L’église collégiale Saint-Pierre, en ville haute de Chauvigny (Vienne) est célèbre notamment pour les chapiteaux du chœur, richement sculptés avec des repeints du 19e siècle… mais qui reprennent sans doute une partie des peintures romanes. La lutte du bien et du mal est omniprésente dans ce programme sculpté. Je commence aujourd’hui par le chapiteau situé dans l’axe du chœur et qui présente quatre scènes consacrées à l’Enfance de Jésus. Une cinquième scène (l’Annonce aux bergers) se trouve sur un autre chapiteau, dominé par le thème de l’Apocalypse…
La première scène, dans l’ordre chronologique de l’histoire dans le Nouveau testament, se trouve non pas sur la face que l’on voit en regardant le chœur, mais sur la face sud. La scène est rapportée dans Luc 1, 26-38: l’archange Gabriel annonce à Marie qu’elle va donner naissance à Jésus, fils de Dieu.
Marie (identifiée par S. MARIA), à gauche, accueille la nouvelle les mains ouvertes, tandis que l’archange lui présente une croix.
(Je vous ai déjà montré des scènes de l’Annonciation à Poitiers sur la partie droite du portail Saint-Michel de la cathédrale et sur la façade de l’église Notre-Dame-la-Grande).
Sur la face ouest du chapiteau, la plus visible, est représentée l’adoration des mages. Chronologiquement, cette scène se situe après la Nativité (Luc 2, 7, à revoir à Poitiers, sur la façade de l’église Notre-Dame-la-Grande) et l’Annonce aux bergers (sur un autre chapiteau de l’église Saint-Pierre à Chauvigny). Avant d’arriver, les rois mages ont eu quelques péripéties (Matthieu 2, 7-10) que l’on peut voir par exemple sur la partie gauche du portail saint Michel de la cathédrale de Poitiers. L’adoration des mages (Matthieu 2, 11) se trouve également sur la partie droite du portail saint Michel de la cathédrale de Poitiers. Revenons à Chauvigny. Marie (à nouveau identifiée par une inscription sur son auréole, SANCT MARIA), tenant Jésus sur ses genoux, trône au centre du chapiteau et est encadrée par deux rois mages à gauche et un à droite. Ils apportent leurs présents.
A gauche est représentée l’étoile du berger, qui a guidé les rois mages, et à droite la main de Dieu.
Ce chapiteau est surtout célèbre pour son inscription « GOFRIDUS ME FECIT », Geoffroy m’a fait ou m’a fait faire (selon que l’on traduise une forme active ou passive du verbe), mentionnant soit le sculpteur, soit le commanditaire de cet ensemble sculpté.
La face sud du chapiteau porte une scène peu fréquente dans l’art roman, la présentation au Temple (Luc 2, 22-39). Sur la droite de cette face se trouve le dernier roi mage de la face précédente.
A gauche, Siméon (SIMEON) accueille au-dessus de l’autel Jésus (le nimbe cruciforme suffisait à l’identifier, l’inscription IHS XPS est superflue) présenté par sa mère (SANCTA MARIA). Cette église est décidément bavarde… avec de nombreux textes pour expliciter les scènes pourtant claires… surtout pour les chanoines qui à l’époque avaient seuls accès au chœur…
La face est du chapiteau porte également une scène assez rarement représentée, la tentation au désert (Luc 4, 1-13, Matthieu 4, 1-11).
Le Christ, à gauche, fait face au diable… que je trouve très réussi avec ses pattes arrières griffues, ses ailes et ses grandes dents.
Photographies de juillet 2012.