Aujourd’hui, c’est Maryse qui vous présente le résultat de ses dernières recherches généalogiques… La parole à Maryse! Les saisies d’écran ne sont pas en haute résolution, pour les curieux, suivez les liens et allez chercher la bonne vue numérisée…
Scandales au pays du Bocage. Transsexualité et disparition de bébé!
Qui a dit que la généalogie était chronophage et ennuyeuse ? Non seulement je la trouve passionnante car j’y trouve plein d’informations sur des branches de ma famille encore bien dénudées, en plus la confirmation qu’il y a bien 2 Deux-Sèvres, celle du sud, laïque, plutôt protestante et très ouverte et celle du nord, fermée, très catholique, familles très nombreuses… et bien plus encore.
J’ai commencé par le sud (famille paternelle), grâce au torchon d’Adorise donné à Véronique (merci à elle…pour m’avoir lancée sur cette recherche familiale) et à la lettre de la guerre 70-71 de Louis Poplineau (respectivement la mère et le grand-père de ma grand-mère paternelle).
Après avoir écumé le côté paternel dans les communes de La Chapelle-Bâton, Cherveux et Echiré avec les Redien, Ecotière et Popelineau, très riche mais assez facile car j’avais plein d’informations familiales, je suis partie dans le nord du département, à l’ouest de Bressuire, proche de la Vendée, pour voir ce qui se passait du côté de la famille de mes grands-parents maternels. Pour moi c’était l’inconnu.
Impressionnant : 12 enfants et environ 15 tontons et tatas de chaque côté. Overdose des noms Bernier, Baudin et Fradin avec, qui plus est, plusieurs familles du même nom dans chaque commune et des prénoms identiques. J’ai cru craquer, mais c’est le lot des chercheurs. J’ai dû faire un travail de fourmi minutieux pour ne pas me perdre entre les Joseph, les Louis, les Constant… et autres Pétronille et Florine. Donc passage obligatoire : les registres d’état civil en ligne des Archives départementales et les registres de recensement des Deux-Sèvres.
Au hasard des pages j’ai découvert des informations inédites et pour le moins surprenantes, voire croustillantes, et en en parlant à Véronique, elle m’a dit que je devrais faire un article sur ces anomalies.
Situons là où se passent les évènements surprenants: commune de Courlay, canton de Cerizay, arrondissement de Bressuire, à la recherche des Bernier (côté de ma grand-mère maternelle, ça se complique !).
Lecture donc des tables décennales (de 1803 à 1893), registres de recensement jusqu’en 1906 et registres de l’état civil.
Bousculade des noms et méli-mélo des naissances ; il y en a tous les ans, voire 3 (des jumeaux en janvier et un bébé en décembre). Très prolifique. C’est là que des découvertes inattendues m’ont interpelée. En cherchant un des nombreux Bernier, je « tombe » sur un titre qui me surprend dans le registre des naissances de l’année 1909 [Archives départementales et les registres de recensement des Deux-Sèvres, Courlay, registre des naissances 1903-1912, vue numérisée n° 125] : « Transcription d’un jugement de Rectification d’un acte de naissance de Thibaud Marceline, née le 27 septembre 1888 ». C’est quoi une « rectification » ? Tout simplement il y a eu erreur sur le sexe du bébé à sa naissance, pourtant présenté à la mairie lors de sa déclaration par son père, donc il a fallu « rectifier » l’erreur. Par jugement du tribunal de Bressuire retranscrit dans le registre de l’état civil on y signale une «indignité dûment constatée » et que Marcellin allait devenir Marceline 21 ans plus tard. Ouf ! Ma curiosité piquée au vif, je vais voir l’acte de naissance du fameux « Marcellin » et les surprises continuent.
Il y a des inscriptions très fines en marge à l’encre décolorée, l’une d’entre elles notifie précisément [Archives départementales et les registres de recensement des Deux-Sèvres, Courlay, registre des naissances 1883-1892, vue numérisée n° 131] : « Par jugement du tribunal civil de Bressuire du 13 janvier 1909, l’acte ci-contre demeure rectifié en ce sens que le prénom de Marcellin sera remplacé par celui de Marceline et que l’enfant y sera désigné comme étant du sexe féminin sur le sexe masculin. Bressuire le 14 janvier 1909, Le Greffier » (sic). Ouaouh, coquin le greffier du tribunal de Bressuire, ou maladresse de style ?
