Dans la rue du Marché à Poitiers, rue riche en patrimoine (je vous ai déjà montré l’ancienne chambre de commerce, avec des sculptures de Raymond (Émile) Couvègnes et des peintures de Henri-Pierre Lejeune, j’en ai encore d’autres en stock de diverses périodes), dans la rue du Marché donc se trouve un hôtel Renaissance avec un rez-de-chaussée qui a beaucoup été modifié et refait, un premier et un deuxième étages avec cinq fenêtres séparés par des pilastres cannelés à chapiteaux ioniques au premier et corinthiens au second étage, et une lucarne dans le comble. Il est connu sous le nom d’hôtel Pélisson, du nom de Jean Pélisson, marchand de drap de soie devenu échevin de Poitiers en 1550. La date de 1557 portée sur la façade, date probable de l’achèvement des travaux, précède de peu sa mort en 1558.
Comme sur l’hôtel du hôtel du grand prieuré d’Aquitaine (construit en 1667, un siècle plus tard) dans la Grand’Rue, mais ici entre le rez-de-chaussée et le premier étage, sous le bandeau de niveau soutenu par des modillons, se trouve une frise…
… composée de triglyphes et de métopes (voir ici pour un retour sur le vocabulaire) ornés de bucranes et de rosaces. Elle avait été très abîmée par les travaux successifs au rez-de-chaussée et a été restaurée en 1989.
Le bucrane (sans accent circonflexe sur le a) est un crâne de bœuf représenté sous sa forme osseuse, mais avec les cornes du bœuf. A la Renaissance, ces cornes sont souvent entourées de tissus ou de feuillages. Ici, ils sont tous différents, avec des « pendeloques » de fruits accrochées aux cornes.
Les espaces au-dessus des fenêtres du premier étage sont richement ornés. A gauche, dans une profusion de fruits et dans un cartouche surmonté d’une petite tête humaine se trouve l’inscription « HOC EST / REFUGION / MEUM 1557 » (Ceci est mon refuge, 1557).
Sur la deuxième fenêtre, un blason encadré de rubans, de guirlandes et de deux têtes de lion.
Sur la troisième fenêtre, un médaillon sans inscription entouré de rubans, de feuilles et de deux masques.
Au-dessus de la quatrième fenêtre, on trouve à nouveau deux têtes de lion sur les côtés.
Enfin, sur la fenêtre de droite, une autre inscription « IN D[omi]NO / CONFIDO / 1557 » (Je me confie au Seigneur, 1557), avec une tête de lion au-dessus, à droite et à gauche.
Le bandeau qui sépare le premier et le deuxième étage porte un décor de rubans perlés, de tiges et de feuilles.
Voici un détail.
Au deuxième étage, les chapiteaux sont ornés de feuillage, sauf le deuxième et le troisième en partant de la gauche, qui cachent deux visages…
Voici la travée centrale, au deuxième étage et le comble avec sa lucarne peu décorée par rapport au reste.
Dans un style très proche et contemporain presque à l’année près (1555), voir l’hôtel Pontard ou maison Henri II à La Rochelle.
C’est un superbe bâtiment, les sculptures sont de toute beauté !
ils sont superbement conservés ! cath
En résumé, les ordres dorique, ionique et corinthien sont superposés de façon canonique sur les trois niveaux, soulignés par les entablements : frise dorique entre le premier et le second, etc.
Cette superposition selon les règles est à comparer avec la façade de la pharmacie voisine, où les pilastres sont cependant non plus en pierre mais en bois.
Bonjour
trés bonne description
j’ai rénové cet maison en 1989 et restauré cette façade à mes propres frais sans aucune aide des monuments historiques …..
un souvenir de trahison qui est resté comme une blessure….mais la blessure s’est refermée et les remerciements de la ville de Poitiers sont toujours dans l’attente.
ainsi est la vie mais je suis fier d’avoir laissé ce chef d’œuvre aux Poitevins
jean Luc Lemée