Un certain nombre de préhistoriens se sont lancés dans l’aventure du roman historique… Il y a un peu plus de deux ans, Actes sud a réédité dans la collection Babel un livre publié par Jean Guilaine en 2006 (en lien avec les éditions Errance, plus spécialisées en archéologie). Je l’ai trouvé à la médiathèque.
Le livre : Pourquoi j’ai construit une maison carrée, de Jean Guilaine, collection Babel (n° 1186), éditions Actes Sud, 332 p., 2013, ISBN 978-2-330-01965-5 (1ère édition en 2006 sous l’ISBN 978-2-7427-6142-5).
L’histoire : il y a 10.000 ans… Cando raconte à ses enfants l’histoire de sa jeunesse. Direction le Proche-Orient. Cando appartient à un groupe de chasseurs-cueilleurs passés du nomadisme sous tente à des maisons rondes rapides à reconstruire ailleurs, mais autour d’eux, beaucoup de groupes sont passés à l’élevage (des chèvres) voire à l’agriculture, y compris chez des cousins. La lutte sera féroce avec les anciens, attachés à leurs traditions, pourquoi abandonner les maisons rondes en torchis pour bâtir des maisons carrées? C’était bien la peine de transporter autant de blocs, voici le village installé en bord de mer englouti par la montée des eaux… La promiscuité des animaux entraîne une épidémie mortelle, les dieux ne rejettent-ils pas ces innovations? A quoi bon ces pots en céramique, lourds, même s’ils mettent les céréales à l’abri? Et c’est quoi, cette mode des tissus, la peau tannée ne convient donc plus aux jeunes? Au sein du groupe, rien ne va plus, la scission est inévitable…
Mon avis : pour les besoins du récit, Jean Guilaine a condensé en une génération les évolutions qui se sont produites sur une période un peu plus longue, sédentarisation, transformation du mode de vie, domestication du chat (le loup avait été domestiqué depuis plusieurs dizaines de millénaires), apparition de la guerre (enfin, développement, plutôt…). La montée des eaux aussi a été impressionnante, rappelez-vous le déluge de la Bible ou l’Atlantide, des récits ancrés dans les mémoires collectives et pour cause, si aujourd’hui on s’inquiète pour une montée des eaux de quelques mètres, on oublie que la mer a monté de presque 55 mètres entre le dernier maximum glaciaire et l’Holocène (et aussi que le trait de la côte atlantique était 5 mètres plus haut qu’aujourd’hui au 5e siècle avant Jésus-Christ, avec des sites de production de sel à Muron, presque à Surgères, à une cinquantaine de kilomètres à l’intérieur des terres pour ceux qui connaissent la Charente-Martime). Revenons au Proche-Orient… Ce roman est agréable à lire, avec de nombreuses touches d’humour, ce qui change d’autres romans (pré)historiques: soit ils sont agréables à lire mais plein d’erreurs pour les préhistoriens, soit ils sont écrits par des préhistoriens et parfois pas très agréables à lire. Jean Guilaine a réussi à éviter cet écueil!