Une autre notre précise son mariage à Bressuire le 28 octobre 1915 à « Marie Joseph Hauleau », bizarrerie des prénoms qui veut qu’il peut être aussi bien féminin que masculin.
Pour terminer cet acte (manqué), il y a aussi la mention du décès de Marcelin(e), avec le tampon officiel : « Décédé (sans « e », NDLR) à La Chapelle-Saint-Laurent le 10 août 1968 ». Décidément, oubli ou pas cette pauvre « femme » n’aura jamais été vraiment sûre de son sexe.
Je reviens au registre des naissances des années 1900, et en 1906, même anomalie [Archives départementales et les registres de recensement des Deux-Sèvres, Courlay, registre des naissances 1903-1912, vue numérisée n° 61]. (Il faut dire que ces textes sont beaucoup plus longs que les simples actes de naissance qui prennent un quart de page alors que les autres occupent une page et demi et on les remarque facilement). Donc même titre : « Transcription d’un jugement de Rectification d’un acte de naissance de Rouger Eugène, né le 16 février 1885 ». On y parle toujours d’ « indignité dûment constatée ». Et 21 ans après sa naissance, Eugénie devient Eugène tout comme pour Marcellin est devenu Marceline, les gens ne se souciaient pas de leurs actes de naissance comme maintenant, ils n’en avaient besoin que lorsqu’ils voulaient se marier. Je vais donc voir l’acte de naissance d’Eugénie (oups, Eugène) et je vois les mêmes notes marginales de confirmation du jugement du tribunal civil de Bressuire avec toutefois la mention de changement de sexe plus soft et la mention de son mariage à Angers.
Toujours dans la série des actes manqués, le troisième m’a laissé pantoise [Archives départementales et les registres de recensement des Deux-Sèvres, Courlay, registre des naissances 1903-1912, vue numérisée n° 23] ; le 7 février 1904 à Courlay, dans le registre des naissances, je vois encore deux pages de texte en petite écriture fine et je m’attends de nouveau à voir le mot « Rectification » et non, il s’agit d’une « Fixation », de quoi et pourquoi? Je continue ma lecture et je lis « Fixation de la Naissance de Marie-Mélanie Benaîteau »… à la lecture du texte j’ai compris que cette petiote avait tout simplement été oubliée sur les actes de naissance et n’avait donc jamais été inscrite sur les registres de l’état civil, alors qu’elle était née le 20 novembre 1880. En un mot, elle n’existait pas officiellement parlant, deux pages ont alors été nécessaires au tribunal civil de Bressuire pour corriger que par « négligence regrettable, il n’a pas été dressé d’acte de naissance de cette enfant » (sic). Toutefois il est précisé que « La naissance […] est cependant établie tant par l’enquête officieuse que par les déclarations des parents…». J’ai cru avoir des hallucinations avant de réaliser que cette personne avait bel et bien été « zappée » tout simplement…
Bien sûr je suis aller voir ce qui se passait dans le registre des naissances de 1880 : une inscription manuscrite était portée en haut de la page entre le n°82 et 83 (avec le n° 82bis) [Archives départementales et les registres de recensement des Deux-Sèvres, Courlay, registre des naissances 1873-1882, vue numérisée n° 198] confirmant que « Lors d’un jugement rendu […] il résulte que Benaîteau Marie-Mélanie est née à Courlay [… ] de Benaîteau Mathurin et de Husseau Marie-Athalie… ». Puis une autre mention nous informe son mariage à Saint-Même-les-Carrières en Charente le 15 février 1904 à [ill.]vert Henri, soit peu de temps après que le jugement a été rendu. Quel choc j’imagine lorsqu’elle est venue chercher son acte de naissance et qu’elle s’est entendue répondre qu’elle n’existait pas! Ceci dit, elle doit être bien morte, car je n’ai pas vu de « Fixation d’acte de Décès ». Mais que faisait le maire de l’époque, car c’est le même pour ces trois cas ? Je tairai son nom. 🙁
Je tiens à vous préciser que cette histoire n’est pas un roman de science fiction faisant changer de sexe les êtres humains, ni un polar faisant disparaître et réapparaître les gens manu militari, mais bel et bien des faits ayant véritablement existé… sur le papier heureusement…Happy end ! 😉