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Petites scènes capitales, de Sylvie Germain

Logo du défi rentrée littéraire 2013 chez HérissonCouverture de Petites scènes capitales, de Sylvie GermainJ’ai commencé la lecture des livres pour la voix des lecteurs par le plus facile à lire pour moi… typographiquement! Merci à Grégory qui a organisé ce groupe de lecteurs avec Florence, Jenny, Michèle. Et en plus, ce livre, par sa date de parution, peut aussi entrer dans la rentrée littéraire 2013 organisé par Hérisson jusque fin juillet 2014 (je n’en ai pas lu autant que les années précédentes, avec mes problèmes de nerf optique). Pour l’auteure du jour, Sylvie Germain, vous pouvez aussi relire mes avis sur Rendez-vous nomades et Hors champ de Sylvie Germain (prêtés par Grégory).

Le livre : Petites scènes capitales, de Sylvie Germain, éditions Albin Michel, 2013, 247 pages, ISBN 9782226249791.

L’histoire: quelque part en province, dans l’immédiate après-guerre. Lili, une petite fille, est élevée seule par son père, Gabriel, la mère les a abandonnés peu après sa naissance puis a été portée disparue en mer. Accident? Suicide? Très vite, son père se remet en ménage avec Viviane et ses quatre enfants, Jeanne-Joy, des jumelles, Christine et Chantal, qui ont son âge, et Paul. A l’école, Lili apprend que son véritable prénom est Barbara, Liliane n’étant que son deuxième prénom. Elle aime se réfugier chez sa grand-mère, où elle a une chambre pour elle toute seule, apprend peu à peu à vivre avec ses demi-frère et sœurs, avec Viviane et Gabriel qui vieillissent peu à peu, joies et soucis quotidiens, année après année.

Mon avis: Au fil de petites scènes charmantes (les oiseaux qui gazouillent dans la volière près de la maison d’enfance) ou dramatiques (la mort accidentelle de Christine, la courte vie de Sophie, phocomèle à cause du distilbène / thalidomide pris par sa mère, Jeanne-Joy) se trace à petites touches la vie de Lili. Le contexte historique n’apparaît qu’en suggestion, la seconde guerre mondiale est le nid du secret de la naissance de Paul, la guerre d’Algérie est évoquée par la radio, mai 1968 n’apparaît que dans l’ambiance d’une maison collective et quelques slogans. Le récit est centré sur la famille et même sur le ressenti de Lili, on apprend sur son lit de mort que Viviane était d’origine roumaine. La « maison » semble être un sujet de préoccupations, les maisons successives plutôt, mais il faut attendre la page 237 pour avoir un indice sur la localisation de la maison d’enfance, dans le hameau de la Capelle-Porette, désormais enfoui sous un lac de barrage! Bon, il y a eu un certain nombre de villages engloutis dans les années 1950-1970, je n’ai pas cherché où ce lieu-dit pouvait se trouver… Un tableau par petites touches donc, comme les essais de peinture de Lili (avant la destruction des œuvres). Attention, au fil des pages, il faut se méfier des scènes heureuses, le pique-nique tourne ainsi en drame en quelques lignes. Cette écriture peut devenir un peu dérangeante, tient le lecteur en éveil, peut-on se laisser porter par cette scène de bonheur ou va-t-elle dégénérer?  D’où vient-on, où va-t-on? Peut-on se construire avec l’incertitude de l’abandon par la mère? La scène finale m’a laissée sceptique…

D’autres avis: ils ont aimé… ou pas, voir les blogs de Laure /MicMélo littéraire, École des Lettres, les lectures d’Asphodèle, Blablabla Mia, Le tour du Nombril, etc.

Pour aller plus loin: écouter un extrait lu par Sylvie Germain sur France Culture. et une émission où elle parle de son « métier d’écrivain ».

