Ce livre avait obtenu le prix Goncourt en 2014, une amie me l’a prêté en version de poche.
Le livre : Pas pleurer de Lydie Salvayre, éditions du Seuil, 2014, 288 pages, ISBN 9782021116199.
L’histoire : de nos jours… Montse, une vieille dame, la mère de la narratrice, a tout oublié de sa vie sauf quelques mois en 1936 en Espagne. Adolescente dans un village, elle se rebelle contre sa mère qui cherche le « bon parti » pour un mariage. Quand les « Révolutionnaires » arrivent, parlent de liberté, de partage des terres, ils séduisent son frère aîné, José, et elle décide de partir avec eux « à la ville », à Burgos. Suite à une relation d’une nuit avec un volontaire français des Brigades Internationales, elle tombe enceinte… En réponse à ce récit de Montse, la colère de Georges Bernanos, catholique convaincu, en séjour à Majorque, dénonce la passivité du clergé espagnol face aux exactions des Nationaux (les Franquistes).
Mon avis : Les deux récits se mêlent, alternent. Les passages plus longs de la vie de Montse sont écrits dans une langue haute en couleur, qui reflète l’exil, le mélange de mots espagnols ou « fragnol », avec des néologismes mêlant les deux langues de cette vieille dame exilée – la langue natale fatalement n’a jamais disparu – mais aussi peut-être la tendance de certains malades d’Alzheimer à utiliser un vocabulaire scatologique par levée des inhibitions et qui aboutit donc à l’irruption dans le récit de mots qui peuvent paraître comme « grossiers » mais arrivent très naturellement dans le récit imagé de ces quelques semaines tragiques. J’ai lu un certain nombre de livres autour de la guerre d’Espagne (voir notamment Espagne, Espagne!, de Jean-Richard Bloch), elle est cette fois abordée du point de vue d’un village, de ses habitants qui vont se déchirer en quelques semaines autour d’enjeux qui les touchent de près, notamment le partage ou non des terres et des richesses. Le mélange avec le point de vue de Georges Bernanos, en Espagne aussi mais sur l’île de Majorque, m’a d’abord déconcertée, avec le décalage de lieu, de langue, d’enjeu puisque l’on a un notable, intellectuel exilé depuis deux ans pour des raisons financières. Georges Bernanos… un auteur ultra-catholique qui ne m’a jamais vraiment tenté. Membre de l’Action française, mouvement politique à tendance royaliste et d’extrême droite, Georges Bernanos ne m’est pas particulièrement sympathique, mais ce livre m’a donné envie de lire Les grands cimetières sous la lune.