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L’exercice de l’État de Pierre Schoeller

Affiche de L'exercice de l'État de Pierre Schoeller

Je termine le festival télérama 2012 avec L’exercice de l’État, de Pierre Schoeller… Cela fait quatre films vus avant le festival, six pendant, soit dix sur quinze, les autres ne me tentaient vraiment pas…

Le film : à Paris de nos jours. Le film s’ouvre par un cauchemar… une femme qui rentre dans un crocodile, un sac plastique sur la tête. Cauchemar rattrapé par la réalité. Le ministre des transports Bertrand Saint-Jean (Olivier Gourmet) est réveillé en pleine nuit, un car transportant des adolescents s’est renversé dans les Ardennes, il y a des morts, des blessés, il doit aller sur place, prononcer le discours préparé pour lui pendant le trajet (effectué en partie en hélico). On plonge ensuite dans le quotidien du ministre, dont la vie est entièrement organisée par son directeur de cabinet, Gilles (Michel Blanc) qui va jusqu’à régler les problèmes de passeport de sa fille ou prévoir le cadeau d’anniversaire de sa femme (pas de chance, l’opéra sera annulé pour cause de grève…). La question en toile de fond: faut-il ou non privatiser les gares? Il n’a pas d’avis, s’en remet à ce qu’on lui fait tenir comme position, dans un sens ou dans l’autre, au gré des alliances…

Mon avis : ce film aurait aussi bien pu être un téléfilm, rien de bien original, si ce n’est la surimpression à l’écran de SMS qui tombent ici ou là… Le scénario repêche la médiocrité d’un point de vue strictement cinématographique. Rien à voir avec le très inventif Pater d’Alain Cavallier. Ce film dénonce le fonctionnement des ministères, le rôle des chefs de cabinet, de l’attachée de communication personnelle, des conseillers… Il oublie deux rouages importants dans cet exercice du pouvoir… Ceux qui manipulent les ministres en général via leurs conseillers, à savoir les lobbies pouvant passer par des agences de communication spécialisées (sans état d’âme, elles vont au client le plus offrant), et quand même un contre-pouvoir, la presse libre et satirique, du type du Canard enchaîné ou de Charlie Hebdo. Après une intervention à la radio, la chargée de comm’ vante les retombées dans la presse du discours du ministre, elle oublie de regarder la presse libre…

Un épisode a trouvé un cruel écho juste après que j’ai vu le film. Dans le film, le ministre est agacé d’être retardé par un ralentissement sur l’autoroute, il doit aller à une réunion pour son parachutage électoral… Alors, il décide de diriger son chauffeur (un chômeur de longue durée en stage pour un mois) sur une portion d’autoroute pas encore en service, il doit l’inaugurer la semaine prochaine. Il contraint le pauvre employé présent d’ouvrir la barrière qui barre l’accès… et quelques kilomètres plus loin, ce qui devait arriver arriva: tonneaux, ministre légèrement blessé… mais chauffeur éjecté et tué sur le coup. Cela ne vous rappelle rien? Nadine Morano a obtenu du premier ministre l’autre jour une escorte policière pour aller rejoindre l’aéroport militaire où un avion ministériel l’attend… pour rentrer dans son fief électoral à Nancy (voir par exemple l’article du Monde après un petit tour à une rencontre où sont déjà d’autres ministres, sa présence n’est donc pas indispensable). Aucune urgence en fait, puisque cet avion l’aurait attendue, et Le Canard (daté du 25 janvier 2012) rappelle qu’elle aurait aussi bien pu prendre le TGV, 1h30 de centre-ville à centre-ville. J’ajouterai même qu’elle AURAIT DÛ prendre le train, bien meilleur pour l’environnement… et pour les finances publiques (il paraît qu’il faut faire des économies, cela ne vaut visiblement pas pour tout le monde). Et le tragique est arrivé: un des motards de l’escorte a renversé un étudiant qui traversait la voie prise en sens interdit par l’escorte et la voiture ministérielle, coma, double fracture du crâne et trois mois d’ITT (incapacité totale de travail) pour l’étudiant, la ministre a poursuivi sa route et à peine demandé de ses nouvelles avant que le scandale soit révélé à la presse…

Ce film était sélectionné pour le festival télérama 2012. Voici les dix films que j’ai vus dans cette sélection de quinze films: