En ces journées du patrimoine, je vais à nouveau rentrer dans la polémique. Faut-il restaurer les ruines? Titre d’un colloque que j’avais eu à commenter il y a presque 25 ans pour le concours de conservateur. Toujours d’actualité: vaut-il mieux conserver une ruine, la restaurer (à l’état de ruine, restituée?), l’enterrer? je reste sur ma position, il vaut mieux ré-enterrer un vestige archéologique pour le protéger, le garder à tout prix sans explication et sans contexte dans un bâtiment contemporain n’a aucun sens (voir la collégiale Saint-Pierre-le-Puellier à Tours, la place Saint-Jean, un palais à Rhodes, un bout de mur romain près de la chapelle du Pas-de-Dieu à Poitiers, etc.). Voici quelques exemples romains à Cahors. Le bâtiment de la chambre d’Agriculture est installé à cheval sur le théâtre, compréhensible seulement par un panneau…
pas très clair!!! Je ne vois pas comment le visiteur peut faire le rapprochement entre la vue ancienne, le plan et ce qu’il voit s’il n’est pas archéologue! Le théâtre dit des Cadourques, connu depuis toujours, a servi de carrière de pierres puis les vestiges ont été intégrés dans ce bâtiment (para-)public dans les années 1960.
Reconnaître un amphithéâtre romain et le comprendre n’est pas facile, je vous en ai déjà montré quelques exemples (voir à Périgueux ou à Poitiers l’amphithéâtre romain et sa reconstitution par Golvin). Celui de Cahors, au milieu d’un parking souterrain, est encore moins compréhensible. Il a été trouvé en 2003 lors du creusement du parking, qui en a adopté la forme oblongue (il a valu en partie la défaite du maire de l’époque, Marc Lecuru, aux élections de 2008), mais comment expliquer aux gens à quoi servait cet édifice de spectacles et de jeux de gladiateurs? D’autant que l’usager du parking a un seul objectif, venir facilement en ville, se garer, courir faire ses courses, pas admirer le paysage, fût-il patrimonial et antique! Passé l’intérêt lors de la découverte, l’utilité de garder ce tas de pierres doit interroger quelques usagers.
Dans une ville romaine, à côté de l’amphithéâtre et du théâtre, il y a un autre monument public important, les thermes, qui souvent renferment aussi des installations sportives. Son nom est ambigu, « Arc de Diane », cela peut sous-entendre un arc de triomphe ou un temple dédié à Diane. Quand on passe dans la rue, on voit surtout un grand pan de mur. La construction du collège voisin et les fouilles consécutives (pas encore dites « préventives », plutôt du « sauvetage urgent » même si le site était connu) en 1953-1954 a permis de préciser qu’il s’agissait d’un des quatre murs qui bordait un piscine froide ou frigidarium.
Pour le temple, je n’ai pas de photographie… mais voici la position des gros bâtiments publics romains de Cahors.
Pour aller plus loin, voir:
Deux mille ans d’un quartier urbain à Cahors [amphithéâtre], par Didier Rigal, Inrap
Les thermes romains de Cahors, par Michel Labrousse, Gallia, vol.21, n° 1, 1963, p. 191-225.
Photographies mars 2011
Si je comprends bien, ces vestiges du passé sont « gâchées » parce que mal mises en valeur et expliquées, pourquoi ne pas recueillir AVANT un avis éclairé comme le tien ??
Bises, bon dimanche.
L’archéologue détruit les vestiges, la fouille est irréversible. Si on peut ne pas fouiller un site sous la contrainte de travaux, c’est mieux, en le gardant ainsi pour un sujet de recherche précis ou les générations futures (les techniques évoluent). Si on peut modifier un projet pour garder des vestiges majeurs, c’est mieux. Si on décide de fouiller dans l’urgence, il faut aussi accepter la destruction ou le ré-enfouissement, la présentation « à tout prix » devrait s’accompagner des éléments permettant leur compréhension.
Pas facile comme question, et c’est vraiment à examiner au cas par cas, selon l’intérêt de la découverte, le type de constructions prévu. Il ne doit pas être toujours possible de ré-enfouir, et l’intégration dans des bâtiments modernes n’est pas toujours très heureuse ni très aisée. Mais parfois elle peut aussi être bien faite ! Bisous et bon dimanche !
C’est vrai, quelquefois, le vestige parait anachronique par rapport à l’environnement…
que garder, que détruire, et tu rajoutes que re-cacher?ce sont des questions qui m’intéressent bien que personnellement je n’aie aucune réponse par manque d e connaissances….Comment une ville évolue t elle avec (ou sans ) ce qui fut son histoire, pourquoi garder ceci et détruire celà ,moi je trouve çà bien que par endroit il y ait des panneaux explicatifs, comme, par exemple, à Nantes vers la place du Bouffay que tu connais, où j’ai appris que naguère était le premier château de Nantes (oups, naguère car je ne me rappelle plus les détails, dsl)…donc a priori je dis oui aux panneaux pédagogiques c’est aussi une façon d e donner aux passants une certaine main mise sur l’histoire meme invisible d e la ville….
merci d’avoir soulevé cette question, et je vais aller voir l’article sur Poitiers.
c’est interessant ces découvertes archéologiques, sur mon blog, j’en parle d’une très interessante qu’ils ont fait en voulant construire un immeuble à Aurillac (cantal), et ils sont dans la problématique, garder ou recouvrir! bonne journée !