Flo m’avait parlé de ce livre dans un commentaire, je l’ai immédiatement réservé en ligne à la médiathèque car il était emprunté…
Le livre : Les cahiers ukrainiens, mémoires du temps de l’URSS de Igor Tuveri, dit Igort (scénario et dessin), éditions Futuropolis, 2010, 176 pages, ISBN 9782754802666.
L’histoire : 1932-1933 en Ukraine. Interrogés en 2009/2009, un certain nombre d’Ukrainiens témoignent de leur vie au temps de l’Union soviétique et surtout du Holodomor, le génocide par la faim des années 1932-1933. Parce que les petits paysans propriétaires ukrainiens (les koulaks) résistaient depuis 1928 à la collectivisation voulue par Staline, le pouvoir soviétique a organisé la famine en confisquant (réquisitionnant) les animaux et les récoltes. Rien n’est épargné au lecteur, les charrettes de cadavres, la nécrophagie et le cannibalisme après assassinat des plus faibles, les personnes qui meurent pour avoir mangé tout ce qu’elles trouvent, comestible ou pas. Les années suivantes de l’Ukraine soviétique sont abordées plus brièvement, avec une sorte d’âge d’or, Tchernobyl et jusqu’à l’abandon des terres aujourd’hui…
Mon avis : Beaucoup trop de fautes dans le lettrage. Lorsque j’ai participé à des fouilles en Ukraine tout juste indépendante (il y a presque vingt ans maintenant, c’était dans l’est de l’Ukraine, dans une zone non contaminée par Tchernobyl donc, puisque les vents avaient poussé les particules vers l’ouest), j’avais pu constater l’importance de cette famine organisée et sa place dans la mémoire des Ukrainiens, qui se battaient déjà pour qu’elle soit reconnue comme un génocide. Les Ukrainiens revendiquent 7 à 10 millions de morts, les historiens les estiment plutôt à 2,5 à 5 millions. Mais dans la même période et encore en 1946-1947, il y a eu d’autres famines en Union soviétique qui ont fait aussi des millions de morts. Le terme de génocide (qui implique une volonté planifiée d’extermination d’un peuple ou d’un groupe de personnes) est lui aussi discuté par les historiens, mais reconnu par le parlement ukrainien depuis 2006. Le parlement européen a qualifié en 2008 cette famine de crime contre le peuple ukrainien et contre l’humanité, sans prononcer le mot de génocide (voir ici la résolution adoptée). Cela étant, cette famine a fait des millions de morts et a bien été organisée. Cette bande dessinée aborde donc un sujet important pour les Ukrainiens, la forme revendiquée (la transcription de témoignages dont la date est clairement indiquée, à la manière d’une enquête ethnographique) est originale. Les personnes interrogées sont âgées, étaient enfants au moment de la famine.
Cette BD sera soumise pour le classement du TOP BD des blogueurs organisé par Yaneck / Les chroniques de l’invisible. Mes chroniques BD sont regroupées dans la catégorie pour les BD et par auteur sur la page BD dans ma bibliothèque.