Suivre mes (nos) lectures de la sélection de la Voix des lecteurs 2014 (liens au fur et  mesure des lectures):

Profanes, de Jeanne Benameur, éditions Actes sud
Composite, de Denis Bourgeois, éditions Ego comme X
Petites scènes capitales, de Sylvie Germain, éditions Albin Michel
Nativité cinquante et quelques de Lionel-Edouard Martin, éditions Le Vampire actif
N’entre pas dans mon âme avec tes chaussures, Paola Pigani, éditions Liana Levi

Au fil d’Ariane, de Robert Guédiguian

Affiche de Au fil d'Ariane, de Robert GuédiguianSamedi pluvieux, Poitiers désert (à 17h, 150 places libres au parking Carnot/hôtel de ville, plein d’habitude le samedi, même sans soldes), effet conjugué de la météo, de la crise et de l’annonce des perturbations des championnats de France de cyclisme, plus de un million d’euros de nos impôts (556.000€ ou 843.000€, ce n’est pas clair en subventions du conseil général, pas facile de trouver la somme exacte, 120.000€ de la Région Poitou-Charentes, 120.000€ de Grand Poitiers, plus la « valorisation » de l’intervention des services du Conseil général, de Poitiers et de l’agglomération) pour empirer la situation économique du centre-ville et des magasins autour du Futuroscope (et paraît-il de remplir les hôtels et donner une bonne image de la ville et du Futuroscope)… En attendant, je suis allée au cinéma voir Au fil d’Ariane, de Robert Guédiguian (revoir mon avis sur Les neiges du Kilimandjaro, déjà avec Ariane Ascaride, Gérard Meylan et Jean-Pierre Darroussin).

Le film: à Marseille de nos jours. Ariane [Ariane Ascaride] prépare un gâteau pour fêter son anniversaire, mais au fil des minutes, ses enfants et son mari se décommandent, lui faisant juste livrer des fleurs. Elle prend sa voiture, se retrouve sur le port. Bloquée à un pont-levis, en attendant le passage d’un bateau, elle met de la musique, elle est abordée par un jeune homme à scooter [Adrien Jolivet], il l’emmène déjeuner dans un restaurant de plage tenu par Denis [Gérard Meylan], mais l’abandonne sur place, à la même table que Jack [Jacques Boudet], un habitué, alors qu’il part avec sa copine [Lola Naymark]. Ariane part en taxi [conduit par Jean-Pierre Darroussin], retrouve sa voiture en train d’être enlevée par la fourrière, se fait voler son sac à mains au distributeur… retour en pleine déprime au restaurant, fermé, mais accueillie par le gardien [Youssouf Djaoro]…

Mon avis: un film où l’on a des doutes… jusqu’à la surprenant scène finale qui explique tout, mais chut! C’est peut-être dû aux images de synthèse inserrée sans qu’on les voie vraiment, mais que le cerveau reconstitue comme une anomalie, au scénario aussi, improbable jusqu’aux dernières minutes. J’ai toujours du mal avec les films qui ont des scènes chantées, je trouve que ça « sonne faux », et c’est encore le cas ici pour quelques séquences. A part cette réserve, j’ai beaucoup aimé ce film, tous les acteurs sont très bons. La presse a beaucoup parlé de Ariane Ascaride et Jean-Pierre Darroussin. Je voudrais souligner le rôle de Youssouf Djaoro, ancien gardien du muséum d’histoire naturelle de Marseille (il y a une scène assez surréaliste dans ce beau musée fermé pour rénovation), devenu gardien du restaurant, hanté de cauchemars qu’il vit dans sa cabane peinte d’un grand décor africain. Robert Guédiguian joue sur les contes, les rêves, les peurs exprimées ou non, au premier rang desquelles la peur de l’abandon (d’Ariane par ses invités à son anniversaire, mais pas que)… Vite, allez le voir, il reste encore une journée pour la fête du cinéma et j’espère qu’il restera encore un peu à l’affiche!