Sortie cinéma dimanche en fin d’après-midi avec Les nuits blanches du facteur, de Andreï Kontchalovski.
L’histoire : de nos jours dans le nord de la Russie, autour du lac Kenozero. Chaque jour, Lyokha le facteur [Aleksey Tryaptisyn], abandonné par sa femme, qui a arrêté de boire depuis deux ans, apporte aux villageois tout autour du lac le courrier, le pain, les journaux et surtout leur maigre pension. Il rend aussi visite à Irina [Irina Ermolova], la femme qu’il aime depuis son enfance, vit seule avec son jeune fils, Timur [Timur Bondarenko], à qui il entreprend de faire découvrir la vie d’avant, l’ancienne école en ruine, les légendes dont celle de la sorcière Kikimora qui habite le lac. Il rend aussi de multiples menus services, que ce soit à « Brioche », l’alcoolique du coin orphelin depuis l’âge de cinq ans, ou au général qui vient braconner dans le lac. Parfois, le matin, il voit un chat siamois tout gris, qui évidemment n’est pas là… Un jour, il se fait voler son moteur de bateau et part à la ville pour se le faire remplacer…
Mon avis : un film lent, très lent. Soit mon russe -appris sur le tas- est vraiment très rouillé, soit les personnages (notamment le vieil orphelin alcoolique) parlent tellement dans leur barbe qu’il est difficile de les comprendre, en dehors des mots courants (bonjour et salut, d’ailleurs sous-titrés de la même manière et sans nuance, merci, les nombres pour le compte des billets des pensions, le pain, les pommes de terre, etc.). Visiblement, d’autres personnes présentes à la même séance ont eu encore plus de mal que moi à suivre, ne pouvant pas goûté au décalage entre la vie rurale et la vie urbaine ou la base de lancement de Plesetsk. Les paysages de la réserve naturelle du lac de Kenozero [voir le site officiel en russe], classée au patrimoine mondial par l’Unesco, dans le district de Plesetsk (région d’Arkhangelsk, une ville de 350 000 habitants), sont superbes, hors du temps, filmés ici dans des paysages d’été et d’automne. Un bac, quelques heures de bus et voilà la vie urbaine contrastée qui attire les jeunes du coin… La vie rurale y ressemble beaucoup à ce que j’ai pu partager il y a une grosse vingtaine d’années dans l’est de l’Ukraine, pas d’eau courante, ils ont de l’électricité*, et donc captent la télévision, plutôt sur de vieux postes. L’intérieur de la maison d’Irina, avec sa nappe en toile cirée, son réchaud, sa cheminée au centre de la pièce à vivre, me rappelle l’intérieur de la maison où nous mangions. Mon voisin de siège n’a pas compris -et longuement commenté avec sa femme à voix basse- pourquoi le facteur demande une soucoupe (à hauts bords), y verse son thé depuis sa tasse et le boit dans la soucoupe plutôt que dans la tasse , c’est que ce monsieur n’a jamais goûté le thé brûlant sortant du samovar, même dilué avec l’eau moins chaude de la théière à côté, ça reste trop chaud pour être bu rapidement au milieu de la tournée à poursuivre… Bref, pour un spectateur non averti, le film peut sembler s’étirer interminablement pendant 1h45, mais profitez donc de la vie simple de la campagne profonde, les légendes qui restent vivantes (et participent à l’éducation des enfants), voyez ce film presque comme un reportage ethnographique… même si la garde-pêche ne se laisse pas corrompre par les habitants/braconniers, ce qui a peut de chance d’être vrai 😉 Notre société ne prend pas assez le temps de vivre et de s’ennuyer, de profiter du temps présent, ce film devrait vous y aider pendant un tout petit moment!
* en Ukraine, nous n’avions pas l’électricité, restrictions post-Tchernobyl obligent dans une zone située à l’est de la centrale donc pas touchée, les vents ayant chassé le nuage radioactif vers l’ouest et surtout la Biélorussie – pas du tout la France, si vous vous souvenez bien!