénile, se font trop pressantes. D’un côté, les opposants, qui peinent à s’organiser, sont exterminés sans pitié, de l’autre, les opportunistes, collaborateurs et flagorneurs. Una tente d’écrire clandestinement à son frère qui a réussi à fuir la ville et est comédien dans une cité voisine. Un jour, un orphelin réussit à se faufiler dans son appartement, à changer la vie de Una et de son père… Comment fait-il pour entrer sans se faire prendre pas les gardes? Comment Una réussit-elle à entrer en contact avec les opposants et à se rendre à leurs réunions? Le régime de terreur réussira-t-il à se maintenir?

Mon avis : le roman alterne un chapitre sur deux le récit de la vie dans la cité et en alternance, une lettre de Una à son frère Andréas, qui a réussi à fuir dans une ville voisine. Pour l’essentiel, c’est le récit d’un éternel recommencement des régimes totalitaires, entre terreur, flagornerie, collaboration, résistance. En parallèle, la déchéance physique et surtout mentale du vieux père est très émouvante. Mais certains chapitres qui relatent crûment les exactions et les meurtres par le régime m’ont franchement gênée. Trop violent, trop abrupt, et en même temps décousu, d’une exécution à l’autre. C’est un livre court, vous ne perdrez pas beaucoup de temps à le découvrir par vous même, quitte à l’abandonner ou à sauter ces chapitres.

De la même auteure, j’ai aussi lu A l’enfant que je n’aurai pas, Lame de fond et Œuvres vives.