Je vous ai déjà parlé des architectes Maurice (1887-1982) et Lucien (1890-1972) Martineau à propos de l’ancienne chambre de commerce rue du Marché, à Poitiers, ainsi que de leur père Léon Martineau (1853-1921), qui a réalisé notamment la maison Vannier. Les archives abondantes de ces trois architectes font l’objet d’un répertoire bien pratique mis en ligne par les archives départementales de la Vienne. Je vous montre aujourd’hui trois autres immeubles qu’ils ont construits dans les années 1930.
Je commence par le n° 13 rue des Écossais, juste à côté du temple protestant (qu’ils vont reconstruire une quinzaine d’années plus tard), se trouve cet immeuble de rapport de cinq étages construit en 1931. Ses plans ont été présentés en 1988 dans l’exposition « 37 » et l’architecture des années 1930 à Poitiers (c’était avant mon arrivée, mais le Picton en a publié un long compte rendu et il existe un petit journal de cette exposition, les deux autres immeubles de l’article du jour y figuraient aussi). L’immeuble a été construit par M. Fraillon, négociant en matériaux de construction.
Les architectes ont décidé de jouer sur une architecture avec des poteaux en béton bien visibles en façade. Le rez-de-chaussée, qui devait renfermer des bureaux, se présente comme un gros bloc en saillie. Le porche est traversant et donne accès à la cour en arrière. Pour les étages, éclairés par de larges fenêtres, ils ont joué sur les formes droites pour les avant-corps et arrondies au centre (formant une sorte de V en retrait par rapport à l’alignement de la rue). Au dernier étage, une fausse balustrade forme un garde-corps devant les grandes fenêtres. Le toit est débordant avec un décor de cercles sous le chéneau.
Pour l’immeuble construit pour le dentiste Rat aux 21 et 23 rue d’Alsace-Lorraine, ils ont choisi encore des formes rondes, mais en saillie cette fois, formant comme une ré-interprétation du bow-window. Comme dans l’immeuble précédent, le rez-de-chaussée est prévu pour des bureaux et le porche est traversant.
Ici aussi, la structure porteuse en béton est visible de l’extérieur, avec des colonnes rondes sur la partie en saillie.
Seule concession au décor, cette tête de femme sculptée au-dessus de la fenêtre du rez-de-chaussée, aux cheveux enroulés en volute qui ne parviennent pas à animer sa face rigide.
Le troisième immeuble que je souhaite vous présenter aujourd’hui se trouve rue du Marché. Il a été construit pour la Banque nationale de crédit (c’est aujourd’hui une boutique). Il a été réalisé en lien avec les frères Auguste (1874-1954) et Gustave (1876-1952) Perret, oui, ceux de la reconstruction du Havre, ils étaient alors les architectes de la Banque nationale de crédit à Paris. La rue manque sérieusement de recul pour prendre la photographie. Mais vu ainsi, on voit mieux que les fenêtres du haut sont plus enfoncées dans la façade que les fenêtres du premier et du deuxième étage. Nous sommes un peu avant la construction des deux immeubles précédents, en 1928-1929. Point de formes rondes ici, des lignes droites et rigides…
Un petit décor quand même sous la corniche, seule concession aux formes rondes… Je vous ai fait un assemblage sur la ligne du haut la partie gauche et sur la ligne du bas la partie droite. J’aurais peut-être dû corriger les déformations de mes photos, mais ça vous donne une idée…