Quand j’avais vu la présentation de Citoyen d’honneur, de Mariano Cohn et Gastón Duprat, je n’avais pas vraiment eu envie d’aller le voir, mais la critique de Philippe Lançon dans Charlie Hebdo m’a fait changer d’avis… même s’il est déjà sorti depuis presque un mois et que j’avais lu avant d’autres bonnes critiques qui ne m’avaient pas vraiment décidée ; le ton de Philippe Lançon était différent et m’a intriguée. Oscar Martínez a reçu le prix du meilleur acteur au dernier festival de Venise et le film figurait dans la sélection des Oscar…
Le film : de nos jours à Barcelone puis à Salas, à 750 km de Buenos Aires. Depuis qu’il a reçu son prix Nobel de littérature il y a cinq ans,
l’argentin Daniel Mantovani [Oscar Martínez], la soixantaine, n’a rien écrit, annule sa présence au dernier moment dans de nombreuses réceptions et conférences. Un jour, sa secrétaire lui parle d’une lettre reçue de Salas, sa ville natale qu’il a quittée quand il avait 20 ans et qui est au centre de tous ses romans. Il n’y est jamais retourné, pas même pour l’enterrement de ses parents, et voilà que le maire [Manuel Vicente] l’invite la semaine suivante pour le faire citoyen d’honneur! Il décide d’y aller seul, de renouer avec son passé. Entre les pannes de voiture, les tours de ville à pied ou sur la voiture des pompiers, les conférences, les réceptions, le concours de peintres locaux, le réceptionniste de l’hôtel qui écrit des nouvelles [Julián Larquier Tellarini], le séjour n’a rien à voir avec sa petite vie sur-protégée en Europe! Il retrouve son ami Antonio [Dady Brieva], qui a épousé Irene [Andrea Frigerio], son ex-petite amie, et découvre leur fille, Julia [Belén Chavanne], à l’une de ses conférences puis… envahissant son lit!
Mon avis : j’ai bien fait de me laisser revenir sur la première impression laissée par la bande-annonce! L’acteur principal est vraiment excellent, et le ton très décalé de la narration rend certaines scènes jubilatoires! Le film aborde la place de l’écrivain – et au-delà de l’artiste- dans la cité, la Cité avec un C majuscule même, de star capricieuse en Europe, il devient presque un citoyen ordinaire dans sa ville natale, la voiture venue l’accueillir crève sur le raccourci emprunté par le chauffeur, l’hôtel ressemble à « un hôtel roumain » [sic], les rues sont défoncées mais chacun veut prendre un selfie avec lui… Au fil des jours, l’affluence aux conférences passe de la salle pleine à cinq ou six personnes plutôt âgées… A part la fille de son ami Antonio, le réceptionniste de l’hôtel et le monsieur qui a reconnu son père dans l’un de ses personnages, qui d’ailleurs a vraiment lu ses livres? Ah si, le docteur dont il a recalé la croûte au concours de peinture… Le « citoyen d’honneur » refuse d’assumer le résultat final qui comprend tous les recalés – parce que le maire, lui, il va devoir continuer à vivre au quotidien avec ces gens influents. La photographie des scènes nocturnes est très réussie. Si le film est encore à l’affiche chez vous, je vous le recommande vraiment!
A signaler aussi dans sa villa de Barcelone l’impressionnante bibliothèque qui fait écho à l’article que Télérama a consacré aux bibliothèques des écrivains à l’occasion du dernier salon du livre de Paris. Et ce film me donne envie de reprendre la lecture des prix Nobel de littérature, complètement abandonnée ces derniers mois! 😉